23 décembre 2006

Un ange sans ailes


Avec ses six années de conflits sur tous les fronts, la deuxième guerre mondiale a été riche en anecdotes en tout genre, en histoires plus invraisemblables les unes que les autres. Pourtant celle qui arriva, dans la nuit du 24 mars 1944, au jeune sergent mitrailleur de la Royal Air Force Nicholas Alkemade est certainement la plus extraordinaire de toutes.



Nick Alkemade n’avait que 17 ans lorsqu’il s’engagea au 115ème Escadron de la Royal Air Force en 1940. Après une formation accélérée, durant la célèbre bataille de l’Angleterre où la Luftwaffe va écraser son pays de bombes, le jeune homme gravira deux échelons pour finir sergent mitrailleur à bord d’un Avro Lancaster, bombardier anglais à longue portée.

En 1944, Nick est, à 21 ans, mitrailleur de queue, c'est-à-dire la place du mort dans un bombardier avec des pourcentages de pertes excessivement élevés. Mais nous sommes en 44 et l’Allemagne est en train de payer ses arrogantes victoires des premières années du conflit. Le jeune Alkemade a donc bon moral lorsque le 23 mars 1944 il s’envole vers Berlin à bord du S for Sugar, son Lancaster, pour lâcher ses six tonnes de bombes, à 6.000 mètres d’altitude et à 400 kilomètres heure, sur la capitale du Reich. Ce jour là, le 115ème escadron aligne 300 bombardiers lourds pour réveiller Adolf Hitler en pleine nuit.


L'équipage d'un Lancaster avant une mission


Jusqu’à Berlin, le voyage est si calme que les plaisanteries vont bon train à bord du bombardier. Mais lorsque le S for Sugar arrive au dessus de Berlin, la mauvaise surprise est de taille. Au sol, les projecteurs lancent leurs faisceaux de lumières sur la voûte nocturne et la Flak allemande crache la mort. En l’air ce n’est pas mieux. Plus de cent Messerschmitt, Fockwulf et Junkers tombent sur l’escadron britannique.
Comme tous ses camarades mitrailleurs, le jeune Alkemade va défendre son coucou à l’aide de sa quadruple mitrailleuse de 7.7 mm.

La queue d'un Lancaster

Dans sa petite cabine de verre, il n’a pas la place pour son parachute qui est rangé dans un compartiment derrière lui. Mais à la première heure de l’engagement, il ne pense même pas à cela. Il a d’autres chats à fouetter. En effet, les chasseurs allemands s’acharnent toujours en premier lieu sur le mitrailleur de queue. Une fois ce dernier tué, le bombardier peut être pris, à la hussarde, par derrière, sans pouvoir se défendre. Les gars de Goering peuvent alors l’envoyer au tapis sans prendre de risque. Mais les Anglais savent se protéger, ce qui n’empêche pas le S for Sugar d’être criblé de balles et d’éclats d’obus.

Bombardiers Lancaster en formation

Enfin, bon grès, mal grès, le 115ème arrive au-dessus de Berlin et les rescapés des 300 bombardiers peuvent ouvrir leur soute et déverser leurs chapelets de bombes sur la capitale. C’est ce que fait le S for Sugar qui peut maintenant et avec soulagement, prendre le chemin du retour. Hélas pour eux, un Ju-88 isolé va les repérer et leur tomber dessus. Le Lancaster se fera sérieusement arrosé de plomb mais notre jeune mitrailleur de queue aura le dernier mot en le mettant en flammes. Alkemade n’a pas le temps de crier victoire que déjà le capitaine du S for Sugar hurle à ses hommes d’abandonner le bombardier.

Photo d'un Junker 88

Lorsque Nick ouvre sa trappe pour attraper son parachute il comprend pourquoi. De grosses langues de feu viennent lui sauter à la gueule et il a juste le temps de voir, lorsqu’il referme le sas, son parachute en train de cramer. Le Lancaster tombe à présent comme une feuille morte et Nick n’a que deux fins de vie à choisir : tomber comme une pierre ou brûler vif.

Il opte pour la première solution, ouvre sa trappe de secours et se laisse avaler par la nuit d’hiver. Il aperçoit le S for Sugar en flammes danser sur la voûte étoilée puis, il est envahit par la sensation agréable d’être sur un nuage, enveloppé d’une couette confortable. Tout ce qui l’embête c’est qu’il n’était qu’à une semaine de sa permission et qu’il ne reverrait plus jamais sa petite amie Pearl. A aucun moment, il n’eut l’impression de tomber.
Enivré par la forte pression atmosphérique, asphyxié par le manque d’oxygène et le froid, il va rapidement s’évanouir. Et c’est tant mieux. Ci s’est ça la mort, ce dit-il, ce n’est pas grand-chose.

Avro Lancaster au-dessus de Hambourg


Son corps tombe de 6.000 mètres à plus de 200 kilomètres à l’heure.
Lorsqu’il rouvrit les yeux, se fut pour voir ce ciel noir illuminé de milliers d’étoiles. Cette vision lui venait d’une sorte de tunnel creusé dans les branches cassées de deux sapins entre les troncs desquels il était couché. La première sensation qu’il ressentit fut le froid avant de se rendre compte qu’il se trouvait enfoncé dans un mètre de neige. Il consulta sa montre et vit qu’il était 3 heures dix du matin. Avait-il donc survécu ?

En regardant autour de lui il ne vit qu’une forêt de sapin habillée de blanc.
Croyant être réduit en miette il inspecta son corps et n’y trouva aucun os brisé. Seule une cheville foulée, quelques brûlures et pas mal d’épines de sapin plantées un peu partout sur sa peau.

Il mit un bon moment à essayer de comprendre ce qui lui était arrivé. N’y parvenant pas et ayant trop froid, il se mit à souffler dans son sifflet de détresse.
Les soldats allemands qui l’entendirent le trouvèrent assis sur la neige en train de fumer une cigarette. Il essaya de leur expliquer par gestes qu’il était tombé du ciel mais les allemands, qui ne trouvèrent nulle part son parachute, le prirent, malgré son uniforme de la RAF, pour un espion. Lorsqu’ils le remirent debout de force, Nick tomba une nouvelle fois dans les pommes.


Vue aérienne de Berlin en 1944


Il se réveilla dans un lit d’hôpital à Berlin où de nouveau il conta son histoire aux docteurs qui n’en crurent pas un mot. Il ne pouvait être qu’espion ou en état de choc mais personne ne pouvait tomber de si haut sans parachute et survivre.

Une fois en état de tenir sur ses jambes, Alkemade fut transféré dans un camp de prisonniers près de Francfort où il fut passé à la question par la Gestapo. Personne ne pouvait croire à son histoire, pas même ses compagnons de captivité qui le prenait au pire pour un mythomane, au mieux pour un fou.

Il risquait, comme espion, le peloton d’exécution mais il se contenta de dire son incroyable vérité. Une vérité qu’il assenait avec un tel entêtement qu’un lieutenant allemand du nom de Hans Feidel, se mit en quête du Lancaster et du parachute de ce prétendu mitrailleur de queue tombé du ciel.
Décidément, il en avait de la chance le jeune sergent ! Le lieutenant trouva la carcasse du S for Sugar ainsi que les restes du parachute. Comme si cela n’était pas assez, Feidel retrouva même, sur le parachute, le numéro d’immatriculation d’Alkemade, ce même numéro que Nick portait sur sa veste de vol lorsqu’il avait été retrouvé dans la forêt.

Le jeune mitrailleur était tombé, à la vitesse de 200 kilomètres heure, entre les branches enchevêtrés et couvertes de neige de deux sapins avant de finir sa chute sur un lit de poudreuse de plus d’un mètre de haut. Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce « matelas » de circonstance avait brisé sa chute et lui avait sauvé la vie.
Du statut de fou ou d’espion, Alkemade devenait un véritable héros.
Ses compatriotes de captivité, sachant qu’une fois rentré en Angleterre, personne ne croirait à cette histoire, lui signèrent un certificat afin de créditer son aventure.

Nick revit la Grande-Bretagne en mai 1945 et donna une énorme conférence de presse à Londres où il raconta son incroyable saut de l’ange.

Bien que devenu héros du royaume il ne trouva, après la guerre, qu’un modeste emploi d’ouvrier dans une usine chimique. Cependant, ce trompe-la-mort continua de faire des siennes. Lors d’une explosion, une poutre métallique de cent kilos lui tomba sur la tête sans le tuer. Quelques années plus tard, il subira, dans l’ordre, de graves brûlures à l’acide, une électrocution et même une chute dans un bassin de chlore dans lequel il resta un quart d’heure avant d’être secouru. Cet homme incassable finira tout de même par s'éteindre à 64 ans le 22 juin 1987.

7 commentaires:

  1. Trés belle histoire....Merci

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  2. Night Shyalamamammamayayayymilblick se serait donc inspiré de sa vie...

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  3. trés beau récit sauf :
    1 - grammaire :
    se fera sérieusement arroser
    et non
    se fera sérieusement arrosé

    2 - les hublots étaient en plexiglass et non en verre (poids)

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  4. En effet, il y a un bon nombre de fautes d'orthographe. A corriger svp. Merci d'avance

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  5. Plusieurs mots ne sont pas particulièrement bien choisis. Je ne donnerais pas une bonne note au rédacteur. Cordialement.

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    1. L'histoire m'a ému
      On sait même s'il a revu sa copine Pearl....

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  6. bon grès, mal grès -> bon gré, mal gré
    Le Lancaster se fera sérieusement arrosé -> arrosER
    Ci s’est ça la mort, ce dit-il -> Si C’est ça la mort, Se dit-il
    Lorsqu’il rouvrit les yeux, se fut -> Ce fut
    réduit en miette -> mietteS
    entre les branches enchevêtrés -> enchevêtréEs

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