25 décembre 2017

Le morceau du jour qui serait jugé politiquement incorrect aujourd'hui.


Il se dit ici où là qu'il ne faut plus souhaiter un "joyeux Noël" aux gens, mais de "bonnes fêtes"... Le bonnes fêtes a l'avantage d'être vague et de s'adresser littéralement à tout le monde. Quand on affirme qu'on aime "l'humanité" (dans une chanson de la Nouvelle scène française, par exemple), on est suffisamment vague pour aimer tout le monde, mais personne en particulier. Quand, autre exemple, on aime les pompiers, qui sauvent des gens dans des situations scabreuses, on peut le prouver en leur donnant du fric, en achetant leurs brioches ou leur calendrier affreux. Quand on aime l'humanité, en revanche, on ne peut pas le prouver par un acte. Un type qui aime l'humanité, il faut le croire sur parole... Le "bonnes fêtes" est dans cette catégorie : il ne s'agit plus que d'une joie abstraite, désincarnée, tellement générale qu'elle peut aussi bien ne pas être du tout une joie, ni une fête. Comme tout ce qui est politiquement correct, nous nous retrouvons devant un anti-mot : vocable qui ne signifie ni ne spécifie plus rien.

Al Green, lui, cessa une carrière d'artiste soul bien partie pour être une des plus belles, pour se consacrer uniquement au petit Jésus, et à Dieu, son papa (comme chacun le sait). Il sombra dans le gospel comme d'autres font dans l'alcoolisme. Avant cela, il nous fit don de quelques morceaux d'anthologie soul rarement égalés. Tiré de l'album Call me (1973), ce bijou de musique chrétienne...


20 décembre 2017

Le Rouge et le Noir 2

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Au 19ème siècle, le roman d'initiation narrait le parcours d’un jeune homme de milieu modeste, né hors du « sérail » et qui allait s’y élever par son habileté ou ses talents. Le roman d’initiation de notre 21ème siècle semble proposer une trajectoire inverse, et s’annonce en cela réjouissant. Le jeune héros est un individu plutôt bien loti, qui va s’efforcer, durant son aventure, de se désintégrer de la bonne société, de sortir du système.

Julien Sorel, aujourd’hui, a des parents qui ont des moyens, un père en poste dans une belle compagnie ; il a fait une très bonne école de commerce. Après un an en finance-comptabilité chez Groupama, il a ressenti le besoin d'une quête de sens. Papa avait encore de quoi lui prêter pour racheter un bar à vin, avec son ami du BDE, situé dans un quartier vivant de la ville. Julien a trouvé le concept, a baptisé le lieu d’un prénom français à l’ancienne, populaire - ça lui rappelle son grand-père, qui avait fait l’inverse de tout cela pour que sa descendance puisse faire mieux que lui. Julien a trouvé le concept, dessiné lui-même le logo, une amie termine de lui développer l’appli. Le voilà petit commerçant, mais avec des moyens. Il vote Macron pour raisons fiscales. Il est pour le Changement. Il propose une très bonne burrata à 21 € (ses amis restés dans la finance en raffolent). Il n’a pas de voiture, pas de maison. Un vélo. Pas marié. Un enfant. Keno. Un prénom pas comme les autres. Julien aime la débrouille. Les plans copains. Il cultive un look de bistrotier de l’Aveyron : chemise à carreaux (mais de marque), tablier, et petite barbe dégueulasse. Il se sent vivre quand il aide à décharger les fûts du camion.

Ce qui lui importait avant tout était de sortir des rails. Ne pas faire comme son pauvre père (cadre !). Il aurait pu être artiste s’il avait eu un talent. Il aime la vie de bohème. A condition de pouvoir partir en vacances chaque année à l’étranger. Julien a tout de suite vu que nous avions changé d’époque. Que son intérêt était de quitter la voie droite, de donner à sa carrière la petite torsion, la petite patine cérusée qui le rend unique. Oh oui, Julien aime le cérusé. Il est prêt à payer très cher pour ça. Il sait d'instinct que pour être bien comme il faut, désormais, il faut ne pas être bien comme il faut. Le gendre idéal, aujourd'hui, a le goût de l’entrepreneuriat. Le goût de l’usage plutôt que de la propriété. Des parts et des actions plutôt que de l’immobilier.

Julien sait qu’il peut cumuler le revenu du bourgeois et le prestige du marginal réprouvé. Alors pourquoi devrait-il choisir ?

17 décembre 2017

L'interdiction du mois - Rouler à 90Km/h sur les routes


En démarrant, il y a trois semaines, une rubrique intitulée « l’interdiction du mois », je comptais bien avoir le temps de glander entre deux dénonciations rageuses. Connaissant le goût moderne pour la contrainte (dans un concert assourdissant de paroles libertaires, libérales, et libertophiles), j’imaginais qu’une chronique au rythme mensuel rendrait compte de l’activité des fanatiques qui, sans relâche, trouvent et imposent toujours plus de limites à la liberté de ce dangereux personnage nommé Autrui. Hélas ! Ces cons-là ont le vent mauvais en poupe, et filent avec un entrain de bacheliers vers l’horizon marron des lendemains qui fliquent. Cette semaine, donc, la nouvelle interdiction qui nous menace est d’ordre routier : ne plus dépasser 80km/h sur les routes départementales.

Si cela ne dépendait que de moi, il n’y aurait plus une seule voiture en France. Plus une voiture, plus un m² de goudron, plus de tire-fesse, plus une piscine, plus un seul golf, plus de parcs à jeux, plus de musées et, naturellement, plus d’écoles. Le retour de la préhistoire, ce serait. Et, pour être plus sûr, la préhistoire à ses débuts ! Tous à pinces, et chacun avec le droit d’aller se faire enculer. Ça simplifierait à peu près tous les problèmes qui nous accablent. Les bouchons quand tu pars à la neige ? Fini. Les encombrements parisiens ? Oubliés ! Les connasses qui te bloquent la rue quand elles déposent leur lardon juste en face de la porte de l’école, là oùsque la voie est justement rétrécie pour ne laisser passer qu’une seule voiture à la fois (Sainte sécurité, priez pour nous) ? Ter-mi-né ! Plus jamais ça ! Alors, l’abaissement de 10km/h sur les routes, à côté de mon programme à moi, ça ressemble au pet d’une mésange au-dessus d’un camp de manouches !

15 décembre 2017

L'ouvrier d'apparat

Avertissement: Kevin Torquemada et Beboper ont collaboré pour écrire ce texte "à quatre mains", comme on dit.  Sauras-tu, lecteur lucide, reconnaître qui a fait quoi dans ce bintz ?



Tendance Up : jeune métro-sexuel en bleu de chauffe. 
Le dandy de 2018 adoptera sans réserve le look Prolo !

Pascal : « D’où vient qu’un boiteux ne nous irrite pas, et un esprit boiteux nous irrite ? A cause qu’un boiteux reconnaît que nous allons droit, et qu’un esprit boiteux dit que c’est nous qui boitons. »

Le bobo est tout entier défini dans ce cas de figure. Ce qui le rend insupportable n’est pas tant sa façon de vivre, de s’habiller ou d’arborer une barbe grotesque, mais plutôt ses deux caractères évidents : faire la leçon au monde entier, et incarner de façon caricaturale le concept orwellien de double pensée.
Le bourgeois du XIXème siècle pouvait être défini, psychologiquement, comme quelqu’un qui essaie de se faire passer pour ce qu’il n’est pas. Tandis que l’ouvrier, le prolétaire, se contentait d’être ce qu’il était - c’est-à-dire pas grand ’chose, le bourgeois se donnait des airs, prenait des poses, disposait autour de lui les indices prouvant qu’il appartenait à une élite en formation, héritière putative des dignités perdues des noblesses d’ancien régime. Il s’agissait pour le bourgeois, même petit, de se différencier du populo à tout prix, quitte à jouer un rôle trop large pour ses épaules.

11 décembre 2017

Les gens qu'on lit : Jean-Claude Michéa

J'ai lu, sur le conseil de l'ami Beboper, du Michéa. Sur son insistance, devrais-je dire, car au départ je rechignais. Michéa comptait pour moi parmi ces auteurs qu'on connait déjà un peu sans les connaître à force de les avoir entendus cités dans quelque conversation, lus mentionnés dans quelque article : sans en avoir lu une ligne, on peut les situer à peu près, visualiser leur thème, leur attribuer une place sur ses étagères mentales... Ainsi pouvais-je situer Michéa sur une carte, avec en prime la pressentiment qu'on pourrait bien s'entendre lui et moi. Pour cette raison, rien ne me pressait, je traînais les pieds : tant qu'à lire, autant découvrir et se surprendre plutôt qu'approfondir, chercher à conforter ou aiguiser une opinion. Mais que voulez-vous, Beboper est chiant comme une bonne femme.

  michéa 

10 décembre 2017

La minute de BatPat : Johnny Hallyday


Johnny se rendant à son enterrement
 Un lion est mort avant-hier soir. Ou avant-avant-hier soir. Ou avant-avant-avant-hier soir. Un lion qui nous avait tous mis en cage. Tu n’es pas sans l’ignorer. Ton coeur saigne, comme si on essayait de te greffer un pacemaker avec un hachoir, sans anesthésie, et en t’ayant préalablement amputé les mains et les pieds. Comment te poser la question sans te faire mal ? Elle est oratoire, purement rhétorique. Tu aimais Johnny Hallyday ? Moi non plus. Magnéto Serge ! 

7 décembre 2017

Le son du jour qui a jauni dans la peau

Vous voulez célébrer Johnny mais n'aimez vraiment pas sa musique ? Le CGB a pensé à vous. Voici une petite demi-heure de séquence-émotion avec le dernier concert donné par Johnny Cash. 


6 décembre 2017

Mort de Johnny : on vous l'avait bien dit !


Johnny Hallyday est mort. Cette nouvelle semble surprendre le cosmos, qui voyait dans le yéyé un phénomène promis au millénaire. Comme souvent, nous annoncions la chose ici même, en janvier 2008. Dix ans d'avance, c'est un peu la norme au CGB...

Ça commençait comme ça...

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Plus près de toi...

La mort de Carlos, dont il était l’ami, a rendu Johnny Hallyday un peu nerveux. Lui qui misait sur la chirurgie inesthétique pour conserver l’air en forme, est arrivé à une conclusion très peu yéyé : on est bien peu de choses. Comme son autre ami Nicolas Sarkozy, Johnny Hallyday est très catholique, il pratique non seulement la moto chromée et la machine à abdo-fessiers mais aussi la messe, dont on dit qu’il est fou. Et comme il avoisine l’âge de raison (65 balais en juin), il a décidé en même temps d’arrêter les tournées, de se mettre à la guitare et de préparer ses funérailles.

4 décembre 2017

Voyage au bout de la réacosphère

Anciens combattants

Je me suis demandé si tout ça, ce n’était pas un peu fini. Au CGB, ça fait un moment qu’on se le fait remarquer. A quoi bon continuer alors que la blogosphère de notre génération a rendu le tablier depuis belle lurette ? A quoi bon le CGB après 10 ans et des milliers d’articles où l’on a à peu près tout dit, tout ri ? A quoi bon le CGB quand l’actu se met à être grotesque toute seule comme une grande, sans qu’on n’ait plus rien à faire pour l’y aider ? Overdose de bouffonnerie. Flamby m’a tuer.

La situation a pris une telle tournure, la démence une telle proportion. Qui a encore besoin qu’on lui fasse le dessin ? Il n’y a plus rien à dépeindre qu’un homme un peu sensé ne puisse remarquer de lui-même. A ce stade de dinguerie, il n’est plus d’innocent possible : celui qui n’aurait pas encore vu que ça déconne doit être considéré comme incurable. On ampute. Dans un monde rempli de dingos, personne ne vous entend crier. Et puis, la France qui dégringole, qui se viande, c’est drôle une minute. On peut en rire aussi longtemps qu’on croit qu’elle peut se relever. Au-delà, ça devient glauque et inconvenant. Je me suis demandé si tout ça, ce n’était pas un peu fini. A quoi bon le CGB.

2 décembre 2017

Courrier des lecteurs : François Sanders vous parle cinéma

Gens mimant des points d'exclamation avec les doigts
Cinéma. Critique du film CAPTAIN FANTASTIC.



CAPTAIN FANTASTIC est le père d’une famille de six enfants. Ils vivent à l’écart de la civilisation et forment une société qui habite une forêt située au nord-ouest des Etats-Unis. Leurs journées sont dédiées à l’entraînement que ponctuent quelques rites païens. Témoin celui du début du film : le fils aîné est torse nu, il traque et tue un daim à l’arme blanche, puis s’enduit du sang de l’animal dont il tend le cœur à son géniteur : il devient un homme au terme d’une communion panthéiste.