31 mars 2008
30 mars 2008
Lècheculisation médiatique
Dans le domaine de la politique, il serait assez simple de démontrer, exemples à l’appui, que les médias fabriquent de toutes pièces des sujets, surfent sur certaines vagues par le biais de sondages, poursuivant un but unique et jamais évoqué : vendre du papier. Certaines périodes sont plus propices aux combinazione des médias, surtout les périodes post-électorales. On se souvient, par exemple, de la nomination du stupéfiant Jean-Pierre Raffarin au poste de premier ministre comme une période particulièrement favorable pour les médias français. Homme d’appareil et de parti depuis longtemps, le type semblait sortir de nulle part, c'est-à-dire du Sénat, du Conseil Régional de Poitou Charentes et de l’enivrant club Giscardisme et modernité. Pain béni pour les médias, qui firent leur maximum pour diffuser l’image d’homme de terrain de cet authentique pro de la politique, c'est-à-dire pour collaborer à l’édification de ce qu’on appellerait un mythe, si le sujet ne se nommait pas Raffarin… Personne n’a oublié le ton d’allégresse médiatique des articles sur ce champion des sondages, dont on vantait le sens du contact, la compassion pour les petites gens, le goût simple et la capacité (unique dans l’Histoire de France) de prononcer des phrases ridicules devant les caméras sans la moindre honte. Chaque jour, les images le montraient en Sisyphe de la poignée de main et de la tape dans le dos, tandis que les commentateurs s’extasiaient entre deux léchages de cul.
Il est bien évident qu’à l’exception de quelques benêts, personne, dans la presse mondiale, n’en n’avait rien à foutre de Raffarin ! Le problème n’est pas ici de relever une éventuelle collusion ni des « idées » trop convergentes entre le monde politique et les médias, mais une gamme de techniques de camelots que la presse utilise pour donner aux gens l’impression qu’il se passe quelque chose autour d’un personnage, souvent présenté par rapport à un modèle du passé tenu pour grand (Pinay, de Gaulle, Mendès, Jeanne d’Arc) et systématiquement éclairé avantageusement au début de ce que tout un chacun appelle désormais un « état de grâce », alors que ce n’est qu’un buzz. Sauf à croire qu’un premier ministre nommé par Jacques Chirac (n’oublions pas ce détail) pouvait se transformer subitement en homme providentiel, il était clair dès le début qu’on avait affaire à une manœuvre médiatique d’amplification systématique. Le simple ton employé à la télévision pour relater l’important déplacement du Raffarin dans une coopérative agricole inondée participait de cet entertainment, de cette auto suggestion encourageant l’optimisme et les commentaires épatés.
On a utilisé les mêmes techniques après la dernière élection présidentielle. Les sondages étaient bons pour le Pèzident, il dînait dans des palaces, faisait du yacht dans le Pacifique, se glandait les burnes dans des résidences princières ou donnait l’avis de
Venons-en au sujet actuel : Bertrand Delanoë. Tout le monde a remarqué que les médias présentent ce type comme un présidentiable depuis pas mal de temps, contre toute évidence. Avant la dernière présidentielle, il semblait qu’il fallait absolument qu’il se présente contre Ségo, Fabius et Strauss Kahn, même s’il n’était pas d’accord lui-même… Après les municipales, on nous ressort la même salade : il a conservé sa mairie, il est « la personnalité politique préférée des Français » (sondage), il est donc très utile pour monter artificiellement un semblant de suspens au sein du PS. Ségo contre Delanoë, c’est aussi subtil que Beatles contre Rolling stones ! S’il suffisait d’être « la personnalité préférée des Français » pour être bombardé big boss, on aurait connu les règnes de Rocard, de Delors, de l’abbé Pierre, du commandant Cousteau, et on en serait bel et bien à yannick Noah… On cherche même à nous convaincre que Delanoë serait sur un parcours comparable à un certain Chirac, au motif ridicule qu’il fut lui aussi maire de Paname, alors que Chirac, patron et créateur d’un parti fort, organisant sa vie publique autour de la conquête de l’Elysée, était passé deux fois par Matignon avant. Delanoë n’a même jamais été ministre des écoles maternelles ! A part briller dans des pinces-fesses internationaux et échouer à l’organisation des J.O. qu’a-t-il fait de particulier ? Battre Tiberi ? Tapisser Paris de couloirs de bus ? Hisser la motocrotte au rang d’art du vivre ensemble ?
Un peuple! Un empire! Un maire !
Non, il est au PS depuis des décennies et n’a visiblement jamais montré d’appétit pour le rôle de chef présidentiable. Il est plus que probable que Delanoë ne sera jamais Président de
Au Kop de Boulogne
La banderole "scandale" déployée lors de la finale de la Coupe de Ligue PSG/Lens illustre bien le mépris des zid et autres hooligans pour le peuple ouvrier.
Dénués de tout sens commun ou common decency, ces pseudos supporters ne connaissent qu'une chose dans leur substance d'ordures: la logique du kit identitaire ultramarketé.
La banderole? Elle n'était qu'une projection, qu'un absolu vers lequel ces bonshommes de neige rêvent de tendre... Se faire haïr du Peuple avec une telle action? Mais c'est bien le doux dessein de ces oligarques grimés en amateurs de foot.
PS: Auraient-ils osé la même banderole contre Bastia?
Paul Amar (ée basse)
Paul Amar est un journaliste unique: à chaque fois qu'il ouvre son claque-merde sort la voix de l'époque dans son expression la plus pure.
Si certains déploraient le ton jésuitique du Sieur Schneidermann pendant son émission "Arrêts sur Images", avec Paul Amar, on est dans le chanoine en pleine componction. "Revu et corrigé" n'est pas une émission pour décrypter l'actualité, non... c'est le tribunal pathos du Moderne, l'émulation socialo-charognarde, la tartufieuse fraternelle chacalerie.
Cet étron télévisuel, prétentieux et autocentré qui ne voyait jadis le monde que sous les yeux de sa fille (Le Monde de Léa) nous gerbe ainsi chaque semaine une daube avec ses invités permanents (Jacques Séguéla UV23, Robert "CIA" Mesnard) pour morceaux de choix et ses apprentis journalistes comme bile (dont le faux Jean-Pascal).
Le ton du cirque Amar oscille entre le confessionnal de la Star-Ac et le lynchage du bobienvrai, les talents faméliques cumulés d'une telle entreprise, se rêvant en irrésistibles pédagogues du grand public, ressemblent surtout à un tas d'asticots se trémoussant péniblement au fond de leur bocal. Cet hideux courtaud, professeur Nimbus de Franceland, n'est jamais aussi heureux que quand il tente de rééduquer des impétrants comme Eric Zemmour (aka Soral Light), un journaliste Chinois, ou un membre de SOS Education.
On ne reparlera pas de sa prestation de polichinelle durant l'affaire Sébire, empoignant son galoubet de la levée des tabous, enfourchant la canasson du gloubiboulga émotionnel (à côté de lui Arlette Chabot est un modèle de journalisme).
Il y a quinze ans, Paul Amar s'était fait virer pour avoir sorti des gants de Boxe avant un débat Le Pen/Tapie... mais c'est bien dans la gueule qu'il aurait mérité ses gants... Car Paul Amar n'est pas journaliste même pas présentateur télé...il n'est juste bon qu' à recevoir la luisance opaline de nos crachats... et encore ce ne serait même pas à la mesure du mépris qu'il exprime pour ses invités dits "déviants".
28 mars 2008
Hamas-Deus
Un nouvel interdit semble frapper Franceland, la fille préférée des justes croisades : celui du calembour et du jeu de mots.
Rue89 rapporte cette nouvelle hallucinante au sujet d'une plainte déposée par la CFDT contre le DRH de la société touristique Amadeus pour une blague "dite raciste".
France Gorgi, représentante CFDT du personnel au sein de cet acteur du secteur touristique (arme de destruction massive s'il en est) déclare ainsi au journal en ligne:
"Il nous avait déjà traités de terroristes dans le passé, mais, cette fois, il a comparé le comité d'entreprise d'Amadeus au "Hamas Deus". Alors que neuf élus du personnel sur dix sont d'origine étrangère ou mixte: Marocains, Libanais, Syriens, Tchadiens, Réunionnais, Tunisiens, Antillais, Algériens…"
Le Moderne n'aime pas le rire, et la pitoyable CFDT,qui n'est jamais en retard d'un crime contre l'esprit, prouve une fois de plus qu'elle est la mère-maquerelle du syndicalisme jaune.
Notons que pour les plaignants, les Antillais et les Réunionnais sont forcément musulmans tout comme les personnes d'origines "mixtes".
Et ces diafoirus bonimenteurs se permettent de donner des leçons contre le racisme...
27 mars 2008
White season
La BBC2 a récemment diffusé une série de cinq documentaires (et un téléfilm) White season sur la disparition de la classe blanche ouvrière du Royaume-Uni. L'écrivain Tim Lott dans un remarquable article paru dans The Independent (traduit par Courrier International) y voit surtout l'expression de préjugés des élites.
Le CGB d'entrée se pose cette question: peut-on calquer cette grille d'analyse sur l'hexagone? Certes les modèles divergent (assimilationniste pour l'un et differentialiste libertaire pour l'autre), mais on peut retrouver certains point communs.
L'honneur perdu du prolétariat anglais
Qu'évoquent pour vous les mots "classe ouvrière blanche"? Couteaux, beuveries, irresponsabilité, jeunes à capuches, salopes, voyous, sales pauvres? Pourquoi nous permettrons-nous pas d'associer des termes aussi injurieux à cette minorité particulière? Ce n'est pas White season qui va nous apporter des réponses.
Mon père a travaillé chez un marchand de fruits et légumes pendant trente-cinq ans. Ma mère était femme au foyer, elle s'est suicidée en 1987. Ils ont toujours voté travailliste. Ma mère s'est pendue dans la maison où elle avait vécu toute sa vie, à Southall, dans l'Ouest de Londres. C'est sans doute aujourd'hui, l'endroit qui compte le moins de blancs de tout le Royaume-Uni. Ma mère se sentait perdu: son univers avait disparu.
C'est en partie ce que ressentent les gens de la classe ouvrière. Même si je fais aujourd'hui partie de la classe moyenne, ce sont toujours "les miens". Je les trouve honnêtes, drôles, irrévérencieux, forts et sans prétentions. Je les trouve aussi obstinément ignorants, hédonistes, colériques, souvent racistes. Ils se méfient de la culture et de l'éducation, qu'ils associent à la classe moyenne, qu'ils détestent. Parce qu'ils ont en fait plus d'animosité envers les classes moyennes, qu'envers les Noirs, les Indo-Pakistanais ou les homos.
C'est parce qu'ils ont été trahis par plusieurs générations de cette classe sociale qui leur est soit-disant supérieure: la classe moyenne blanche progressiste. Pour cette dernière, la classe ouvrière respectable, autrefois célébrée, est un espèce disparue, dont seule subsiste la lie (même s'ils n'emploieront jamais ce mot là). Il y a sans doute une once de vérité là-dedans, mais si c'est vrai, la classe ouvrière ne s'est pas éteinte: elle a été assassinée.
Et comment s'est-on débarrassé d'elle? Le premier assaut qui a miné ses espoirs et son moral est la grande trahison éducative, avec l'abolition des grammar schools (des collèges qui n'étaient ouverts qu'aux élèves réussissant un examen à la fin du primaire) et le maintien des écoles privées. Les grammar schools, selon le point de vue culpabilisateur des progressistes, favorisaient les enfants des classes moyennes au détriment des enfants issus des classes populaires. Alors qu'en fait elles favorisaient surtout les enfants les plus doués. Et si l'on regarde les élèves sortis des grammar schools après la guerre: Harold Pinter, Dennis Potter, Allan Silitoe, Melvyn Bragg, Alan Bennett et tant d'autres, elles ont injecté un élement de sensibilité ouvrière dans la culture.
Aujourd'hui au nom de l'égalitarisme- la même chose pour tout le monde sauf pour la classe moyenne blanche progressiste, qui a les moyens de scolariser ses enfants dans le privé-, la sélection dans les écoles ne se fait plus sur l'intelligence- dont un grand nombre d'enfants de classe ouvrière sont pourtant dotés- mais sur l'argent. Les progressistes ont décrété que les enfants d'ouvriers étaient tous aussi intelligents (c'est à dire peu- même si on prétend le contraire) et qu'ils devraient tous aller dans les mêmes usines écoles, souvent minables.
Deuxième grande trahison: le multiculturalisme. Ce credo qui veut que toutes les cultures aient la même valeur (en théorie) mais que les cultures minoritaires sont d'une certaine manière-même si personne ne sait vraiment en quoi-supérieurs à bien des égards à la culture du pays d'accueil, qui, elle, est intrinsèquement raciste. La classe ouvrière n'a pas très bien accueilli l'immigration. En partie à cause du racisme, bien sûr, tare contre laquelle la classe moyenne blanche progressiste est naturellement immunisée. Mais parce qu'elle a du mal à accepter de voir les occasions de logement lui passer sous le nez, des emplois mal payés prendre la place d'emplois décents, et de devoir apprendre à exister dans un nouveau genre de culture qui a supplanté la sienne. Et devoir apprendre à avoir honte quand on vous enlève tout a été très dur à avaler.
Troisième trahison: la détermination de cette classe moyenne blanche progressiste à éradiquer le nationalisme- du moins le nationalisme anglais. Si vous êtes écossais, gallois ou irlandais, évidemment vous pouvez glorifier votre drapeau et votre culture. Mais si,, vous êtes anglais, célébrer Saint Georges et le drapeau anglais est raciste. Parce que les ouvriers blancs, bien qu'ils aient été envoyés au fond des mines et parqués dans des usines, ont apparemment réussi à exploiter leurs frères et sœurs des colonies au cours des siècles précédents, et qu'ils n'ont donc pas le droit d'être fiers de leur pays, pour lequel leurs parents et grands-parents ont pourtant souffert et sont morts au cours de deux guerres mondiales.
Quoi d'autre? L'utopie des logements sociaux des années 1960 et 1970, qui a déraciné des communautés entières d'ouvriers, et les a mis dans des tous hideuses et invivables. Comment, alors, s'étonner que la classe ouvrière blanche soit en colère, désespérée, qu'elle joue avec des couteaux et qu'elle s'étourdisse de bagarres et d'alcool? La White season de BBC2 ne dit rien pour sa défense. Elle se contente d'observer à distance, comme au zoo. Après tout, nos élites ne la considèrent pas comme une espèce animale? Les universitaires de la classe moyenne blanche aiment introduire le concept de l'"autre". Et c'est bien connu, les blancs de la classe ouvrière ont la haine de l'"autre": Noirs, Indo-Pakistanais, musulmans. Mais, il ne leur est jamais venu à l'idée que c'est elle, la classe moyenne blanche progressiste, qui est championne de la haine de l'autre. Sa répulsion à l'égard de la classe ouvrière blanche, bien trop proche d'elle, en est la preuve. Elle s'en sert pour projeter ses propres travers et son racisme à l'envers sur la classe ouvrière
Tim Lott
26 mars 2008
Destins croisés de deux grands résistants
Leur petit chef debout au balcon de la honte
Et le peuple à sa botte
Lui remettait les clés, la mémoire est bien courte
Notre France est aux fers
25 mars 2008
T'sais quoi, en vrai : le Tibet, on s'en fout !
Sur Bakchich, dans la rubrique « Coup de boule », on lit ce joyeux billet, qui ne manquera pas de faire réagir. http://www.bakchich.info/article3102.html En gros, l’auteur de l’article remet le Dalaï-Lama à sa place, c'est-à-dire celle du chef d’un clergé moyenâgeux et autrefois tout-puissant, qui faisait suer le burnous à son peuple en nageant dans le sous développement et la fausse non violence.
Le Dalaï-Lama est une sorte de victime parfaite qu’il est absolument inutile de vouloir dénigrer : les gens l’aiment par habitude, par effet de mode ou parce qu’il est inoffensif, comme si c’était une qualité en soi. Qu’on l’aime ou qu’on s’en foute, d’ailleurs, il faut reconnaître que les discours officiels et médiatiques sur le personnage sont rarement négatifs. On chercherait même la trace d’une simple critique à son encontre sans grand risque de trouver matière à scandale. Le Dalaï-Lama, c’est un peu le Georges Brassens de la spiritualité : ses biographies ressemblent à des quatrièmes de couv. Il faut dire que le bougre a de sacrés potes, de Richard Gere à Michaël Jackson, de Jean-Claude Carrière à l’implacable Bono, qui promeuvent son sourire et ses private sentences dans le monde entier. Il est assez rare qu’un esprit aussi simple cartonne aussi longtemps dans le show business mondial sans qu’un mouvement général de dérision apparaisse. Il est capable de dire « il faut que tu cherches l’homme qui est en toi plutôt que de laisser s’exprimer l’animal par ta bouche », sans que le genre humain se torde de rire. Le Dalaï-Lama est une sorte de super curé, un pape exotique désarmé, un chef d’Etat foutu dehors de chez lui, comme il y en a des wagons entiers sur la côte d’Azur, mais, comme il est impuissant, on l’écoute radoter avec bienveillance. Qu’un religieux au pouvoir vienne donner le même genre de conseils sur la façon de gouverner notre vie, et on entendra les admirateurs du tibétain gueuler en invoquant les croisades, la charia et le veau d’or. Les gens cools qui admirent Super Lama savent-ils qu’il est contre l’avortement, par exemple ? Modestement nommé « Océan de sagesse », le Vieux semble toutefois s’accrocher à son Tibet comme le moins sage des nationalistes serbes. Pourtant, dans la perspective d’abandon du moi et de toute idée de propriété temporelle, ne serait-il pas plus sage, justement, de chercher à vivre une vie parfaite ailleurs qu’au Tibet sinisé, sans s’accrocher à ses coutumes perdues, à son bout de terrain, à son pouvoir, à ses richesses matérielles dont on dit à longueur de proverbes qu’elles ne sont qu’un leurre, qu’une erreur, qu’un fardeau pour l’homme ?
Mais je m’emporte. La question que je voulais poser ici est celle-ci : peut-on se foutre des Tibétains ? L’article de Jacques-Marie Bourget, dans Bakchich, semblait juger de la légitimité de la liberté tibétaine à l’aune de son caractère démocratique : « Un Tibet libre ? Oui mais une démocratie. » Comme si il n’y avait pas d’autres façons d’être libre, ni aujourd’hui, ni demain, ni hier… Il s’agirait donc d’être solidaire d’un peuple qui lutte pour son indépendance si, et seulement si ce peuple désire établir un régime identique au nôtre. C’est une conception assez curieuse de la liberté. Les Tibétains, dont je me fous pas mal par ailleurs, n’auraient-ils pas le droit de choisir librement de croire à leurs réincarnations, de révérer leur dieu vivant et de s’abrutir de prières ? L’option Bourget revient à dire : établissez la démocratie ou crevez en exil. Comme si les Tibétains exilés ne devaient espérer revoir le Tibet qu’à cette seule condition.
En réalité, Bourget est comme tout le monde : le Tibet, il s’en tape. Il ne fait rien pour le Tibet, il ne part pas en guerre contre les intérêts chinois, il ne milite pas, il ne donne pas d’argent, il ne crée pas de lobby. Il est fort probable que, comme chaque lecteur de ce blogue et comme moi-même, il n’a rien fait non plus pour le Rwanda, pour le Soudan, pour l’Irak ni pour aucun autre « drame de l’actualité » (peut-être quelque pognon pour les victimes du Tsunami ? OK). Mais comme l’impuissance-indifférence est une chose difficile à admettre, à avouer, et encore plus difficile à assumer, il trouve le prétexte de la démocratie pour passer quand même pour un type « concerné ». C’est une tartuferie très répandue, c’est même la plus répandue depuis l’invention du journal télévisé.
Pour lutter mentalement contre les complexes que le JT nous file à longueur de « drame de l’actualité », nous avons inventé l’indignation stérile, la condamnation de principe et la solidarité discount. L’actualité est suffisamment violente pour nous fournir à flux tendu des occasions de passer (verbalement) pour des cœurs généreux, voire pour des héros. On assassine en Tchétchénie ? Quels salauds ces Russes ! On ratonne à Lhassa ? On devrait faire quelque chose, merde ! On zigouille au Darfour ? C’est un scandale ! Accoudé au zinc ou calé devant son écran, le citoyen informé fait semblant de ne pas être inutile en ouvrant un peu sa gueule. C’est humain, ça libère, ça permet de continuer de s’intéresser à l’actualité, comme si le monde en avait quelque chose à foutre que tu t’y intéresses, hé nabot! Non, il faut être juste avec soi-même : quand on ne fait rien pour quelqu’un, c’est qu’au fond, on n’en a rien à foutre. C’est tout aussi vrai pour l’Histoire en train de se faire. Ce n’est peut-être pas joli-joli, mais c’est ainsi. Pour prendre un exemple ultra minimaliste, combien de gens refuseront de regarder les J.O. à la télé par solidarité avec le Tibet ? Douze ? Vingt ? Ce n’est pourtant pas un geste difficile ni dangereux, mais on sait bien que personne ne le fera… Le plus joli, c’est que tout Franceland© fait comme s’il était important que chacun sache qu’il se passe des choses affreuses à l’autre bout du monde, mais personne n’en fait jamais le bilan : ça change quoi de savoir qu’un génocide se déroule au Soudan, au Rwanda, ou que les Chinois cassent du tibétain ? L’histoire a montré et montrera encore ceci : ça change que dalle.
Comme l’a peut-être dit le Dalaï-Lama, l’homme libre, c’est celui qui connaît ses limites. Il serait temps que les victimes de l’information-totale prennent conscience des leurs, et profitent ainsi de la liberté au lieu de se remplir la bouche en vain avec son joli nom.
24 mars 2008
23 mars 2008
22 mars 2008
Adieu der rote
Bertrand Delanoë, cet apparatchik psychorigide vient nous seulement d'être réélu à la mairie de Paris (par défaut vu la nullité de ses adversaires...on mettra à part le sémillant Gaspard .D qui a tout de même fait 3, 7% dans le Xe arrondissement) mais il a réussi à décourager les auteurs du Perroquet Libéré.
François Devoucoux du Buysson et Max Dupré jettent donc l'éponge après cinq ans de guérilla, lassés mais surtout lucides: Saint Bertrand ne fascine que les élites bien dans leur "intra muros":
"On n'est pas très inquiets. L'un des problèmes de notre critique était sa difficulté à porter au-delà du périphérique. En province, Delanoë ne captive pas les foules et ce ne sont pas ses quelques déplacements dans les fédérations socialistes qui y changeront quoi que ce soit. La preuve : les livres d'enquête sur sa gestion de la mairie de Paris ne se vendent pas. Le plus médiatisé, signé Sophie Coignard, dépasse à peine les 10 000 exemplaires."
Nos deux compères garderont tout de même un oeil sur leur maire préféré, ne serait-ce parce qu'il fait figure d'adversaire privilégié du Président sortant pour l'année 2012.
Idées Noires (suite et fin)
UMP: Menace to society
Après Olivier Martinez, ce sont maintenant les militants de l'UMP qui se mettent à menacer la blogosphère. Dans ce cas précis , c'est le musicien Nonolimit qui s'est attiré les foudres judiciaires de la noblesse de robe pour une parodie de l'affrontement entre racailles de Neuilly:
Ce remix, mis en partage par cet utilisateur sur votre site Internet, porte gravement atteinte au respect de la vie privée de ma cliente et également à la dignité de sa personne
Le camarade Birenbaum s'en est le premier ému. En fait, il a carrément demandé à être poursuivi en lieu et place de Nonolimit par la mystérieuse militante UMP.
Ces procédés rappellent au CGB les heures les plus sombres de notre histoire et nous soutenons en tant qu'intermittents de la parodie Guy Birenbaum et Nonolimit.
On constate comme d'habitude que Dailymotion n'a pas de couilles... On rappelera pour les distraits que les patrons de la plateforme Séverin Naudet et Martin Rogard sont tous deux des sarkoboyz (actuels ou ex membres du cabinet du gouvernement).
Bienvenue dans la France d'après Nicolas Princen.
21 mars 2008
Happy slapping à l'Hôtel de Ville
Raphaël Ruffier est rédac chef de Lyon-Capitale, hebdomadaire inutile et lyonnais. Désormais, le danger inhérent au métier de journaliste, il connaît. Son corps en est marqué. A-t-il reçu une rafale de mitraillette en tentant d’interroger un moine tibétain en pleine ratonnade ? Non. A-t-il été séquestré par des terroristes irakiens dans les faubourgs de Bagdad ? Non plus. A-t-il dégusté ferme sous les bombardements à Gaza ? Mais non, vous dis-je ! Nous sommes à Franceland©, ne l’oublions pas.
Ce brave a simplement été giflé, oui, giflé sur la voie publique, par la meuf du maire de Lyon, Caroline Collomb, ancienne collègue de fac du Ruffier en question, et ancienne instructrice de self –défense à l’Unef. L’histoire est brièvement racontée ici : http://libelyon.blogs.liberation.fr/info/2008/03/lpouse-du-maire.html
A la lecture de cette triste histoire de violence féminine, on parierait que l’origine de la raclée est probablement une histoire de cul. Sache, fidèle et innocent lecteur, que malgré son histoire bi millénaire, Lyon est une toute petite ville où il est difficile de ne pas coucher avec tout le monde, et je sais de quoi je parle.
Il y a peut-être vingt ans de ça, un journaliste de Libé avait eu la mauvaise idée de débiner Bernard Lavilliers dans un article particulièrement nul. Nanar et des potes étaient passé lui dire la messe, ponctuant le catéchisme de soufflets retentissants. On avait un peu crié au scandale, mais chacun aura remarqué que des conneries sur Lavilliers, depuis vingt piges, on n’en lit plus une seule dans la presse mondiale ! La baffe dans la gueule, on a beau être civilisé, avoir le portrait de Gandhi au dessus de la télé, on est forcé de reconnaître : ça marche !
Les élections municipales auront même servi à ça : rétablir les hiérarchies. On était sur le point de penser que le Pèzident était décidemment un sacré couillu (« viens l’dire ici ! », « dégage pauv’con ! », etc), et on s’aperçoit qu’une jeunette socialiste bon teint, blonde comme les blés, même pas pote avec Devedjian, manie le bourre-pif en toute décontraction, sans finalement en faire un fromage. Nous, on est comme ça, à Lyon : discrets, mais fais quand même gaffe à ta gueule !
Lâcher de pétasses
DDR Movie
Bouge ta prison !
Le 12 février dernier, le Sunday Times balançait qu’une prison secrète de métèques étrangers arrivant sur leur sol. »
La prison: le droit d'être bien enfermé.
Seulement voilà : le territoire national coûte cher. Construire une prison sur un terrain en France est un luxe que ne méritent peut-être pas les gibiers de cellule, se dit-on du côté du ministère. On a vite fait de calculer que sur la surface de la prochaine prison de Nantes, on aurait pu implanter des lotissements pour six mille familles ! Ça rapporte, ça, six mille familles ! Six mille baraques mal foutues qu’il faut sans cesse décorer, entretenir … six mille tondeuses à gazon… six mille barbecues ! S’inspirant alors de ce que fait notre belle industrie française depuis quelques années, le Pèzident a décidé de monter d’un cran supplémentaire dans l’externalisation des services en délocalisant carrément les prochaines prisons dans des pays pauvres, mais émergeants. « Actuellement, nous confie Jean-Benoît Frilesse, inspirateur du projet, un employé de prison (gardien ou personnel technique) coûte en moyenne seize fois plus cher en France qu’en Namibie, douze fois plus cher qu’au Pérou et encore neuf fois plus cher qu’en Roumanie, calculs faits en excluant les droits à la retraite ! Pensez-vous que
Vous ne verrez plus le Pérou comme avant...
C’est ainsi que la prochaine prison-Bouygues sera édifiée dans la banlieue de Chiclayo, au Pérou, avec des maçons locaux (artisanat méritant et très habile), des femmes de ménages locales (elles abattent leurs douze heures quotidiennes le sourire aux lèvres), des cuisiniers du coin (plats épicées, très bon pour le transit intestinal), des matons locaux (anciens militaires en retraite, rompus à la psychologie masculine) mais des détenus 100% made in France, évidemment. J.B. Frilesse insiste sur "le bon sens" d’une telle mesure : « Les consultations d’usages n’ont pas permis de dégager de réels arguments contre la délocalisation des prisons. Non seulement nous faisons faire des économies au budget de l’Etat, mais nous offrons une chance d’apprendre une langue étrangère aux détenus, surtout les longues peines ; nous fournissons du travail aux populations locales dans le cadre d’un accord de développement basé sur le travail, et plus seulement sur l’assistanat ; nous exportons le savoir-faire français dans les domaines de la sécurité et de la construction et nous allégeons considérablement les charges administratives spécifiques aux visites en parloir. C’est une opération gagnant - gagnant qui va servir de modèle à l’Europe entière ! D'ailleurs, les demandes de conventionnements internationaux affluent déjà au ministère, aussi bien de la part de la Russie que de la Chine, sans parler de la Turquie, qui est prête à beaucoup de sacrifices pour faire la démonstration de sa compétence. »
Merci qui ?
Mitch et MAUSS
Jean-Claude Michéa de retour dans "le berceau originel" du Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales c'est évidemment dans le précieux journal permanent du MAUSS.
Le libéralisme est bien sûr passé à la moulinette. Au CGB, on fera tout de même trois observations:
La conversation minore l'impact de Bernard de Mandeville (les vices privés font la fortune publique ), ce médecin fait figure de véritable précurseur et libéralisme ET de le psychanalyse, c'est lui qui "libère" le sujet de ses antiques racines et autres transcendances au profit d'une morale égo-grégaire.
Sur la main invisible du Marché, on ne saurait penser à l'influence d'un Leibniz et de ses harmonies préétablies/schéma de l'emboîtement.
Ce qui est gênant avec les "autonomistes" c'est leur aversion pour le Républicanisme assimilé à une idéologie héroique et guerrière alors qu'il constitue le premier rempart à la culture du narcissisme.
Pochettes surprises
Encore un classement débile: celui des 50 pochettes d'albums les plus controversées opéré par Gigwise.
Au menu: vraie et fausse subversion, tabous d'hier et d'aujourd'hui... Evidemment, au CGB on estime qu'il manque quelques pochettes (This is hardcore de Pulp, Panzer division Marduk, I need drugs de Necro, Funky Honkey natsy nigger de Richard & Willie...).
19 mars 2008
Who is Clutchy Hopkins?
Non, mais sérieusement... Le CGB se pose depuis quelques semaines cette question essentielle: qui se cache derrière l'artiste Clutchy Hopkins?
Le label Ubiquity pour le buzz nous livre la version du musicien de studio dont les bandes, enregistrées en 1972, ont été retrouvées par hasard... Les bandes étant un album de Hip-Hop Instrumental péchu: "Walking Backwards".
Certains avancent les noms de Shadow, Madlib, Danger Mouse (on reviendra plus tard sur le dernier Gnarls Barkley), Cut Chemist voire Mike D...
18 mars 2008
Rahho le sage
Le CGB s'étonne que les bloggueurs consanguins habituels n'aient pas relayé la nouvelle: l'assassinat de l'archevêque Chaldéen de Mossoul, Mgr Paul Farraj Rahho par les terroristes mafieux d'Irak. Cet homme était respecté et apprécié de tous, y compris des Musulmans.
Il y aurait pourtant matière à redire en ce qui concerne le situation des chrétiens d'Orient et en particulier ceux d'Irak... Peut-être sont-ils gênés du fait que leur Métaprophète préféré n'ait pas eu la vista nécessaire pour comprendre que l'envahissement de l'Irak par les USA conduirait à la fin des Chrétiens d'Orient.
Qu'on se le dise, les Chrétiens sont une sorte de baromètre vivant de la dégradation de la situation au Moyen-Orient, comme l'écrit Régis Debray:
"Tant que la région était fédérée par l’arabité, les chrétiens pouvaient y jouer un rôle de premier plan. A partir du moment où le lien est l’islam, ils n’y trouvent plus leur place. La défaite du nationalisme arabe, c’est aussi et d’abord celle des chrétiens(…) Les chrétiens d’Orient méritent d’être défendus, et pas seulement pour des raisons morales,“humanitaires”. Sans eux, le monde musulman se condamnerait à l’étiolement et à la stérilité : “Ils sont à l’islam ce que furent les juifs à la chrétienté d’antan : des catalyseurs de la modernité et des ouvreurs de fenêtres."
10 millions de chrétiens d'Orient. Oh ...ne vous y mèprenez-pas, le CGB n'est point un repaire de grenouille de bénitiers...mais quand on parle de diversité culturelle, c'est aussi valable pour d'autres contrées.
Down by the River (Buddy Miles RIP)
Petite info malheureusement passée inaperçue: Buddy Miles, le dernier batteur de Jimi Hendrix (Machine Gun) est décédé à la fin du mois de février dernier d'un arrêt cardiaque à l'âge de 60 ans ... On retiendra son phrasé soul inimitable (cf sa version de Down by the river de Neil Young) mais également ses expériences avec le groupe Kiss, Carlos Santana, George Clinton et bien sûr Band of Gypsies.
Simone, comment on fait les bébés ?
Comment ça? C'est déjà fait...
Et vous pleurnichez encore, bienheureuses travailleuses?
Vous attendez plus de la vie?
Vous voulez des enfants?!?!
Beurk!
Au boulot!!!!
_ Allo, Fouresta? Fioneta? Prochouwa?
Ici Laurence, oui Laurence la super-patronne, venez-vite, on arrive plus à les tenir! Elles veulent des gosses ces feignasses!
_ Serrez la vis ! Après 35 ans elles seront à moitié cuites de toutes façons! Alors, si les parents, "qui sont de nos idées", les ont bien tenues à l'œil... Vous prenez le relai et l'affaire est dans le sac... Ils faut les aider à faire le bon chouwa...
_ Nous sommes là pour ça.
17 mars 2008
Mortels pavillons
On savait depuis Strabon que la géographie était la mère de toutes les sciences humaines et on l'avait un peu oublié devant le foisonnement de "politologues", "criminologues", "islamologues" et autres experts en toc .
A l'heure d'une "éclatante victoire" de ce que l'on appelle la "gauche", il est plutôt rafraichissant de lire le géographe radical Christophe Guilluy, coauteur avec C. Noyé de l'Atlas des Nouvelles fractures sociales (Autrement) qui affirme : "Arrêtons de parler seulement des banlieues. Le vrai phénomène social, aujourd'hui, c'est l'embourgeoisement des villes et le rejet des ouvriers et employés à la périphérie et à la campagne."
Mieux, quand on regarde la carte des dernières élections américaines (2004), où les villes les plus riches sont démocrates et les États du centre, y compris ouvriers, républicains, on peut voir avec un peu d'avance le futur processus à l'œuvre en France.
Le Petit Peuple coincé entre bobos et migrants n'a pas d'autre choix que de s'exiler. Cette nouvelle répartition unit des catégories sociales autrefois opposées comme l'ouvrier en milieu rural, le petit paysan, l'employé et depuis peu les professions intermédiaires au sein de lotissements pavillonnaires bas de gamme et qui subissent aujourd'hui le même sentiment de relégation. C'est le sens de la conférence que le géographe a donné lors d'un colloque à la fondation Respublica.
Bonsoir. Je vais essayer, en une vingtaine de minutes, de vous brosser la nouvelle géographie sociale qui structure aujourd'hui le pays. J'ai réalisé avec Christophe Noyé un atlas des nouvelles fractures sociales. Consultants l'un et l'autre, nous travaillons sur l'ensemble des territoires de la politique de la ville mais aussi sur les territoires périurbains et ruraux.
Un constat s'impose : les discours entendus ne reflètent pas la réalité des dynamiques en cours, notamment celle de la dynamique de recomposition sociale des territoires. La perception des territoires est le fruit de deux héritages historiques - celui de la révolution industrielle et celui de la période des Trente Glorieuses - mais aussi d'une construction médiatique (peut être plus puissante).
La vision dix-neuvièmiste des territoires oppose les quartiers ouvriers et les régions industrielles aux quartiers bourgeois et aux régions plus tertiaires. Héritée de la révolution industrielle, cette géographie est en train de s'effacer.
Une autre géographie est venue compléter ce dispositif. Il s'agit de la géographie sociale héritée des Trente glorieuses, la géographie de la moyennisation de la société française, celle de la France pavillonnaire, la France du périurbain devenant, au delà des villes, la France des classes moyennes en voie d'ascension sociale. Cette géographie, elle aussi, est en train d'évoluer, de se transformer et, dans une certaine mesure, de s'effacer.
Qu'elles soient héritées de la révolution industrielle ou de la période des Trente glorieuses, ces perceptions de la géographie sociale ont un défaut : elles ne prennent pas en compte les effets considérables de la mondialisation sur la recomposition économique et sociale des territoires.
Ces dynamiques sont d'autant plus difficiles à appréhender qu ‘un discours médiatique s'est imposé depuis près de 20 ans à partir de la crise des banlieues. Ce discours médiatique divise la société française entre les banlieues d'un côté et les territoires de la classe moyenne de l'autre, dans une caricature absolue : Villiers-le-Bel et le reste de la société. C'est une construction typiquement médiatique. Malheureusement, les politiques courent souvent après la vision médiatique, à un point tel que celle-ci inspire désormais les politiques publiques qui se mettent en œuvre.
A) DESCONSTRUIRE UNE GEOGRAPHIE SOCIALE MEDIATIQUE
La description de la véritable dynamique des territoires passe par une déconstruction de ce discours médiatique qui résume la question sociale à celle des banlieues. Cette approche est en réalité très confortable car elle permet d'évacuer la question sociale (et celle des effets de la mondialisation sur la recomposition sociale des territoires) au profit d'une thématique qui rappelle celle des « in » et des « out », la société française étant alors divisée entre des territoires « in » mais majoritaires et des territoires « out » mais minoritaires. Cette approche, qui remplace la question du conflit de classes par celle de la gestion des exclus, est celle que les élites mondialisées cherchent à nous imposer depuis 20 ans. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Bernard Henry Lévy explique qu'aujourd'hui « la question des banlieues est LA question sociale ».
Derrière de constat il y a évidemment le glissement de la gauche sociale vers une gauche sociétale….les banlieues symbolisant évidemment pour BHL une France qui « rejette » ces « minorités visibles » dans ces zones de relégation que seraient les banlieues françaises.
C'est ainsi que s'est construite en 20 ans une géographie sociale qui décrivait, en creux, la France raciste, la France moisie etc.
Il est d'autre part très rassurant de penser qu'à l'exception d'un millier de quartiers qui vont mal en France, le reste va plus ou moins bien. Il n'y a donc pas de remise en cause fondamentale de ce qui fait la société française : on se croit toujours dans une dynamique d'ascenseur social pour tous.
Qu'en est-il en réalité ? Les banlieues sont-elles ces territoires où les gens seraient « assignés à résidence » ou « relégués » ? Il y aurait beaucoup à dire sur l'emploi de ces expressions empruntées à l'univers quasi-concentrationnaire pour décrire une réalité urbaine. L'analyse sérieuse de la réalité du pays montre qu'en réalité la question du chômage, de la précarité, du chômage des jeunes diplômés n'est pas spécifique aux banlieues. La pauvreté non plus. On rappellera utilement que 80% des ménages pauvres urbains ne vivent pas dans les quartiers sensibles, ce qui n'est pas illogique puisque près des trois quarts des ménages pauvres ne vivent pas non plus dans le parc social. Le revenu médian des ménages est d'ailleurs plus élevé dans le parc locatif social que dans le parc locatif privé.
De la même manière comment décrire un univers où les habitants ne bougent pas alors même que, jusqu'à une période récente, les banlieues faisaient partie des territoires où le taux de mobilité était le plus élevé (61 % des habitants des ZUS en 1999 ne vivaient pas dans ces quartiers en 1990).
De la même, si le taux de chômage évolue peu d'un recensement à l'autre, il faut rappeler que ce ne sont pas les mêmes chômeurs qui sont recensés à chaque date.
La réalité des banlieues est celle de la mobilité, des gens entrent, d'autres sortent. Ceux qui arrivent sont évidemment plus pauvres car arrivant souvent de pays du Sud, ceux qui partent, souvent des jeunes diplômés, le sont moins. Ces dynamiques positives sont le plus souvent occultées, comme s'il fallait absolument maintenir un discours misérabiliste sur ces territoires pour, là encore enfermer la question sociale dans une thématique sociétale, ici la question des discriminations des nouveaux exclus.
Cette lecture d'une société divisée entre ces quartiers sensibles et le reste des territoires ne tient pas et ne permet pas de distinguer la recomposition sociale de tous les territoires.
B) LE MODÈLE DE LA VILLE SANS LE PEUPLE : ETALEMENT URBAIN ET GENTRIFICATION.
Que s'est-il passé en réalité ?
Depuis les années 1960-70, on a assisté à un étalement urbain considérable. Aujourd'hui, la limite de la ville, contrairement à ce qu'on imagine, n'est pas, n'est plus, la banlieue. Les discours récurrents sur « l'autre côté du périph » sont d'ailleurs assez étonnants quand on sait qu'aujourd'hui, « de l'autre côté du périph », c'est encore le centre. Du fait de l'étalement urbain, la quasi-totalité des banlieues et des quartiers sensibles se retrouvent aujourd'hui au centre des grandes métropoles de ce pays. La Courneuve se situe à dix minutes en RER de Paris, tout comme Villiers-le-Bel.
L'analyse de la réalité des territoires révèle que, géographiquement, l'ensemble des quartiers sensibles sont aujourd'hui, de fait, dans une logique de centralité. C'est d'ailleurs ce qui explique les explosions récurrentes auxquelles on assiste dans les banlieues car ces quartiers pauvres se situent désormais au cœur des métropoles les plus riches. Mais c'est aussi cette centralité qui permet aujourd'hui le processus d'ascension sociale minoritaire (mais réel) de bon nombre de jeunes issus de l'immigration.
Cet étalement urbain a accompagné la recomposition économique des villes. Aujourd'hui, les grandes villes – nous retrouvons la question de la mondialisation – se sont spécialisées vers des emplois de plus en plus qualifiés, avec une désindustrialisation massive depuis vingt ou vingt-cinq ans. Les délocalisations ne concernent d'ailleurs pas tant les industries qui partent à l'étranger que celles qui quittent les villes pour le périurbain et le rural. Une recomposition économique du territoire a bel et bien précédé cette recomposition sociale : tandis que les industries se délocalisaient, le logement social attenant à ces industries restait, lui, dans la ville : c'est l'histoire même des banlieues. Par contre, l'emploi était parti ailleurs, à l'étranger ou dans les espaces ruraux ou périurbains.
C'est un point fondamental : la recomposition économique des grandes villes induit inévitablement une recomposition sociale.
La métropolisation a, en effet, entraîné une spécialisation des activités et des emplois des grandes villes dans les secteurs les plus qualifiés, attirant les catégories les plus aisées, les catégories moyennes supérieures : c'est le phénomène de gentrification : l'appropriation par des catégories aisées ou moyennes de l'ensemble des quartiers populaires des villes. Le modèle urbain d'aujourd'hui n'est plus celui du XIXe siècle, le modèle intégrateur de la révolution industrielle. La ville attirait alors les catégories populaires parce qu'elle en avait besoin. Aujourd'hui, dans le contexte de la mondialisation, la ville n'a plus besoin, pour créer ses richesses, des catégories populaires.
Cette évolution décrit exactement la recomposition à laquelle on assiste dans les grandes villes, y compris en ce qui concerne le logement. On parle beaucoup du logement social mais historiquement, c'est le parc privé qui a accueilli les catégories populaires dans les villes. Quand on parlait de quartiers populaires à Paris, à Lille ou dans d'autres grandes villes, il s'agissait d'abord de ce qu'on appelait « le parc privé social de fait ». Le marché créait l'offre de logement pour les catégories populaires. Or ce sont ces logements-là qui sont en train de disparaître.
Si la question du parc social est importante elle n'est donc pas fondamentale. Aujourd'hui, tout le monde est d'accord sur la nécessité de créer du logement social, mais quid du « parc privé social de fait » qui disparaît ? La disparition du parc privé social de fait, notamment des logements en loyer de 1948, n'est pas un sujet de réflexion, pas plus à droite qu'à gauche. Cette thématique est trop « sensible » car elle met en lumière l'impuissance du politique face aux logiques du marché.
Alors même que disparaissait la majorité du parc privé de ces catégories populaires, on entendait invariablement : « Il faut construire du logement social ». Certes, mais, dût-on imposer 25% de logements sociaux, ils ne compenseront jamais la disparition de ce parc privé social de fait. Cela montre bien que le modèle urbain d'aujourd'hui est celui de « la ville sans le peuple ». C'est révélateur de ce que vivent les sociétés post-industrielles, c'est-à-dire de l'inutilité des catégories populaires. On pourrait, très cyniquement, démontrer que, les catégories populaires étant devenues inutiles, le parc social qui, aujourd'hui encore, accueille dans les banlieues ces catégories populaires ne sert économiquement plus à rien. C'est le problème des pouvoirs publics : la gestion des banlieues repose sur ce type de logique.
Cela pose, au-delà de la question territoriale, la question fondamentale de la mondialisation. La connexion entre la disparition de l'emploi pour les catégories populaires et leur disparition de la ville est évidente. Or, aujourd'hui, on n'a pas vu cette recomposition sociale.
On a parlé de l'étalement urbain mais celui-ci ne se fait pas n'importe comment. Cette recomposition sociale s'est réalisée à catégorie populaire égale. Aujourd'hui les catégories populaires - ouvriers et employés - représentent environ 60% de population active, comme dans les années soixante. Le départ massif des catégories populaires des grandes villes se fait à catégories sociales égales, c'est-à-dire au prix d'un tri énorme, considérable, effectué au long des vingt ou vingt-cinq dernières années.
C) NAISSANCE D'UNE « FRANCE PÉRIPHÉRIQUE ET MAJORITAIRE »
Où ces catégories sociales se retrouvent-elles ?
Elles sont reléguées au-delà de la banlieue. Le lointain aujourd'hui, n'est plus « de l'autre côté du périph », mais beaucoup plus loin, de l'autre côté de la banlieue. On entend beaucoup débattre du « Grand Paris »… Il faut évidemment faire un grand Paris puisque, de fait, la Seine-Saint-Denis fait partie du centre de l'aire urbaine parisienne, il n'y a là-dessus aucun débat géographique. Les grandes villes se spécialisant vers de l'emploi très qualifié, donc des catégories sociales aisées, « bobo » ou grands bourgeois, les banlieues se retrouvent insérées dans des environnements très embourgeoisés.
Chaque année, l'observatoire des zones sensibles dresse un bilan et chacun s'étonne de la conclusion : l'écart de revenus entre les banlieues et leur agglomération a augmenté ! La belle affaire ! Puisque l'ensemble des grandes agglomérations se spécialisent vers l'emploi high-tech et les catégories sociales aisées, le décalage croît inévitablement.
C'est le cœur de la crise des banlieues : les écarts de revenus, les inégalités sociales et culturelles entre les banlieues et leur environnement ne vont cesser d'augmenter puisque la dynamique est à la spécialisation des grandes villes vers de l'emploi plus qualifié. C'est une tendance structurelle qui entraîne, non une relégation spécifique de telle ou telle population dans les « quartiers », mais une spécialisation des villes débouchant sur l'idée que les catégories populaires n'y ont plus leur place.
Etonnamment, à côté de ce grand mouvement d'éviction des catégories populaires, on observe le flux migratoire inverse amenant les catégories populaires immigrées vers les grandes villes embourgeoisées, notamment dans les banlieues, suivant précisément le chemin inverse des autres catégories populaires. C'est un choc énorme : les villes ont accueilli, ces vingt dernières années, notamment via l'immigration familiale, une immigration totalement déconnectée du marché de l'emploi. Le diagnostic concernant la banlieue est essentiellement, selon moi, la déconnection du marché de l'emploi de populations pas ou peu qualifiées. Ce point est fondamental : avec ce flux totalement déconnecté des autres flux migratoires, on assiste à un phénomène structurel qui explique la crise des banlieues.
Il faut ensuite évoquer la constitution de ce que j'appelle une France périphérique. C'est la France qui démarre de l'autre côté des banlieues. Cette France pavillonnaire des classes moyennes, souvent décrite, correspondait à une réalité dans les années 1970. A cette époque, jusqu'en 1975, cette réalité s'inscrivait dans une logique positive d'ascenseur social. Aujourd'hui arrivent sur ces territoires des catégories modestes, voire précaires. Statistiquement, les gens qui arrivent aujourd'hui dans l'espace rural sont des gens modestes et la moitié d'entre eux sont des précaires. Il y a bien une spécialisation sociale des migrants sur ces territoires.
Les médias ont construit un autre mythe : celui du cadre qui s'installe à la campagne avec son ordinateur. Ce phénomène existe mais le fond n'est pas là. On comprend d'ailleurs la logique médiatique qui véhicule cette image très rassurante. En réalité, le cadre reste en ville et achète une résidence secondaire.
Je lie, dans ce que j'appelle la France périphérique, la France périurbaine et la France rurale car il y a une vraie unicité sociale et culturelle de ces espaces périurbains et ruraux où arrivent des catégories populaires, majoritairement des ouvriers et des employés. Aujourd'hui l'habitat type de l'ouvrier est la maison individuelle. Le logement collectif ouvrier appartient au passé. Il faudrait d'ailleurs réfléchir sur le lien entre le basculement de la classe ouvrière du logement collectif vers le pavillonnaire, sa disparition du discours de la gauche et sa disparition culturelle, comme si, en quittant les immeubles, l'ouvrier avait définitivement disparu du champ de vision des décideurs, notamment à gauche.
Il faut aussi souligner que cette France périurbaine et rurale est la France majoritaire.
80% d'urbains en France, chiffre magique ? Réalité statistique : si on comptabilise le pôle urbain + les pôles périurbains, on a bien 80% de gens qui vivent en ville.
Mais dans quelle ville ? La réalité, c'est que le centre dense, la ville-centre, ne représente plus aujourd'hui que 25% de la population ; si on inclut les banlieues, on arrive à 30% ou 35%. La France des villes denses (villes-centres + banlieues) est une France minoritaire et c'est là que la gauche est majoritaire. Inversement, la visibilité de cette France majoritaire est nulle pour la gauche. On vit encore sur une représentation du territoire selon laquelle le périurbain et le rural seraient marginaux. La réalité, c'est que ce sont aujourd'hui ces espaces qui pèsent démographiquement.
Leur dynamique est d'ailleurs beaucoup plus forte que celle des pôles urbains. Les chiffres révèlent, dans les dix dernières années, une croissance du périurbain de 3,5% par an, contre 0,4% pour les pôles urbains. Des familles s'installent, la jeunesse est très présente. Le rural forcément vieillissant et les banlieues forcément jeunes font aussi partie des clichés. La réalité, c'est qu'on vieillit aussi en banlieue. C'est un scoop : les jeunes d'il y a vingt ans ont quarante ans aujourd'hui … mais on continue à parler des jeunes des banlieues ! D'ailleurs, les statistiques montrent que le stock de jeunes dans les ZUS baisse. Eux aussi vieillissent… On peut très légitimement imaginer, dans quelques années, un papy-boom des cités. On l'observe déjà dans le parc social. Au cours de travaux sur les quartiers de logements sociaux, j'ai pu observer la pesanteur des politiques publiques avec, par exemple, des programmes ciblant « les jeunes »dans des immeubles habités par des plus de 60 ans !
Inversement, dans le rural, s'il subsiste un stock de population vieillissante, beaucoup de jeunes ménages, souvent précaires, s'installent. Il y a aussi une « jeunesse rurale » (terminologie qui étonne), une jeunesse périurbaine, très souvent touchée par le chômage. Il est intéressant de noter qu'il s'agit souvent de jeunes diplômés. J'avais fait une cartographie du chômage des jeunes diplômés suite à la médiatisation du chômage des jeunes diplômés dans les banlieues (puisque la « question sociale » est dans les banlieues, les thématiques ne peuvent surgir que de là…). La thématique « jeunes diplômés » est apparue dans les médias notamment autour de la question des jeunes diplômés issus de l'immigration qui ne trouvaient pas d'emploi. Or les chiffres révélaient que la majorité des diplômés au chômage sont des jeunes des espaces ruraux et périurbains. Ce constat montre évidemment que c'est bien la question de l'ascension sociale des jeunes issus des milieux populaires qui est posée. Pas celle de tel ou tel quartier. Question sociale essentielle, que les élites préféreront dissimuler une nouvelle fois derrière la question des banlieues.
D) LES TERRITOIRES DE LA « MONDIALISATION HEUREUSE » SONT CEUX DE LA GAUCHE .
Le problème est que la construction de ce discours « médiatico-sociétal » influence des discours politiques qui renforcent un peu plus la fracture culturelle.
On voit bien, dans ce dispositif, les grands centres urbains, bénéficiaires d'une « mondialisation heureuse », et la périphérie périurbaine et rurale qui subit cette mondialisation. La géographie des plans sociaux en France ne correspond pas à la France des grandes villes mais, là encore, au périurbain et au rural.
La question sociale et la question de la mondialisation ne sont pas perçues de la même façon selon que l'on habite dans le périurbain ou dans le centre-ville. Or, aujourd'hui, l'électorat de la gauche vit dans la grande ville. La gauche est donc soutenue par un électorat qui bénéficie fortement de la mondialisation. Les catégories populaires demandent protection depuis vingt ans contre les effets de la mondialisation, affectant l'emploi, les logiques économiques mais aussi contre les effets de l'immigration. La gauche est prise dans un nœud inextricable : son électorat veut la mondialisation tandis que l'électorat populaire, plutôt dans une logique de fermeture, souhaite, au contraire, la protection face à la mondialisation.
Comment renouer avec cet électorat ?
On pourrait aussi parler de l'ethnicisation des territoires et de bien d'autres points mais je vais m'arrêter là pour laisser la parole aux autres orateurs.
Idol market
Le marché, nouvelle divinité? Telle était la question à laquelle Dany Robert-Dufour a tenté de répondre au cours de l'excellente émission de Philippe Arondel "Les Rendez-vous de 20h" sur Fréquence Protestante et diffusée le 15 mars dernier. Au menu: destruction du savoir en temps de paix, vices privés et vertus publiques (Mandeville), nouvel esprit du capitalisme...
L'émission est réécoutable ici.
16 mars 2008
Montreuil-sous-Bobo
Le journaliste Andres Pérez dans son article de Publico (et reproduit dans la feuille de chou Courrier International) avait vu juste "Montreuil, ville ouvrière adossée au flanc est de Paris et connue pour accueillir l'imposant siège social de la CGT, est à l'épicentre du tremblement de terre bobo."
Les Bobos attaquent la banlieue rouge et Dominique Voynet en est le symptôme manifeste. La sénatrice Verte, blackboulée du Doubs, a remporté la mairie de Montreuil aux mains du communiste antisecte Jean-Pierre Brard avec près de 54% des voix.
Montreuil et ses quartiers populaires ont été zappés par les néobourgeois à pavillon adeptes du supermarché bio "Les Robinsons".
Qu'on se le dise, la poussée de la gauche n'est que le sous-produit de la démobilisation de la classe ouvrière (voir l'analyse de Christophe Guilluy).
L'abstention semble favoriser les classes moyennes supérieures, politisées , férues de développement durable (voir le succès de la liste Baupin à Paris)... Les classes populaires qui avaient voté Sarkozy, Le Pen et Royal dans une moindre mesure ne se sont pas déplacées une année après.
L'OPA des bobos sur le territoire du petit Peuple sera sans merci comme le dit Jacques Donzelot: "La construction d'un espace urbain sélectif, où une population aisée, manipulateurs de symboles (yuppies, bobos et intellectuels riches), avides de quartiers populaires fera en sorte de maintenir les apparences populaires mais obligera la population pauvre à partir, chassée par la flambée des prix de l'immobilier."
La prochaine émeute aura lieu au troisième rond-point après Jardiland...à 20 km des centres nettoyés.
Flag
Le procureur de la République de Perpignan est sur place accompagné de la police judiciaire.Le président du bureau de vote vient d'être placé en garde à vue d'après la déclaration du procureur de la République. Monsieur Garcia qui nie les faits risque jusqu'à 5 ans d'emprisonnement d'après le code électoral.
400 à 500 personnes sont devant la préfecture et crient "Alduy démission" "Alduy en prison".
Pour plus de fun vous pouvez écouter France Bleu Roussillon.
Le CGB demande expressément l'envoi d'observateurs de l'ONU afin que la démocratie puisse s'exprimer proprement.
Rising Down
Après les clips de 75Bar et Get Busy deux nouveaux extraits du nouvel album de The Roots l'étonnant premier single annoncé Birthday Girl qui tranche pas mal par rapport aux autres sons déjà entendus et le morceau ouvrant l'album Rising Down avec Mos Def en guest.
"Birthday Girl" (feat. Patrick Stump of Fall Out Boy)
"Rising Down (Hum Drum)" (feat. Dice Raw, Mos Def and Styles P)
15 mars 2008
Suprême de dindonneau
Ah!!! Ils étaient tous si beaux, pâmés d'aise devant le retour EXCLUSIF (après la pub) du groupe Suprem NTM.
Regardez donc ces loufiats zélés, ces cancrelats du Grand Canal révérant leur branchitude retrouvée.
Belle ribambelle de foutriquets: Denisot, Massenet, Mouss Diouf, Ramzy, Pascal Obispo, Julia Chanel (et pourquoi pas Sylvia Kristel tant qu'on y est), la princesse Clothilde Coureau, Omar & Fred, une ex star du K1 pour enterrer en grande pompe ce qu'était le hip-hop des "années 90".
Oui, Didier Morville et Bruno Lopez se sont reformés pour la thune évidemment... Grouillement d'un cadavre racorni...ça pue le faux, la frustration et le soumis. Ces retrouvailles sonnent comme un requiem poussif.
On ne devrait jamais dénuder un faux mythe.
13 mars 2008
Ne pas fumer tue
Voilà un bien étrange fait divers paru aujourd'hui dans Le Libération des "écrivains" sous la plume de Sylvie Granotier: un vieil homme de la Creuse aurait préféré la liberté au diktat tabacophobe et du "mourir en bonne santé".
Acte de résistance? Œuvre d'un fou isolé? Le CGB s'interroge. Récit
La dernière cigarette du retraité
Drame. Dans la Creuse, un homme de 85 ans s’est suicidé après qu’on lui a déconseillé de fumer.
Sylvie Granotier
QUOTIDIEN : jeudi 13 mars 2008
Ce serait mieux pour votre santé d’arrêter de fumer, a conseillé son médecin de famille à Camille, 85 ans. Bilan : Camille s’est jeté dans le puits. Certains mieux sont l’ennemi du bien.
La vie allait tranquillement dans ce hameau de Creuse, cinq maisons, des voisins sympas, une vie ordinaire. Camille était né là, il y mourrait, comme ses parents avant lui.
Pendant la guerre, il avait trouvé moyen d’échapper au STO en se planquant dans les bois. L’avantage de vivre dans un petit périmètre, c’est qu’on le connaît comme sa poche.
Parce qu’il n’avait jamais besoin d’aller bien loin, Camille.
Question transports, sa Motobécane années 60, avec sacoches pour les courses, avait toujours fait l’affaire. Après la nouvelle réglementation, il avait dû s’acheter un casque. Déjà ça, il s’en serait bien passé. Il le mettait quand il allait en ville, à cause des gendarmes. Pour le reste, les courses de proximité et les pauses bistrot, il s’en passait du casque.
C’est comme les médicaments, la petite pile n’en finissait pas de monter, midi et soir, remèdes à la vieillesse, paraît-il. «Regarde ce qu’ils me font avaler. Où est-ce qu’on est parti ! Je le verrai pas, je préfère pas le voir.»
Pendant trente-cinq ans, il avait trait ses huit laitières, matin et soir, à croupetons au cul des vaches. Après la retraite, sa vie s’était organisée d’elle-même : la chasse à l’automne, la pêche au printemps, l’accordéon et puis les visites. Y avait souvent du passage chez Camille. «Assieds-toi, tu vas boire un canon.»
Il avait le tutoiement facile, la conversation également, curieux des autres. Il n’avait jamais quitté son village. Pour quoi faire ? Les règles communes vous rattrapent même dans un hameau perdu. Inutile d’essayer de se planquer dans les bois.
Santé, sécurité à tout prix, même en bout de vie.
Alors quand il s’était agi de renoncer à ses dix cigarettes qu’il se roulait si parfaitement qu’on aurait cru que la gomme était dans sa salive, il l’a dit tout haut : «Ah bon ! Ça aussi, ça m’est interdit.»
Et il a changé, replié sur lui-même, solitaire ces dernières semaines, plus le cœur à rien.
Cette nuit-là, il s’est levé sur le coup des quatre heures : «Je vais pisser.»
Sa femme l’a entendu, puis elle l’a attendu. Un coup de carabine résonne fort dans le silence. Quand elle est descendue, il pissait le sang. On meurt pas avec la chevrotine. Les chasseurs savent ça et leurs femmes également. Mais quand il a saisi le fusil, elle le lui a arraché et est allée chercher le voisin.
Le voisin a vu le sang sur le carrelage de la cuisine, à l’étage aussi, sur le plancher, mais pas Camille.
C’est la fille, en arrivant, qui a remarqué que le couvercle manquait sur la margelle du puits.
Il n’y a pas loin de la porte au puits. Pour la commodité, avant l’eau courante. Trois pas pour chercher l’eau. Ou s’y jeter.
Avec précaution, ils ont appris à sa femme que Camille était mort. Elle a dit : «Oh ben, il a fait ce qu’il voulait. Eh ben, il l’a fait.»
Une manière de marquer que cette décision-là, au moins, lui appartenait.