31 mai 2011

Le retour du concombre masqué

Un peuple undigné


Cet après-midi, une nouvelle agression honteuse s’est déroulée en plein cœur de Paris. Une jeune femme a copieusement molesté deux gamins roms âgés de 12 à 14 ans selon les témoins coculaires de la scène. Cette femme, âgée d’une trentaine d’années, aurait, au terme d’une lutte acharnée, tout simplement osé interdire à ces deux jeunes enfants de la soulager de quelques centaines d'euros au distributeur automatique de la Société Générale, place Monge. « A un moment, elle a même repoussé violemment le gentil garçon qui essayait tant bien que mal de faire écran pour la fillette pour qu’elle puisse retirer de l’argent au distributeur, vu que la dame avait déjà saisi son code ! Toute cette violence. C’est navrant », confie une mère de famille encore sous le choc. Jean-Louis X, un passant qui passait son chemin « peinard », se veut formel sur le montant de la somme en jeu : « C’est 400 euros que la rom elle avait commandé à la machine à sou. C’est quoi 400 euros putain ? C’est quoi ? Si c’est pas malheureux… La gonzesse, elle a tout simplement privé tout un camp d’rom de vivre tranquille pendant dix ans… »
D’après les premiers éléments de l’enquête, les policiers n’auraient pas tardé à ne pas identifier la jeune femme, très bien inconnue de leurs services pour avoir déjà par une fois dépouillé un jeune rom du téléphone qu’il venait de lui subtiliser. Notons qu’elle l’avait également sévèrement humilié en public, le grondant, circonstance veugravante constitutive de crime à caractère raciste contre l’humanité.
Selon Jean-Louis, la jeune femme aurait de plus crié dans son for intérieur à la foule : « Allez tous vous faire enculer ! Pas un pour m’aider ! Fourmis ! Soumis ! Enculeurs d’urnes ! Coprophages de PAF ! Hypocrites ! Corcidopolâches ! Lâches ! Lâches ! Faut pas avoir d’père ! Faut pas avoir avoir d’face ! Faut être personne ! Moutons ! Poussière !, qu’elle nous a engueulé dans sa tête cette salope ! » Quant à Félicien, un voyant qui avait reçu je cite, « l’annonciation de l’agression par le Saint-Esprit du quotidien vu qu’y dépouillent tous les jours au même endroit, tiens, tenez, ça c’est Bruno et Denis de la BAC du Vème qu'étaient justement en planque » , la « belle fille » aurait conclu ses menaces au paisible peuple français, victime d’un mauvais concours de circonstance, malheureusement présent au mauvais endroit au mauvais moment et vice et versa, d’un « regard noir comme la grâce postmoderne » : « J’en ai marre de ce pays d’merde ! Ta mère l’engeance la pute ! » Un mandat d’arrêt international à l’encontre de cette femme devrait être délivré dans les prochains jours, à l’initiative de Macarth.Inc.kisition, notre sacro-sainte méta-structure socioculturelle du Vivre-ensemble-envers-et-contre-tous.
Nous saluons le flegme de nos concitoyens, imperturbables jusqu'à l'indifférence de tout et de tous, et qui tous les matins démontrent tout le courage qui les anime en se regardant bien en face dans la glace. Et n’oubliez pas : Undignez-vous !

Elle court, elle court la rumeur

Le Grand Journal du 30/05/2011 from mjollnir on Vimeo.



Invité le 30 mai du Gland Journal d’Anal+, le pseudophilosophe Luc Ferry a mouillé le short en évoquant un délicat arcane des milieux autorisés, connu de tous d’après lui, mais sur laquelle tout le monde ne pipe : « un ancien ministre, qui s’est fait poisser à Marrakech, au Maroc, dans une partouze avec des petits garçons ».
« Les journalistes ne peuvent pas dire les choses qu’ils savent (je pourrais vous en donner beaucoup d’exemples, que vous connaissez comme moi) parce qu’ils tombent sous le coup de la diffamation », a déclaré Luc Ferry, avant de mettre en cause « un ancien ministre », sans le nommer : « Le problème c’est : est-ce que l’on veut une presse qui fait fi du principe de la diffamation et du respect de la vie privée, ou pas ? Est-ce qu’on veut une presse à l’américaine ou pas ? », ... « Regardez, le dernier exemple en date est frappant. Dans les pages du Figaro Magazine de cette semaine, vous avez un épisode qui est raconté d’un ancien ministre, qui s’est fait poisser à Marrakech, au Maroc, dans une partouze avec des petits garçons (…). L’affaire m’a été racontée par les plus hautes autorités de l’État, en particulier par le Premier ministre », conclut-il.



Le 22 septembre 2005, L’Express consacrait un article aux ragots qui couraient alors sur « Bip » :
En 1996, un « blanc » - document non signé - des Renseignements généraux fait allusion à une vraie affaire de pédophilie survenue en 1988 dans le sud-est de la France et évoque, avec force détails scabreux, le couple « Bip », citant des écoutes téléphoniques que personne n’a jamais entendues et qui ont été, selon la note… détruite depuis. La hiérarchie policière n’accorde aucune crédibilité à l’assertion. Enfin, à l’approche de la présidentielle de 2002, quelques chiraquiens racontent une arrestation de « Bip » au Maroc, dans une affaire de mœurs, suivie d’une exfiltration discrète organisée par l’Élysée. Pas la moindre preuve, mais les missiles anti-Jospin se préparent, que le 21 avril rendra caducs. « Le plaisir est important dans sa vie privée, conclut un proche, mais il est trop soucieux de la liberté d’autrui pour se livrer à quoi que ce soit d’illégal en la matière. »


Pédophilie d'un ministre étouffée par la justice par laconik


No you Kahn


« Touche pas mon pote »

29 mai 2011

Fuminisme : défense des fumistes.



L’affaire DSK est une aubaine pour les médias, elle fait vendre beaucoup plus de papier qu’un bombardement de civils en Syrie ou une énième éruption violente du côté de Gaza. C’est ainsi. Il faut reconnaître que l’affaire DSK est avantageuse. Il est nécessaire de se documenter, par exemple, si vous voulez donner un avis un peu pertinent sur le conflit Israël / monde arabe. Il faut se farcir des livres d’histoire, apprendre quelques faits et réaliser le tri entre les interprétations des uns et des autres. Idem si vous avez l’intention de l’ouvrir sans dire trop de conneries à propos de la Côte d’Ivoire, du Soudan, de Fukushima et même d’un discours du pape. Mais l’affaire DSK, un régal ! On peut y aller, balancer sa certitude sans risque, puisque l’éventuel contradicteur ne dispose pas, de toute façon, d’argument plus fondé que le vôtre. Même s’il n’a rien à en dire, chacun a un avis et tient à l’exprimer !

Il est comme ça, le Français : quand on lui embastille son président du FMI, il commente ! Et merde, il a bien le droit ! Il commente au boulot, en famille, au bistrot et, natürlich, sur Internet. Mais qu’est-ce qu’Internet, après tout ? Quelle fonction ça remplit, Internet ? Grosso modo, celle d’un bistrot. Un « endroit » où l’on peut ouvrir sa gueule et partager quelques impressions. Internet, c’est du lien social à l’échelle industrielle. Alors, quand un très gros bonnet se fait pincer dans une sordide histoire, on commente, on glose, on participe à l’Histoire. On est d’abord stupéfié, puis on se marre, on galèje, on exagère. On fabrique du lien social sur le dos du cador. On est peuple. Et puis, il y a tellement de gens qui prétendent détenir la vérité sur l’Affaire, qu’au fond, personne n’y croit. Qu’importe, après tout, ce n’est que de l’écume.

C’est pourtant sur cette écume, ce rien-du- tout, ces propos de café du commerce que nos féministes s’appuient pour repartir au combat. Quoi ?!! On aurait violé une femme à New York ?! On aurait bousculé une minette à la sortie d’une boîte de nuit ? On aurait manqué de respect à ma grand-mère ? On aurait plaisanté grassement sur les cuisses tout aussi grasses d’une caissière à mi-temps chez Ed l’Epicier ? On aurait fait de l’esprit sur celui des femmes, qui, chacun le sait, ne diffère pourtant EN RIEN de celui des hommes ?! Formons nos bataillons, mes sœurs, et allons dénoncer l’hydre masculine et sa gigantesque bite mentale !


Alors qu’une femme vient d’être arrêtée en Arabie Saoudite parce qu’elle conduisait une simple bagnole, des féministes organisent en France une manifestation pour s’opposer au climat misogyne qui régnerait en ce moment dans la patrie de DSK. La disproportion entre les rodomontades féministes parisiennes et les sujets réellement scandaleux que l’actualité nous rappelle, est encore une fois l’occasion d’une affligeante méditation. Tel l’antinazi du XXIème siècle, qui continue d’œuvrer et de lever le poing, même sans trouver le moindre nazi à se mettre sous la dent, la féministe française de 2011 fait tout pour faire croire que le sujet de sa « lutte » est encore brûlant. Alors qu’il pue le moisi comme une vieille ration de la guerre de 14.

Passons sur les offuscations de circonstances : certaines prétendent qu’on nage dans un climat de gaudriole appelant les Assises. Je ne renchérirai donc pas. Retenons plutôt ce chiffre effrayant, époustouflant, brandi comme une injonction à un peu de décence : 75 000 viols par an, en France ! Aha, on fait moins les malins ! Le message est donc clair : que tous ceux qui s’amusent et font de l’esprit sur la femme de chambre DSKisée se rappellent qu’en France, chaque année, on viole 75 000 femmes, bordel !


Il y a déjà quelques temps que des chiffres jonglant avec les dizaines de milliers (voir les centaines de milliers) circulent ici ou là sur ce sujet. L’Etat n’avance curieusement aucun chiffre précis, laissant ce soin à d’obscures associations qui ont, fort logiquement, un bel intérêt à démontrer que leur raison d’être ne repose pas sur du vent. Tout le monde est d’accord pour suspecter une association de défense de l’agriculture intensive, par exemple, de ne pas être neutre dans son combat, ni dans sa façon de mener ses travaux. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, une association de lutte féministe, pour utile qu’elle soit, a intérêt à démontrer que son combat est justifié, nécessaire, indispensable. (Je me souviens d’un pote qui pondait sa thèse de doctorat sur l’apartheid sud africain au moment où celui-ci fut aboli : une gueule de six pieds de long). Il est donc normal de prendre les chiffres avancés par toute association, même féministe, avec un minimum de précautions.

Allons-y pour les précautions. On laisse n’importe quel chiffre se répandre dans les médias sans faire aucune vérification. N’étant pas un spécialiste des viols, n’étant même pas violeur moi-même (oh, ça va, c’est une petite vanne), j’expose ici ma pseudo méthode, qui est rudimentaire : je cherchouille sur Internet, pas plus.
Que trouvé-je ?
On parle de 75 000 viols annuels en France. Bon. Pourtant, une enquête américaine de 2004 – 2005 n’en donnait que 60 080 aux Etats-Unis, un pays quatre fois plus peuplé que le nôtre, et réputé en général pour sa grande violence. De plus, cette enquête américaine estimait que seulement 41% des viols étaient déclarés. En France, à en croire les militantes, ce chiffre serait inférieur à 10%, et personne n’est capable d’expliquer cette monstrueuse différence…
Mieux : Wikipédia nous apprend que l’Afrique du sud serait le pays du monde où l’on dénombre le plus de viols : 147 par jour ! Atroce ! Mais c’est compter sans la french touch : 75 000 divisé par 365, ça donne 205 viols quotidiens ! L’Afrique du sud enfoncée ! Ça ressemble de plus en plus à un canular. Un peu comme si certains, ou certaines, avaient intérêt à répandre des chiffres dopés à l’hélium… D’ailleurs, quand l’Enquête Nationale sur les Violences Envers les Femmes en France (ENVEFF) donne les chiffres de la gendarmerie et de la police (pour 1998), on arrive à 7828 viols annuels, c'est-à-dire 21 par jour. On est loin, et heureusement, de 205…

Pour aborder très rapidement un point de méthode qui ferait sourire de commisération un enfant de huit ans, je citerai cette perle méthodologique de l’ENVEFF. Un panel de femmes est constitué. Il apparaît que 0,3% de ces femmes disent avoir été violées. On applique ensuite ce pourcentage à l’ensemble de la population féminine française (ce qui donne les fameux 75 000 viols). Puis, constatant que les chiffres des plaintes enregistrées sont époustouflamment inférieurs, on en infère que seulement 5% des femmes violées portent plainte. La seule et unique chose qu’on remet donc en question, ce sont les chiffres officiels des plaintes
« Si l'on applique cette dernière proportion aux 15,9 millions de femmes âgées de 20 à 59 ans vivant en France métropolitaine (lors du recensement de 1999), ce sont quelque 48 000 femmes âgées de 20 à 59 ans qui auraient été victimes de viol dans l'année (2). Cette estimation est à rapprocher des déclarations faites à la police et à la gendarmerie : 7 828 viols en 1998, dont 3 350 concernaient des personnes majeures. Seuls environ 5 % des viols de femmes majeures feraient ainsi l'objet d'une plainte. »



Autre exemple ? Sur une recherche Google, le premier site apparaissant quand on demande « viols en France statistiques », c’est SOSfemmes.com. Il titre « au moins 25 000 viols en France » et l’illustre par cette phrase effrayante : une femme violée toutes les deux heures ». Oui, mais une femme violée toutes les deux heures, ça nous donne un total de 4380, c'est-à-dire cinq fois moins que ce qu’annonce le titre de l’article ! Tout est comme ça. Aussi surprenant que ça puisse paraître, dès qu’on aborde le sujet du viol en France, on nage en pleine décontraction…

Enfin, pour étayer mes doutes sur les chiffres avancés par les Combattantes, je rapprocherai les supposés 75 000 viols annuels des 68 512 accidents de la route enregistrés en 2009 en France. Ouais : moins que des viols ! Posons-nous alors la question suivante : à titre personnel, dans notre entourage, nos amis, notre famille, connaissons-nous plus de victimes de viols ou d’accident de bagnole ? Hum ? Allez, fuministes, circulez !

Je prétends qu’en matière de violence contre les femmes et en matière de viol, par peur d’être désigné « négationniste », on laisse le champ libre au militantisme le plus exalté. Une contradiction sur les chiffres avancés et hop, on vous soupçonne d’être favorable au viol, d’en faire l’apologie ! Le sujet de la violence sexuelle contre les femmes est un tabou, une friche dont on laisse l’usufruit à des militants déterminés à faire peser sur tous les hommes un soupçon infâmant. Vieille technique utilisée par tous les lobbies, il s’agit alors de gonfler la réalité, d’amplifier le danger pour que des mesures radicales soient prises. Un peu comme ces manuels scolaires du début des années 80 qui nous expliquaient qu’avant l’an 2000, les réserves pétrolières mondiales seraient quasi éteintes… Pire, plus ambitieux et jamais clairement dit, en répandant l’idée que des dizaines de milliers de viols sont commis en France chaque année, il s’agit surtout d’établir un climat mental de culpabilité générale chez les hommes. Le bon vieux truc des méchants et des gentils.

Autre point désagréable : les fausses accusations de viol. On a beaucoup parlé de présomption d’innocence et de présomption de véracité (pour les accusations de la plaignante), mais une chose demeure certaine, malgré toutes les présomptions : les enquêteurs doivent étudier toutes les hypothèses, y compris celle où la victime raconterait des bobards. C’est d’ailleurs la meilleure et la seule façon de faire honneur à la présomption d’innocence dont on se remplit la bouche sur les plateaux de télévision. Or, des études montrent qu’en matière de viol, la fausse accusation est une pratique massive, et bien connue des spécialistes. Sans même rappeler les fausses accusations d’Outreau, des études jamais évoquées par les médias montrent que les fausses accusations de viols peuvent représenter jusqu’à 40% des cas ! (lisez ceci) Évidemment, les militantes fuministes rejettent en bloc ces chiffres (pour le cas improbable où on les produirait), en vertu de la mécanique d’intérêts que j’ai évoquée en introduction.

DSK et les femmes, c’est un sujet idéal pour vendre du papier. Il est riche, elle est pauvre. Il est puissant, elle balaie les chambres. Il a des avocats, elle a des huissiers aux trousses. C’est un homme, c’est une femme. Il est blanc, elle est noire. Un mauvais scénariste de série télé aurait reculé devant un tel simplisme. Pas les fuministes français.

28 mai 2011

Bob Dylan, l'icône dédaigneuse

En 1964 il chantait que "les temps sont en train de changer" ("The Times They Are A-Changin'"), en 2000 que les "choses ont changé" ("Things Have Changed"), mais en 2011 il est toujours là.
A 70 ans, Bob Dylan reste le symbole du temps qui allait venir, du temps qui était en train de passer, du temps qui est passé, et du temps qui passe. Par ses textes donc, mais aussi par sa musique, les "modes" qu'il suivit ou qu'il contribua a créées. Du folk acoustique au blues électrique, du rock au reggae, Bob Dylan étale son empreinte musicale depuis près d'un demi-siècle (son premier album, The Freewheelin' Bob Dylan, est sorti en 1963), et comme le temps, sa carrière n'est faite que de ruptures perpétuelles. Avec ses influences (sans les renier), avec ses propres contributions, avec son public, avec les femmes.

Car c'est là tout le personnage Bob Dylan, il est à la musique ce que Socrate est à la philosophie, une représentation vivante de l'ironie. Une icône dédaigneuse, qui tantôt fédère, tantôt exaspère.

Il n'y a qu'à voir l'album Blood on the Tracks, sorti en 1975, connu pour être lié à la séparation de Dylan et de sa femme, Sarah. Les textes y sont aussi acerbes que doux, ou mélancoliques. Après avoir ponctué tous ses refrains d'un "Tu es stupide, bébé. C'est une merveille que tu saches encore respirer." ("You're an idiot, babe. It's a wonder that you still know how to breathe.") dans Idiot Wind, il termine par faire voeux de repentance : "Nous sommes stupides, bébé. C'est une merveille que nous sachions encore nous nourrir." ("We're idiots, babe. It's a wonder we can even feed ourselves."). Une ironie toujours emprunte de nostalgie, mais une nostalgie qui regrette également les temps à venir. En pleine séparation avec sa femme, il est déjà "hanté par son souvenir" ("hounded by your memory"), mais demande déjà aussi à quelqu'un "si tu la vois, dis lui bonjour, [...] elle pense peut-être que je l'ai oubliée, ne lui dis pas que ce n'est pas vrai" ("If you see her, say hello, [...], She might think that I've forgotten her, don't tell
her it isn't so.
")

Dylan, dès 1965, dans Highway 61 Revisited, avait déjà compris que le temps n'était qu'une longue et lente "allée de la désolation" ("Desolation row"), où toutes les contradictions coexistent et où règne l'absurdité.
Sa conversion vers le mysticisme n'est donc pas anodine. Tout autant que l'adoration et les multiples références de l'auteur de Watchmen, Alan Moore, pour le musicien américain. Bob Dylan, dans une certaine mesure, est le Comédien, ce personnage qui a compris que la vie n'est qu'une vaste farce, que rien n'en vaut vraiment la peine, et qui vit alors totalement cette ironie, une ironie complexe, à découvert, à face découverte.

Vociférant sur son public, sur les femmes qu'il aime, Bob Dylan a surtout su créer une oeuvre d'une richesse qualitative et quantitative impressionnante, et c'est sa vision si particulière qui lui permet, lui qui, en 1997, sur Time Out Of Mind (le titre en dit long), nous chantait le crépuscule en nous donnant ce détail qui résume si bien l'artiste : "Derrière chaque belle chose, il y a une sorte de peine" ("Behind every beautiful thing, there's been some kind of pain")

27 mai 2011

L'homme Tron

On est en panne de photo monteur au CGB. Si vous avez quelques talents graphiques, nous proposons de taper sur Georges Tron, cet auguste fétichiste des pieds, podophile parmi les podophiles, homme Tron expert en réflexologie, pas manchot pour deux sous, mais curieusement non amateur d'unijambistes.
C'est une question d'équilibre, car nous ne voudrions surtout pas être soupçonnés d'injustice à deux vitesses. Il en va de l'harmnonie du Cosmos...

Légendes suggérées :
_ Georges Tron est fétichiste des pieds ? Le CGB lui met son pied au cul !
_ Le CGB prend son pied
_ Georges Tron partira les pieds (politiques) devant

idée de montage : Georges Tron se faisant botter le cul par un kicker des Raiders, enfin du CGB...

Manifestation nationale pour le pouvoir de crachat


Les syndicats appellent à une mobilisation nationale mardi 31 mai prochain pour la revalorisation des salaires. Alors qu'à Bastille, on essaie bon an mal an de vivre à l'heure espagnole, les garde-chiourme du prolétariat français vont-ils enfin faire montre d'audace en décrétant le camping sauvage pour tous ? Rien n'est mois sûr hips... Rendez-vous mardi. Nous salivons déjà à la veille d'un mois de juin dont nous savons tous qu'il s'achèvera dans les bouchons juilettistes... A vos glaviots

25 mai 2011

(Courrier des lecteurs) Obama vs Ben LAden, by Chomsky

Noam Chomsky s'est récemment fendu d'un papier sur l'execution d'Oussama Ben Laden.

"Ma réaction à la mort d’Oussama Ben Laden, par Noam Chomsky

Il est de plus en plus clair que l’opération était un assassinat prémédité, en complète violation de multiples règles élémentaires du droit international.
[...] ", commence t il.

Je n'ai pas pu aller plus loin. Les "humanistes de gauche" dégoulinant d'autosatisfaction font généralement naître en moi des pulsions de strangulation, mais là c'est plutôt une crise de rire qui a stoppé ma lecture. Chomsky, l'intello fétiche des lemmings décérébrés et des rebelles inrockuptibles est un putain de génie. Le premier pilier de pmu-bar venu a compris le jour meme que l'execution de Ben Laden était une mission commando mise en place de manière
unilatérale par les US, mais Chomsky nous présente ces faits comme une révélation cruciale mise au jour par son cerveau surpuissant. Pour tomber ainsi des nues quant
à ces faits plutôt évidents, on ne peut que supposer que Chomsky avait initialement imaginé un scénario de ce style :

Barak Obama, en vacances avec femmes enfants au Pakistan, passe par hasard, au cours d'une promenade, devant une villa cossue de province. A la fenêtre, il entrevoit
furtivement une silhouette lui paraissant vaguement familière. Barak flaire quelque chose de louche.
Il prend son menton entre le pouce et l'index, fronce les sourcils et réalise :
"fucking shit, that's Osama!", s'exclame-t-il intérieurement. "Darling,
reste avec les enfants, je dois sauver le monde libre de la menace terroriste", intime t il à sa femme.
D'un bond, il enjambe la clôture barbelée culminant à 3 mètres du sol. A peine le pied à Terre, il dégaine son portable et compose le numéro du président pakistanais, car respectueux du droit international comme tous ses prédécesseurs à la magistrature suprême américaine, il lui faut évidemment une autorisation pour agir sur le territoire d' un état souverain.

- "Allo Asif, je viens de débusquer that fucking bloody Osama. I need your agreement to capture him. Quick man!"
- "Ok Barak, no problemo. Et a propos, négro, t'oublieras pas de me rendre les 20 dollars que je t ai prêté à Davos! ".

Ni une ni deux, Black Captain America entame une course effrénée dans le jardin de la luxueuse villa, il file à toute allure entre les palmiers, les fontaines et les cocotiers, distribuant dans la foulée high kicks et coups de boule aux malheureux vigiles à carrure de gorille, tentant vainement de barrer son chemin. Arrivé au pied de la bâtisse, il lève les yeux vers la fenêtre cible qu'il constate fermée et d'une puissante poussée sur ses mollets musculeux se propulse à travers le passage, atterrissant en roulé-boulé dans la chambre d'Osama tandis que les éclats de verres
retombent au ralenti autour de lui.

- "Nardin zobi, ci quoi ci nigro tombi di ciel?? ", s'exclame l'idole
des djinns qui était en train de regarder une énième rediffusion d'Happy Days en se baffrant de chips bolognaise. "Saleti di nigro, ji vé ti montri ki Osama il est encore plou cool et fortiche qui Fonzie!!"
- Osama, au nom du peuple américain et du monde libre, tu es en état
d'arrestation.
- Nardin, j'iti sûr ki cet enculi d'Huggy il va balanci ma super
cachitte, tout ci nigros ci vraiment la merde, maugrée le barbu qui valait 25 millions.

Les deux hommes se font face, se jaugeant l'un l'autre, tandis que l'harmonica d' "Il etait une fois dans l'Ouest vient transpercer un silence ecrasant de tension." [ zoom sur Obama] Le visage de Barak est impassible, le héros concentre son attention sur son adversaire. [zoom sur Osama] Un rictus déforme le visage de l'arabe qui passe discrètement sa main dans le dos.

- Ce sourire démoniaque...ces yeux de fouine..Osama prépare probablement un sale coup, je dois rester sur mes gardes", pense Mister President. "Je te somme de te rendre, Ben Laden. Si tu n'opposes pas de résistance, tout ira bien, l’Amérique est le pays de la justice!"

- Ji vais lui pripari un sale coup à ci gro batard d'infidile, hihihi
, ricane intérieurement Osama en dénichant de son dos une arme de poing à la crosse frappée du croissant de Lune et de l’étoile à 5 branches.
Soudain, Ben Laden pointe l'arme sur le métisse d'acier et presse la gâchette. "Hi hi ti est fit comme un rat, enfoiri d' nigro"

- Damned, il vient de tirer. D' après mes calculs, la trajectoire de la balle finit pile au milieu de mon front, je n'ai plus que 8 millièmes de seconde pour agir, que faire ?" Barak se souvient alors d'un truc que lui avait montré Keanu Reeves sur un trottoir de Tribeca alors qu'il rentraient tous deux d'un vernissage ennuyeux à mourir mais généreusement arrosé.

"T..tu v...ois..Bar...rak, c'est fa..facile...tu concentres dedans
t...ta tête et 'vec pui..puiss...puisance d'l'espriiiit, t'ralentis le temps qu..quoi! Ap..après, c'facile qu..quand c'est que le temps il est...rr.rrr....ralenti, tu plies ton dos à..à...à l'envers genre comme si qu'tes du caoutchouc qu..quoi!!!". Essayant de joindre à l' explication orale une démonstration physique, Keanu chuta lourdement sur le pavé, amortissant la chute de son postérieur hollywoodien.
- Pauv' Keanu, ce con a jamais su tenir l'alcool...complètement
déchiré... j'entrave pas un mot à ce qu'il raconte..bon, j'le ramène chez lui ou j'le laisse cuver sur le trottoir? hum...bon allez, j'me casse."
Barak héla un taxi et s'engouffra dans la Chrysler. En s'adressant au reflet du Sénateur Obama dans le rétroviseur, le chauffeur, un hindou à casquette arborant un t-shirt "I see dead people", demanda à Barak sa destination, un énigmatique sourire au coin des lèvres. La Chrysler démarra et disparut tandis qu'un filet de bave ruisselait le long du menton de Keanu.

Cet épisode à priori insignifiant lui etait revenu comme un flash.
Soudain, il prenait tout son sens. "C'est donc ca que tu essayais de me dire, Keanu! Tu savais!"
Barak réalisa alors qu'il ne lui restait plus que 2 millième de seconde pour s'en tirer. Il concentra sa volonté aussi puissamment qu'il le pouvait et laissant echapper un râle, fit plier le Temps à son désir. Soudain, la mini fusée létale sembla s’arrêter à quelques centimètres de son front. Barak tordit son buste vers
l’arrière jusqu'à former une équerre avec le reste de son corps, laissant le champs libre à la balle qui alla finir sa course dans le mur.
"Merci Keanu; vieux frère, pensa Barak".

Puis, se redressant d'un trait, il transperça Osama du regard et lâcha menaçant:
"Vermine terroriste, tu ne me laisses plus le choix!". Puis il se propulsa vers Ben Laden, effectuant une pirouette dans l'air et terminant sa course aérienne la jambe tendue en un coup de pied mortel vers le cou de l'arabe dont les vertèbres cervicales furent brisées nettes.

Barak se réceptionna en position accroupie. De l'index, il essuya une petite gouttelette solitaire de sueur qui perlait au dessus de son arcade gauche. Puis, il se releva.
"Bon, voila qui est fait, rejoignons vite Michelle et les enfants pour ce petit thé chez l'ambassadeur. Encore un peu et nous étions en retard."

.............


Voila donc ce que semble avoir imaginé Chomsky au premier abord et qui justifierait
son étonnement quand à la réalité des faits qu'il n'allait pas tarder à découvrir. Car on ne la fait pas à l'esprit le plus fin de sa génération qui subodorait déjà que Barack Obama ne pouvait sauter à 3 mètres de hauteur sans chaussures de sport.
Mettant en branle tous ses réseaux d'informations, enquêtant 3 jours et 3 nuits sans même dormir ni manger, Noam, épuisé, découvrit finalement la vérité sur Google News au terme d'un travail d'investigation hors du commun. Il tomba alors des nues. L’exécution avait été préméditée!
Les USA avait agi strictement unilatéralement! Barak Obama n’était pas réellement capable de ralentir le temps! Toutes les illusions de Chomsky s'envolaient d'un seul coup. C'est alors que, dans un sursaut, pour conjurer le désespoir qui l'envahissait et commençait à le submerger, Noam Chomsky décida de révéler à la face du monde ce qu'il avait découvert:

"Ma réaction à la mort d’Oussama Ben Laden, par Noam Chomsky

Il est de plus en plus clair que l’opération était un assassinat prémédité, en complète violation de multiples règles élémentaires du droit international [...]"

Mick pour CGB International

23 mai 2011

DSK : les dessous de l’affaire


Tristane Banon ne portera pas plainte contre son « chimpanzé en rut. » Elle vient de solennellement l’annoncer sous l’œil protecteur de son avocat. Elle ne portera pas plainte contre DSK, du moins le temps de son cauchemar américain. Elle laisse entendre, qu’elle pourrait porter plainte contre lui un jour, pourquoi pas aux alentours de 2012. Naturellement. Après il sera trop tard. C’est les Mayas qui l’ont dit. Accessoirement le Code pénal français. La prescription pour ce crime, c’est 10 ans. Tristane a peu de temps pour capitaliser. Cette jeune journaliste/écrivaine, filleule d’une ex-femme de l’ex-Président du FMI et amie de l’une de ses filles, fait actuellement le buzz malgré les bips, après avoir fait chou blanc et pschitt pendant 4 ans. Son discret dîner mondain entre gens de bonne compagnie au 93 Faubourg Saint-Honoré, sur pellicule depuis 2007, a enfin touché sa cible. Tristane Banon est sortie de l’anonymat.


Sculpture sur bois datant de l'année 2012 et représentant le Président du FMI bandant pour un placement en Bourse


Ça a été long, malgré la présence en plateau, c'est-à-dire à table, de journalistes politiques en vue. Au menu de l’émission, du Jean-Michel Apathie ou encore du Claude Askolovich, tous deux servis sur leur lit d’hypocrisie. Ça a été long à faire du bruit, malgré l’œil des focales. Anne Mansouret, sa maman, élue socialiste au Conseil général de l’Eure et candidate déclarée aux primaires socialistes, nous a expliqué pourquoi. C’est parce qu’elle avait joué son rôle de mère. « C’est moi qui ai dissuadé ma fille de porter plainte. Je voulais protéger sa carrière. Je voulais protéger ma fille. » A peu de chose près. N’importequi.fr aurait probablement porté plainte, histoire de jouer les Zeus médiatiques. Les psychiatres auraient été fous d’joie. L’expert du CGB vous le confirme : _ Un procès est nécessaire à toute victime pour l’aider à se reconstruire. Comprenez-vous ? La victime a besoin que la société reconnaisse officiellement son statut de victime pour avancer. _ Vous voulez dire que notre société c’est comme une grande réunion d’alcooliques anonymes ? On croyait naïvement qu’un bon accord valait toujours mieux qu’un mauvais procès ?


Le maquereau de la République, un livre choc de Tristane Banon, préfacé par Barbara Cartland


C’est pas tout. Tristane Banon, elle a ajouté au cours de son communiqué, qu’elle refuserait de témoigner à charge et à New York contre l’ex-« secret de Polichinelle de la classe politique françaièèèse. » Ça sent pas l’tabac pour DSK. Et si ça sent pas l’tabac, c’est que ça sent pas l’roussi pour lui. Et puis, le temps fait son œuvre. Vite, car il travaille live. En direct. Les versions évoluent. Des faux frères appelant à la sacro sainte justice bling bling sont percés à jour. Le business s’arrête même pas pour pisser. Le buzzness non plus. Le peuple monde en prend plein ses mirettes. C’est X-Files, au sens propre. La vérité est peut être ailleurs d'ailleurs. Derrière l’hystérie. On enquête au plus près de l’anecdote ouah. Question information, c'est handicap sensoriel international. L’information est muette. Muselée ? La lumière a peur de son ombre ? Non. L’important, c’est que ça pleuve. La vérité est là. Pas ailleurs. Mais si. Elle est derrière, la figurante là-bas au fond. On s’en fout ! Elle est pas belle comme Banon. Le peuple monde, malgré la preuve divine qu’est l’ADN, ne connaîtra jamais la vérité. C’est même pas une question de verdict. Toutes les vérités se valent. Le légitime doute. Ou pas. C’est la fiction qui prime. Les infos, c’est de la télé réalité. C'était pas prévu hein ? Et le show must go on. Tristane Banon a peu de temps pour capitaliser.


_ Il a tenté de me violer mais je ne veux pas accabler un présumé multirécidiviste _ Ouais, normal quoi.


Frimeuse. Tristane Banon s’est décrédibilisée. Mythomane ? Peut-être. Mais le truc c'est que le viol est monnayable là. Pas si grave. D’ailleurs, pour notre éminent expert en anormalité, ça ne fait pas un pli, parce que c’est même pas le problème : _ C’est pas un viol, c’est un acte manqué, un « suicide politique » ! _ Euh oui mais c’est pas un acte manqué c’est un viol manqué : une tentative de viol. Vous ne pensez pas plutôt que ça pourrait traduire le sentiment d’impunité des puissants ? Vivent dans leurs bulles en haute altitude. Là-haut, l’air est rare. Et on connaît les tendances d’un cerveau mal oxygéné à dérailler… _ C’est pas un « suicide politique », c’est un complot ! Ça , c’est notre expert en gymnastique douce, expert en méthodes Pilates et Feldenkrais, un ancien témoin de Jéhovah, qui le dit. L’a pas peur de faire une entorse à sa phobie des théories complotistes, qu’il décrète normalement d’emblée paranoïaques. Y’a inversion totale là. Parce que le complotiste, il y croit pas au complot sur ce coup-là. Y’a une couille quelque part...


Viagra con dios

Mmm. Revenons à DSK qui serait tombé dans un bite-apens. La théorie du complot, je la rejette pas. La ficelle sur laquelle fallait tirer, c’était une corde à nœuds. Suivez mon regard… La pulsion, c’est une question de battements par minute. 57 % de Français croient en l’innocence ou le simple, mignon et si délicieux penchant véniel de leur étalon : l’ancien poulain en chef pour 2012 des socialistes et des combattants du compromis. Allez. Le complot, retourne-le comme un gant. Et si c’était pas pour le faire perdre que c’était sorti ? C’est gros hein ? DSK blanchi dans quelques semaines, que lui restera-t-il au cul ? Quelques casseroles d’ordre queutarde. Au pays du french lover ? Au pays de la french (at)touch(ement) ? Au pays de la digne présomption d’innocence qui plane comme tout le monde sous tabloïd ? Au pays des petits arrangements entre amis ? En pays paillard ? Que sont quelques coups de canif au contrat conjugal en pays rabelaisien ? Le outing de DSK ne sera peut-être pas si long. Le martyr priapique reste un martyr. Tout ça, ouais, c’est peut-être juste qu’une affaire de couilles… Dominique va avoir le temps pour capitaliser, la fortune de sa femme en bandoulière. Et tout le monde se rappellera qu'il apparaissait fut un temps l'homme de la situation. Le Guizot des temps postmodernes. Le De Gaulle mondial de la mondialisation. C’était ça les dessous de l’affaire DSK. Allez lol et mdr 1 ! _ Les moutons admirent le bouc car ce dernier a de jolis attributs et s’en sert. _ Oui, bonsoir docteur.

Canteloup venge Guillon

Aujourd'hui, alors que la chute de DSK fait un ramdam de tous les diables, on peut légitimenent se demander comment ça rigole à France Inter ?


Guillon: Visite de DSK à France Inter, tous aux... par franceinter


Quant à Canteloup, il a définitivement repris le crachoir

20 mai 2011

Années 2000

Les années 80, c’était moche mais au moins ça avait une couleur. Il se trouvera toujours quelqu’un pour vouloir revivre les années 60, 70, 80… Personne, en revanche, n’aurait l’idée de regretter les années 90 : les années 90, c’était creux et atone ; une décennie de transition, qui n’est qu’une série de revivals des décennies précédentes. Les années 90 ressemblent étrangement à une gigantesque émission présentée par Arthur, pleine de best-of, d’archives, de bêtisiers, de Top 50, de remix, qui tournent en boucle... La singularité des années 90, c’est de n’avoir aucune saveur propre.

Les années 2000, au moins, ont une couleur, même si c’est celle du clean et de la transparence.



Années 2000 et leur côté clean : plastique, numérique, surfaces planes. Tactiles. Lisses mais pas dérapantes. Règne du blanc translucide. Comme la coque d’un ordinateur Apple. Comme un Planet Sushi. Années 2000 et le pipi clair du rock électro, le dégueulis propre des beats tamisés, les voix modulées électroniquement. Négligé chic. Maîtrisé inoffensif.

Années 2000, et leur design plat. Minimaliste. Comme une commode Habitat. Comme un objet designé par Philippe Starck. Comme un projet immobilier qui « intègre les espaces de verdure au cœur du bâtiment »… Années 2000 et la pureté des formes, des choses, des sentiments, de l'alimentaire.

Années 2000 et leurs aplats de couleur enjoués, arc-en-ciel, pots de peinture. Splash ! Murakami ! Maternelle ! Gaga. Années 2000 et la béatitude enthousiaste. « Donnez votre avis ! ». Social. Média. Participatif. Flash. Mob. « J’aime ! ». Années 2000 et le gobelet Starbucks à votre prénom. Années 2000 et le tout-à-portée, portable, portatif…


No it’s not.



Naked : bio, bar à salade, bar à soupes



... etc. etc. ...


Et tant pis pour ceux pour qui, ce qui séduit, ce qui attire, ce qui intrigue, c’est justement le rouillé, le tordu et le sale. Le sang mêlé à la poussière. La graisse et les écrous.

Sur la route


« Ne comptez pas sur moi pour laisser repartir le nombre de morts sur les routes à la hausse. Je ne céderai pas sur cet objectif. » Le shérif en chef a parlé. Les « délinquants de la route » ont du mouron à s’faire. Le truc, c’est que c’est nous tous les délinquants, les titulaires du permis de conduire. Bon ou mauvais conducteur, on se fait alpaguer par les guignols en moyenne une fois toutes les 600 infractions. C’est pas une stat du service des sports de Canal hein, mais de la Prévention routière. Pas de première fraîcheur, elle a 15 ans. J’l’ai apprise au cours d’un stage que j’avais dû faire consécutivement à un grand excès de vitesse alors que je décalaminais ma toute nouvelle caisse en pleine nuit sur une 8 voix déserte… La belle affaire insécuritaire ! Sur la route, y’a rien d’absolu, y’a que du relatif. Sur la route, la vérité c’est que c’est la guerre. Une guerre de position, une guerre d’attention et d’anticipation en même temps qu’un jeu de la souris contre le chat sous képi. Etre sur la route est un danger permanent, quelque soit ton véhicule. On peut bien les supprimer ces damnés panneaux, on supprimera jamais l’inconscience et la connerie humaine… Tu peux bien multiplier les règles, mais quand le respect de l’autre et le bon sens ont foutu le camp, c’est un combat perdu d’avance.

On va être nombreux à tomber dans l’panneau, maintenant qu’ils vont les dévisser ces avertisseurs de croisement imminent d’un flash fixe. Comme tout l’monde, quand j’les croisais, je me mettais à grimper sur ma pédale de frein, et dans les jours sans, à laisser mon frein moteur agir, pour récupérer une énergie cinétique digne de ce nom une fois le danger de la photo passé. Alors faut bien convenir que ce dispositif était d’une stupidité affligeante. Grotesque. Comptez pas sur moi pour être de mauvaise foi. Y’a pas marqué député UMP en pleine drague électorale ! Y frondent, y grondent car cette mesure est « impopulaire » ? La pusillanimité, connaissent pas ces drôles !
C’est sûr, ça va flasher sur les routes comme en bas des marches du palais des festivals de Cannes ! Comptez pas non plus sur moi pour m’en réjouir. On va se faire suer à s’traîner sur l’autoroute, tandis que parfois, conduire à tombeau ouvert est ta seule issue pour laisser le danger loin derrière toi… La route, j’la connais bien cette garce, en voiture, en scooter, à vélo, à ch’val et à pince ! La limitation de vitesse, c’est pas la réponse à tous les maux. C’est l’arbre qui cache la forêt du réel souci : le déficit chronique d’éducation pour ne pas dire d’intelligence. Ah c’est sûr, l’argent va pleuvoir dru dans les caisses de l’Etat. Ça va être Fort Boyard tous les jours au centre des amendes de Rennes ! Ça va cracher au bassinet ! Mon permis à points est en sursis, tout comme le vôtre.

Depuis mes débuts sur la route, j’ai vu les comportements changer. La majorité des gens s’est doucement mis à respecter les limitations de vitesse, notamment sur autoroute. La preuve que la sensibilisation, ça marche. La preuve que la peur de la sanction, ça roule. Et c’est vrai que ça a quelque chose de reposant. Mais vous ne me ferez pas dire que je me sens moins en insécurité sur la route. On peut bien les supprimer ces damnés panneaux, l’imprévisibilité dopée à la connerie est un facteur X irrépressible. Sur la route à trois voies, tu pourras toujours essayer de doubler à 130 sur la voie rapide si t’es disposé à prendre le risque d’un dépassement de 3 kilomètres, tandis que le bouchonneur en puissance aurait pu circuler sur la voie de droite, désespérément vide... Sur la route, dans les campagnes perdues, tu pourras toujours rouler sur les départementales à 90 et négocier des virages sans visibilité à 60, t’auras toujours un connard d’autochtone plein les rétro, ce même bouffon que tu retrouveras en panique, à perdre les pédales en plein Paris, en pleine crise mystique existentielle, découvrant un peu tard comme le con qu’il est, que conduire, y savait pas ce que c’était jusqu’à présent. Sur la route, tu pourras toujours croiser cet automobiliste pendu à son téléphone te griller le feu sous le nez, à une vitesse raisonnable de 30 kilomètres par heure. Sur la route, tu pourras toujours gueuler contre les scooters ignorants des dangers, prêts à prendre des risques inutiles pour avancer coûte que coûte, et qui te rétorqueront toujours la même réplique alors que tu viens de les rejoindre tranquillou au feu : « Apprends à conduire hé connard ! » Sur la route, tu pourras toujours avoir maille à partir avec ce gamin en pleine phase de transgression, juché sur un jouet de 50 cm3, en route pour Garches, s'il est verni... Sur la route, tu pourras toujours croiser l’un de ces cyclistes engagés, prêt à mourir pour sa cause, préférant te couper la route plutôt que de gérer ta présence. Sur la route, tu pourras toujours croiser ces piétons ignorants de la règle de l’engagement régulier sur un passage protégé, manifestement convaincus que leur combat écologique et citoyen les immunise contre une voiture d’une tonne lancée à 50 kilomètres heure. Sur la route, tu pourras toujours croiser ce môme en train de courir au devant du danger, sa mère et son père, à 30 mètres derrière ses talons.

La psychorigidité du respect de la règle est une dystopie. Voyez tous ces chiens de Pavlov avancer au vert et transformer ainsi irrémédiablement le carrefour déjà chargé en piège définitif. Pensez également qu’un deux-roues est bien souvent plus en sécurité quand il se met hors jeu. La tolérance zéro est une ineptie, et les cyclistes anti-automobilistes ne riront pas les derniers. La remise en vigueur de l’immatraculation des vélos est imminente, j'en suis convaincu.

Le système avec ses règles produit des sectes concurrentes à la pelle : automobiliste diabolique, motard en colère, individu engagé pour le respect du nouveau droit de l’homme qu’est la circulation à bicyclette, piéton fanatique. Sur la route, malgré les règles et le fleurissement des « zones de partage », zones 30, zones 20, c’est pas vraiment le bonheur du Vivre ensemble, mais plutôt la jungle de l’anarchie totale.
La mondialisation néo libérale est un accélérateur de particules à tendance schizophrénique. A mesure qu'elle produit toujours plus de grosses cylindrées à électronique embarquée, elle fait avancer les moyens de sa répression infantilisante, faisant irrémédiablement régresser l'humanité vers l'axiome d'Hobbes. L'humain de l'homme est en perte de vitesse, quand il n'est pas en pleine sortie de route. Sans culture du bon sens, toute route est une impasse.

19 mai 2011

DSQ

La question que tout Paris se pose : A défaut de la présidentielle, DSK participera-t-il à l'Amour est dans ton QHS édition 2012?

Souvenez-vous ?

Que faites-vous samedi ?

Les actes surréalistes des métaphysiconautes ne cesseront de me surprendre et de me faire crawler dans mon limpide pipi.
Alors que Miguel de Cervantes nous avait avertis de nous prémunir contre les lubies des futurs « Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Mancha », un américain délabré de soixante longueurs existentielles, fraichement retraité, a fumé les cent quarante mille dollars d’économies (cent six mille euros), arrachés au patronat au prix d’une lutte harassante, dans une campagne de pub new-yorkaise afin de prévenir l’humanité de l’imminence d’une apocacalypse tant promise, pour le 21 mai 2011, soit samedi. Çe qui s’avère un peu court quand même.
Les citadins de la grosse pomme ont eu la stupéfaction d’apercevoir des affiches placardées dans plus de mille rames de métros et d’abribus, leur annonçant que « Tremblement de terre mondial ! Le plus grand jamais produit : le jour du Jugement Dernier, le 21 mai 2011 ».
Robert Fitzpatrick, à l’origine de ce battage public salvateur, est un auditeur assidu de la radio catholique « California Evangelist Harold Camping », dont l’animateur Harold Patrick nous avait déjà promis, il y a vingt ans, un 21 décembre 2012 pour le 4 septembre 1994. Une simple erreur de calcul d’après ses dires. Personne n’est parfait.

Fitzpatrick, chérubin perché dans les hauteurs célestes et qui n’a pas l’intention de redescendre, se condamne à manger des pâtes et des biscuits secs pour qu’un maximum d’humains puisse survivre au grand chamboulement, à la condition bien sûr, qu’on se rue en masse dans les maisons du Seigneur et qu’on embrasse la foi catholique sur le zizi rikiki du petit Jésus. C’est quand même sympa de sa part de vouloir nous sauver pour si peu de contrepartie. « J’essaie d’avertir les gens de ce qui va arriver. Les gens qui savent se doivent de prévenir tout le monde », puis ajoute « cela commencera juste avant minuit, à l’heure de Jérusalem. Cela instantané et global. Il y a trop d’écrits mentionnant des 'destructions soudaines' ».
C’est bien beau tout ça, mais encore faut-il qu’il existe des preuves ! Lorsque j’ouvre ma porte à des témoins de Jéhovah et que je tiens fermement ma batte de baseball, j’ai l’habitude de quémander un miracle séance tenante avant d’accepter leur prospectus. En général, ils se taillent rapidement. Comme quoi, ça marche les prodiges. Sur le même principe de sainte suspicion, qui m’a valu étant gamin d’éviter la profanation de mon temple inviolé par un mécréant de passage qui voulait, je cite, « me montrer son petit chat » dans une cave de mon quartier, nous sommes en droit de réclamer des preuves de caractères irréfutables avant d’se faire évangéliser les voies pénétrables par un représentant du Bon Dieu. Et ben, chers lecteurs assoiffés de franches rigolades paillardes et païennes, nos fervents millénaristes ne sont pas venus les mains vides. Alors sur quoi se basent ces prédictions catastrophistes ? De la marijuana cultivée dans les champs de la Jérusalem céleste ? De l’hostie amphétaminique ? L’Archange Gabriel en songe ou en congé payé dans le coin ? Non ! Des saintes Écritures décryptées. Nos bienfaiteurs nous ont décodé la sainte Bible à l’aide d’une volonté farouche, alors qu’on pensait jusqu’à présent qu’il suffisait de la lire.
Le projet Aqualand de Dieu. Tout ça pour ça.

Sortez vos calculatrices. Le grand glouglou de l’époque de Noé s’est déroulé précisément en l’an 4990 avant fils à papa, il y a tout juste sept mille ans. Or el Amor de Dios avait prévenus le marinier que le déluge aurait lieu sept jours après et, dans un autre extrait, qu’un jour pour Dieu équivaut à mille ans humains, donc que les sept jours divins correspondent à sept mille ans bien de chez nous.
Ce n’est pas tout. En additionnant la date estimée de la crucifixion du Christ, le 3 avril de l’an 33, par les chiffres symboliques 5, 10, 17 (rédemption, complétude et paradis) multiplié entre eux au carré, gobez un aspro, le résultat nous donne 722 500 jours, ce qui arrive au 21 mai 2011.
D’après eux, le paradis accueillera les croyants, desservi par le bus « magical mystery tour », tandis que les autres, dont moi, subiront 153 jours de « morts et d’horreurs » avant la fin définitive au 21 octobre 2011. On ne peut que rester baba devant la précision des prédictions.
Fitzpatrick et ses camarades de paroisse, dont certains d’après le dailymail ont quitté femmes, enfants et turbins, vous conjurent, petits agneaux frêles et égarés, de vous aider vous-mêmes pour que le ciel vous aide. Si le Disneyland divin vous tente, n’hésitez pas surtout. C’est gratos, aucune liste d’attente et cette fois, ce n'est pas tenu par les Américains. Pour les autres, ce sera Beyrouth pendant cinq longs mois… ou pas peut-être.

L'utopie meurtrière

L’utopie meurtrière, c’est un livre : le récit de Pin Yathay, un ingénieur cambodgien qui a survécu pendant 2 ans aux camps khmers rouges.

Pour ceux qui ne connaissent pas : la révolution cambodgienne s’est déroulée de 1975 à 1979 et visait l’édification d’une société égalitaire qui passait notamment par une rééducation des populations urbaines (considérées comme gangrénées par l’impérialisme et les valeurs bourgeoises).


Concrètement, cela consistait à déporter ces millions de gens dans la jungle pour leur faire prendre part à des travaux agricoles planifiés en dépit du bon sens, en même temps qu’on leur assénait une éducation politique et mentale pour désapprendre leurs réflexes individualistes. Cela s’est traduit par 2 ou 3 millions de morts : de famine, d’épuisement, de maladie, d’exécutions sommaires… Et malgré tout – c’est le plus terrifiant - le programme d’épuration semblait mené pour le bien, dans l’objectif naïf, sincère et complètement dément que les bons éléments, après quelques années à ce régime, seraient purifiés de leurs mauvais penchants et prêts à vivre ensemble dans une société d’hommes nouveaux…

L’utopie meurtrière, ce sont donc deux années de survie dans des conditions plus que rudimentaires, où ceux qui tiennent la kalachnikov et qui sont chargés votre parcours de réinitialisation ont parfois entre 14 et 16 ans, ou bien sont des paysans incultes très grossièrement formés au marxisme. Deux années où dans l’arbitraire le plus total, ces soldats vous exécutent ou vous gracient selon la faute qu’ils croient vous avoir vu commettre contre « la Révolution »… Deux années où malgré votre bonne volonté révolutionnaire, il suffit d’être pris en train de troquer un vêtement contre de la nourriture ou de tomber de fatigue en dehors des siestes autorisées pour insinuer que la Révolution ne pourvoit pas aux besoins de tous et être emmené dans la forêt (balle dans la tête). Deux années à composer avec un système absurde dans lequel la vie tient à un mot qu’on prononce ou à un silence qu’on garde…

« Je vais d'abord vous couper la tête. Ensuite vous connaîtrez la vérité ! »


Pourquoi ce livre, lu il y a plus de 15 ans, m’a-t-il laissé un si fort souvenir ?

Il y a le frisson de se dire que tout cela s’est vraiment passé, sur Terre, en 1975 (hier). Il y a aussi ce totalitarisme fou, encore plus fou puisqu’il prétend s’exercer pour le bien de ceux qu’il extermine. Il y a enfin et surtout ce fascinant rétrécissement de la conscience humaine pour survivre : dans un environnement où règne l’absurde, où la mort tombe comme la pluie et où il faut passer entre les gouttes, la raison, la conscience, se mettent en veille et laissent une sorte d’instinct prendre le relais. Dès qu’il sent que ses forces peuvent l’abandonner et qu’il y a danger de mort, Pin Yathay se désintéresse naturellement des questions, du pourquoi, de la justice ou de l’injustice… Dans une sorte d’ébriété vigilante, sa conscience se rétrécit jusqu’à ne devenir qu’un point, focalisé sur la survie, le bout du tunnel : manger, se reposer, mentir, échapper au travail… Cela devient un jeu, un jeu où il faut être intelligent autant qu’idiot.

Intelligent parce que seul le plus malin survit. Détourner les règles, voler, dissimuler, tricher, désobéir, sans quoi on meurt doucement mais sûrement. Comprendre la logique dans l’absurde, le jeu dans le jeu. Idiot parce qu’il faut également savoir être bête, ne pas chercher à comprendre, fermer les yeux, jouer l’imbécile. Celui qui réfléchit, qui cherche une justification, est sommairement éliminé. Comprendre qu’il n’y a rien à comprendre et l’accepter, aussi désespérant, bête ou terrifiant que ce puisse être.

Et c’est un peu cela la vie : il n’y a pas de bonne ou de mauvaise dotation, le monde n’est jamais donné entièrement au plus intelligent ou au plus bête. Traverser la vie demande autant d’intelligence que de bêtise, de clairevoyance que de cécité, de maîtrise que d’abandon… La vie est un jeu où il est crucial de savoir s’en remettre tantôt à la compréhension, tantôt à l’instinct le plus immédiat et le plus bête. Et l’art de vivre est cette virtuosité à mêler l’un et l’autre opportunément selon les situations.

L'affaire DSK selon le grand Mozinor


DSK A RIKERS par mozinor

18 mai 2011

Une femme, toutes les femmes


"Comment voulez-vous croire qu'une simple femme de ménage, noire, mère célibataire de surcroît, ne dise pas la vérité ?" Gisèle Halimi. Le Monde.fr du 18/05/2011.

Oh, je sais qu’on peut se laisser entraîner à dire les choses de façon maladroite, surtout quand on est presque sommé d’avoir un avis sur une question dont on ne sait, en fait, rien. Oh, je sais que les paroles dépassent parfois la stricte mesure de ce que leur auteur voulait dire. Malgré tout ce que je sais, je ne peux pas m’empêcher de goûter comme un nectar la perle halimienne ci-dessus. Nectar d’une bien curieuse nature, car il cumule deux caractères contraires : il est à la fois précieux et très répandu.
Gisèle Halimi n’a peut-être jamais fréquenté de femme de ménage, noire, mère célibataire. Qu’importe ! elle aurait quand même pu se renseigner avant de parler… En effet, la science est formelle sur ce point : les femmes noires, mère célibataires, et qui font des ménages pour gagner leur vie peuvent et savent mentir. C’est scientifique, c’est établi, c’est du solide. Les plus grands spécialistes de la question convergent même vers l’idée qu’en fait, tout le monde est capable de mentir. La profession d’un individu, son sexe, sa couleur de peau (fût-elle noire, oui !) n’entravent manifestement pas sa capacité à mentir et il semble bien qu’en ce domaine, les individus « faibles », ou « dominés », enfin les individus qui ont en général à rendre des comptes, développent leur compétence bobardienne de façon encore plus satisfaisante.
Ainsi, hélas, les victimes-nées que sont les pauvres, les femmes battues ou non, les sanpapiers, les sans grade, les ramasseurs de fruits, les chiffonniers du Caire, les pestiférés de la Garenne-Colombe, les moinqueriens de Ouagadougou, les plongeurs de chez Quick-Hallal, les précaires, les cédédés de la Barbade et même les trous du cul du Yang Tsé Qiang, tous sont potentiellement de remarquables baratineurs. Sur ce point, on me rétorquera que les ministres et les D.G. d’institutions internationales sont de vrais champions : certes !

« Gisèle Halimi dérape !», auraient pu titrer les médias s’ils n’étaient pas en ce domaine focalisés sur les têtes de Turc consacrées. Elle prend ses désirs pour des réalités, ses fantasmes pour chose certaine. La militante milite comme tous les militants le font : dans la lourdeur. Si les militants se mettaient à peser les arguments et les accusations, où irions-nous ? Par ailleurs, Gisèle Ha-la-limite est avocate. Il serait étonnant que son expérience d’avocate ne lui ait jamais fourni l’exemple de gens qui mentent, accusés, accusateurs, femmes, hommes, Blancs et même Noirs (si !). Mais la militante en elle est la plus forte, et débarrasse l’avocate des scrupules qu’elle devrait avoir.

Dans une conversation télévisée récente portant sur l’affaire DSK, Clémentine Autain remarquait que les réactions publiques se focalisaient sur la personne de l’accusé (elle ignore sans doute qu’un patron du FMI mis en taule pour viol est bigrement plus susceptible de soulever l’étonnement public qu’une malheureuse femme de chambre maltraitée, même noire). Elle s’étonnait et regrettait que l’on déplore la situation de DSK tout en ignorant celles de l’accusatrice et des femmes violées. En cette occasion comme en tant d’autres, elle parlait en parfaite militante, c'est-à-dire en utilisant des expressions toutes faites : les fameuses (et déplorables) « violences faites aux femmes ». Pour cette soldate des femmes, nous avons DSK d’une part (encore présumé innocent bien qu’il soit un homme) et, dans l’autre plateau de la balance, les violenzfètzofam. Or, quelle que soit l’énergie sexuelle du mari d’Anne Sinclair, on ne peut quand même pas le tenir responsable des violences faites à toutes les femmes ! Dites-moi que ce mec est un tombeur de première, un satyre forcené, un queutard d’exception, un militant du gland, dites-moi qu’il crapahute de fesses en fesses depuis trente ans, qu’il bouscule ma tante dans les rosiers, qu’il force les premières communiantes et d’insoutenables génuflexions et même qu’il DSKise© les réticentes, mais ne venez pas me dire qu’il épuise à lui seul le genre féminin sous les assauts !! Il doit bien avoir quelques complices, ce mec ! Il ne peut pas faire partout à la fois ! En l’occurrence, donc, on l’accuse de violence faite à UNE femme, une seulement ! Toute la différence entre une exaltée de la militance et une personne sensée tient à cette nuance.

Un conseil à tous les hommes : dans un tribunal présidé par Clémentine Autain, évitez d’être défendus par Gisèle Halimi.

A bas DSK mais vive la bite!



DSK et sa matrone sont des êtres insupportables, des "socialistes" à détester sans modération... mais on ne va pas commencer à admirer ces benêts de yankees pour autant. Ils ne vont pas nous refiler leur phobie du poil sous prétexte qu'ils nous débarrassent du bandard fou!
Restons Français que diable.

Ecarté pour 2012, DSK se range derrière le MoDem

Second degree on TV

Entendu en début d'année une annonce radio pour le programme télé du soir, qui invitait avec grand enthousiasme le téléspectateur à regarder l'Eurovision pour « retrouver les commentaires acerbes et drôles » de tel animateur...


On comprend définitivement qu’il n’y a rien à attendre de la télévision le jour où l’on constate qu’elle préfèrera toujours nous montrer un spectacle minable comme l’Eurovision, quitte à lui superposer le commentaire d’un animateur ironique qui le dénigre pour rendre le tout « intéressant », plutôt que de nous proposer une véritable soirée musicale de qualité à la place. Second degré ! Nous mangerons la merde jusqu’au bout, dût-on pour cela nous la faire réchauffer ou l’agrémenter d’un peu de poivre. Cela vaut mieux que de cuisiner autre chose.




Le second degré, c’est drôle évidemment. La majeure partie de notre humour et de notre esprit est basée dessus. Le second degré, c’est drôle jusqu’à ce qu’on réalise que ça empêche quelque chose d’autre de se jouer. Le second degré, en emballant le moche pour le rendre intéressant, occupe la place du beau. Le second degré, c’est ce qui permet d’être aussi con et laid que le reste, mais sans renoncer à la distinction : on vit comme un con, on fait les choses que fait un con, on baigne dans la même connerie, mais on le fait exprès, on n’est pas con ! L’Eurovision c’est nul, mais on le sait, c’est ça qui est drôle ! lol !


Le second degré, c’est drôle jusqu’à ce qu’on réalise que cela permet de refourguer des choses que personne ne voudrait autrement. En ricanant au second degré, vous faites perdurer le moche. Il y a des émissions « débiles » qui ne vivent que de l’audience de ceux qui les regardent « pour rire », au second degré. Et des professionnels qui n’auraient plus de raison d’être si la merde télévisuelle et médiatique dont ils ricanent avec vous cessait d’exister. Ce dont ils prétendent se démarquer est en réalité leur nourriture la plus nécessaire.


1er degré / 2nd degré



En ricanant au second degré, non seulement vous ne faites pas changer les choses, mais vous y participez. Au-delà d’un certain stade, le second degré rejoint le premier : produire un jeu volontairement idiot avec un animateur « décalé » n’est pas moins produire de la débilité, se délecter d’un film « trop débile ! » ajoute à la débilité, et celui qui rit à cet humour « trop lourd ! » est un lourd, celui qui jubile de cette veste « trop kitsch ! » est un kitsch, et celui qui met 1 centime de sa poche pour acquérir cet truc « trop ringard » qui le fait kiffer, augmente de fait la quantité de ringardise dans le monde.



Ces choses que vous trouvez moches, laissez-les donc mourir !

17 mai 2011

35 heures pour une ruine


Dickens écrit Hard times (en français, Temps difficiles) en 1854. Dans ce passage, il ironise sur certain discours patronal présentant les contraintes de la loi comme menant immanquablement à leur ruine. On se croirait en 2011...
Ici, ceux qu’il nomme les « citoyens de Coketown », ce sont bien sûr les possédants, ceux qui détiennent les usines.

« Assurément, il n’y avait jamais eu de porcelaine aussi fragile que celle dont étaient faits les manufacturiers de Coketown. Les eussiez-vous maniés le plus légèrement qu’il est possible, ils seraient encore tombés en morceaux avec tant de facilité que vous auriez pu les soupçonner d’avoir été fêlés auparavant. Ils étaient ruinés lorsqu’on leur demandait d’envoyer les petits manœuvres à l’école, ils étaient ruinés quand on désignait des inspecteurs pour venir visiter leurs fabriques, ils étaient ruinés quand ces mêmes inspecteurs considéraient comme douteux qu’ils eussent tout à fait le droit de couper les gens en morceaux avec leurs machines, ils étaient ruinés quand on insinuait qu’ils n’avaient peut-être pas toujours besoin de faire tant de fumée. (…) Chaque fois qu’un citoyen de Coketown se croyait victime d’une injustice, c'est-à-dire chaque fois qu’on ne le laissait pas absolument libre de faire à sa guise, et qu’on voulait le tenir pour responsable des conséquences d’un quelconque de ses actes, on pouvait être sûr qu’il allait lancer sa terrible menace et affirmer qu’il « aimerait mieux flanquer ses biens dans l’Atlantique ». Cette menace avait terrifié le ministre de l’Intérieur, au point de le mettre à plusieurs reprises à deux doigts de la tombe.
Cependant les citoyens de Coketown étaient si bons patriotes, après tout, qu’ils n’avaient jamais encore flanqué leurs biens dans l’Atlantique, mais au contraire avaient eu la bonté d’en prendre grand soin. C’est pourquoi ces biens étaient là-bas dans la brume, qu’ils croissaient et se multipliaient. »

Livre indispensable.

L’empire sur soi-même, la modération et leurs derniers motifs

Nietzsche, Aurore, Livre deuxième § 109

L’empire sur soi-même, la modération et leurs derniers motifs.
– Je ne trouve pas moins de six méthodes profondément différentes pour combattre la violence d’un instinct. Premièrement, on peut se dérober aux motifs de satisfaire un instinct, affaiblir et dessécher cet instinct en s’abstenant de le satisfaire pendant des périodes de plus en plus longues. Deuxièmement, on peut se faire une loi d’un ordre sévère et régulier dans l’assouvissement de ses appétits : on les soumet ainsi à une règle, on enferme leur flux et leur reflux dans des limites stables, pour gagner les intervalles où ils ne gênent plus ; – en partant de là on pourra peut-être passer à la première méthode. Troisièmement, on peut s’abandonner, avec intention, à la satisfaction d’un instinct sauvage et effréné, jusqu’à en avoir le dégoût pour obtenir, par ce dégoût, une puissance sur l’instinct : en admettant toutefois que l’on ne fasse pas comme le cavalier qui, voulant éreinter son cheval, se casse le cou – ce qui est malheureusement la règle en de pareilles tentatives.

Quatrièmement, il existe une pratique intellectuelle qui consiste à associer à l’idée de satisfaction une pensée pénible et cela avec tant d’intensité qu’avec un peu d’habitude l’idée de satisfaction devient chaque fois pénible elle aussi. (Par exemple lorsque le chrétien s’habitue à songer pendant la jouissance sexuelle, à la présence et au ricanement du diable, ou à l’enfer éternel pour un crime par vengeance, ou bien encore au mépris qu’il encourrait aux yeux des hommes qu’il vénère le plus, s’il commettait un vol ; de même quelqu’un peut réprimer un violent désir de suicide qui lui est venu cent fois lorsqu’il songe à la désolation de ses parents et de ses amis et aux reproches qu’ils se feront, et c’est ainsi qu’il arrive à se maintenir du côté de la vie : – car dès lors ces représentations se succèdent dans son esprit comme la cause et l’effet.) Il faut encore mentionner ici la fierté de l’homme qui se révolte, comme firent par exemple Byron et Napoléon, qui ressentirent comme une offense la prépondérance d’une passion sur la tenue et la règle générale de la raison : de là provient alors l’habitude et la joie de tyranniser l’instinct et de le broyer en quelque sorte. (« Je ne veux pas être l’esclave d’un appétit quelconque », – écrivait Byron dans son journal.) Cinquièmement : on entreprend une dislocation de ses forces accumulées en se contraignant à un travail quelconque, difficile et fatigant, ou bien en se soumettant avec intention à des attraits et des plaisirs nouveaux, afin de diriger ainsi, dans des voies nouvelles, les pensées et le jeu des forces physiques. Il en est de même lorsque l’on favorise temporairement un autre instinct, en lui donnant de nombreuses occasions de se satisfaire, pour le rendre dispensateur de cette force que dominerait, dans l’autre cas, l’instinct qui importune, par sa violence, et que l’on veut réfréner. Tel autre saura peut-être aussi contenir la passion qui voudrait agir en maître, en accordant à tous les autres instincts, qu’il connaît, un encouragement et une licence momentanée, pour qu’ils dévorent la nourriture que le tyran voudrait accaparer. Et enfin, sixièmement, celui qui supporte et trouve raisonnable d’affaiblir et de déprimer toute son organisation physique et psychique parvient naturellement du même coup à affaiblir un instinct particulier trop violent : comme fait par exemple celui qui affame sa sensualité et qui détruit, il est vrai, en même temps sa vigueur et souvent aussi sa raison, à la manière de l’ascète. – Donc : éviter les occasions, implanter la règle dans l’instinct, provoquer la satiété et le dégoût de l’instinct, amener l’association d’une idée martyrisante (comme celle de la honte, des suites néfastes ou de la fierté offensée), ensuite la dislocation des forces et enfin l’affaiblissement et l’épuisement général, – ce sont là les six méthodes. Mais la volonté de combattre la violence d’un instinct, elle n’est pas en notre pouvoir, pas plus que la méthode sur laquelle on tombe et le succès que l’on peut avoir en l’appliquant. Dans tout ce procès notre intellect n’est au contraire qu’instrument aveugle d’un autre instinct qui est le rival de l’instinct dont la violence nous tourmente, que ce soit le besoin de repos, ou la crainte de la honte et d’autres suites néfastes, ou bien encore l’amour. Donc, tandis que nous croyons nous plaindre de la violence d’un instinct, c’est au fond un instinct qui se plaint d’un autre instinct ; ce qui veut dire que la perception de la souffrance que nous cause une telle violence a pour condition un autre instinct tout aussi violent, ou plus violent encore et qu’une lutte se prépare où notre intellect est forcé de prendre parti.

La flamme est l’avenir de l’homme.


On le sait d’expérience, la réalité est la mère supérieure de toutes les fictions. Quand la fiction se débride, la réalité lui rappelle bien vite qu’en matière de fantaisie comme en matière d’horreur, elle ne saurait être dépassée.
Il n’est pas d’usage ancien qu’on brûle les morts en occident. On ne sait pas le nom du premier con qui a trouvé sympa de se faire volontairement chauffer le lard à quelques centaines de degrés, mais on constate son succès. En effet, il n’est désormais plus possible d’avoir une conversation sur la mort sans qu’un plaisantin vienne affirmer qu’il voue son corps aux flammes, « parce que c’est mieux que les asticots »… Ingratitude des viandes vives ! Inconséquence des éphémères ! Dire que des générations d’Européens ont nourri, entretenu, élevé, oui, é-le-vé des milliards de générations d’asticots en leur fournissant post mortem un copieux repas chaud farci de protéines, et nous voici au seuil du troisième millénaire à rationner le bifteck à nos compagnons d’éternité ! Nous vivons l’âge du Rationnement.
Quoi qu’il en soit, il faut se rendre à l’évidence, le crématoire est désormais devenu la destination très prisée des macchabées de par chez nous, on s’y précipite ventre à terre et les osselets en bataille.

Dans le catalogue des « raisons » censées justifier le choix du chalumeau plutôt que la vénérable tombe « pierres apparentes » qui fit la joie de nos ancêtres, on trouve l’argument de l’encombrement. Habitué à faire la queue chez Carrefour, à s’embourber par milliers sur les plages d’août, à faire du bite-à-cul sur le périph matin et soir pendant une vie d’employé modèle, le Français d’aujourd’hui n’est plus qu’un mec qui s’efface, un timide qui craint d’abuser, un modèle qui condamne l’usage de tout ce qui fait « du mal à la planète ». Cette tendance navrante est renforcée depuis peu par l’assurance que les humains, vivants ou morts, sont trop nombreux sur la terre. Les humains, et surtout moi-même ! se dit le Français moyen courant au four crématoire y trouver ses vingt centimètres cubes d’éternité.
On ne dira jamais assez ce que la rage écologiste a ajouté aux peurs traditionnelles de l’être humain, et les justifications nouvelles qu’elle a apportées à sa bêtise. La planète ayant été décrétée « trop petite » pour les milliards que nous sommes, l’homme moderne (donc responsable) se doit désormais de se faire mince. Le viatique écologiste (donc responsable) prescrit dix commandements impérieux :
1 Manger peu (des légumes),
2 jeter encore moins,
3 se déplacer seulement en cas de force majeure,
4 et JAMAIS EN BAGNOLE,
5 prendre des douches sans eau,
6 trier ses déchets, voire ceux des voisins,
7 limiter son empreinte écologique,
8 renoncer à jeter ses vieilles piles à la poubelle
9 préférer le suicide (assisté) à l’acharnement
10 se faire incinérer

Ne pas prendre de place, même la sienne, est devenu l’ambition suprême.
On doit donc en prendre son parti : il est de la dernière tendance et du plus haut chic de partir en fumée dès que la mort nous en donne l’occasion. Il est alors écrit que les fours municipaux se multiplieront, résurrection inattendue des fours banaux. Comme autrefois, au village, chacun viendra y porter non plus son pâton à cuire, mais son vieux père à griller…


Le village de Redditch, affreux bled d’Angleterre, a fait parler de lui il y a quelques mois pour un projet surprenant. L’affaire semblait un canular : le conseil municipal envisageait d’utiliser la chaleur produite par le four crématoire pour chauffer la piscine municipale. D’un côté, des citoyens calcinés par les flammes ; de l’autre, des citoyens engourdis par la flemme. Mourir pour inciter les autres aux délassements aquatiques ! Hé, Cindy, tu viens te baigner, demain ? Pas folle ! j’attends que la mère Brighton ait cassé sa pipe !
L’idée était frappée au coin du bon sens écologique : on ne va quand même pas dépenser du combustible à seule fin de faire disparaître le corps d’un mort ! Faut que ça profite ! Quoi ? Vous voulez qu’on vous incinère, comme ça, tout seul ? Un feu rien que pour vos os ?! ‘Rendez pas compte de l’impact, ou quoi ? Terrible ! Une apocalypse de retombées ! Non, si vous voulez qu’on chauffe vraiment le four à fond, faut partager la chaleur avec les avaleurs de Javel. Si vous n’êtes pas content, faites-vous incinérer à froid !

On imaginait alors que le bouchon était poussé un peu loin et que tout ça finirait dans la décence, denrée britannique s’il en est. Macache ! Non seulement la mesure a été adoptée, mais le village vient d’être récompensé d’un « green award » de mes deux pour l’excellence de ses pratiques vertes ! Une récompense nationale visant à encourager la chose, à la faire essaimer et, qui sait, à la rendre bientôt obligatoire ! A ceux des lecteurs qui lisent l’anglais, je conseille cet article, où un neuneu assure même que sa vieille tante, récemment morte, aurait trouvé formidable de servir de combustible pour que les as du maillot de bains ne se les gèlent pas quand ils font trempette. Là encore, on croit à une bonne farce. Mais non, c’est réel, c’est contemporain, c’est imprimé, ça se porte en étendard.

La machine est en marche, le mouvement nous entraîne. Déjà, quand on affirme à la cantonade qu’on refuse de donner ses organes post mortem, on se voit opposer que « nos organes ne nous servent plus à rien quand on est mort ». On a beau argumenter, on ne récolte qu’incompréhension et condamnation morale. Si l’on vante les mérites d’un cimetière particulièrement bucolique, on nous oppose que les cimetières prennent de la place, argument de promoteur immobilier qui recoupe par miracle les dogmes écologistes les plus avancées. Quand on attend que la Sécu rembourse les soins d’un nonagénaire, on entend dire que la société dépense en pure perte.Et demain, en généralisant les initiatives à la Redditch, on comprendra que les individus ne doivent plus rien attendre de gratuit de la société.


L’utilitarisme le plus massif gouverne désormais la morale, guidé par la bonne conscience du Soldat du Bien qui piétine traditions, modes de vie, croyances, mythes et principes moraux de ses deux pieds plats. Les intérêts des chantres du libéralisme et ceux des écologistes progressistes se trouvent, ici encore, mêlés. Du côté libéral-les-affaires-y-a-que-ça-dans-la-vie, on se focalise sur l’utilité économique du citoyen dépenseur transformé dès l’enfance en consommateur quantifiable. Notion d’utilité d’ailleurs largement dévoyée et qui ne dépasse guère le niveau de la rentabilité de court terme. Par exemple, bien que totalement inutile au bien-être général (pour parler comme Jeremy Bentham), la fabrication de crèmes pour retendre la peau des genoux des vieilles dames rapporte gros, et à ce titre, elle prend son utilité dans notre système comme dans les esprits. Idem pour un publicitaire vantant les mérites d’un pneu discount hyper casse-gueule, d’une pâte au chocolat qui te foutra les tripes en vrac, d’une huile de palme à faire crever trente-six hyènes, d’un circuit touristique qui détruira les plus beaux paysages, les paysans et le mode de vie qui vont avec. La morale s’est simplifiée à l’extrême : tant qu’un enculé produit du pognon, il est utile.

Du côté écologie-et-modernité-nous-voilà, il s’agit de changer la société en comptant qu’elle reste hébétée devant la brutalité et l’audace des attentats qu’on lui fait. La chirurgie écolo se pratique à la hache : PAN ! interdire les voitures en centre-ville, ou interdire les voitures un peu anciennes, là, comme ça, pan ! T’as pas de solution de rechange ? Tu te démerdes ! PAN ! on interdit les ampoules à incandescence, qu’on remplace par des merdes qu’éclairent que dalle ! Tu te re-démerdes, fils ! PAN ! on t’ordonne de mourir utile et collectif en utilisant tes cendres pour payer la note de chauffage de l’aqua-splatch local ! PAN! on décrète qu'il faut construire des immeubles de cent étages en plein centre historique parce que ça prend moins d'place au sol, hé ballot! Etc. La morale reste simple: tant que ça fait du bien à la plapla, à la plapla, à la planète, RIEN ne vous sera épargné.
L’écologiste surfe sur l’urgence, il utilise ce concept comme un bélier, il en tartine toutes ses certitudes. Réduire la crémation d’un être humain à un geste qui doive servir à quelque chose d’autre, comme si brûler du combustible uniquement pour ça n’était plus envisageable, comme si le mort ne méritait même plus qu’on lui sacrifie quelques fagots. Et pourquoi ? Parce que la planète se meure. Evidemment, réduire la combustion des centrales à charbon allemandes, ou chinoises, c’est plus compliqué que faire chauffer l’eau d’une piscine à couillons avec la peau des vieux. Alors on y va : on pond l’idée la plus indécente possible, on l’habille de bonne conscience et d’esprit de responsabilité, et l'on se convainc bien fort que ça va sauver la planète, cette conne !

Post Scriptum : lisez l’amusant et désespérant « L’écologie en bas de chez moi », de Iegor Gran. Ça vous rappellera Redditch.