29 octobre 2019

Les mamans à pédés


C’est un livre qui - je vous le donne en mille - apprend aux mères à élever leurs garçons, qui par définition ont bien besoin de l’être, les rustres ! Une interview de Télérama nous en dit plus.

Aurélia Blanc, féministe de profession, en aurait eu l’idée alors qu'enceinte de son premier enfant, on lui apprit que ce serait un garçon. Fort dépourvue, elle n’en avait nullement envisagé l'éventualité. Un garçon, elle pourtant si féministe ? Que va-t-elle pouvoir lui raconter ? Qu’est-ce qu’il y connaît aux femmes, Rick Hunter ? Comment ça s’élève, ce machin ? Aurélia se met en recherche d’ouvrages spécialisés pour l’aider dans sa tâche, mais elle réalise alors une chose inouïe : en trois millénaires de littérature patriarcale, rien n’a jamais été écrit sur la manière d’élever les garçons !
« J’avais l’impression de savoir assez clairement ce que j’aurais dit à une fille, d’avoir beaucoup d’ouvrages ou d’albums jeunesse s’adressant directement aux filles sur les questions du féminisme. Mais pour les garçons, il n’y avait rien ». 
On notera ici qu’Aurélia, bien que rigoureusement contre le fait de “genrer” les jouets en décrétant par exemple que les poupées sont pour les filles et les tractopelles pour les garçons, ne voit aucun problème à “genrer” les livres : un même texte devant idéalement exister, comme les layettes, en version fille et garçon.

Bref, face à la lacune identifiée, Aurélia se lance dans l’écriture de Tu seras un homme - féministe ! - mon fils : le tout premier livre à traiter de l'éducation des mâles. L'objectif : ériger un homme sain et équilibré, débarrassé des stéréotypes polluants et des réflexes pavloviens dont il a jusqu'ici été pétri, en un mot un homme antisexiste ; un homme qui, selon Aurélia, « n’aura pas trop de comportements nourris par la masculinité toxique ambiante ».

22 octobre 2019

Brasse papillon contre militarisme turc.


Je n’avais jamais entendu parler du ministre français des sports avant l’affaire dite des enculades. Pour rappel, les enculades évoquées sont les promesses faites à la ligue de football professionnel par des supporters probablement en conflit idéologique avec elle. Idéologique, le mot est peut-être fort : en proclamant « la Ligue, on t’encule », les supporters en question n’avaient dévoilé ni le fond de leur pensée, ni le cheminement de leurs réflexions, et s’étaient contenté d’en formuler les conclusions. Admirable par sa concision, la formule laisse tout de même planer un doute quant à son réalisme : comment, en effet, enculer une Ligue de football, entité morale qui n’a, bien sûr, pas de corps, et qui n’est que représentée par de graves sexagénaires (dissuadant, par leur aspect et par leur mise, tout contact intime) ?

16 octobre 2019

Signaux faibles

I used to think my Republic was a tragedy.
Now I realize it’s a comedy!
” 

De Mohammed Merah, indic’ de la DGSE, à Mickaël Harpon, lame de la police, voilà 8 ans que nos Pieds Nickelés se ramassent en pleine gueule les signaux forts de l’islamisation. Kouachi, le Bataclan, Nice, Beltrame... Bam bam bam ! Ils ne les ont vu venir ni de près ni de loin, mais les voilà qui se relèvent une énième fois, époussètent leur costume et déclarent changer de stratégie : désormais, ils vont chercher les signaux faibles ! Ce sera sans doute plus facile.

Le lundi, Macron appelle à une société de la vigilance. Il invite chacun à se faire lanceur d’alerte aux premiers signes de radicalisation compatriote. Le mardi, son ministre de l’Intérieur révèle penaud que l’imam de la ville de Mickaël Harpon s’était vu décerné un titre de séjour bien qu’il était sous avis d'expulsion pour le motif qu’il s’était marié et reproduit entre temps. Le mercredi, tout le monde s’entend à trouver indigne qu’un élu déplore la présence d’un voile salafiste dans son hémicycle.

Ce n’est pas une farce, ce n’est pas le CGB : c’est la “morne et plate” réalité !

Is it just me, or is it getting crazier out there?” 

27 septembre 2019

Faire chier


Pourquoi une personne irait revendiquer le droit au burkini à la piscine quand elle a déjà le loisir d’évoluer librement en voile dans la rue, au travail, quand elle vit ses manières radicales où ça lui chante sans courroucer la police ni les citoyens, quand elle bénéficie d’horaires de piscine aménagés pour barboter à son aise, pourquoi irait-elle encore réclamer davantage alors que tout se passe déjà au mieux ?

Pour faire chier.

Et pourquoi, en réponse à ces provocations adressées entre deux attentats au couteau, vous mettez-vous à riposter ? Pourquoi délaissez-vous la nuance, les pincettes, et tirez-vous comme un âne dans le sens opposé ? Pourquoi vous faites-vous plus con que vous n’êtes et jouez-vous de l’amalgame et de l’injure, alors qu’en vérité vous cernez les enjeux plus finement que ne le feront jamais les bienpensants qui vous réprouvent ?

Simplement pour faire chier.

Comment arrive-t-on, en tant que férue féministe, à fermer les yeux sur les agressions sexuelles qui jonchent l’actualité migratoire, alors que le reste du temps on ne badine pas avec le viol, ni même avec le frôlement de fesses dans le métro ? Pourquoi laisse-t-on passer ça, quand le reste du temps on perçoit l’oppression masculine derrière le moindre mot ? Et si l’on prétend tenir là un sujet extrêmement grave, pourquoi l’accommoder ainsi à toutes les sauces, sur tous les tons, en toutes occasions surtout les plus grotesques, finissant par le rendre dérisoire ?

Parce qu’on veut surtout faire chier.

Et ne vous leurrez pas : c’est pour faire chier en retour que vous vous faites taquin sur l’égalité salariale, mitigé sur les violences fétofam, dubitatif sur la nécessité de la parité... C’est pour faire chier et seulement pour cela que vous vous emparez de ces sujets sur lesquels vous vous seriez autrement montré plus coopératif. Faire chier à même hauteur que Marlène Schiappa. Œil pour œil. Dent pour dent. Bec pour ongle. Faire chier.


14 septembre 2019

A l'arrêt du 95




J’étais resté tapi au fond de mon lit tiède jusqu’à l’extrême limite de la bienséance, mais enfin vers neuf heures il avait bien fallu briser là et partir en quête de la justification quotidienne de mon existence. J’arrivais à l’arrêt de bus déjà suant et tenaillé par la douloureuse inquiétude de l’employé qui sait qu’il encourra le légitime déplaisir de ses supérieurs, le front plissé par l’injustice absolue de devoir ainsi sacrifier cette brillante matinée à l’assommoir quotidien du travail salarié, ses abîmes de réunions interminables où ne se décide jamais rien, altitudes de power points, slides en pagaille, torture garottante des urinoirs où l’on arrive en même temps que son chef de service, ce qui suffit à vous étrangler la vessie, liquider la bite, condamné à repasser plus tard, écrans infinis des ordinateurs, jappement strident des téléphones, immense désert de surveillance des bureaux partagés, modernes et conviviaux. J’en étais donc là, le front rongé par de sourdes tenailles, me pressant nerveusement à l’arrêt du bus 95, fantomatique et encore invisible masse de ferraille, lorsque soudain mes yeux fatigués se posèrent sur toi :

10 septembre 2019

Mon nom est personne

Nouveaux-prenoms-les-plus-originaux_2 

À quel moment s’est-on mis à penser que le domaine des prénoms devait être celui de l'inventivité la plus totale ? À quel moment s’est-on persuadé que tout, absolument tout était permis en la matière ? Qu’est-ce qui a fait qu’un jour, on a cessé de choisir parmi les saints du calendrier, de prendre le nom d’un oncle ou d’un ami pour l’honorer, de piocher dans un dictionnaire d’existants, pour se mettre purement et simplement à inventer des trucs ?

Résultat : dans une classe de 30 élèves aujourd’hui, non seulement il n’y en a plus deux qui ont le même prénom, mais c'est à peine s’il s’en trouve cinq dont on peut dire que le prénom existe, qu’on le connaissait ou qu’on l’avait déjà entendu quelque part. C’est malin !

C’est progressivement que l’originalité s’est immiscée. Au départ, elle a consisté à choisir des consonances exotiques et charmantes : un petit -a par-ci, un petit -io par-là... Puis on a arrêté les chichis : c’est le prénom entier qu’on a fait venir tel quel du bout du monde jusque sous nos climats pluvieux, sans chaussettes ni manteau adaptés. Et voilà comment un petit Français peut aujourd'hui se trouver camarade d'un Curtis, sans avoir à bouger de chez lui. Curtis habite Brive-la-Gaillarde, où il est né, et s’appelle en réalité Curtis Chamfoin. Mais c’est toujours mieux que rien.

Malgré cette extension du champ des prénoms possibles, les Mattéo et les Jason ont rapidement envahi le marché. Il a fallu, pour innover, recourir à de nouvelles audaces. Cette fois on fit tomber la règle selon laquelle les noms ont une orthographe donnée. Jérémie est devenu Jérémy. Cyrille est devenu Cyril. C’est vrai quoi, l'orthographe qu’est-ce qu’on s'en fout ! A l'inverse, d’autres ont appliqué la règle grammaticale de la plus rigoriste des manières : Daphné est ainsi devenue Daphnée ! Logique, puisque c’est une fille. Si elle avait été plusieurs, les parents l'auraient appelée Daphnéent.

9 septembre 2019

La révolte des ordures


Dans un monde parfait, personne ne donnerait un micro à un ancien footballeur, personne ne ferait attention à ce qu’il dit, ce qu’il écrit ni ce qu’il pense. Mais nous ne sommes pas dans un monde parfait, nous sommes en France, en 2019 : je vais donc commenter, le plus brièvement possible, les insanités proférées par un être dépourvu de tout intérêt.

1 septembre 2019

Messe à F***



La vieille église romane aux pierres lavées par le vent gisait en ruines depuis 1956, éternellement en chantier, jamais rénovée, et depuis plus d’un demi-siècle les paroissiens se réunissaient dans une construction provisoire, cube de béton posé à la hâte en face des membres grandioses et désolés de l’église, bas « lieu de culte » trapu, nu et fonctionnel, temporaire depuis plus d’un demi-siècle. L’intérieur était aussi froid et sale et déjeté que l’extérieur ; chaises en plastique, tapis noyés par l’humidité, statues en plâtre de Jeanne d’Arc et de Sainte Thérèse de Lisieux sauvées de la vieille église, deux ou trois scènes pieuses accrochées aux murs nus et lézardés – Une fois sur dix, une fois sur vingt, qu’on la donne, la messe, à F*** : un prêtre qui fait la tournée du diocèse, arrive en retard, s’habille devant tout le monde, murmure quelques mots d’excuse, et les paroissiens qui attendent gentiment, souriant, ils ne lui en tiennent pas rigueur, ils savent que c’est dur, la route est difficile quand on ne connait pas la région. Ils espèrent de lui la vie, littéralement, la vie gratuite du don de Dieu, alors ils attendent patiemment dans leur « lieu de culte » abject et humide et infiniment triste et sale. Le prêtre ne peut pas ne pas le remarquer, c’est sans doute la pire du diocèse, la plus humble, la plus moche, cette église de F***, on dirait les catacombes – non, pas les catacombes, celles-ci étaient le sentier souterrain de la foi qui croissait, jaillissait comme une source, préparait sa subversive suffusion parfaite et épiphanique avec le monde gréco-romain. Ici à F*** les catacombes sont des tranchées à ciel ouvert, des catacombes d’indifférence éventrées comme des boyaux exposés à l’air libre, au mépris, au rien.

25 août 2019

À la bonne franquette

A la fraîche, décontracté du gland

Dans la société sympa, les façons ne doivent plus empeser les rapports entre individus : le patron tutoie, la serveuse appelle par le prénom... nous sommes tous frères. Dans la société sympa, rien ne doit plus marquer de hiérarchie, de rapport, de réserve, et pour s'en assurer, certains bons soldats veillent à forcer la décontraction quand elle est insuffisante.


Je parle ici de ces énergumènes qui parfois, abolissent les conventions de la courtoise d’entrée de jeu, de façon unilatérale, simplement parce qu’ils sont malhabiles à les employer. Vous vous adressez à lui pour la première fois et il vous interrompt derechef : « Ah s’il te plaît ! Ici on se tutoie ! ». Votre politesse était somme toute raisonnable, conventionnelle, rudimentaire, mais le con cherche à s’en défaire avec fracas.

Une autre fois, la jeune femme à qui l’on tient la porte, à qui l’on remplit le verre quand il est vide, à qui l’on porte une attention délicate quelconque, affiche en retour un rictus ou se renfrogne : la gourde juge la galanterie comme quelque chose de dépassé.

Dans tous les cas, ce sont le gougnafier ou la greluche qui chercheront à vous faire vous sentir déplacé, maniéré, emprunté... bien qu'en réalité ce soit l’inverse. C’est bien lui et non vous que la situation encombre, c'est lui qui est engoncé dans ses rituels de décontraction, lui qui tient à faire la bise plutôt qu'à serrer la pogne, lui qui insiste pour qu’on se regarde dans les yeux au moment de trinquer, lui qui tient à ce qu’on l’appelle Jérem’ plutôt que Jérémie ! Et la greluche : c’est elle qui tient à ses convenances égalitaires comme à la prunelle de ses yeux, elle qui se décontenance si celles-ci ne sont pas scrupuleusement respectées ; vos attentions la mettent mal à l’aise parce qu’elle croit qu’il faudrait y répondre, parce qu’elle croit que ces signes revêtent une signification autre que la simple application de la coutume.

23 août 2019

Waze naze



Il y a quelques années, peut-être vingt ans, un copain m’avoue qu’il a pris l’habitude de faire ses courses chez Ed l’épicier (ou chez Leader Price, je ne m’en souviens pas, c’était l’époque où ces enseignes nouvelles envahissaient la France). Je fais les courses chez Ed, qu’il me fait, et immédiatement, il complète son aveu par une précision que je ne réclamais pas : ils ont des super produits ! J’aurais été étonné qu’il avoue acheter ses fournitures dans un magasin qui ne vend que de la merde.

15 juillet 2019

Kloug ou le racisme très ordinaire


Ah, la réjouissance excessive des collègues de bureau quand le musulman de l’open-space arrive au bout de son ramadan ! C’est la fête, Champagne ! - enfin Champomy ! Bravo Mourad, tu l’as fait ! C’est super, on est content pour toi ! Les femmes gloussent, on dirait que le mec a traversé l’Atlantique à la rame, qu’il a accompli quelque chose de grand et d’une certaine manière, qu’il l’a fait un peu pour nous tous. L’extase.

Pour fêter ça, il a ramené des cornes de gazelle ; le bruit se répand, chacun laisse son ouvrage sur le métier et se précipite jusqu’au carton à pâtisseries, déjà translucide. Là, on en fait des caisses : "MmmmMMMMMh! Ah mais j’adOORE ! C’est trop BOOON !! Mais c'est quoi la recette ?
- Je peux prendre le dernier ? Attends, jette pas le carton, t’es dingue ! Laisse-moi laper le miel qui a coulé au fond, c’est ce qu’il y a de meilleur !” m’écrie-je pour donner le change, avec un grand sourire terrorisé. Terrorisé qu’on me diagnostique un enthousiasme insuffisant.

L'ordre règne sur Franceland



28 juin 2019

Chaleur coupable


Pas plus que vous et moi, la vague de chaleur n'est innocente. D'ailleurs, les spécialistes s'accordent à dire que ce n'est pas une vague, c'est un nouveau régime. Désormais, l'Europe est une terre de grandes chaleurs, son climat bientôt ne sera plus défini comme "tempéré". La canicule s'installe ici chez elle.

25 juin 2019

L'art niqué

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Notre modernité plaide volontiers coupable pour la destruction de la nature et de l’environnement. Elle en oublie de confesser un autre crime ravageur qui lui est tout autant imputable : la destruction des arts par prolifération.

Qui peut décemment se vouloir peintre ou musicien dans un monde qui produit par lui-même une quantité massive d’images et de sons chaque jour, chaque heure ? Quel esprit honnête peut juger nécessaire d’ajouter sa contribution au monceau d’ordures et de perles qui s’accumule quotidiennement et qui demain déjà sera recouvert ? Pourquoi s’essayer à une forme quand le moindre illustrateur de presse, coloriste de bande dessinée, ado sampleur de rythmes... dispose d’une technicité qui le professionnalise immédiatement ? Pourquoi envisager le marbre ou le bronze après quarante années où n’ont surnagé que la sculpture en plastique ou en caca, le graffiti, le happening à message, la facilité insolente ? Quel être sincère, enfin, arriverait à ravaler sa répugnance à descendre dans le marigot des charlatans, des arrivistes et des bons à rien portés aux nues ?

17 juin 2019

Les femmes déferlantes.



Je me souviens de ce qui déclencha l’abandon de mon téléviseur, dans les années 1990 : une explosion. Un habitant de l’immeuble contigu eut la mauvaise idée de déconner avec le robinet de gaz, et l’explosion qui s’ensuivit détruisit, en même temps que les murs du dit immeuble, tous les fils cheminant sur les façades, dont celui de la télé. Qui serait resté insensible à un signe aussi colossal ? Le surlendemain, je portai ma télé à la déchetterie. A un mec me demandant s’il pouvait « la récupérer », je répondis non. Il s’éloigna en disant « connard ». J’étais sur la bonne voie.

6 juin 2019

Tour de magie - Bonjour Tristesse

En matière d’idées, ce sont les sens qui nous gouvernent infiniment plus que la raison. Il y a les idées qu’on aime parce qu’elles viennent de gens que l’on sent plutôt bien, et celles qu’on n’aime pas parce qu’elles viennent de gens qu’on ne sent pas. Le reste n’est qu’orgueil cérébral. Vous voulez faire le test ?


En voici un : vous allez regarder la vidéo qui suit, mais sans le son s’il vous plaît. Regardez la vidéo après avoir coupé le son, durant une poignée de secondes : regardez l’écran, le type, son environnement… Prêts ?

16 mai 2019

La plongée sous-marine, une discipline bien plus qu'extrême - CGB Enquête


Sa haine n'aura pas su résister jusqu'à la fin de la campagne européenne : Madame Le Pen n'y tenant plus, elle a cédé, et effectué en compagnie d'un extrémiste suprémaciste un signe qui pourrait sembler anodin s'il ne revêtait une signification cachée :





29 avril 2019

Notre-Dame, pas la leur

LOL ;)

Notre-Dame part en fumée. Je la regarde se consumer depuis le haut d’un toit, aussi impuissant que le reste de la ville. La flèche s’est déjà abattue. L’édifice crache des flammes de six à sept mètres. Impossible d’y croire : je regarde cela comme si c’était l’incendie d’un dépôt ordinaire. Impossible d’y croire : ce serait trop catastrophique.

Notre-Dame en flammes. Au départ j’ai cru que c’était grave. Et puis très vite, on m'a rassuré : le feu était encore en cours que le responsable du pays (un jeune de 40 ans) demandait de ne pas s’en faire. « Pleure pas, je t’en rachèterai une autre. Une encore plus belle ! ».

Aucun temps de sidération. Pas une minute d'effroi face au désastre. Pas le moindre scrupule à voir ainsi niquée notre Dame de 800 années passées. Pas penaud pour un sou d’avoir laissé évaporer ce que cinquante générations précédentes avaient su maintenir. Nous avions un flambeau à transmettre, nous l’avons jeté dans les combles. On va la reconstruire. Un concours d’architectes international. On va bien se marrer ! Comment exprimer mieux une incompréhension complète de ce que l’on vient de perdre ? Une imperméabilité totale à ce à quoi l’on est en train de rendre prétendument hommage ? La toiture de Notre-Dame de Paris a disparu de ce monde, et avec elle un millénaire de prières humaines et d’espérances qu’elle abritait. Et le Président, grand prince, sort le chéquier tel un plouc se proposant de rembourser la Vénus de Milo qu’il a renversé sur le carrelage par mégarde.

25 avril 2019

Robinson en gilet

Vous pouvez embrasser la mariée.


Tout fini en mascarade. Les chaises à porteurs sont devenues de trottinettes électriques, les mâtins de Naples mutent en chien-nus de Chine, et les curés troquent la Croisade contre le compassionnel à la sauce pleurniche.

Les gilets jaunes n’échappent pas au processus. Reconnaissons-le, ils sont partis de haut. Le mouvement a surpris ses organisateurs. A la base, ça devait être une blague potache le long de quelques péages d’autoroute, le temps de manger une chipo en descendant une timballe de gros rouge qui tâche.

17 avril 2019

Notre-Dame qui es aux cieux


Le lumière tout au bout du tunnel

Notre-Dame qui es aux cieux.
Que ton nom soit sanctifié.

#15Avril2019 : Paris brûle-t-elle ?
#16Avril2019 : oui, Notre-Dame de Paris est en cendres.

Les souvenirs font comme des poussières qui retournent à la poussière. D’étoiles. Stardust to dust.

Il y a 4 mois encore. J’y étais.
Épris de malaise. Pris dans la nasse de la masse.
Cerné par les visiteurs, les employés de sécurité, les touristes.
Leur tourbillon hallucinant.

11 avril 2019

Deux heures moins le quart avant Julia-Christ


Nous vivons, en dépit des apparences, en des temps très chrétiens. Emmanuel Todd avait parlé de “catholiques zombies” pour dénommer la France Charlie des allumeurs de cierges, au moment des attentats de 2015. Antoine Leiris avait été leur Paul de Tarse, en quelque sorte : dès le lendemain du massacre du Bataclan dans lequel il avait perdu sa femme, il s’était emparé de son bâton de pèlerin sans se décourager, pour porter la Bonne parole : “Vous n’aurez pas ma haine”. Depuis, les cas miraculeux se sont multipliés comme des petits pains. Pas un attentat islamiste sans qu’un survivant ou un proche accède à la Paix intérieure express devant les micros de BFM. Le Pardon.

Dernière incarnation christique en date : “Julia”, transsexuel parisien pris à partie en plein jour, place de la République, par la foule algérienne qui protestait contre Bouteflika. Dérangé par son apparence, un attroupement lui bloque le passage, on lui jette de la bière, on le gifle, un homme exhibe son sexe devant lui en lui demandant une gâterie... Le transsexuel essaie de rebrousser chemin, on commence à le frapper, une brigade de la RATP a tout juste le temps de l'exfiltrer pour éviter le lynchage...

Le lendemain, "Julia” témoigne sur toutes les chaînes. Non pour accabler ses agresseurs et condamner l'homophobie, mais pour transmettre un message de tolérance : “Je suis comme je suis, et ces personnes également”. Cela n’a rien à voir avec leurs drapeaux, rien à voir avec leur religion ou leur culture, rien à voir avec les agresseurs, bien au contraire ! Ce ne sont pas des homophobes, ce sont simplement “des personnes ignorantes”. Pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. Vous, depuis votre canapé, étiez déjà parti en besogne à la vue des images de la vidéo, mais Julia, elle, parvient à surmonter, en plus du traumatisme de l'agression, la facilité des évidences. Elle pardonne. Mieux : elle perçoit la fraternité de sa condition avec celle des persécuteurs. Il n'y a qu'une chose qu’elle “n’accepte pas”, ce sont les messages de soutien de personnes nauséabondes qu’elle a reçus.

7 avril 2019

Anglophobie de bon aloi

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Si les Français parlent si mal anglais, ce n’est pas pour des raisons de grammaire ou de phonétique insurmontables, c’est qu’ils y mettent toute leur mauvaise volonté : celle du vaincu orgueilleux regrettant que sa langue se soit fait damer le pion.

C’est malheureusement un scrupule qui se perd : le mental des jeunes générations est bientôt entièrement colonisé, et d’ici vingt ans nous ferons tous d’excellents petits anglophones, plus vrais que nature. J’en développe une affection renforcée pour l’attitude obtuse de mon oncle, un ingénieur à la retraite, vieille école, qui mène à son échelle une lutte quotidienne et pittoresque contre l’anglais. 

Je le vois encore me montrer avec une satisfaction enfantine le trait au marqueur qu’il avait fait sur ses nouvelles chaussures, pour cacher une minuscule étiquette de tissu de quelques millimètres aux couleurs de l’Union Jack. C'était un modèle Reebok très sobre en cuir noir dont ce drapeau réduit au minimum était la seule expression de la marque. Mais mon oncle ignorait ce que c'était que "Reebok”. Il avait choisi ces chaussures par hasard, pour leur confort et leur discrétion, et ne voyait pas ce que l'étendard britannique venait faire là ni pourquoi il devait promouvoir la perfide Albion à chaque fois qu’il marcherait dans la rue. Très content de son coup, cet homme de 65 ou 70 ans, habituellement sérieux et raisonnable, croyait saboter ainsi une intrusion ennemie. 

29 mars 2019

Les détourneurs d'objets


En ces temps de bouleversement des mœurs et des coutumes, en cette époque d’incertitudes où tout ce qu’on croyait solide s’effrite, où tout repère est suspect de péremption, où les grandes puissances elles-mêmes sont contraintes de jouer aux chaises musicales, il est réconfortant de penser rien ne pourra jamais faire disparaître ni les imbéciles, ni le mauvais goût. On a les amarres qu’on peut. Cette semaine, je vous propose donc de détester une catégorie d’imbéciles qui se distinguent par leur mauvais goût : les détourneurs d’objets.

28 mars 2019

Ma vie est une sitcom et le réalisateur est bourré.



Je veux revoir ma Normandie.
 
Lors d’une marche en Mazurie, j’étais tombé dans des marécages. Couvert de boue, je courus me réfugier dans une ferme voisine. Un grand type maigre d’environ 70 ans m’avait ouvert. Avec le tact du touriste, je lui demande : « speak english ? ». Ce à quoi il répondit lapidairement : « Nein, aber ich spreche Deutsch ». J’étais tombé sur le dernier des Prussiens, sur un de ces hommes sobre en humour et amateur de viande fumé, survivant des soudards russes venus venger les villages en flammes de Biélorussie. Il m’ouvrit sa porte et me permit de prendre une douche, me sauvant la vie au passage en évitant à quelques tiques bien grasses de se sédentariser sur mon scrotum.

A mon retour dans le monde civilisé, celui des cafés Starbucks et des manifestations véganes, j’ai pris l’habitude d’écrire une fois par an à ce fermier, pour Noël. Me voilà donc au bureau de Poste le plus proche pour faire affranchir mon envoi. Je demande de jolis timbres, histoire d'éviter la Marianne-FEMEN. La guichetière cherche rapidement dans son classeur, où se trouvent des espèces de bouses, genre peintures d'art contemporain sorties de l'atelier « main dans la gouache » de l'école maternelle Léon Blum. 

Alors que les pages défilent, je tilte sur une image : « Attendez, attendez, c'est quoi ça ? Un timbre Normandie-Niémen?! ». Effectivement, j'ai eu l’œil vif : un très beau timbre en hommage aux aviateurs français qui ont combattu sur le front de l'Est, dans les rangs de l'Armée rouge. La dame m'explique : « Ah oui, celui-là ? Je ne vous l'ai pas proposé, les gens n'en veulent pas, c'est sur la guerre, ça ne plaît pas ». Evidemment, je me dépêche d'acheter ces timbres et d'expédier la lettre. En rentrant chez moi, je repense à la réponse de la postière. 

Alors, on en est là. La guerre c'est mal. Peu importe qui, quand, comment, pourquoi. C'est le mal, ya pas à chercher. Les armes, c'est mal. Ca tue. C'est la seule réflexion que se font mes contemporains à ce sujet. Pour eux, le monde ne devrait être qu'une grande ronde de l'amitié où « Imagine » de John Lennon passerait en boucle. 

La civilisation, les libertés, l'abondance paisible de notre pays sont les fruits du hasard, et non des efforts, de la sueur et du sang de ceux qui nous ont précédés. C'est très curieux, vraiment. Que nous en arrivions à ignorer et mépriser notre passé de cette façon. 

Mes contemporains ne semblent plus capables de conceptualiser quoi que ce soit qui ne leur soit pas arrivé personnellement il y a moins de 48 heures. Les gens sans histoires sont devenus des gens sans Histoire. Ou bien ils se contentent de poncifs du genre : le soleil ne se levait plus pendant l'Occupation, et il pleuvait tout le temps au Moyen-Age. Bon sang, quelle époque horrible.
Et c'est là que je pose la vraie question : était-ce une bonne idée d'envoyer une lettre à un Prussien avec un timbre Normandie-Niémen ?

« Le véritable exil n'est pas d'être arraché de son pays ; c'est d'y vivre et de n'y plus rien trouver de ce qui le faisait aimer ». Edgar Quinet.

Fermiers prussiens partant en pique-nique.

27 mars 2019

Journal d’un pèlerin de campagne.




Evangélisation dans ta face.
                                                 
Pour apaiser sa conscience en ces temps troublés, l'homme moderne a recours au yoga, aux chakras et à la cuisine sans gluten. Bref, au New-Age. Je lui recommande toutefois une expérience Old-Age : le pèlerinage. Et s'il fait le pari de partir sans argent, alors là, il est carrément dans le Medieval-Age, ça donne des points bonus côté énergie positive.

Figurez-vous que je me trouvais précisément dans cette situation de pèlerin-mendiant, par une chaude journée de septembre, aux alentours de Nevers. Ecrasé par la chaleur, je m’étais assis à l’ombre, sur un perron dans un petit village désert. Au bout d’un moment, un vieux était sorti de sa maison pour me proposer une citronnade et on avait taillé le bout de gras. J’avais prévu de m’arrêter dans une petite ville, à 15km de là, et je lui demande s’il y a un curé là-bas. « Ouais, tu vas voir, c’est un Noir ! Un mec super, il va t’inviter à boire un coup ! ». Je m’étonnais de cet enthousiasme, les séries de France 2 m’ayant appris que les Français ruraux sont des racistes invétérés. Mais je reprenais ma route ragaillardi par la perspective d’un curé accueillant à l’arrivée.

26 mars 2019

L'art de la dénonciation



Connaissez-vous le nouveau concept d’une émission de télé à venir bientôt en France, appelée pour l'instant Allo Police (concept suédois, déjà vendu dans quinze pays, dont les USA) en attendant un nom définitif ? Simple : vous avez sûrement entendu un voisin, quelqu’un du quartier, un habitué du bar d’en face tenir des propos scandaleux ou, pire, se conduire de façon inacceptable. Ça nous arrive à tous et, hélas, nous sommes souvent démunis devant la chose. Pas de panique désormais puisque la télé nous propose de faire d’une pierre deux coups en dénonçant l’individu à la police, et en gagnant un petit quelque chose. Oh là, pas la vraie police, non, on n’est pas des monstres, la police supplétive mise en place par la chaîne elle-même, qui ne possède pas réellement les pouvoirs d’une authentique police mais qui pourra, par l’éclairage public qu’elle braquera sur les « prévenus », orienter le travail de sécurisation de l’espace public que la police réelle n’a pas toujours les moyens d’assurer.

21 mars 2019

Emile Brami prend Céline à rebours



Une interview exclusive du CulturalGangBang !

Les céliniens forment une race à part dans le monde littéraire. Leur originalité ne tient pas à leur monomanie, qui est commune à tous ceux qu'anime une passion forcenée pour un écrivain, mais au fait qu'ils doivent sans cesse justifier leur amour. C'est que le père Céline n’a pas fait les choses à moitié pour se mettre le monde à dos. Ses livres hurlent pour lui, et parfois contre lui. La seconde guerre mondiale étant devenue la boussole de notre époque, la faute originelle à quoi tout se rapporte, il est assez logique qu’un écrivain s’y étant à ce point fourvoyé nous apparaisse comme une sorte de monstre. C’est cet amour du monstre que les céliniens doivent justifier, et quand ce n’est pas de l’amour, c’est au moins leur admiration pour l’œuvre littéraire du monstre. Car si plus personne ne nie la révolution stylistique introduite dans la langue par Louis-Ferdinand Céline, il demeure beaucoup de fâcheux pour qui cette révolution est annulée par sa conduite morale. Ne pouvant concevoir qu’on persiste à admirer l’œuvre, ils passent donc, en permanence, les céliniens à la Question.

20 mars 2019

Pentatoniques mentales

jim-hall-bd 

En jazz, en blues, et dans toutes ces musiques ouvertes à l’improvisation, le musicien s’appuie en réalité sur des “pattern” musicaux, des échelles harmoniques qui lui permettent de retomber toujours plus ou moins sur ses pattes. Tandis que l’auditeur novice entend un solo endiablé et incontrôlable dont l’enchaînement impeccable semble tenir du miracle, le musicien lui, joue en réalité à l'intérieur d'un éventail de possibilités réduit, plus balisé qu’il n’y paraît : au sein d’un spectre de notes ou d’accords dont il sait l’harmonie garantie. La gamme pentatonique est l’un de ces systèmes : elle compte cinq hauteurs de son différentes qui fonctionnent entre elles et “sonnent juste” quel que soit l’ordre dans lequel elles sont jouées.