23 novembre 2008

Le chemin des dames


Ségolène, Martine, le duel au sommet. Le duel de trop pour le PS ? C’est l’impression donnée par les glossateurs exotériques de la médiacratie. Un vrai règlement de comptes de Noël. Vous savez, un peu comme lorsque le ton monte à la tablée familiale, réunie là pour évaluer l’affection que chacun se porte à l’aune de produits manufacturés par les bons soins de petites mains de dragons damnés, et que tout à coup, l’événement se crée par le vol d’une coquille d’huître qui vous arrive en pleine gueule… L’élection de la première secrétaire du PS : un épisode de plus du véritable soap opéra, de la totale sitcom, qui nous est présentée chaque soir à 20 h. La réalité réduite à l’état de fiction, ce qui ne veut pas dire qu’elle n’ait pas de conséquences réelles. Le « vrai moment du faux » de Debord… A kind of French Tabloïd…

Goebbels disait : « Nous ne parlons pas pour dire quelque chose mais pour obtenir un certain effet. » Oui, voilà bien une affreuse référence. Mais ne vivons-nous pas encore à l’heure nazie grâce à cette fabuleuse invention qu’est l’heure d’hiver, officiellement entrée en vigueur en France sous le régime vichyste, la « véritable époque de l’amitié franco-allemande » comme ironisait le père situ.

Quel est l’effet à obtenir de nos jours ? Christopher Lasch dit dans son livre Le seul et vrai paradis, une histoire de l’idéologie du progrès et de ses critiques : « Les néo conservateurs perçoivent un lien entre les drogues et la télévision, mais ne saisissent pas la nature de cette connexion, pas plus qu’ils ne saisissent ce qui importe dans les actualités : le fait qu’elles représentent une autre forme de publicité, pas une propagande libérale. La propagande, dans l’acception courante du terme, joue un rôle de moins en moins important dans une société consumériste, où toute déclaration est accueillie avec suspicion par la population. Les médias de masse contribuent d’eux-mêmes au scepticisme prédominant ; l’un de leurs principaux effets est de saper à la base l’héroïsme et la direction charismatique, de tout réduire aux mêmes dimensions. L’effet des médias ne consiste pas à provoquer la croyance, mais à maintenir le dispositif de dépendance. Il est vrai que la dépendance à la drogue est l’un des éléments qui minent « les valeurs traditionnelles », mais le besoin de drogues – c’est-à-dire le besoin de marchandises qui soulagent l’ennui, et satisfont le désir socialement stimulé de nouveauté et d’excitation – découle de la nature précise d’une économie consumériste. »

Brillante démonstration. Mais ne sommes-nous pas tous conditionnés à croire que l’accumulation de marchandises nous apaisera de la terrible angoisse qui nous étreint à chaque instant, angoisse qui est la résultante implacable de notre condition de consommateur / cible, soit les jouets d’une authentique propagande.


Actualisation de la notion de citoyen dans le 93 : pour les emplois, autodafez !


Le père de la propagande nazie n’est pas contredit par l’assertion de Lasch. Bien au contraire. Et savoir si l’anéantissement de tout recul critique n’est pas l’objectif premier, mais une étape de la réalisation de celui-ci n’est-il pas juste un débat par trop technique ? Les deux allant de paire à mon sens, se recoupant de manière multiple, répondre à cette question me semble une perte de temps et d’énergie.


Préférez désormais les trottoirs pour vos graffitis


Identifier l’infantilisation, la régression des masses en cours dans notre médiacratie (les questions qui nous préoccupent tous actuellement ne sont-elles pas : qui a engrossé Rachida Dati, combien coûte sa bague, le mariage Sarkozy Bruni est-il du pur marketing, DSK 47 tire-t-il plus vite que son ombre, la France est-elle prête pour un Président noir, qui a chipé sa voix à Bayrou lors du vote sur la loi de la retraite à 70 ans ?), n’est-ce pas un préalable obligé à une prise de conscience pouvant potentiellement découler sur une possible résistance, puis sur la capacité à opérer une révolution adulte, c’est-à-dire une révolution qui intégrerait et transcenderait l’ancien, en tout cas, l’avant post-modernité ?


Sous les pavés, le bac à sable


« Qui sera la prochaine reine du bac à sable ? », demande l’ami CGBien Clarence Boddicker ? Effectivement : telle est la question. Et la réponse au bénéfice d’inventaire de l’héritage de mai 68 est bien : sous les pavés, le bac à sable.
Nous ne roulons pas tous en 4X4, mais nous avons tous au moins un seau et une pelle en stock.

PS : un petit PS sur un billet sur les élections du prochain cornac socialo, qui en vérité n’en était pas un, s’impose. Mais un PS concernant l’ami Bayrou. Après tout, n’était-il pas au cœur des débats aubrysto-royalistes ? François s’est posé en victime d’une machination politique, façon j’ai trop regardé de films d’espionnage au lieu de faire profil bas. Car pourquoi n’était-il pas à l’Assemblée pour s’opposer à un tel projet de loi, constituant, je le cite, « une véritable régression sociale » ? Il n’y a pas qu’au PS que le « code d’honneur » n’ait plus cours…

5 commentaires:

  1. Je n'aime Bayrou mais le fait que Tapie l'exècre me le rend sympathique (Nanard a récemment déclaré qu'il reviendrait en politique seulement en cas de danger présidentiel bayrouiste).


    Sur le politique, je citerai le même Lasch dans le même bouquin: "Ainsi Georges Sorel, qui reconnaissait une dette intellectuelle à l'égard de James, concevait le syndicalisme non seulement comme l'équivalent moral d'une forme première de propriété mais comme la seule forme d'action susceptible de soutenir une conception héroique de la vie."

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  2. Avec un candidat métissé, les socialistes n'auraient pas eu tous ces problèmes électoraux. Putain de PS ! Incapable d'être moderne ! :)

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  3. Et pourtant, on a deux femmes au troisième tour ! comme quoi le matriarcat est archaïque...

    Sorel, le grand mythe du grand soir. Mais qui sont les héros du syndicalisme de nos jours ?

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  4. Bernard Thibault, François Chérèque, Jean-Claude Mailly et Jacques Voisin :-))

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  5. Très bon texte.
    Il y a du style ou je ne m'y connais pas.

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