8 juillet 2013

Songe antisémite d'une nuit d'été


Texte offert vendu pour un prix modique sur Kontre Kulture

Le dimanche soir ne devrait pas exister. On s'emmerde, on traîne sur le net en attendant le sommeil et forcément on fait de mauvaises rencontres. Un vieil article sur les excuses de la SNCF pour récupérer le marché californien, un billet de Yann Moix, le bloc-notes de BHL sur le site du Point et par association d'idées me voilà à mater les dernières vidéos de Dieudo et de Soral sur le site de E&R. Un programme épais, donnant la même impression que de manger lourd avant d'aller se coucher. Un programme qui forcément se paie.

Une fois la lumière éteinte, plongé dans un sommeil vicieux, je me retrouve téléporté aux abords d'une gare empruntant habilement des éléments de celles de Perpignan, Montpellier et de la station de métro Châtelet – Les Halles. Après avoir suivi un passage souterrain, je remonte au quai et à l'air libre en grimpant un vieil escalier de béton. C'est là que la danse macabre débute.
Je suis littéralement happé par une cohorte de damnés habillés de vieux pardessus râpés des années 40. Je suis prisonnier d'un documentaire d'Arte. Leurs hardes, leurs visages émaciés au regard vide tiennent plus des cortèges de lépreux du Moyen-Age ou des hordes de zombies de Walking Dead. Ils râlent, pleurent et gémissent en s'accrochant à moi, enfouissant leurs bouches baveuses, leurs nez morveux dans mon cou. Ils se retroussent les manches pour me montrer leurs bras maigres et blancs et les numéros définitivement imprimés à même la chair. Ces numéros attestant de leur séjour dans les camps.

A mon tour je fonds en larmes, porteur du poids de toute la souffrance du monde, je les prends dans mes bras, baigne les leurs de mes larmes en essayant d'effacer les infâmes tatouages. Je partage leur douleur, essaie de les réconforter, leur disant mon incompréhension devant le sort qui leur est fait. Mais rien ne peut les apaiser. A mon tour les vêtements en lambeaux, je me dégage de la mêlée et aperçois un autre groupe sur le quai d'en face. Ils sont jeunes et bien portants, garçons et filles habillés à la dernière mode, ils sont juifs. Ils observent la scène, goguenards et amusés, assis sur des bancs. Ils ont l'air de jouir du spectacle, manifestement c'est de lui qu'ils tirent leur statut privilégié.
Je suis maintenant en face d'eux, je reconnais une jeune fille qui joue avec les filles du groupe. C'est une amie d'enfance, je sais qu'elle n'est pas juive. Je me campe devant elle et l'agonie d'insultes. Je la traite de Yann Moix au féminin avant de me mettre à insulter les autres membres du groupe. Ils rient.

Ensuite le rêve se brouille mais je me souviens de la dernière image avant de me réveiller. C'est moi au bout du quai, l'endroit est désert. Je suis devant un bâtiment rectangulaire à l'ossature de roche et de béton (c'est en fait l'exacte réplique d'un bunker allemand sur les rochers de la plage de mon enfance). Son fronton est orné d'une inscription en lettres majuscules gothiques « DOUCHES ». Ses vieilles grilles rouillées sont entrouvertes mais l'intérieur m'est masqué par un lourd rideau en caoutchouc noir. Je sens que là est la clé de mon rêve. Je m'approche pour écarter le rideau mais déjà la réalité me rappelle. Je ne saurais pas quel mystère se trouve derrière l'épais rideau de la salle des douches. Cela vaut peut-être mieux car avant de quitter définitivement le rêve, ce sont des bruits de jeux d'eau et des rires en cascade que j'entends derrière lui.
Je crois qu'il est vraiment temps d'arrêter internet et de reprendre la drogue.

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