9 septembre 2011

Et le Prix Goncourt 2011 est attribué à :


Sans surprise, Emmanuel Carrère pour sa biographie d’Édouard Limonov. Pour tout un tas de raisons n'ayant rien à voir avec la qualité ou médiocrité du livre.
Avec une vie comme celle de Limonov, difficile de faire un livre ennuyeux et on vous rassure, Emmanuel Carrère ne réussi pas ce tour de force. On peut toutefois lui reprocher, alors qu'il est censé dresser un portrait en creux des bouleversements connus par la société russe au cours des 40 dernières années, à travers la bio d'un homme fou, romanesque et contradictoire comme on aime à imaginer les russes, de réussir à finalement beaucoup parler de lui-même. Ainsi que l'impression d'assister à un adoubement bobo d'Eduard Veniaminovich Savenko dit Édouard Limonov et de ses éclats fascisants en souvenir du grand frisson qu'ont pu connaitre  à son contact, les rejetons de la grande bourgeoisie lettrée parisienne dans les années 80.
Toutefois ce travers ne suffit pas à gommer les indéniables qualités de l'écrivain, de son sujet et de son livre que ne manqueront pas de  lui trouver les têtes pensantes de l'industrie du livre. Savant mélange qui laisse augurer de grands espoirs de récompenses. Des qualités qui se résument avant tout à :

La personnalité de l'écrivain :
-Emmanuel Carrère est un ancien journaliste de Télérama
-Il est marié à une journaliste
-Il est le frère d'une journaliste de télé
-Il est le fils bien né d'Hélène Carrère d'Encausse, soviétologue reconnue, Grand Officier de la Légion d'Honneur (entre autres distinctions), Secrétaire perpétuel de l'Académie Française, voisine et fréquentant les mêmes cercles que ceux des jurés des différents prix.
-Il est multicartes, écrivain, scénariste, réalisateur, Bar Mitsva, communion, anniversaire
-Il a déjà eu différents hochets dont le Femina
-Il passe superbement bien à la tv
-Il a déjà un cheptel de lectrices conséquent, lectrice qui sont les plus grandes consommatrices de produits culturels

Le sujet du livre
-Limonov a tout d'un aventurier, ce qui ne manquera pas d'impressionner un jury pour lequel l'extraction de Saint-Germain ou la prise du métro est déjà toute une aventure
-Limonov est aussi un mondain
-Il a été la coqueluche des soirées de l’intelligentsia parisienne dans les années 80-90, cette même intelligentsia qui distribue les hochets
-Il possède des amitiés qui vont de l'extrême-gauche à l'extrême-droite (de l'Humanité en passant par les anciens amis d'Edern-Hallier jusqu'à Patrick Gofman et Radio-Courtoisie)
-C'est un fervent adversaire de Vladimir Poutine, qui lui vaut pas mal de passages en prison et lui assure la distinction de dissident
-De Paris, il parait inoffensif, cabochard et romantique et sa condition de chef de file Naz-bol ne fait qu'ajouter à son nez rouge et à son costume de personnage de roman qui permet d'alimenter les conversations pendant les cocktails
-N'oublions pas l'incroyable fascination que continue d'exercer la Russie sur les membres de la république des lettres françaises.

Tous les ingrédients d'un succès annoncé, un livre écrit par un membre du sérail, journalistique, culturel et littéraire, une maison d'édition reconnue, un livre dont on parlait dès avant sa sortie, l'assurance d'une couverture média maximale et élogieuse, passages TV (quoique je sais pas si il reste des émissions littéraires à la TV), passages radio, une chronique, un portrait, une interview dans chaque magazine littéraire et dans les pages culture de tous les newsmags et cela quelle que soit l'orientation politique du support. Un joli rouleau-compresseur déguisé en biographie d'un personnage présenté comme sulfureux. Une rentrée littéraire dépourvue de poids-lourds et Joseph MAce-Scaron a été retenu à la photocopieuse. Ce serait un comble si le Limonov d'Emmanuel Carrère n'accrochait pas la liste des éligibles au Goncourt, du Renaudot ou du Femina. L'Interallié serait considéré comme une maigre récompense et le Goncourt des Lycéens, prix plus moraliste que romanesque, semble assuré à Morgan-Sportès dont le livre sur Fofana et sa bande de  barbares parait taillé spécifiquement pour ce prix.
Sur ce coup, l'endogamique monde des lettres français ne devrait pas trop nous décevoir. Qu'on nous épargne le simulacre du vote et qu'on lui refile son chèque de 10 euros.

PS : pour ceux qui s'intéresseraient aux écrits de Limonov, je précise qu'une bonne partie de sa production en Français comme en Russe est téléchargeable sur sa page wiki.

6 commentaires:

  1. Gofman ne "supporte" plus Limonov depuis des années (au moins 5 ou 6) et de plus il est viré de Courtoisie depuis la même époque soit depuis la mort de Serge de Beketch.
    Mais il est assez grand et assez fort pour se défendre lui-même !
    A part ce détail tout a fait d'accord avec le reste du billet.

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  2. Yep, je savais que Limonov n'est plus vraiment dans les petits papiers de Gofman depuis l'époque du comité de soutien. Une histoire de sous et de non-reconnaissance il me semble. J'ai cité Gofman pour montrer l'étendue du panel de soutiens que peut connaitre ou avoir connu Limonv sur le plus vaste éventail politique possible.
    Par contre, c'est vrai que ça date de plus loin que dans mon souvenir cette histoire de comité de soutien. Il me semblait que c'était à peu près concomitant à la mort de Serge de Beketch.

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  3. Etre "opposant" au nazi Poutine qui fait la guerre aux gentils musulmans chéchénes (voir Glucksmerde entre autres étrons...) vaut badge de GENTIL au pays de Voltaire et de Pétain. Sur ARTE y'avait même eu un documentaire qui présentait les NazBol de manière positive et sympathique - alors qu'en France, ce genre de groupuscule est taxé de nazisme, d'antisémitisme, de fachisme, d'esstrême drouatte, rouge-brun révisionniste violeur de bébés. C'est beau, la démocratie libérale quand même.

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  4. Douguine t'est trop jaloux comme mec. Qu'est-ce que t'as besoin de te taper ARTE ? Poutine te suffit pas ? Et puis d'abord ARTE c'est aussi la France et c'est même ce qui se fait de plus libéral dans ce pays. Alors si tu veux te la péter plus naze que le bol, laisse lui au moins la gamelle à Limonov.

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  5. Ah mais ce bon Douguine a parfaitement raison, d'ailleurs Carrère explique plus ou moins que c'est parce qu'en tant qu'opposant à Poutine, Limonov était bien vu par Sainte Anna Politkovskaïa et qu'il était présent à son enterrement qu'il a eu droit à sa bio et de ne plus être un sale enculé fasciste mais un personnage multiple dans les tons gris.

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  6. Entre un Goncourt en France et le rôle de conseiller du prince, y a plus que l'épaisseur d'un bouquin. C'est un peu vouloir le beurre et l'argent de beurre que de se plaindre de ce petit succès littéraire. Nominé au Goncourt c'est pas la Sibérie, mais c'est pas loin.

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