27 septembre 2011

Sénat babord qu'on gueule, qu'on gueule

Alors vous aussi vous le sentez cet incroyable vent de liberté qui souffle sur notre pays depuis que la gauche a réussi à s'emparer du sénat ?
Il faut bien l'avouer, cette victoire de la gauche aux élections sénatoriales n'était que simple formalité. Une formalité annoncée et analysée il y a déjà un an dans cet article d'Antoine Vieilliard, Président du Mouvement Démocrate de Haute Savoie. Une formalité certes mais une formalité historique qui voit la gauche prendre la majorité de cette assemblée pour la première fois depuis l'instauration de la Vème République. Une chambre où règne l'immobilisme, ennemie de l'assemblée nationale et qui s' identifie depuis toujours par un conservatisme au sens le plus négatif du terme. Constituée de barons et d’apparatchiks à la française, le sénat se caractérisée en plus par un taux d’absentéisme parmi les plus hauts des instances politiques de notre pays. Mais la place y est confortable, la soupe y est bonne et les émoluments y ont été relevé en catimini au début de l'été. Ça aide à mettre un temps de coté ses grands idéaux d'une démocratie pleine et entière.
Si nous étions mauvaise langue, nous pourrions ajouter que cette victoire assurée par des grands électeurs peu connus pour leur progressisme est une nouvelle preuve qu'aujourd'hui le conformisme s'incarne bien dans les tenants de cette gauche rose pale.

Il est loin le temps où la gauche plurielle, unie derrière Lionel Jospin avait pour projet de supprimer le Sénat. Où tout du moins d'en réformer le mode d'élection taxé par le leader socialiste d' »anomalie parmi les démocraties » (Le Monde, 21 avril 1998). Lionel Jospin voyait dans le Sénat une institution conservatrice et non représentative de la société actuelle. La réforme restera toutefois dans les cartons et une fois l'euphorie de la victoire de 1997 passée, on en entendra plus vraiment parler.
Et heureusement pour les compagnons de route du perdant de 2002, car on en retrouve une bonne partie aujourd'hui au chaud sur les bancs de la maison de retraite comme la nommait Noël Mamere.
Et si Dominique Voynet (ancienne ministre de l'écologie du gouvernement Jospin) met fin à un cumul de mandat en quittant d'elle-même le sénat pour se consacrer à sa bonne ville de Montreuil, Robert Hue, autre grande figure de la gauche plurielle, y coule une retraite dorée depuis 2004 aux cotés de Catherine Tasca (ex-ministre de la culture jospinienne), Marie-Christine Blandin (figure de l'union des gauches de l'époque qui lui permettra de prendre un temps la présidence de la region Nord/Pas-de-Calais) et des petits nouveaux Dominique Gillot (secrétaire d'Etat à la Santé entre 1999 et 2001), Marie-Noelle Lieneman (secrétaire d'état au logement de 2001 à 2002) et Alain Richard (ex-ministre de la défense de 1997 à 2002).
Du coup, pas sur que tous ces camarades bien lotis apportent leur soutien à Ségolène Royal dans sa course à l'investiture présidentielle, elle, qui prônait aussi la suppression du sénat, le qualifiant le 14 septembre 2005 d' »anachronisme démocratique insupportable ».

Dans un autre registre, nous ne pouvons que saluer la performance de Christian Bourquin, nouveau sénateur élu triomphalement au 1er tour. exclu du PS à cause de son soutien au conducator aujourd'hui défunt, le successeur de Georges Frêche à la tête de la région Languedoc-Roussillon ne se trouve pas touché par les accords de non cumul de mandats en vigueur au parti socialiste et se voit en situation de cumuler son mandat de sénateur, celui de président du conseil régional Languedoc-Roussillon et son mandat de 4ème vice-président du conseil général des Pyrénées-Orientales. Un cumul de mandats qu'il aurait justifié à l'agence CGBpresse par le besoin d'assurer l'avenir de ses enfants et le devoir de mettre sa famille à l'abri du besoin financier, à l'image d'un joueur de foot s'exilant au Qatar.

Mais revenons à nos gras moutons. L'hostilité que se voue la gauche et le sénat ne datent pas d'hier. La gauche accusant le sénat d'être anti-démocratique puisque non élu directement par le peuple et d'avoir systématiquement fait obstacle aux grandes réformes voulues par les différents gouvernements de gauche notamment par son droit de véto et celui de retoquer les propositions de loi, il est cocasse de voir cette même gauche se féliciter d'avoir réussi à prendre le commandement de cette institution, de cette anomalie comme disait Jospin. Bien sur, conscients de cette ambiguité, les nouveaux sénateurs nous assurent que seule cette position dominante leur permettra d'avoir les coudées franches pour pouvoir le réformer. Une profession de foi qui n'est pas sans rappeler la bonne vieille technique de l'entrisme trotskiste qui était censé permettre d' infiltrer les agents révolutionnaires au cœur du système et qui a surtout donné de nouveaux zélés serviteurs du dit système.

Toutefois il est clair qu'en prenant le sénat, la gauche a les moyens, à 8 mois des élections présidentielles, de gêner considérablement la fin de règne du quinquennat sarkosyste, ce que n'a pas manqué de rappeler Jean-Luc Mélenchon, lui-même ancien sénateur socialiste (qualité que le délicieux Alain Soral considère assez peu éloigné d'enculé mondain)qui affirme que « le sénat reste la plus baroque des élections ». Bien placé pour le savoir pour y avoir chauffé les bancs pendant 17 ans, La Méluche souligne sur son blog qu'« En passant à gauche, le nouveau Sénat pourrait (...) bloquer la politique de Nicolas Sarkozy jusqu'à la présidentielle. C'est en quelque sorte une nouvelle forme de cohabitation jusqu'à la fin du quinquennat".
"Cela obligera le gouvernement de droite à connaitre ce qu'ont connu les gouvernements de gauche. C'est-à-dire le recours au 'dernier mot' de l'Assemblée et donc à deux lectures au Sénat et trois à l'Assemblée pour chaque texte. (...) Compte-tenu du calendrier parlementaire, en fait quasiment toute réforme de droite d'ici mai 2012 peut être bloquée"
et ainsi, potentiellement, adieu la fumeuse règle d'or...

En remportant le Sénat et dans cette situation de cohabitation qui ne dit pas son nom, la gauche se trouve face à un curieux dilemme :
-Soit utiliser la stratégie du pourrissement, user du pouvoir de bloquer les actions du gouvernement Sarko et donc de se muer en cette force antidémocratique, susceptible de dédire l'assemblée nationale élue par le peuple, qu'elle dénonçait jusqu'à présent avec vigueur.
-Soit laisser passer cette chance, arguant par exemple de l'exceptionnelle situation de crise et du besoin de parler d'une même voix notamment à l'international (remake du duo Chirac/Jospin).
Dans le cas second, si le PS se verrait alors tresser des lauriers et décerner des brevets de responsabilité dans les éditos sexys d'Alain Duhamel, il laisserait un boulevard à Mélenchon comme au FN qui pourront marteler avec bonheur la formule de ce grand tout UMPS connivent qui gouverne main dans la main depuis 30 ans.

Quoiqu'il en soit si la gauche parvient à s'imposer en 2012 et considérant que les élections législatives de juin ne sont plus avec le nouveau calendrier que pur exercice de style, elle tiendrait en ses mains la totalité des pouvoirs après ses scores aux élections municipales, cantonales, régionales européennes et aujourd'hui sénatoriales. Pour la première fois celle-ci se trouverait dans une incroyable position de force. Et donc sans aucune excuse pour ne pas déverser sur nous le programme du grand bonheur socialiste que l'on nous promet depuis si longtemps.
Ça vaudrait presque le coup d'essayer pour voir ce qu'ils ont réellement dans le ventre.

9 commentaires:

  1. Et donc sans aucune excuse pour ne pas déverser sur nous le programme du grand bonheur socialiste que l'on nous promet depuis si longtemps.
    Ça vaudrait presque le coup d'essayer pour voir ce qu'ils ont réellement dans le ventre.


    Ben, c'est simple. Tu prends Christophe Girard comme modèle et tu déplois au national. On ferme les yeux sur les réformes néolibérales et même on continue le programme, puis on oppose à ça, " la consolation culturelle ".
    Tous les soirs, en bas de chez toi, la Gay Pride.

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  2. on va pouvoir goûter aux joies d'un conservatisme de gauche. Ni-Ni est de retour !

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  3. @Para
    Oh oui, je le vois tout à fait comme ça. Mais là ils seraient obligés d'assumer.
    Et puis, pourquoi seulement en bas de chez moi? La gay pride tous les soirs chez moi !

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  4. La France a peur face à la crise, alors elle hisse le drapeau rose !

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  5. Pas tout à fait d’accord avec toi Paracelse, imaginons quelques scenarii imprévus :

    Montebourg emporte la primaire socialiste. Là catastrophe. Les journalistes font dans leur ben, l’oligarchie commence à paniquer en tentant de renflouer une candidature Sarkozy ou Juppé ou Borloo voire Eva Joly. Putain Marine le Pen, Montebourg, Mélenchon sur le même plateau, on va traiter les petits affidés du néo-libéralisme économique et sociétal de valets du capital, de vendus à l’étranger, on va les menacer avec du goudron et des plumes. La démondialisation est au centre du débat. Chaque jour, le Wall Street Journal, the Economist et le Financial Times lancent une offensive contre la France tandis que parallèlement les spéculateurs planqués derrière leurs dark pools font plier l’euro et les valeurs bancaires en créant une sorte de panique des épargnants.

    Valls emporte la primaire socialiste, l’UMP a trouvé son candidat naturel. Mélenchon et Marine Le Pen se retrouvent seuls opposants aux poupées gigognes de l’oligarchie, l’abstention atteint 70 % des suffrages

    Hollande l’emporte. La parodie de François Mitterrand, version eighty one, mène une campagne soporifique contre son rival, Nicolas l’ami des vieux avec cash flow, les français exaspérés par tant de suffisance conjuguée propulsent Marine le Pen au second tour et celle-ci se retrouve soit candidate anti-système soit leader de la droite

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  6. moi j'attends pas j'émigre.. jvais aller voir chez Maurice G. comme qu'il fait froid.
    bon courage a tous pour la campagne

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  7. Bonne chance wessss, vous aurez la joie de découvrir Cordicopolis avec l'accent de la belle province, là bas tous les tenants du système ressemblent à Martine Aubry, on vous soutient pour le visa

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  8. L'arrogant de service29 septembre 2011 à 22:54

    @ Mémento Mouloud
    L'abstention n'atteindra jamais 70 %. C'est un peu abusif comme chiffre.

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  9. Et on conserve Marini (sénateur-maire UMP de Compiègne) à la présidence de la Commission des finances... Quelle révolution !...

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