5 août 2006

William Walker, l'homme qui faillit faire gagner le Sud



Président de Basse Californie et du Nicaragua, docteur, avocat, écrivain voilà quelques-uns des titres dont se dota celui qui passait pour être le plus grand flibustier d’Amérique. Une seule ombre au tableau, cet aventurier d’exception était également le plus fervent porte drapeau de l’esclavagisme.

Né en 1824 à Nashville, dans le Tennessee, William Walker sortit diplômé de l’université de Nashville à l’âge de 14 ans et, à 19 ans, il obtint un diplôme en médecine. Ses origines en firent naturellement un grand amoureux et un sympathisant du Sud. Désirant perfectionner ses talents de médecin il fréquenta les universités d’Edinburgh, de Göttingen, d’Heidelberg et de Paris. Sa première vocation fut donc plus celle d’un scientifique que d’un flibustier. Il assista aux révolutions européennes de 1848 et il est évident que les doctrines révolutionnaires de Garibaldi, Blanc, Marx, Mazzini et Feuerbach eurent une influence sur sa future vocation d’aventurier.
De retour aux États-Unis, il ouvrit un cabinet de médecin à Philadelphie. Là, il comprit très vite qu’il n’était pas fait pour être docteur. Il envoya tout balader avant de se rendre à la Nouvelle Orléans pour étudier le droit et devenir avocat. C’est dans cette ville qu’il devint co-propriétaire du Crescent, un journal où le jeune poète Walt Whitman travailla un temps.
En 1850, il s’installe à San Francisco et travaille comme journaliste avant de déménager à Marysville où il ouvrira un cabinet d’avocat et deviendra le défenseur de la cause esclavagiste. Mais le démon de l’aventure allait s’emparer de cet homme d’un mètre cinquante sept et de 60 kilos pour ne plus le quitter.
À l’âge de 29 ans, en 1853, William fit un voyage à Guaymas, au Mexique, où il souhaita établir une colonie militaire à la frontière afin de la protégée des raids indiens. Mais le gouvernement mexicain, qui se méfiait à raison des initiatives américaines, repoussa son offre. Il retourna donc à San Francisco où, avec l’aide du comte français Gaston de Raousset-Boulbon, il va ouvrir un bureau de recrutement afin de monter une expédition en Basse Californie. De nombreux volontaires, dont la majorité vient du Kentucky et du Tennessee, vont s’enrôler dans l’aventure. L’idée de Walker était de fonder une république à la barbe des Mexicains, une république où l’esclavage serait légal et que l’on pourrait, ultérieurement, faire rentrer dans l’Union. Il n’eut aucun mal à lever des fonds qui l’aidèrent à financer l’expédition.
Une fois les hommes rassemblés, il affréta le brick Arrow et se prépara à la traversée mais il fut arrêté par le général américain Hitchcock, commandant en chef des armées de la côte pacifique. Walker avait de nombreux sympathisants membres du bureau fédéral de San Francisco et il n’eut aucun mal à se faire libérer. Comme par hasard, le général Wood vint peu après relever Hitchcock de son commandement et prendre son poste.
Pendant ce temps, Walker et 48 hommes, quittent San Francisco à bord du bateau Caroline. Trois semaines plus tard, en novembre 1853, la troupe débarque à La Paz, dans le golf de Californie. La ville qui n’opposera quasiment pas de résistance, tombera comme un fruit mûr. Walker s’y proclame président de Basse Californie avant d’y faire venir 200 hommes en renfort. L’indépendance de la république de Basse Californie est proclamée et l’esclavage y est légalisé. La Paz n’étant pas une position très défendable, Walker déménage son quartier général à Ensenada où il abolit déjà la république de Basse Californie pour la ramplacer par celle de Sonora, composée de deux états, la Basse Californie et la région de Sonora. Walker se proclame président, Watkins, son partenaire, est nommé vice-président et un certain Emory devient secrétaire d’état.
À San Francisco, les exploits de Walker sont salués par tous et la prise de La Paz y est décrite comme une grande victoire. Le drapeau de la république de Sonora flotte même au coin des rues Kearny et Sacramento, des bureaux de recrutement s’ouvrent un peu partout et les actions de la république se vendent comme des petits pains.
Pendant que Walker attendait ses renforts, il se passa un événement qui reste, de nos jours encore, inexpliqué. La Caroline, son bateau, prit le large avec une grande partie du ravitaillement dans ses cales. Hors, lorsque deux cent hommes arrivèrent en renfort, Walker n’eut pas d’autre choix que d’envoyer une expédition vers la baie de Todos Santos afin de fourrager, c’est à dire vivre sur le pays. Mais les Indiens n’eurent pas l’intention de laisser les blancs se saisirent de leur bétail et de leurs provisions. À Guilla, les deux troupes s’affrontèrent lors d’une escarmouche. Walker voulut rassembler ses hommes afin de monter une expédition punitive mais le manque de vivre mena à une mutinerie parmi les nouveaux venus, déçus de ne trouver aucun butin à se mettre sous la main. Les hommes se mirent à déserter. Walker en rattrapa quatre. Deux furent fusillés et deux autres fouettés devant le reste de la troupe. Loin de renforcer la discipline, cette mesure drastique ne fit qu’exacerber la mauvaise humeur de ses hommes. Quelques semaines plus tard, il n’avait plus qu’une centaine de miliciens sous ses ordres pour marcher sur Sonora. Lorsqu’ils atteignirent la rivière Colorado, ils n’étaient plus que 35 ! Walker, très déçu, décida d’abandonner l’aventure. Le 8 mai 1854, la petite troupe passa la frontière et se rendit aux autorités américaines. Là, ils donnèrent leur parole de ne pas retourner au Mexique et purent repartir pour San Francisco.
Si Walker avait eu de quoi nourrir ses hommes il est probable que la Basse Californie aurait fini par devenir un état américain, comme le Texas en son temps. Mais l’expédition de Walker eut tout de même des conséquences car, pour éviter de nouveaux désagréments avec ses voisins, le Mexique finit par vendre une partie de Sonora aux Américains.
De retour en Californie, Walker présenta son aventure comme une expédition visant à protéger les populations de Sonora des Apaches. Cependant, si l’on avait pris la peine de demander leur avis aux populations locales, il est clair qu’elles auraient préféré les Apaches aux séides de Walker.
Quoi qu’il en soit Walker passa devant la cour fédérale pour avoir violé les lois américaines sur la neutralité. Il fit marcher ses relations, fut acquitté et reprit ses activités d’avocat. Sa réputation, elle, dépassa les frontières.
Au Nicaragua une guerre civile entre Démocrates et Légitimistes battait son plein. Le chef des Démocrates, qui essuyait défaite sur défaite, sollicita l’aide de Walker. Ce dernier ne se fit pas prier et, en 1855, il s’embarqua pour le Nicaragua avec 60 volontaires. En un an, il parvint à mettre les Légitimistes en déroute et à prendre leur capitale, Granada. On lui donna le grade de Generalissimo ce qui ne sembla pas lui suffire car il ne tarda pas à s’autoproclamer président du Nicaragua.
Encore une fois, les États-Unis firent l’écho de ses exploits, les bureaux de recrutement rouvrirent leurs portes dans les grandes villes du Sud et des fonds furent levés. Au Nicaragua, Walker commença à n’en faire qu’à sa tête. Il annula la franchise que Cornelius Vanderbilt, un magnat du transport maritime, avait sur la rivière San Juan et le lac Nicaragua, lieux de transit obligés pour passer de la mer des Caraïbes à l’océan Pacifique. Inutile de dire que Vanderbilt devint vite son ennemi intime. Évidemment, il ne tarda pas à rétablir l’esclavage ce qui provoqua plusieurs révoltes dans le pays, des révoltes que Vanderbilt fut plus qu’heureux de financer. De plus, la marine britannique, qui voyait d’un mauvais oeil les Américains se développer dans la région, gênait considérablement le ravitaillement. Pour finir, c’est le Costa Rica qui déclara la guerre à Walker en envoyant des troupes au Nicaragua. L’armée de William Walker repoussa l’invasion mais échoua lamentablement dans sa contre-attaque au Costa Rica. De plus, la maladie joua sa carte en tuant plus de soldats des deux camps que les balles.
Les temps devinrent durs pour Walker car si les États-Unis reconnurent son gouvernement ils ne lui envoyèrent aucune aide. Financés en partie par Vanderbilt, les pays d’Amérique Centrale firent une coalition contre Walker qui, en 1857, dut une fois de plus, se rendre à un officier américain et rentrer au pays.
Arrivé à la Nouvelle Orléans, il fut accueilli en véritable héros. Le président Buchanan accueillit Walker à la maison blanche qui fit ensuite un voyage à New York pour financer une seconde expédition au Nicaragua mais cette fois le succès fut mitigé car les rescapés de son armée lui firent une très mauvaise publicité. Il parvint tout de même à lever une armée et s’embarqua pour le Nicaragua fin 1857. Hélas pour lui, la marine britannique veillait au grain. Il ne put débarquer et dut rentrer, une nouvelle fois, en Amérique.
Pas découragé pour un sou, William écrivit un livre, La Guerre du Nicaragua pour exposer ses points de vue, notamment ses fortes opinions esclavagistes. Son livre fit mouche et, en 1860, il avait de nouveau une armée pour naviguer vers le Sud. Encore une fois, les Anglais l’empêchèrent de débarquer mais il parvint à poser le pied au Honduras. Il pensait rejoindre le Nicaragua sur terre mais les Britanniques lui mirent le grappin dessus avant cela et le livrèrent illico aux Honduriens. Six jours plus tard, William Walker était fusillé à l’âge de 36 ans.
Ainsi se termina son aventure. S’il avait réussi, comme il le souhaitait, à faire intégrer plusieurs états esclavagistes d’Amérique Centrale aux États-Unis d’Amérique, la guerre de sécession aurait connu un autre dénouement.

5 commentaires:

  1. Massini?! Tu veux dire Mazzini, non?

    Hé Bill qu'est-ce que t'attends pour débarquer en Martinique.

    Avec Carla del Ponte, le malheureux se serait retouvé suicidé au fond d'une geôle du TPI.

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  2. Tout à fait Todo. Je rectifie. Merci.

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  3. Quelqu'un a des bons bouquins à conseiller sur la guerre de sécession ?
    Je connais plutot mal l'histoire américaine du XIX siècle.

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  4. Une bonne synthèse sur cette guerre : 'La guerre de sécession' de James McPherson dans la collection Bouquins. Très agréable à lire, très complet sur le sujet et disposant de nombreuses cartes pour suivre les différentes batailles.

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  5. C'est noté merci.
    La collectrion "Bouquins" est toujours bien faite.

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