11 novembre 2017

Renaud Camus, Norman de l'apocalypse


Une particularité, pour ne pas dire drame des tubes, c'est de tout rendre dérisoire, de transformer le monde entier en troll.

Prenons ce pauvre Henry de Lesquen, le national-libéral à particule, celui que vous imaginez sans peine rudoyer sa femme de ménage espagnole. Polytechnicien, horloger, grenouillant dans les cabinets ministériels, patron de Radio Courtoisie (la radio des vieilles dames qui font des fausses routes en buvant leur thé), toujours tiré à 4 épingles et distribuant les amendes pour anglicisme, qui aurait pu imaginer qu'il terminerait sa carrière en troll internet, en  idole cringesque du 15-18 ?

Regardez, là Renaud Camus. Certes,
je l'ai jamais lu, mais il est plutôt positionné sur le créneau du grand écrivain, la Cassandre des temps modernes, la Pénélope infatigable à son métier de contempteur du monde tel qu'il va mal. Il suffit qu'il fasse une vidéo et tout le grotesque du personnage, du discours, ressort. Quel moment dérangeant. Camus se serait filmé un chapeau de papier sur la tête, à califourchon sur un cheval à bascule d'aire de jeux pour enfants plurichromosomiques, que le résultat ne serait pas plus ridicule.

En fait, c'est là que réside la supériorité de la lecture et de l'écrit face à la vidéo.

L'article, le livre, ce billet-là, toi lecteur, que t'es pas con d'ailleurs, que sinon tu serais pas là, tu le lis à l'aune de ta propre intelligence. C'est ta façon de lire le livre qui le rend beau, qui rend le propos brillant, c'est ta petite musique intérieure, ce que tu y projettes, qui rentre en résonance avec tes interrogations du moment, qui va le rendre intelligent, qui va en augmenter la portée.
La vidéo supprime ça.
La connerie, le ridicule du mec tassé dans son coin, le regard inquiet de ne pas se faire surprendre par le gardien du lieu pendant qu'il parle de guerre,  ils s'imposent à toi, tu ne peux pas faire fi, tu ne peux pas les dépasser.

Alors que son appel du 18 juin là, tu l'aurais trouvé placardé sur la devanture de la boulangère du coin de ta rue, ou sur la porte de ta boite à partouzes préférée, juste au-dessous du heurtoir en forme de paire de couilles. Dans un bon jour, t'y aurais ajouté tes rêves de grandeur, ta soif d'absolu. T'y aurais ajouté un peu d'écho, de la grande musique et des cymbales. la tête remplie de bruit et de fureur, t'aurais fini sa lecture la main sur le cœur ou dans le pantalon, le regard franc tourné vers l'horizon, prêt à envahir la Pologne ou au moins l’hôtesse de caisse pour commencer.  Ça aurait eu de la gueule. T'aurais peut-être même rejoint le CGB.

Ça tient à rien les débuts d'une grande aventure.


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