16 novembre 2015

Inversion de la courbe de la guerre


J'apprends ce matin que le père d'un enfant de la classe de mon fils est mort au Bataclan. Je ne le connaissais pas vraiment, on faisait simplement la même route le matin. On se saluait d'un hochement de tête quand on se reconnaissait. Il était devant ou derrière moi, sur le chemin de l'école. On partageait le même trottoir.

Mort au Bataclan. Mort pour la Syrie. Mort par la France. Mort pour la Syrie, puisque « nous sommes en guerre ». J’avoue, je ne l’avais pas plus réalisé que lui jusqu’ici. Nous sommes en guerre depuis hier. Hier seulement. Parce qu’une tête tranchée accrochée à un grillage en Isère, ce n’était pas encore une déclaration de guerre. Parce que des voitures lancées dans les foules de Noël au cri d’Allah Akbar, c’était l’acte malheureux de déséquilibrés. Parce qu’un type armé jusqu’aux dents dans un Thalys, c’était une crainte, certes : la crainte que cela fasse le jeu du Front National


Mais cette fois ça y est : c’est la guerre. Ce qui est attaqué, ce n’est pas « la République », ce ne sont pas nos « modes de vie », ce n'est pas un symbole, c’est toi, ton voisin, ton pote, ton parent, ton adolescente... Ce sont des hommes et des femmes qui n’ont eu pour seule caractéristique que de se trouver amassés. Ball trap. #PrayforParis ? You’d better #PrayforYourself. Tu n’as plus le luxe de refuser une prière pour toi, d'où qu'elle vienne, comme le fait Joann Sfar, prétextant qu’on a assez de religion comme ça. Si Ganesh peut quelque chose pour toi, s'il te tend la trompe, ne fais pas la fine bouche, n'hésite pas une seconde.

  sfar 

Cette fois c’est la guerre. Monsieur Valls nous dit de nous habituer à vivre avec. « C'est une situation exceptionnelle amenée à durer ». Mieux vaut s’acculturer. L’état d’urgence est déclaré. On craint une atteinte aux libertés individuelles. Mais on ne dit pas si la liberté des islamo-fichés sera atteinte, elle. La guerre ? Redites-moi un peu comment ça se passe. Je n’ai pas fait le service militaire. On m’avait dit que la conscription c’était fini. Le pacte républicain, c’est quoi au juste : je paye l’impôt, tu me protèges ? Y’a un moment où je dois donner mon sang ?

Sur France Inter, Thomas Legrand dit que oui. C’est mon devoir de retourner au front. En terrasse. Le verre à la main. Tenir bon. Ne pas espérer de renforts sécuritaires. La relève arrivera samedi soir prochain. Ami, si tu tombes, un ami sort de l'ombre à ta place. Demain du sang noir séchera au grand soleil sur les routes. Chantez, compagnons, dans la nuit la liberté vous écoute.

Deux jours après le triple attentat, ça parle "sentiment d'insécurité" sur France Inter :   http://www.franceinter.fr/player/export-reecouter?content=1189663


Le plus flippant, c’est sans doute cela : pas les assaillants ni l’attaque elle-même, mais les réactions qui s’ensuivent. Celles des médias. Celles de vos amis sur les réseaux sociaux. Tout le monde dit et fait n’importe quoi. Chacun y va de son indécence. Vous le premier. Sinon le deuxième. 

« N’ayons pas peur car rien de bon ne peut sortir de la peur ». Parce qu’évidemment, il faudrait que quelque chose de « bon » sorte d’un truc comme ça. Pas que du sang, pas que de la cervelle. Mais un nouveau logo. De nouveaux slogans. De chouettes dessins de presse. Un joli graffiti sur l’unité nationale. On les tweeterait. On serait repris par le New York Times ! PrayforParis. C’est si glamour. Tous unis. Même pas peur. Baume au cœur. Chloroforme. Se rendormir, vite ! Montrer qu’on continue à vivre comme avant. Montrer qu’on n’a absolument rien compris. Pied au plancher, bloqués en mode Tourner les serviettes.


"Et tous les grincheux : ON S'EN FOUT ! Les barbus trop nerveux : ON S'EN FOUT !"

Pour ma part, pas de bougie. J’y vois suffisamment clair.
Pour ma part, pas de drapeau bleu-blanc-rouge sur la face. Il est trop plein de vos crachats.
Pas de concours de mots, de réconfort poétique, de dessins touchants, d’élans amicaux et humanistes. Pas de revival de l'esprit du 11 janvier. Parce que son souffle court ne mène que jusqu'au Vendredi 13.


2 commentaires:

  1. Tagada Grand Vénérable de la Hype16 novembre 2015 à 21:48

    Camarade djeune, sois à la pointe de la hype dans les manifestations de Gauche (financés pas le Grand Capital) !

    Après "peace n' love", "vivre-ensemble" "du pain du boudin et du Boursin" "bisounours for ever" et "je suis Charlie", voici le nouveau slogan militant à la mode qui fait fureur: "le pire est devant nous".

    Au fait, qui crée les guerres ? ....

    RépondreSupprimer
  2. Je ne connais pas de merde plus sur évaluée en BD que joann sfar.
    Et en plus le mec ne se prends pour n'importe qui...
    A.g.

    RépondreSupprimer