19 juin 2013

Big Brother chante et danse

 
« Par le parquet remonte un aboiement de paroles en accompagnement d’une chanson. Ces gens qui ont tout le temps besoin d’avoir leur télévision, leur chaîne hi-fi, leur radio qui marchent. Ces gens auxquels le silence fait tellement peur. […] Ce bon vieux George Orwell a tout compris à l’envers. Big Brother ne surveille pas. Il chante et il danse. Il sort des lapins d’un chapeau. Big Brother est tout entier occupé à attirer votre attention à chaque instant dès que vous êtes éveillés. Il fait en sorte que vous soyez toujours distraits. Il fait en sorte que vous soyez pleinement absorbés. Il fait en sorte que votre imagination s’étiole. Jusqu’à ce qu’elle vous devienne aussi utile que votre appendice. Il fait en sorte que votre attention soit toujours remplie. »
Berceuse, Chuck Palahniuk

8 commentaires:

  1. Une bande dessinée circule depuis quatre ans sur la Toile ( http://lesenfantsdelazonegrise.hautetfort.com/archive/2011/09/07/s-amuser-a-en-crever.html ) où il est dit que Orwell avait tort, Huxley avait raison. En fait, leurs deux visions sont compatibles : contrôle social par la sidération, répression physique des dissidents.

    Il y a simultanément censure de livres et décervelage rendant les livres inutiles (les deux sont présents dans Fahrenheit 451), surinformation et pénurie d'informations importantes (la lecture d'un journal de PQR dont sont absents tous les scandales politico-affairistes locaux et régionaux, en atteste), certaines vérités sont supprimées et d'autres sont noyées dans un océan d'absurdité, les caméras sont omniprésentes et les gens ont une vie si banale qu'ils n'ont plus rien à cacher, le confort est omniprésent mais la répression politique peut être très violente (ou sous-traitée à la racaille...), etc.

    L'auteur de cette bédé croit que l'un ou l'autre avait raison, alors que et Orwell, et Huxley, et Bradbury avaient tous trois raison.

    Content de voir que Palahniuk pense de même. Je n'ai lu que Fight Club, mais Berceuse a l'air intéressant, vu l'extrait.

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    1. C'est si original que ça de concilier Huxley et Orwell ? ça me parait naturel non ?

      Je te conseille Survivant et Choke de Chuck plutôt que Berceuse moi.

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    2. Ça me semblait naturel mais cette bédé a vraiment beaucoup circulé, sans recul critique.

      Bien noté tes suggestions.

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  2. Orwell n'a pas compris si à l’envers que ça, son Big Brother ne fait pas que surveiller, il distrait aussi :
    « Le Commissariat aux Archives était une branche du Ministère de la Vérité dont l’activité essentielle était de fournir aux citoyens des journaux, des films, des manuels, des programmes, des pièces, des romans, le tout accompagné de toutes sortes d’informations, d’instructions et de distractions imaginables (…). Il existait toute une suite de départements spéciaux qui s’occupaient (…) de littérature, de musique, de théâtre et de délassement en général. Là on produisait des journaux stupides qui ne traitaient presque exclusivement que de sport, de crime et d’astrologie, de petits romans à cinq francs, des films juteux de sexualité, des chansons sentimentales composées par des moyens entièrement mécaniques (…). Il y avait même une sous-section entière, appelée Pornosex, occupée à produire le genre le plus bas de pornographie. »

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    1. D'ailleurs si je me souviens bien (je l'ai lu il y a une quinzaine d'années), 1984 commence par un programme de divertissement sur le télécran.

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  3. Avant de lire Bradbury, Orwell et Huxley, et de vouloir les concilier, mieux vaut commencer par lire l'auteur dont ils sont les héritiers et se sont, de leur propre aveu, inspirés : Eugène Zamiatine. C'est son roman NOUS AUTRES qui a créé le genre de la science-fiction politique. 1984 en est même une version améliorée, à la limite du plagiat, notamment dans l'histoire d'amour existant entre le héros et une ouvrière.

    Il faut compléter ces lectures par 1984-85, d'Anthony Burgess. Ce livre reste l'analyse et la synthèse la plus aboutie de ces romans.

    Quant à Palahniuk, tous ses livres sont excellents, mais n'ont rien à voir avec les précédents.

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    1. Certes ! Enfin, il faut quand même prévenir les lecteurs avant la lecture de Nous autres : c'est lourd et chiant comme les mouches. Préférez largement les copies à l'original.

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    2. Ouais moi aussi j'ai trouvé ça chiant Zamiatine.
      Maintenant qu'on a vu les précurseurs, passons aux héritiers dans le genre dystopique y a L'Oiseau d'Amerique écrit par Walter Tevis qui recèle des pistes de réflexion très intéressantes.

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