27 juin 2011

Les syndicats sont sympa


En ce dimanche 26 juin 2011, le groupe GDF SUEZ organisait à son siège de La Défense un « Family day » : grande fête foraine dominicale à laquelle les employés étaient invités avec leur marmaille, pour leur faire découvrir leur superbe lieu de travail. Au programme : clowns, ballons, manèges, barbe-à-papa… Tout un cirque pour faire croire que bosser à La Défense est une aubaine ! La « com’ » n’ayant pas lésiné pour que ce jour soit fête, sur les affiches et flyers aux couleurs joviales du « Family day », les syndicats ont répliqué par un tract que je reproduis ici, assez juste et amusant sur l’évolution du travail :


Merci patron ! Le temps de garer la voiture, dans l’impatience de participer aux réjouissances. Ce dimanche 26 juin, nous allons vivre des moments incroyables. On pensait perdu le temps des fêtes joyeuses et traditionnelles, des kermesses champêtres et ensoleillées, réunissant petits et grands dans la gaieté du bonheur partagé, sous l’œil protecteur du « Saint-patron ». Aujourd’hui, finissons-en avec la nostalgie et remercions en cœur pour ce Family Day vanté comme un sommet de « détente et de convivialité ».
Penser que cela, enfin, va nous permettre de nous rendre un dimanche au travail au lieu de rester, comme chaque semaine de l’année, dans la frustration interminable d’un weekend loin du boulot. Et surtout pouvoir le faire en famille, sans retenue, pour célébrer dans la joie l’Entreprise et son patron bienfaiteur.
Que de ravissement à renouer ensemble, avec ces traditions anciennes, du temps de la machine à vapeur, où patron de forge et employés s’abreuvaient du même vin œcuménique, partageaient les mêmes agapes, bien loin des visions pessimistes et belliqueuses des militants de la lutte des classes. Les bonnes œuvres patronales d’antan, paternalistes et attentionnées, les « comités patates » soucieux de nourrir et de divertir ceux qui n’étaient pas encore « les ressources humaines »…
Qu’il est bon de sentir à nouveau ce parfum familier et ancien d’avant guerre, d’avant le Conseil National de la Résistance, d’avant la création des Comités d’Entreprises qui a vu confier la gestion des fameuses « œuvres sociales » aux seuls représentants des salariés.
Comme il est rassurant de s’apercevoir que le patron moderne n’a pas perdu la main et comme ses prédécesseurs, de près d’un siècle en arrière, il est encore capable d’initiatives fortes de collaboration sociale entre la direction et le personnel.
Inutile de préciser que cette journée fera la démonstration que les mauvaises langues se trompent. Celles qui, par exemple, enquêtes à l’appui, prétendent que 55 % des salariés pensent ne pas être écoutés par leur hiérarchie, 77 % jugent le partage des profits inéquitable et ne pas être reconnu par leur travail ou encore qu’un cadre supérieur sur deux des grandes entreprises dit ne pas adhérer à la stratégie de leur entreprise.
Non, vous dis-je, point de divorce entre les salariés et leurs patrons. « Family day » est bien là pour le prouver. Et merci aussi d’avoir utilisé l’anglais, parce qu’entre nous, en français : la journée de la famille » associée au travail pour la circonstance, cela aurait été un peu « too much » comme rappel historique.
Oui, il n’y aura que les mêmes grincheux pour y trouver la moindre fausse note. Rien n’est oublié. Pas même l’invitation à se réjouir de l’extension du travail dominical dans les commerces sur le quartier de la Défense, comme un témoignage, là aussi, de ces époques dorées où le code du travail pouvait s’écrire en grosses lettres sur une seule face d’un ticket pour prendre l’omnibus à chevaux.
Donc, ne boudons pas notre plaisir d’autant que l’argent dépensé à cette occasion est bien le notre, celui du fruit de notre travail. Celui aussi qui a été patiemment économisé grâce à une politique salariale particulièrement prudente et attentive à l’évolution des dividendes et des plus hautes rémunérations des cadres dirigeants.
Gageons d’ailleurs que nos collègues des plateaux d’accueil, emportés par ce nouvel enthousiasme social, trouvent aussi tout à fait justifié qu’on leur demande de se serrer la ceinture pour que l’on puisse ainsi amuser la galerie.


6 commentaires:

  1. ILs ont vraiment osé appeler ça "family day" ? Cet obligatoire recours à l'anglais venu du marketing est insupportable.

    RépondreSupprimer
  2. Le type qui a trouvé correct de baptiser ça le "family day" doit être coupé en deux, et sa tête de con doit être promenée au bout d'une pique sous les quolibets de la foule.

    RépondreSupprimer
  3. Si ton patron couche avec ta fille, est-ce de l'inceste ?
    Doit-on désormais mettre le nom de son patron dans le livret de famille ?
    Si on engueule son patron devant tout le monde, est-ce laver son linge sale en famille ?

    Ce processus de sectarisation qu'on appelle "esprit corporate" passera mieux ainsi.

    RépondreSupprimer
  4. le type qui a écrit ce tract, bien qu'à la CGT, devrait rentrer au CGB.

    RépondreSupprimer
  5. Cause toujours, tu m'intéresses.
    Je suis indigné (de la Répubique), uh, uh, uh....

    Séb

    RépondreSupprimer
  6. CGT ou pas, il reste des types vivants dans ces zones à broyer du salarié.
    C'est réjouissant.

    RépondreSupprimer