19 avril 2011

Game of Thrones sur HBO



Ce week-end voyait le lancement sur HBO de Game of Thrones (le Trône de fer en français) adaptation télévisée de la saga fleuve de George R.R. Martin. L'occasion, une fois de plus, de se morfondre sur la qualité des fictions françaises, notamment celles adaptées de succès littéraires souvent débités, chez nous, sans conviction par l’infâme Josée Dayan.

Game of Thrones pour les US, Jekyll ou Sherlock Holmes en Angleterre ou même la série adaptée du roman noir Romanzo Criminale en Italie nous replongent avec tristesse dans l'incapacité des chaines françaises à produire, créer ou adapter des programmes de fiction de qualité.

Si le modèle américain semble impossible à reproduire pour des raisons de puissance financière, d'un marché intérieur sans commune mesure et d'une puissance à l'export assise sur la domination culturelle de l'american way of life, les succès qualitatifs des formats anglais ou italiens cités plus haut avec des marchés équivalents voir inférieurs au notre et des moyens financiers comparables balaient l'argument économique.

TF1 et le service public, spécialisés dans l'adaptation des classiques de la littérature française (Les Misérables, Le Comte de Monte-Christo) se noient dans un académisme pompeux dont la frigidité n'est pas sans rapport avec leur cible fétiche que reste la fameuse ménagère de moins de 50. Ménagère qui pourtant les a abandonnés depuis longtemps au profit de sa réunion hebdomadaire Tuppergode. Canal essaie désespérément de singer le rythme et l'esthétique américains sans être capable de fournir le fond (scenar, dialogues), M6 n'existe pas et Arte reste convaincu qu'un programme de qualité se mesure à son incapacité à réunir plus de 20 téléspectateurs devant leur écran, critiques du Figamonde et de Libérama inclus.

Le dernier format Tv exporté par la France avec succès reste "Sous le soleil", vendu par TF1 dans plus de 100 pays. Quel triomphe après 30 ans d'exception culturelle française sous perfusion étatique! Pourtant peu de pays possèdent un patrimoine culturel équivalent dans lequel il suffit de se pencher pour réaliser des programmes de qualité.

Quelle loi non écrite oblige "les Misérables", "Le Comte de Monte-Christo", "les Trois Mousquetaires", "les Rois Maudits" ou "les liaisons Dangereuses" à être calibrés pour ne contenter que les pensionnaires de maisons de retraite, pourquoi Maigret et Arsène Lupin continuent de prendre la poussière dans leur placard pendant que l'Angleterre reboote avec succès et élégance le détective de Bakerstreet, qui peut nier le potentiel fédérateur des œuvres de Jules Verne (Le Tour du Monde en 80 Jours, Michel Strogoff, 20000 lieux sous les mers...) toujours adaptées avec succès sur différents supports (bd, mangas, films) mais jamais sous la bannière française alors qu'il y a matière à de superbes feuilletons.

Au-delà des sagas classiques et sans rêver à du Babylon Babies sous LSD feuilletonné en prime time sur France Télévisions, des héros de romans populaires comme Le Poulpe de Jean-Bernard Pouy ou même le Blèmia Borowicz de Franck et Vautrin ont tout ce qui faut comme univers développé, personnages secondaires riches en couleur, lots d'aventures, de jolies pépés et de méchants bien de droite pour produire quelque chose qui tienne la route et qui fasse consensus pour peu qu'on n'impose pas Philippe Torreton, ou Christian Clavier en guise de héros charismatiques.

Autre univers dans lequel puiser, la BD : pourquoi est-on incapables de magnifier Largo Winch, Adèle Blanc-sec ou XIII quand on les adapte pour la télévision dans un pays qui se targue pourtant d'avoir élevé la bande-dessinée au rang d'art ?

La production française manque de souffle, de charisme, de créativité et souffre terriblement d'un déficit de scénaristes et de dialoguistes talentueux, étonnant constat dans un pays qui ,30 ans après leur mort, se régale encore des saillies histrionnes d'un Michel Audiard ou du duo Pierre Dac/Francis Blanche.

Tiens, on me dit que je n'ai pas parlé de Game of Thrones... La série s'annonce comme une réussite, même si après un épisode il est difficile de prédire comment ils vont se dépêtrer des multiples intrigues qui jalonnent l'histoire, d'autant que l'auteur lui-même (qui supervise l'adaptation tv) commence à perdre le fil et à s’essouffler dans les livres, à cause justement de la profusion de complots et du nombre importants de personnages, d'après ce qu'on peut lire sur le net. Et si on passe sur le côté parfois balourd/kitsch inhérent à l'heroic-fantasy et si HBO ne tombe pas dans la facilité en noyant tout ça sous les scènes de cul, la matière est là pour captiver son auditoire pour plusieurs saisons.

19 commentaires:

  1. Je n'ose imaginer ce que pense Renaud Camus de l'engouement pour les séries télé...

    Quoi? Scorsese s'y est mis avec une série sur la prohibition? Quoi Michael Mann va faire un truc avec Dustin Hoffman?

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  2. Ca va pas guérir mon anti-américanisme primaire : je boycotte presque complètement le cinéma américain. Je ne peux plus supporter cette morale protestante qui a dégénéré en puritanisme, la musique partout, tout le temps, pour singer toutes les formes d'émotion, comme on donne du vigra à des vioques réveiller ce qui est mort.
    Les séries américaines, c'est un condensé de tout ce que le cinéma américain fait de pire, le faux, les grosses ficelles et l'archi revu tellement condensé que ça en devient suffoquant.
    Je déteste encore plus les gens qui trouvent normal de venir me voir pour me dire "t'as vu telle série et blabla...". Enculés est-ce que je vous parle de ma passion de la semaine dernière pour les livres de cul arabes. Chacun ses mauvais gouts bordel, si en plus il faut les partager.

    Ce que j'aime bien avec le cinéma français, c'est l'élégance avec laquelle on fait un chef d'oeuvre tout les cinq ans qui vient comme ça de nulle part sans pétarade, sans effets et que ça sent le vrai.
    "Un prophète" est par exemple le film le plus touchant, le plus juste jamais fait sur l'islam et la culture maghrébine. Personne le dit, ceux qui on ressentit le truc n'ont pas eu besoin de faire des cérémonies et des grosses démonstrations de "oh t'as vu que ça m'a trop touché et que c'est tellement vrai".
    Comparez avec Mouchamerde et sa pornographie holywodienne à aller déterrer les morts de la colonisation pour aller faire pleurer dans les chaumières. "Indigènes" bordel...C'est de la merde, la chuinerie officielle a poussé de forts beuglements de satisfaction sur un film qui puait le faux.

    Un autre film que j'ai revu récemment c'est "la moustache". J'ai adoré ce film, tout le film est basé sur un morceau de philip glass et ça, ça guérit mon anti-américanisme.

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  3. Je déteste encore plus les gens qui trouvent normal de venir me voir pour me dire "t'as vu telle série et blabla..."

    T'as vu Boardwalk Empire, Mildred Pierce, Curb Your Enthusiasm, Carnivale ?

    Je n'ose imaginer ce que pense Renaud Camus de l'engouement pour les séries télé...

    It's not TV, it's HBO !

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  4. --premier message pas passé---

    Le trône de fer (le livre) est largement inspiré des rois maudits. Les scénaristes américains lisent nos classiques du roman feuilletons, nous pas. Au XIXème nous avons inventé le genre et produit des "séries" géniales à la chaine. Les Français pensent que les ricains sont géniaux, alors qu'ils prennent tous leurs "trucs" chez Sue, Hugo, Dumas etc..
    Comme tu dis, on crève de l'oligarchie culturelle et du manque d'humilité. Pour faire du feuilleton il faut BOSSER et ne pas chercher à placer la fifille à papa (au hasard Julie Depardieu) pour qu'elle "débute" en chiant son texte grâce à l'argent du contribuable.

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  5. Moi la musique dans des séries comme Treme elle ne me dérange pas du tout...

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  6. C'est un Rome médiéval quoi.

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  7. Ne m'appelez plus jamais France20 avril 2011 à 10:57

    Dans le Parisien d'hier, y'avait justement un article édifiant sur l'amoncellement de fiascos des productions ciné françaises. cette succession systématique de catastrophes devrait déboucher sur une réaction. A moins que... Après tout, la France est tellement à la pointe de la connerie désormais.

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  8. Tiens, c'est drôle, qui tient le cinéma Français?
    Je suis prêt à réaliser ce que vous voulez mais je n'appartiens pas aux bons réseaux....

    Arrêtez de faire semblant de vous poser des questions, les réponses ont les connait depuis longtemps.

    Séb

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  9. Un chef d'oeuvre français tous les 5 ans ? Où ça ? Le "Prophète" cité, c’est bien c’est bien. Enfin je veux dire ça tient la comparaison. Ça se hausse à la hauteur des épaules, et vous avez raison de considérer déjà cela comme un miracle : on a fait 1 fois ce que les Américains font à longueur d’année… Car c’est bien cela le plus décourageant : non seulement l’Amérique est loin loin loin devant en matière de narration (c’est même presque là qu’ils nous mettent la plus grande distance dans la vue) mais en plus elle a élevé cette qualité à l’échelle industrielle. C’est du lourd produit en série, mais ça contient magré tout plus d’émotion et de savoir-faire que le Français produit à la main… Et quand on essaie de faire « mieux », on les singe, et malgré tout il ne faut pas plus de quelques secondes après le générique pour identifier la copie de l’original. C’est à se demander si on ferait pas mieux de s’abstenir, de renoncer. Après tout, c’est pas notre truc, c’est pas notre truc.

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  10. @ l'anonyme de 10h40
    Un Rome Médiéval, pas vraiment, je crois comme Kroulik qu'il vaut mieux chercher la comparaison avec les Rois Maudits.

    @XIX
    S'abstenir, renoncer, c'est pas loin aussi d'être ma conclusion. Mais mon propos porte avant tout sur la fiction tv et notre incapacité à puiser avec succès dans notre patrimoine littéraire que sur le cinéma.

    Le cinéma justement, "Un prophète" c'est pas mal mais le voir érigé, surement à juste raison en plus,comme le meilleur film français des 5 ou 10 dernières années c'est quand même symptomatique de l'état du cinoche national. Parce que si on compare à l'international dans le même temps, on peut citer, tous, une bonne 50aine de films au minimun qui nous ont plus marqué.

    L'état pathétique de notre production culturelle, cinématographique, musicale, télévisuelle dans le pays de la politique de "l'exception culturelle française" devrait largement remettre en cause les principes de cette politique.

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  11. Le cinéma français est mort parce que depuis une vingtaine d'années il s'enferme dans un code dual qui le prive de toute émancipation. Si je devait me représenter le cinéma français aujourd'hui, ce serait un vieillard croulant avec un balai dans le cul. Nos réalisateurs sont enfermés dans leur propre nombrilisme culturel, tout juste bons à nous produire des films d'auteur peine à jouir d'une condescendance digne d'un Jacques Attali, le tout noyé au beau milieu d'une flopée de potaches lourdingues vus et revus, où se succèdent encore et encore les tronches de guignols de Kad Merad ou Clovis Cornillac. Aucunes couilles, aucune ambition, juste une bande de mous de la tige qui se branlent comme ils peuvent sur ce qui reste de la Nouvelle Vague. C'est mort le cinéma français, ça n'intéresse plus personne à part quelques branle-bites élevés à l'auteurisme, donc arrêtez de nous faire chier et partez vous goinfrer devant une production Bruckheimer, comme tout prolo qui se respecte.

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  12. Ce n'est pas Courteline qui disait qu'il fallait supprimer le ministère de la culture?

    Toutes proportions gardées, quand on adapte de la SF en France, cela donne un truc moyen (Babylon Babies de Kassovitz). J'attends tout de même une adaptation d'un Pierre Bordage.

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  13. @Gaby
    Il a pompé en détail et en gros sur Druon. On retrouve des scènes entières (par ex quand la garde du mur se fait enfermer jusqu'à ce qu'ils élisent leur pap.. chef)

    Mais ce que n'avait pas fait Druon ou Hugo c'est oser écrire 900 pages sur des personnages inintéressants au possible histoire de sortir un pavé de plus en attendant de raconter l'histoire des héros (cf l'intégrale T.4 chez j'ai lu - ne l'achetez pas!).

    Balzac aussi publiait en feuilleton, la cousine bette ça ferait une "série" géniale.

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  14. C'est marrant de voir à quel point les cinéma Japonais, Thaïlandais, Anglais, etc défoncent à tout point de vue le cinéma Français, sans pour autant singer les ricains, en faisant juste quelque chose de bien.

    Mais bon, on connaît les causes de tout cela: subventions, milieu noyauté par le gauchisme à hurler, etc.

    Même le cinéma kitsch de Bollywood est plus touchant que notre gloubiboulga franco franchouille.

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  15. @BRZ Ca se voit que tu ne regardes pas de séries télé US justement.
    Depuis quelques années, le vrai talent scénaristique a quitté le cinéma pour bosser pour la télé, où les directeurs de chaines cablées leur laissent une liberté immense comparée aux studios hollywoodiens.
    Je dirais plutot que maintenant c'est l'inverse, c'est le cinéma qui est un concentré de ce qui se fait de pire en télé.
    Alors oui y'a beaucoup de merdes et de trucs déja vus qui suivent la sempiternelle formule, mais quand tu regardes des séries comme Breaking Bad, Carnivale, Oz, The Wire... tu vois que le cinéma est a mille lieux à la traine et qu'il y a vraiment une place pour l'originalité à la télé, et ce plus qu'au cinéma.
    Le cinéma français n'en parlons meme pas.

    Le problème des séries françaises c'est que soit on fait de l'adaptation a deux balles avec Gerard Depardieu soit on nous sert les "créations originales" Canal+ qui aime a croire qu'elle pourrait rivaliser avec HBO ou Showtime ou AMC... Mais au lieu de vouloir singer ces productions, pourquoi n'essayent-ils pas de faire des trucs originaux et français ?
    Parce que le français moyen les seul histoires qu'il apprécie c'est les comédie sociales ou les drames sociaux, ou tout ce qui touche au social parce qu'on aime faire des choses proches du peuple, on aime faire pleurer dans les chaumieres.
    Ca m'étonne que l'article ne mentionne pas Plus Belle La Vie, qui est quand meme le plus gros succès en série télé depuis bien longtemps. Ca veut tout dire...

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  16. Si, si, pour moi les séries américaines c'est un truc de résidence universitaire de banlieue, dans ces espèces de hangars à bestiaux, loin de tout, où tout le monde se fait chier. La seule chose qu'on peut y faire est d'aller squatter chez le mec qui a un ordinateur et une connexion internet pour regarder des séries américaines tout en mangeant des pâtes faites au micro-onde.
    C'est comme ça que j'ai vu presque tout Battlestar Galactica, la première saison de Dexter et the wire.
    C'était plutôt drôle, ça se suit bien, on peut taper la discute en même temps sans perdre le fil, on repasse trois fois les passages qu'on trouve marrants,...
    Mais regarder ça tout seul... C'est un peu comme bouffer de la pizza et boire des bières tout seul.

    Pour le cinéma français, vraiment je trouve qu'un prophète était vraiment pas mal, je ne dirais pas que c'était un chef d'oeuvre mais j'y avais vu un ton, quelque chose de vraiment émouvant, un truc que le cinéma américain est incapable de faire : quelque chose de pudique, de pas surjoué, qui tombe juste et surtout sans putain de morale à la con.
    Je pense que notre problème en France est que l'on veut absolument que notre culture brille, que ça marche, qu'on ait notre quota de chef d'oeuvre annuel.
    C'est pas ce que je demande, un truc avec pas trop d'ambition qui sonne bien de temps en temps, ça me va.
    C'est ce que j'aime bien dans le cinéma coréen, on sent que les mecs font d'abord des films pour raconter quelque chose de personnel : leur histoire, leur position dans le monde et tout ça avec l'auto-dérision d'un petit peuple très fier qui s'est toujours senti à l'étroit entre de grands empires. Ça me plait.
    Le cinéma tunisien aussi j'aime bien, le cinéma hollandais quand il était encore hollandais.
    On fera du bon cinéma quand on aura compris que la France est un petit pays de merde qui ne jouera plus jamais un rôle dans l'histoire et qu'il ne nous reste plus qu'à se moquer de notre propre vanité.

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  17. Il ne suffit pas d'avoir de bonnes histoires à la base, encore faut-il savoir les raconter. Quelque soit le genre abordé, c'est le coeur du problème en France: nos scénariste manquent sérieusement de métier. Et pourtant on en avait des bons à l'époque où notre cinéma était encore "professionnalisé" à l'américaine, avec un partage judicieux des compétences, jusqu'à ce que la politique de l'auteur à l'égo boursoufflé issu de la nouvelle vague n'ait dégénéré. Et le pire c'est que le modèle technique des auteurs US vient des "pièces bien faites" françaises de la fin du XIX° siècle si l'on n'en croit Yves Lavandier dans La dramaturgie, un bouquin que devrait d'ailleurs lire tous les scénaristes de France et de Navarre. Par contre, ne pas oublier que les anglo-saxons bénéficient du patronage de Shakespeare, y compris au niveau des défauts (même si je vénère le grand William), c'est à dire le côté parfois trop rocambolesque.

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  18. @Seb

    "Tiens, c'est drôle, qui tient le cinéma Français?"

    Ah et qui donc ? Les juifs ?

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  19. Le plus gros problème en France et dans tous les domaines : LES FRANCAIS, et de ce constat tout découle.

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