19 décembre 2010

Ne jamais laisser la vérité entraver une bonne histoire.


Au début du premier épisode de Boardwalk Empire, dernier projet en date de Martin Scorcese, on peut voir le personnage principal de la série, Enoch "Nucky" Thompson, trésorier du parti républicain, businessman, mafieux et homme fort d'Atlantic City, campé par Steve Buscemi, faire un discours devant les membres d'une ligue de vertu féminine. A la fin du laius, afin de faire chavirer le coeur des vieilles biques, il leur raconte une petite histoire de Noël, celle d'un jeune garçon pauvre et de sa famille, orphelin de père, soutien de famille, vivant d'expédients aux abords des docks de la ville quelques 30 années plus tôt. Affamé, mort de froid, le petit garçon du conte se trouve, un jour, obligé de tuer 3 rats pour ne pas mourir de faim. Grâce à son courage, lui et sa famille survivent et vous avez devinez la chute, ce jeune garçon n'est autre que lui-même, Nucky Thompson, aujourd'hui l'homme le plus puissant de la ville. Tonnerre d'applaudissements, foule aux yeux humides, Enoch a gagné le cœur de ses dames qui n'oublieront pas de voter pour lui et d'être assurées de sa vertu.
Quittant la salle en compagnie de son jeune porte-flingue, celui-ci impressionné, interroge son boss sur la véracité de l'histoire du petit garçon. Nucky lui répond dans un grand sourire :
Première règle en politique : ne jamais laisser la vérité entraver une bonne histoire.


Actuellement en salle en France, le documentaire « Le Président » sur la dernière campagne régionale victorieuse de Georges Frêche sur les bonnes terres du Languedoc-Roussillon. Le documentaire si il reste un peu superficiel est une réussite dans la lignée de celui de Serge Moati sur Le Pen 2002 ou celui de Depardon sur la « partie de campagne » de Giscard en 1974.
Au cours du docu, on peut voir l'ancien Parrain Montpellierain en meeting raconter la très belle histoire de son défunt pauvre papa, sans le sou, le ventre creux mais le cœur patriote, s'en allant s'enrôler dans l'armée à 17 ans, quittant la campagne et la maison familiale, les pieds nus, les sabots autour du cou dans le froid et la neige aux alentours de 1940. La larme à l'œil, des trémolos dans la voix, le vieux est émouvant et la salle conquise.
Quelques semaines plus tard, on le retrouve, fêtant sa réélection, entouré de ses proches et de son équipe de campagne, dans sa villa. Là, il se laisse aller à leur raconter comment son grand-père paternel a fait fortune en revendant ses terrains agricoles au prix fort à l'État lors de la construction de la ligne de chemin de fer entre Narbonne et Toulouse. Ses conseillers en communication font immédiatement le lien avec l'histoire du père sans le sou du meeting précédent et demandent au Conducator de s'expliquer. Celui-ci, rigolard, content de lui et de sa supercherie, avoue son gros mensonge sur l'air d'après tout Paris vaut bien une messe. Même ses directeurs de campagne restent abasourdis et impressionnées (on voit qu'ils auraient bien aimé l'inventer celle-là) par tant de rouerie gratuite et de cynisme.

A la fin de la séance et du documentaire, alors que les lumières se rallument, la salle applaudira longuement la mémoire de son grand homme. Cocue mais contente, démontrant par l'absurde l'efficacité de la tactique du Sun Tzu méridional de faire campagne pour les cons et confirmant la maxime de Nucky Thompson : Ne jamais laisser la vérité entraver une bonne histoire.

2 commentaires:

  1. Il faut se rappeler que Georges Frêche a toujours "été élu par une majorité de cons"

    http://www.youtube.com/watch?v=t55CC7U82nc

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  2. Frêche: "Je suis tendre aussi, si vous êtes trop tendre on vous tue, moi je tue le premier, et après je pleure.."
    http://www.linternaute.com/actualite/politique/georges-freche-film-extraits/toujours-le-premier.shtml

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