15 octobre 2010

J'ai pas la tv mais j'ai vu Sherlock 2010


Ouais ma gueule


Voyez-vous, chers lecteurs, je n'ai pas la télé. La TéVé comme disait ma grand-mère quand elle ne disait pas Le Poste, oui avec des majuscules car il se doit de trôner, royal, fier et imposant dans le salon et la vie familiale s'articuler autour de lui. j'ai poussé le snobisme à ne même pas installer le boitier ,qui permet d'accéder aux nombreuses chaines, livré avec ma box internet. Il est toujours dans son carton et me sert de cale-porte car voyez-vous chez moi y a des courants d'air. Du coup les portes claquent. Et je déteste les portes qui claquent.



Ne manquez jamais de dire que vous n'avez pas la télé. Ça fait toujours son petit effet en société. C'est un peu comme écouter du Jazz, ou plus précisément dire que vous écoutez du Jazz, si on aime les parallèles musicaux. Et peu importe qu'en réalité dans votre chaine vous attend fidèlement le best-of de Pascal Obispo qui tourne bien plus souvent dans vos oreilles que le superbe coffret du Miles Davis Quintet "The Legendary Prestige Quintet Sessions" période 55-56 avec Coltrane au sax, celui acheté en import et qui trône bien en vue sur votre étagère où il prend la poussière, ou que vous prenez votre pied sur le dancefloor au son d'une de ces insupportables compils de titres débilitants et régressifs des 80's. En société ou sur votre blog, faites semblant d'avoir biberonné au son de New Orleans, cela vous vaudra les commentaires respectueux des quelques amateurs et les autres, se sachant cons et peu cultivés, passeront leur chemin. Mieux, mais il faut être équipé, un petit topo ou une vidéo sur ce bœuf épique au sous-sol d'un club, ravira à coup sûr l'auditoire et ne vous obligera pas à dévoiler que vous y avez été trainé par une connaissance et que vous n'avez accepté de subir les 2h de délires free jazz d'un puceau au physique Nabien, que parce que vous saviez de source sûre que la bière y était bonne et que vous caressiez le secret espoir de tirer un coup à la fin de la session (de toutes façons elle va pas y couper la connasse, c'est moi qui ai les clés de la tire).


Wha les guitares !!!


Ne manquez jamais de dire que vous n'avez pas la télé, disais-je. Mais attention à cibler votre public. Il faut qu'il soit à même de décrypter la démarche intellectuelle. Il y a quelques années, au cours d'une de ces folles nuits que seules les missions d'intérim en milieu hostile de la grande distribution, sont à même de vous procurer, il m'a fallu avouer à mon partenaire d'un soir que je n'avais pas la télé. Le malheureux essayant désespérément, entre deux boites de conserve, de lier conversation en s'appuyant sur différents programmes tv fédérateurs et totalement inconnus de moi. Stupéfait et très malheureux pour moi il me lâcha un terrible "hébé tu dois vraiment être très pauvre" avant de se détourner définitivement de moi de peur que pareille pauvreté ne s'attrape.


AHA et ils ont même pas la TNT


Je n'ai pas la télé. Mais pourquoi ne pas avoir la télé? Sache lecteur que c'est avant tout un acte militant, tu vois quoi? C'est pour montrer mon profond dégout face à cette machine à décérébrer, t'as vu ? Nan ? Bon en vrai, un jour, après une forte tempête, l'antenne tv a pris l'eau et s'en est pas remise. J'ai mis 3 ans avant de monter sur le toit pour constater les dégâts. Un peu par flemme, un peu par vertige, un peu par désintérêt.Ça m'a permis de me désaccoutumer. Comme ça ne me manquait pas vraiment, j'ai laissé tomber.

Je n'ai pas la télé, mais faut quand même que je vous l'avoue j'ai internet. Et ne pas avoir la télé en ayant internet, c'est pas vraiment ne pas avoir la télé. C'est un peu comme être un punk à diplomes. Mais si ! Les punks à diplomes, ça pullulait y a un ou deux ans. Alors un punk à diplômes, c'est un mec ou une nana, qui a tout bien fait comme papa et maman, qu'a fait son droit comme papa et maman, qui est bien allé à l'église comme papa et maman, qui a marié Marie-Christine comme papa a marié Marie-Odile, qui est ou aspire à être cadre comme papa et maman, qui est bien inséré dans le système et qui ne moufte pas le jour comme tu sais qui, mais qui, le soir venu, écrit des cochonneries racistes sur internet. Un punk mais à diplômes. C'est un peu comme un "certifié réacosphère". Il (ou elle) a bien un Iphone, un Ipad, un blog perso, un blog collectif, un compte facebook, un compte tweeter, un abo au club de gym etc mais c'est un réac. On imagine difficilement ce qui se serait passé si il était mainstream.


Punk à dîplomes


Ne pas avoir la télé mais avoir internet, ce n'est pas prendre beaucoup de risques, même si la télévision est le plus grand instrument de contrôle des masses en attendant que le système comprenne bien comment fonctionne son petit frère très prometteur : internet. Certes j'échappe aux robinets à clips modèle MTV, les robinets à sons façon NRJ. Je les ai remplacés par deezer, youtube et dailymotion. J'échappe à Pernault le midi, à Black Pernault le soir, aux guignols de l'infos, à Ruquier, à plus Belle la vie, à Nagui, à la téléréalité, à Denisot, mais chaque fois que j'ouvre google actualités je ne manque pas d'avoir droit aux résumés des aventures de secret story (jamais ça s'arrête cette merde ?) et FullHDready, le type avec le chien qui hurle à la mort, me condense les talks en résumés efficaces et voyeurs. J'ai maté la coupe du monde sur le site de TF1, je pompe des kilomètres de documentaires sur megaupload. La seule chose finalement qu'internet nous apporte c'est le choix.


Pas vu à la TV


J'ai pas la télé, vous commencez à le savoir. Ca m'a permis de presque échapper à la déferlante de séries qui a remplacé le film de papa. J'ai jamais vu Lost ou 24h ou Dr House. Je n'aime pas les séries policières donc je ne manque rien à ne pas connaitre The Shield, les Experts à Limoges ou NCIS, j'ai même jamais vu Navarro ou Julie Lescaut. En fait j'ai jamais vraiment dépassé le stade de la série à vocation comique, de la plus mainstream, Friends, les Simpsons, Malcolm aux trucs plus décalés 6 sexy, Father Ted, Dream On, Game On, Bastard du temps où j'avais le cable.

Je n'ai pas la télé, alors je télécharge.J'ai quand même essayé. Je me suis enthousiasmé pour Rome (comme en leur temps pour les Soprano ou Profit), pour le début de Heroes, les premiers épisodes de Jericho, un peu Weeds, Dexter m'ennuie (j'ai commencé la saison 2), Breaking Bad j'accroche pas, la caravane de l'étrange non plus. Spartacus ou les Tudors non plus. En fait le principe des séries américaines m'agace. Il n'y a pas vraiment pour objectif de raconter une histoire. Le seul but est que le spectateur soit devant sa télé pour l'épisode suivant et si possible 5 minutes avant pour profiter du tunnel publicitaire. Les séries américaines sont basées sur une frustration permanente, elles sont miroir, caractéristiques de la société du désir. Un désir qui laisse toujours le spectateur/consommateur sur sa faim. tu te fais chier pendant 30-35 minutes. Tout s'accélère les 10 dernières minutes, te laisse pantelant à la fin de l'épisode, vite la suite ! Tu enchaines et t'es déçu, le développement est très loin de satisfaire tes exigences, est évacué en 5 minutes et c'est reparti pour 30 minutes molles, dix minutes d'accélération et ce sur des dizaines d'épisodes. Au final reste une impression de vide.


La tentation du Fist


Jusqu'à ce que je découvre la dernière adaptation des aventures de Sherlock Holmes par la BBC. Pourtant le concept était casse gueule : adapter les aventures de Sherlock et de son sidekick biographe le Dr Watson à notre époque. Plutôt bateau et après des décennies de déconstruction du mythe Holmesien voire de parodies on ne pouvait qu'être déçus. Surtout la question, à l'époque de la police scientifique, des Experts ou de la Strike Force, qu'attendre du héros de Sir Arthur Conan Doyle ?
La première saison ne comporte que 3 épisodes. Chacun dure 1h30 et promet une aventure complète. Oubliée la structure de frustration habituelle, on se concentre sur l'histoire et les relations entre les deux protagonistes. Seulement 3 épisodes pour une saison, quand on sait qu'on ne rentre dans une série généralement qu'au bout de 3-4 épisodes, le pari est risqué. Et la BBC a mis de gros moyens. Des moyens qui ont fait grincer des dents en Angleterre, car payés avec l'argent du contribuable. Et le pari est tenu.


Batman et Robin


Le premier épisode est bluffant, plus proche d'un film que du budget d'une série. Il pose l'histoire, est superbement rythmé, porté par une bonne bande-son et un scénario adapté de l'aventure "une étude en rouge", l'humour froid omniprésent, On découvre en premier Watson, puis l'inspecteur Lestrade et enfin vient Sherlock, le nom de Moriarty est prononcé bien que celui-ci soit absent de l'épisode. Holmes est insupportable sans être cabot et même le falot Watson gagne en envergure. La série se veut originale tout en gardant un fort ancrage dans le canon Holmesien. Certes les personnages ont été rajeunis, il manque le Londres victorien et Watson a rasé sa moustache mais Guy Ritchie les avait à disposition pour son film et au final faire un Sherlock popcorn. Pour pinailler, on peut regretter qu'ils n'aient pas osé présenter la facette héroïnomane de Sherlock Holmes. Mais Sherlock 2010 est bien de son temps, utilise des patchs pour se sevrer du tabac et est cocaïnomane à ses heures perdues. Si les deux épisodes suivants rentrent un peu dans le rang, l'ensemble de la série reste largement dans le haut du panier de la production de ses dernières années.

Normalement la série devrait être diffusée sur France 4 d'ici la fin de l'année. Espérons que la vf soit à la hauteur de la vo. Une VO avec des sous-titres français de très bonne qualité, bien qu'amateurs est facilement trouvable sur le net. Car je n'ai pas la télé (et j'écoute du jazz) mais j'ai vu Sherlock Holmes 2010 avant qu'il n'y soit diffusé !


En exclusivité, les réactions de la presse :

Les Inrocks : Jouissif !!
Morsay : ça encule grave sa mère la pute !
Telerama : Jubilatoire !
Sexion d'assaut : Holmes et Watson c'est des PDs, sont rop chelous
Canal + : Oh ! oh ! nous aussi on fait des séries qui coutent un max de thunes et personne regarde !!
La Halde Communique : encore une série bien pâle, nous pensons que Watson aurait mérité un traitement plus imaginatif et aurait gagné à être représenté sous les traits d'un pachtoun

10 commentaires:

  1. "Pour pinailler, on peut regretter qu'ils n'aient pas osé présenter la facette héroïnomane de Sherlock Holmes."

    Présentée, non, mais au moins suggérée.

    Dans je ne sais plus quel épisode, Lestrade menace Holmes d'une perquisition en profondeur pour trouver de la drogue chez lui s'il ne coopère pas à l'enquête.
    Watson dit : "comme si Sherlock se droguait !" et se tourne vers lui; Holmes a un regard qui dit tout.

    Donc c'est vrai qu'ils auraient pu le montrer plus clairement mais il faut peut-être en laisser pour les prochains épisodes.

    NB : ce qui a fait grincer des dents, ce n'est pas tant le budget, certes élevé, que le fait que le 1er épisode ait été filmé entièrement 2 fois : la première version n'ayant pas été jugée satisfaisante, ils en ont tourné une autre (celle diffusée) à plein budget. Ouch au portefeuille.

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  2. Pas héroïnomane, cocaïnomane (en injection).

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  3. Première épisode très bon, troisième aussi, le second m'a fait pensé au jour où j'avais trouvé l'intégrale de "Fu Manchu" à la bibli.

    Sinon, les clins d'oeil récurents à la "communauté" de spectateurs gay sont assez pénibles. A chaque épisode on y a droit, c'est gonflant.

    Ceci dit, c'est un bonheur d'entendre des gens s'exprimer en bon anglais et je trouve la transposition excellente.

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  4. Les meilleurs épisodes sont le premier qui est, comme déjà dit, tout bonnement excellent et le dernier. Les deux épisodes du mitan sont quand même plus faiblards.

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  5. Scuze, il y en a que trois (bizarre, je croyais en avoir vu 4)!!
    C'est de toute façon bien meilleur que le film de G.Ritchie sortie peu avant.

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  6. Je vais me mater ça ce soir.

    J'ai entendu dire que Guy Ritchie allait s'attaquer à une des oeuvres d'Agatha Christie avec un Hercule Poirot Free-fight.

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  7. @Paracelse

    Mmmm ça a l'air chouette comme optique. J'espère qu'il y aura des Yamakasis.

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