6 juillet 2010

Ménard sans interdit : la France a peur (et pourquoi aucun gouvernement, pas plus que la justice, ne fera rien)



Pour donner une idée de l'univers mental dans lequel pataugent les économistes officiels, on peut se référer à l'exemple élémentaire imaginé par Jean Gadrey et Florence Jany-Catrice dans Les Nouveaux Indicateurs de richesse (La découverte, 2005, p.21) : « Si un pays rétribuait 10 % des gens — notent ainsi ces deux auteurs — pour détruire des biens, faire des trous dans les routes, endommager des véhicules, etc., et 10 % pour réparer, boucher les trous etc., il aurait le même PIB qu'un pays où ces 20 % d'emplois (dont les effets sur le bien-être s'annulent) seraient consacrés à améliorer l'espérance de vie en bonne santé, les niveaux d'éducation et la participation aux activités culturelles et de loisir. » Un tel exemple permet, au passage, de comprendre l'intérêt économique majeur qu'il y a, d'un point de vue libéral (et comme Mandeville est le premier à l'avoir souligné, dès le début du XVIII° siècle), à maintenir un taux de délinquance élevé. Non seulement, en effet, la pratique délinquante est, généralement, très productive (incendier quelques milliers de voitures chaque année, par exemple, ne demande qu'un apport matériel et humain très réduit, et sans commune mesure avec les bénéfices ainsi dégagés pour l'industrie automobile). Mais, de plus, elle n'exige pas d'investissement éducatif particulier (sauf, peut-être, dans le cas de la criminalité informatique)), de sorte que la participation du délinquant à la croissance du PIB est immédiatement rentable, même s'il commence très jeune (il n'y a pas ici, bien sûr, de limite légale au travail des enfants). Naturellement, dans la mesure où cette pratique est assez peu appréciée des classes populaires, sous le prétexte égoïste qu'elles en sont les premières victimes, il est indispensable d'en améliorer l'image, en mettant en place toute une industrie de l'excuse, voire de la légitimation politique. C'est le travail habituellement confié aux rappeurs, aux cinéastes « citoyens » et aux idiots utiles de la sociologie d'état.
L'empire du moindre mal, essai sur la civilisation libérale, Jean-Claude Michéa, p. 113-114, Champs essais, Flammarion.

Je rajoute à ça, l'avantage pour le néolibéralisme économique de bénéficier des avantages psychologiques d'un environnement anxiogène chez le consommateur, tâche que se partage la délinquance, avec les lendemains désenchantés de la précarité du travail, la destruction de la cellule familiale et le transfert de l'autorité parentale au matketing, et la violence dans les médias, moteur en amont de la consommation par le désir.

16 commentaires:

  1. Po po po po po... L'équation du PIB me semble un peu foireuse. Et même si elle était vraie, on ne peut pas accuser notre société de nous priver côté promotion de la santé, rallonge de l'espérance de vie, gavage d'éducation et d'activités culturelles et de loisir... On en crève, de ses efforts en ce sens, au moins autant que de la délinquance !

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  2. Mauvais raisonnement : la société perd la valeur des objets inutilement détruits .
    Un autre économiste Frédéric Bastiat au XIX° siècle, libéral, démonte cet argument par son "sophisme de la vitre cassée" : http://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme_de_la_vitre_cass%C3%A9e

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  3. Il en conclut que « la société perd la valeur des objets inutilement détruits », ce qu'il résume par : « destruction n'est pas profit. »
    C’est surtout ce raisonnement qui est un beau sophisme. Bastiat, qui m’a souvent fait marré et qui était capable de toutes les ritournelles dialectiques pour justifier son lumineux libéralisme, ne prend pas en compte les taxes dont se sucre l’état dans son raisonnement un peu simpliste.

    Extrapolation N° 1
    1 – Raymond s’achète une vitre. Le vitrier est jouasse et l’État engrange sa taxe.
    2 – Rokhaya Diallo la délinquante tire au fusil à plombs et brise la vitre de Raymond, car il a un prénom moisi de Céfran.
    3 – Raymond se rachète une vitre. Le vitrier est rejouasse et l’État re-engrange une seconde taxe.

    Extrapolation N° 2
    1 – Raymond s’achète une vitre. Le vitrier est jouasse et l’État engrange sa taxe.
    2 - Rokhaya Diallo la délinquante s’apprête à tirer au fusil à plombs sur la vitre de Raymond, mais ce dernier la désarme et l’avoine comme il se doit.
    3 – Raymond trainasse chez Eram et s’achète une paire de souliers. Eram est jouasse et l’État engrange sa taxe.

    Conclusion :
    Pour l’État, c’est kif-kif bourricot. Que l’on casse ou pas la vitre de Raymond, c’est du pareil au même et dans ce sens-là, je suis d’accord pour admettre que la délinquance n’a pas grand intérêt pour lui, mais de là à dire que « destruction n'est pas profit. » est une bonne blague bien poilante. Mais là où ça peut devenir juteux, c’est que dans une époque où la consommation de nécessité ne suffit plus à faire tourner la machine économique à cause de la baisse tendancielle du taux de profit, cher à Marx et Weber, et où seul le désir d’artefacts superficiels, donc de bien-être psychologique, est en mesure de pallier à ce problème foncier, la délinquance peut s’avérer être un allié dans le cadre d’un environnement anxiogène souhaitable pour la population. Surtout que la délinquance est un danger réel, au contraire des simulations audiovisuelles de la mise en scène de la violence.
    Si depuis ce gouvernement, on a droit à une multiplication des faits divers due à la délinquance, ce n’est pas pour régler le problème, comme l’on crut les électeurs du FN qui ont voté Sarko, mais pour maximiser médiatiquement cet environnement anxiogène. Ce qui tombe bien avec la crise.

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  4. Puisque vous faites une très belle citation de Michéa en voilà une autre d'Hannah Arendt qui nous explique Hobbes et l'évolution de la délinquance produit de l'état bourgeois et libéral:

    "Selon les critères bourgeois, ceux à qui la chance ou le succès ne sourient jamais sont
    automatiquement rayés de la compétition, laquelle est la vie de la société. La bonne
    fortune s'identifie à l'honneur, la mauvaise à la honte. En déléguant ses droits politiques à
    l'État, l'individu lui abandonne également ses responsabilités sociales: il demande à l'État
    de le soulager du fardeau que représentent les pauvres, exactement comme il demande à
    être protégé contre les criminels. La différence entre indigent et criminel disparaît - tous
    deux se tenant en dehors de la société. Ceux qui n'ont pas de succès sont dépouillés de
    la vertu que leur avait léguée la civilisation classique; ceux qui n'ont pas de chance ne
    peuvent plus en appeler à la charité chrétienne.
    Hobbes libère tous les bannis de la société - ceux qui n'ont pas de succès, ceux qui n'ont
    pas de chance, les criminels - de toutes leurs obligations envers la société et envers l'État
    si ce dernier ne prend pas soin d'eux. Ils peuvent lâcher la bride à leur soif de pouvoir et
    sont invités à tirer profit de leur aptitude élémentaire à tuer, restaurant ainsi cette égalité
    naturelle que la société ne dissimule que par opportunisme. Hobbes prévoit et justifie
    l'organisation des déclassés sociaux en un gang de meurtriers comme une issue logique
    de la philosophie morale de la bourgeoisie."

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  5. @paracelse,
    J'avoue ne rien comprendre à votre démonstration.
    L'Etat n'a aucun intérêt économique à maintenir la délinquance. Vous l'avez prouvé.
    Raymond après le passage de Rokhaya s'est appauvri (Une vitre eu lieu d'une vitre et une paire de chaussure)
    Le vitrier est jouasse.
    Le chausseur a les boules.
    Quant au psychologique: on peut aussi dire que Raymond se chie dessus au cause des frêres de Rokhaya et après s'être de nouveau ruiné à vendre sa baraque à perte pour déménager il va voter FN. Donc intérêt pour le gouvernement : nul.
    Mais bon ça doit être quand même la faute des bourgeois, au grand capital tout ça tout ça...

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  6. Vous vous épuisez trop à reflechir ainsi.
    La délinquance, on ne dit rien car l'antiracisme institutionnel sanctuarise les auteurs.
    Pour la suite, il ne s'agit que de la mise en place du concept eurabia...

    La reflexion tendant à dire que 10% de degradations + 10% de reparations = 20% d'activité économique est fausse.

    Relire la parabole du vitrier de Bastiat

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  7. si je dois racheter une voiture, je ne peux pas acheter une nouvelle télévision HD.
    donc ce n'est pas bon pour les fabricants de télévision.

    ensuite certes il y a l'assurance mais le cout de l'assurance monte pour tout le monde avec la délinquance.
    Pouvoir d'achat en moins pour les possédants de voiture

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  8. ce qui est valable dans cette histoire d'insécurité c'est que la population du frankistan se bourre de tranquilisants et d'antidépresseurs
    bonne nouvelle pour les prescripteurs les pharmaciens et l'industrie du médicament
    mauvaise nouvelle pour tout le monde et surtout
    - ceux qui paient les charges sociales
    - ceux qui ont la charge de rééduquer les défaillants psychologiques (les psycholoques quoi)

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  9. Du Japon, je rigole bien.

    Merci Para, tes démonstrations autant que celle de Michéa sont "lumineuses".

    Visiblement, si on vous suit, nos banlieues sont des réservoirs de croissance insoupçonnées, sans parler de vecteurs de création de richesse fantastiques !

    Demain, je pars m'installer dans un township d'Afrique du Sud produire des vitres et des voitures en espérant qu'elles soient brisées ou incendiées !

    L'avenir s'annonce radieux ! Vive la délinquance !

    Clarence, le méchant grand capital

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  10. Je ne sais pas pourquoi, mais voir dans un même post un texte de l'immense Michéa et une vidéo de Ménard interviouveur de Lemoine censés illustrer le même sujet (ou la même idée !!???) me rend un peu malade (je vous rassure, juste une envie de roter)...

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  11. C'est vrai que d'une manière générale le capital aime que ses productions durent dans le temps, y'a qu'à voir l'électroménager.

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  12. @ babouche
    "le capital aime voir que ses productions durent dans le temps"
    les capitalistes surtout
    par exemple ma patek-philippe a 30ans et n'a pas une ride
    je préfère ça à la toccante gucci de ma secrétaire qui est naze au bout de 5ans
    ceci dit elle serait incapable d'apprécier un garde temps pareil
    c'est d'ailleurs pour ça qu'elle est secrétaire

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  13. Pour appuyer la démonstration de Paracelse, je rajoute une couche de rideaux métalliques roulants, des alarmes à bip-bip et autres détecteurs de fumées, des extincteurs, des caméras de surveillance et les écrans qui vont avec, de la maintenance, saupoudrez de vigiles sortis d'un concours de neuneux. Industrie de la délinquance, industrie de la déliquescence (non, il y a pas de mots subliminaux: délit/essence).

    Séb

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  14. @camarade capitaliste

    Une montre qui dure 30 ans ça n'a rien d'un miracle, c'est plutôt le fait qu'elle ne passe pas la demi-décennie qui est un scandale.

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  15. N'importe quoi Ménard
    http://moreas.blog.lemonde.fr/2010/08/04/le-crime-de-sang-ce-truc-d%E2%80%99un-autre-age/

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  16. L'une des raisons de ce laxisme est politico-pétrolière, ce sont les maghrebins qui ont la plus grosse réserve de pétrole sur terre, si vous voyez ce que je veux dire...

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