20 décembre 2006

Ces mots étranges...

Il est de ces mots qui nous surprennent, nous font peur, nous dérangent pour des raisons obscures.
Non, je ne parle pas de ces poncifs vagis par les « djeunzes » dans le cadre d’un questionnaire ou d’une interview démago, bidon et inintéressant(e). Le « journaliste » d’un air inspiré : « Quel est le mot que tu détestes ? » Les garçons, œil morne, lippe boudeuse, diction traînante : « Ouais, racismeuh… » ou « Intoléranceuh ». Les filles, dans les aigus, lèvres pincées sur leur cigarette et main dans les cheveux : « Ouais, racismeuh » ou « Intoléranceuh ». Elles rajoutent aussi souvent « égoïssssssme ». Mais là, elles viennent de penser à leur copain. Oh oui, ces mots font peur. Eux aussi.

Non, je pense à ces mots étranges, fuyants, au sens glissant, inconnus de nous et entendus pour la première fois, ces mots que l’on sait qu’on va les oublier dans l’heure et on s’en veut déjà, ceux dont la sonorité perdure mais la signification se dérobe et dont on n’ose se servir, de peur de passer pour une truffe.

Il y 10 ans, mon professeur de linguistique nous subjuguait : « Le vocabulaire moyen d’une concierge se compose de 500 mots ». Discours archaïque sur bien des points. Qui se préoccupe désormais du nombre de mots maîtrisés par les concierges ? Qui plus est, les concierges ne fournissent plus un support d’études linguistique ou autre depuis des lustres… Et 500 mots de vocabulaire, voilà qui est honorable au vu de la lexie de nos jeunes. Cela dit, je suis une mauvaise langue. Leur vocabulaire s’enrichit de pléthore de termes étrangers et néologismes abscons. Quoique nos concierges d’antan aussi. Mais du parler pipelet se dégageaient tout de même un autre charme et une saveur indéfinissable. Parfois, Audiard lui-même se tenait dans l’escalier, en blouse avec un balai. Bon je m’éloigne...

Oui, ces mots qui nous fuient….qui ne nous inspirent pas confiance, car aussi inattendus qu’une plaque de verglas en plein réchauffement planétaire. Argutie, captieux, cautèle, congruence, prodrome, melliflu, messeoir. D’aucuns (car le lectorat du CGB se compose d’êtres exquis dotés d’une culture universelle et d’une subtilité consommée), affichant une belle maîtrise de notre langue s’étonneront de mes angoisses et incertitudes lexicales. J’en appelle à leur mansuétude et indulgence. Ma mère était concierge...

Jolie carnation éburnéenne... ça doit coûter la peau des ...

Les mots qui nous surprennent… Éburné… Je me suis faite surprendre. Non, ce terme ne provoque pas forcément une violente douleur. Ne se prononce pas au sol, en position fœtale, les deux mains entre les cuisses. Et figurez-vous que cet adjectif accepte même le féminin. Pas un soupçon de sexisme. Qui plus est, il appartient à un niveau de langage soutenu. Donc, dans un dîner, une réception, vous l’emploierez avec aisance et distinction, sans rougir, ni balbutier, car le é- n’a ici rien de privatif, comme dans étêté (M. Fouquet, lâchez cette guillotine) ou édenté, par exemple. Son frère « éburnéen » ne vient pas d’une planète peuplée de pleutres. Ne qualifie pas davantage la longue mélopée triste des eunuques dans les harems du calife. Et l’éburnation n’est pas une pratique barbare visant à assurer la pérennité (quasiment antinomique ou absurde, au choix) des Petits Chanteurs à la Croix de Bois. Bande de butors… Éburné(e) qualifie quelque chose qui a la couleur ou la consistance de l’ivoire. Et toc. Un os éburné, une peau éburnéenne. En anatomie, la substance éburnée fait référence à la dentine. Et je vous assure que l’éléphant qui a fourni l’ivoire du bracelet de votre grand-mère, mère ou copine ne s’est pas fait « éburner ». On lui a juste arraché les dents de sagesse. Il est resté digne jusqu’au bout. Les braconniers sont des mâles aussi, tout de même.


Nomenclature des soins : KC20 + KC40...


La prochaine fois, je m’émerveillerai de la « floribondité ». Ou pas. Joyeux Noël…

7 commentaires:

  1. Toute ma vie n'a été que la longue et morne attente de ce moment...

    Bravo Beth!

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  2. Miracle !!!

    Bon maintenant le CGB peut crever en paix ...

    SKY.

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  3. Mon dieu c'est noël ! Hell's Beth se meut !

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  4. Ok balance moi une photo, je te ferai une plaque CGB.

    Sky.

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  5. Oui, l'esprit de Noël souffle sur le CGB. Et comme le dit le Fils de l'Homme, le vent glacé aussi. Pas possible de rester plus de trois nuits dans les foyers d'accueil. Alors je m'incruste. Merci de votre enthousiasme. (Poils dans la main... Je t'en foutrais...)

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  6. on va t'appeler Mrs Manhattan.

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  7. La poule au pot belge pendant que tu y es...

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