22 mars 2017

Penser contre soi-même

penseur 

Penser contre soi-même, dit le philosophe. Oui, certes. S’il n’y avait pas déjà le reste du monde pour s’y employer. Penser contre soi, être sans ménage pour ses conclusions, pour ses certitudes : très bien. Bien que cette gymnastique relève un peu à mon sens de la coquetterie pour intellectuel de plateau : il est gratifiant de s’imaginer que l’on pense contre soi ; le proclamer comme une maxime personnelle est un moyen pour habiller sa fatuité avec les atours de la modestie. 

Penser contre soi-même, oui, mais tandis que l’honnête homme y songe, humble, réfléchi, se faisant intransigeant avec sa propre réflexion, tout autour ce sont les champions de l’auto-affirmation qui triomphent et obtiennent gain de cause : le Rappeur, la Féministe, la Minorité victimaire, la Traînée de télé-réalité, tous se caractérisent au contraire par une prodigieuse indulgence envers eux-mêmes. A eux on ne demande jamais de penser contre soi.

Penser contre soi-même, oui : par temps calme et quand la météo permet à l'intelligence de s’exercer librement. Mais lorsque les vents contraires font déjà ployer vos voiles, lorsque les propagandes adverses hurlent en bourrasques, il n’y a peut-être rien d’autre à faire que de penser bêtement dans son propre sens, penser contre les autres, pour contrebalancer.

Penser contre le monde, contre les autres, contre tous les autres : n'est-ce pas bien plutôt cela qui en toute circonstance, a constitué la seule boussole de notre réflexion ? Nous aimerions nous laisser croire, comme l'intellectuel de plateau, que nous avons pensé contre nous, mais l'honnêteté nous pousse à reconnaître que c'est en faisant le contraire que nous avons avancé jusque-là. Il est même possible, après tout, qu'un assez bête esprit de contradiction nous anime et que nous ne pensions ceci sur tel sujet que parce que nous percevons que le reste du monde pense cela. Si le monde se mettait à penser autrement, peut-être changerions-nous d'avis pour penser du côté où le monde ne penche pas.

La vérité, c'est que nous avons le goût des polémistes, de la controverse. Le goût du blasphème envers l’idée commune. Et alors ? Nietzsche écrivait qu’une philosophie, une opinion, sont moins le fruit d’un raisonnement pur que la résultante d’une vie, d’une biographie, celle de l’auteur, expliquant à elle seule qu’il opte pour telle ou telle idée. Peut-être faut-il aller plus loin et assumer que nos convictions soient encore moins consistantes que cela : non pas le fruit d’une biographie, d’un parcours, mais d’une simple humeur, un tempérament qui nous porte vers telles idées, tels livres, plus aimables à notre nature. Il est évident qu'on apprécie certains auteurs, peu importe la véracité de leur raisonnement, parce qu’une filiation d’humeur existe avec eux, tandis qu’on néglige d’en fréquenter d’autres, bien qu’ils puissent être dans le vrai, parce qu’ils ne nous "parlent" pas. La raison a très peu à faire dans tout cela. Il ne tient pas à nous de développer des idées optimistes ou pessimistes, libérales ou sociales, légères ou profondes… mais seulement à une prédisposition de caractère. Les justifications, les raisonnements, viennent s’ajouter après coup.

Il y a ainsi des personnes d’humeur majoritaire, par exemple, qui aiment se trouver du côté du nombre et qui en conséquence, naviguent instinctivement vers le sens convenu et les idées dominantes. Et à l’autre bout, les personnes qui adoptent les idées bancales, boiteuses ou minoritaires ne le font pas parce qu’ils sont plus malins, mais parce qu’ils ont simplement dans le sang l'humeur marginale. Que les équilibres viennent à changer et les uns comme les autres changeront leurs idées, pour se maintenir. En réalité, il n'y a pas de « courants de pensée » mais des courants d’humeur intellectuelle, autour desquels s'agrègent les esprits.

21 mars 2017

A l'Orient




Quand j’ai lu La confession négative, j’avais vingt-un, peut-être vingt-deux ans. Arrivé sur le tard à la lecture et à la vie après une adolescence lugubre passée dans Cicéron, Démosthène et la masturbation, ma géographie littéraire se composait des Chants de Maldoror, des Falaises de Marbre, du Désert des Tartares, de Salammbô et du Guépard, ce qui suffisait à m’agiter l’esprit de pensées enfiévrées où cohabitaient la conscience claire de la putréfaction de ma race et le désir insensé et inarticulé de hautes entreprises, qui devaient nécessairement se situer ailleurs, en d’autres contrées, d’autres époques ou d’autres horizons, en tout cas loin d’ici, la lecture d’American Psycho m’ayant révélé l’impasse du monde dans lequel mes études supérieures et mon milieu social me destinaient à entrer.

17 mars 2017

Le radeau médusé

 
"Une campagne à m'arracher les cheveux."

Mille sabord-ages ! Tonnerre de Paris-Brest ! Quel courage ! Bachibouzouk en rade. La résistance, c'est rarement dans le sens du vent.

Et les bobos ils feraient quoi ?
Ils émigreraient sûrement en Seine-Saint-Denis avec femmes et enfants pour tout bouclier humain.
Ils inscriraient leurs enfants dans le public.
Ils déclareraient le hall de leur immeuble terre d’asile pour quelque gang de dealers.
Les plus féministes de leurs femmes s’en convertiraient à l’Islam.
Les courageux Parents-1 ouvriraient des centres d’accueil pour les journalistes babtouphobes du Bondy Blog.
Ils iraient reprendre Palmyre à Daesh avec Al Qaida et Laurent Fabius pour tout ô capitaine mon capitaine.
Ils transformeraient le Sacré-cœur en mosquée. 
Un Achab pour tous ces macchabées qui marchent. Vite.

9 mars 2017

Les gens qu'on déteste : les femmes enceintes



Ce ne sont pas les occasions de détester nos semblables qui manquent, c’est le temps. A l’homme moderne, il n’est pas permis de répandre sa haine sur tous ceux qui la mérite, faute de temps libre, et d’énergie. A briguer une haine sans exception, on s’épuiserait vite. Nous sommes donc contraints, (avec quels regrets !) de faire une distinction parmi les gens qui n’en ont aucune, et de sélectionner une élite entre ceux qui insultent jusqu’à la notion d’élite. Comme l’a dit un éminent philosophe (que, par modestie, je ne nommerai pas), s’il fallait courir mettre une gifle à tous ceux qui le méritent, la vie ne serait plus qu’un interminable galop. Cette semaine, je vous propose de détester les femmes enceintes.