12 mai 2015

Génies ailés et autres Victoires

Dans son journal, alors que de retour d’un dîner il marche dans Paris de nuit, Ernst Jünger fait cette description saisissante :

« Le génie ailé de la Bastille, avec son flambeau et les tronçons de chaîne brisée qu’il tient dans ses mains, éveille en moi, chaque fois que je le vois, l’impression toujours plus vive d’une force extrêmement dangereuse et qui porte loin. Il donne le sentiment à la fois d’une grande rapidité et d’un grand calme. On voit ainsi exalté le génie du progrès, en qui déjà vit le triomphe d’incendies à venir. Tout comme se sont unis pour l’instituer l’esprit plébéien et l’esprit mercantile, il conjugue en lui la violence des Furies et l’astuce de Mercure. Ce n’est plus une allégorie ; c’est une véritable idole, environnée de ces souffles d’une violence terrible qui, de tout temps, ont auréolé ces colonnes d’airain. » 


J’étais ravi de lire cette explication qui est en même temps une terrifiante mise à nu, car cet espèce de faune enfantin et doré m’a en effet toujours causé un malaise sans que je puisse dire lequel.

Joie de trouver la description si nette d’un sentiment pour le moins confus. Joie de courte durée cependant, puisque reprenant le texte quelques heures après afin de le recopier, je réalise qu’il est question de la statue de la Bastille, et non de celle du Châtelet comme j’avais cru le lire ou comme je me l’étais en tout cas imaginé. Moyennant quoi le diablotin en haut de la colonne du Châtelet reste l’objet véritable de ma phobie.

2 commentaires:

  1. Il est beau celui-là. La coupe, le poignard et le turban, le tout surmonté d'un ridicule bonnet de clown. Enfin je ne vois pas très bien d'ici mais il apparaît bien que la posture titubante de l'ensemble résume bien à elle-seule le devenir de l'esprit républicain en germe. Vous avez l'oeil, cher Xix, et le bleu.

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  2. ben moi, à part me foutre un torticoli...

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