19 octobre 2014

Le plug anal mis à mal par ses dénégateurs mêmes



Il faut reconnaître un mérite aux cyniques : ils disent clairement ce qu’ils font. Ils ne trafiquent pas leurs coups en douce, ils plastronnent. Un peu comme les terroristes qui revendiquent leurs actes, ils n’hésitent pas à dire : cette merde que vous découvrez posée sur votre paillasson, eh bien, c’est la mienne !

Paul Mc Carthy est un cynique. Pour un artiste contemporain, le qualificatif est banal. Toute son œuvre est placée sous le signe de la défécation, de la sodomie, de la laideur formelle et de la mise en scène de l’ignoble. Il est comme ça Paulo, il colle à son époque. Il en adopte en général le cynisme ordinaire et ne fait pas mystère de son inspiration. Il y a une dizaine d’années, par exemple, il créa une œuvre excessivement familiale pour la ville de Rotterdam : un père Noël (Santa Claus) de six mètres de haut, exhibant – surprise, un plug anal ! On se demande pourquoi le personnage gentil qui apporte des jouets aux enfants suffisamment innocents pour croire en lui se promènerait avec un tel objet, mais enfin, s’il fallait chercher une raison à tous les fantasmes de nos artistes majeurs, on n’en sortirait pas. A l’époque, lecteur abasourdi, l’œuvre s’appelait tout simplement Santa Claus with a butt plug. Au moins les choses étaient-elles claires.



Hélas, même le cynisme n’est plus ce qu’il fut, et notre enculé artistique n’a même plus assez de jus pour oser nommer simplement les objets qu’il aimerait voir séjourner dans nos fondements. Sur la place Vendôme, son gros truc vert est intitulé Tree : l’arbre qui cache la forêt, sans doute. Du reste, ses défenseurs municipaux l’ont bien dit : c’est un sapin. Peut-être de ceux au pied desquels les enfants déposent leurs chaussons pour Santa Claus...

A ce stade de l’affaire, il faut quand même préciser ce qu’est un plug anal (prononcez pleugue) : c’est un truc dont la forme est spécialement conçue pour permettre son intromission dans ton cul mais surtout, pour qu’il y reste, pour qu’il s’y bloque et y séjourne autant qu’on veut. Branché (plug) comme on branche une prise électrique, mais en plus rond et dans un cul. Ainsi équipé, le patient peut aller et venir, faire les courses ou participer à un meeting d’Anne Hidalgo sans craindre de perdre son joujou en route. J’imagine que l’exercice n’est ni agréable ni reposant, mais c’est sans doute sa vocation. Et visiblement, Paul Mc Carthy trouve que le plug anal est une chose formidable. Il voudrait que l’univers entier le sache et qu’on l’acclame pour ça. Il aimerait en parsemer le monde (contre fortes sommes) et en faire l’impératif catégorique moderne et contemporain qui manque à l’humanité désemparée. On a donc beau vouloir rendre la chose ludique (l’expression « sex toy » évoque littéralement le jouet) ou lui donner l’aura sacrée de l’œuvre d’art, il ne faut jamais oublier qu’on parle d’un truc qu’on se fourre dans le figne.


Le plus lamentable est donc qu’on vienne prétendre que l’œuvre en elle-même n’est rien, et que seul le regard du public lui donne sa valeur propre. Par un curieux gymkhana, c’est dans l’œil du passant que se trouverait le godemiché ! Ben merde ! L’hypocrisie majeure est bien plus grave encore que l’exposition de la chose verte en pleine place royale : non contents de nous exposer leur weltanschauung culière sous le pif, les partisans du bengala gonflable nous accusent d’y voir ce qu’il y a vraiment à voir (un gode géant) plutôt que de nous arrêter à son titre (un arbre). Ah, évidemment, on voit mal Fleur Pellerin, ministresse de la culture semblant sortir d’un magasin de porcelaine, assumer crânement le fait qu’elle défend l’exposition en plein Paris d’un truc qui sert à enculer les gens. Déjà qu’elle participe au gouvernement Walz !

Les vedettes de l’art contemporain tournent sempiternellement autour de trois thèmes : le sexe, le caca et la dérision. Mc Carthy érige un gode face au Ritz et il se trouvera bien un con pour faire remarquer que son élargisseur de rondelle est le pendant moderne de la colonne Vendôme, bite colossale s’il en est. Mc Carthy rend donc hommage à la tradition, ha, ha, que c’est drôle n’est-ce pas ? Mais si on peut comprendre (en méprisant) qu’un artiste contemporain vende de la merde aux gens suffisamment raffinés pour l’apprécier, on réclame de conserver le droit de refuser qu’on nous l’impose à nous, qui ne demandons rien. Quand l’objet est exposé sur une place publique, comme c’est désormais la règle, il est un peu fort de dénier au peuple le droit d’ouvrir sa gueule. C’est toujours la même histoire : on va chercher un artiste réputé « sulfureux », qui bouscule les tabous chaque matin en se rasant, on expose ses immondices sous l’œil des gens qui vont acheter leur paquet de clopes, on revendique bien fort le côté provoquant de l’œuvre MAIS on exige que cette provocation ne suscite aucune réaction, aucune rébellion. Mais que vaudrait une provocation sans les réactions qui pourtant la valident ? Que vaudrait une insulte qui passerait inaperçue ? Rien.

N'est-ce pas ce rien après quoi ils courent tous ? Un rien qui a logiquement abandonné l’ambition de représenter quoi que ce soit, un rien ontologique qu’ils essaient de nous fourguer de force en s’appuyant sur les subventions maousses extorquées à de pauvres cons. J’attends d’ailleurs qu’on s’échauffe et qu’on s’affronte sur le sens du plug anal de Mc Carthy : il vise quoi, il dit quoi, il découvre quoi ? Une société, une pensée, une morale, un destin peuvent-ils se fonder sur l’adoration du plug anal ? Si oui, comment rendre hommage à ce curieux dieu, sinon en se faisant enculer place Vendôme, là, au milieu de la foule, à l’heure de la sortie des bureaux ? Est-ce cela qu’ils veulent, est-ce là leur message ?


Je n’ai pas l’habitude d’encourager la destruction d’œuvre d’art, au contraire. Mais je me souviens d’une scène rafraîchissante de Fight club, où des gonzes concrétisant leur dégoût des cons se mettent à démolir des œuvres d’art municipal débiles dans de grands éclats de rire. Ah, la joie vive ! Ah, l’envie de les imiter, d’utiliser la liberté pour de vrai ! Quelques citoyens écœurés d’être systématiquement soumis à ce diktat bien-pensant auront peut-être invoqué Fight club en dégonflant la baudruche de la place Vendôme : tant mieux. C’est cela qu’il faudrait désormais prendre à pleines mains : la liberté d’être soi, de penser par soi-même, de penser mal, la liberté de passer pour un con aux yeux des autres, de passer pour une sorte de monstre, un assassin de petits chats, un djihadiste ou pire, pour un Zemmour incurable ! Jouir de la joie de dire ce qu’on pense, d’écrire ce qu’on pense, de prendre sa liberté comme un artiste contemporain ! Et jouir, jouir enfin et à notre tour, de lire la panique dans leurs yeux.

13 commentaires:

  1. Rien à ajouter !

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  2. Bien vu. C'est violent, d'exhiber un gode géant quand on essaye au quotidien de ne pas se faire trop défoncer par ce système d'enculés. On nous crache à la gueule, on nous piétine.
    Gardons le moral! Le gode totalitaire ne nous fait pas peur,Fleur Pellerin et les autres, attention, retour à l'envoyeur!

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    1. À défaut de rester dans les anus

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    2. Cet tartiste comptantpourien n'est pas un cynique
      C'est un fou
      Une folie compatible avec la vie en zosiete, même zosialiste, mais folie quand même ( comme dirait manu les mordasses)
      Faudrait connaitre l'enfance du mec, ses premiers émois, la façon dont un travailleur zosial l'a travaillé, au corps, précisément, dans son âge tendre
      Une bonne psychanalyse aurait pu nous éviter ce genre d'exposition blessante pour les vendeurs de sapin de Noël
      En plus d'être écologiquement irresponsable ( le truc est fait en précieux combustible fossile non renouvelable)
      Pareil pour nikki de St phalle
      Une franche explication avec son violeur de père aurait dispensé la communauté nazionale de devoir banquer pour des expos où l'on rentre par la cramouille d'une monstrueuse statue peinturlurée
      Et tant qu'on y est, un traitement antidépresseur aurait libéré ce pauvre mesquin de soulages de sa crise d'inspiration, le pauvre gus ne trouvant même pas le courage d'en finir une fois pour toutes et broyant du noiw au propre comme au figuré

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    3. Un mec qui vend sa merde à prix d'or ne peut être complètement fou.

      S'il l'était toutefois vraiment - c-à-d s'il n'était pas responsable de ses actes - le problème demeure, il est juste déplacé : pourquoi les pouvoirs publics dans ce cas, main dans la main avec moult fondations importantes, investissent-ils tant d'or dans de la merde ? A qui profite le crime ? Certainement pas à des fous.
      _Du moins pas à des fous faibles et impotents, du genre de ceux qui gobent des antidépresseurs avec leur café tous les matins parce qu'ils ont peur de leur ombre. _Plutôt à des fous à la American Psycho : des maîtres du monde dont le rêve le plus mégalomaniaque consiste à créer de la valeur ex-nihilo, à partir d'objets sans valeur intrinsèque, c'est-à-dire à créer de la valeur en se passant du travail des gens, de leurs compétences, de leurs savoir-faire... en un mot en se passant de la valeur réelle des choses... c'est-à-dire de la valeur du réel.

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  4. Bien vu, Wolfy. A la fois le mec n'est certainement pas complètement fou, d'ailleurs Kobus ne fait pas cette hypothèse, mais il a atteint un degré de dérangement tel qu'il ne voit aucun obstacle à l'idée de foutre sa merde partout, et les fantasmes qui vont avec. Compatible avec la vie en société, c'est sûr !

    A titre personnel, je me fous de ce mec. Il pourrait tout aussi bien cesser de vivre ou se mettre à vendre de l'essence dans une station Total, ça m'irait tout aussi bien. Les pouvoirs publics, en revanche, et je dirais même les gens, concrètement, les personnes qui, investies d'une autorité en la matière, promeuvent ce genre de conneries à grands coups de millions, ça en revanche, ça me perfore le colon côté sud.

    Après, qu'un artiste soit quelqu'un à qui il "manquerait" une bonne psychanalyse, c'est sans doute vrai. Sauf que pour ma part, je préfère un artiste qui produit quelque chose de valable, fut-ce au prix de sa tranquillité, voire de sa santé mentale pépère, et qui renonce donc à consulter un psy, plutôt qu'un mec talentueux qui renonce à son art pour se caler dans les bras de bobonne entre deux séances chez le psy.

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  5. Il ne faut pas passer sous silence la principale commanditaire de ces horreurs à Paris, savoir Jennifer Flay, la directrice de la FIAC (Foire Internationale D'Art Contemporain), qui est aussi responsable de l'exposition de cet artiste pour l'inauguration de l'Hôtel de la Monnaie fraîchement rénové.

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  6. Tagada Grand Vénérable de la Hype25 octobre 2014 à 17:30

    Si Paul McCarthy en tant que jeanfoutre professionnel (on dit "artiste contemporain" en langage pc) a l'air si obsédé par les godemichets & l' anus au point d' en faire son métier alors je suggère aimablement de le couronner Roi des jeanfoutres en lui faisant subir le supplice du pale en place publique, une vieille & noble tradition issue du Moyen-Age car c'est ainsi que nos bons aïeux traitaient, avec humour, les jeanfoutres qui se moquaient un peu trop du monde.

    Dérangé & vaniteux comme il est, McCarthy ne peut que se réjouir d' un tel délice, obsédé à l' idée futile d' être le centre d'attention de tous et cela aura le mérite de prolonger son petit quart-d 'heure de gloire idiot.

    Je m' improviserai Grand Chambellan des réjouissances et la cérémonie sera retransmise en direct su Canal+de-coke, la chaine préférée de la bobocratie friquée (que des amis à moi). :)

    Rompu à cet exercice, mon petit personnel de maison se chargera de la besogne & se saisira du bougre opportuniste qui fait suer tous le monde avec ses cochonneries pseudo artistiques pour derechef l' empaler séance tenante le cul nu à quatre pattes comme une juste sentence bien méritée.

    Gageons que cynique & goguenard comme il est, le peuple de Paris se réjouira d' un tel spectacle qui s' inscrit dans l' air du temps.

    En ce qui me concerne, je me réjouirai plus simplement de ma part des profits générés par la mise sur le marché du DVD collector estampillé Canal+ de la cérémonie et dormirai ainsi, les poches pleines, du sommeil du juste avec le sentiment du devoir accompli. :)

    "Anus ut alpha et omega si hoc non est artis stercoris pro artis inspiratione" :)

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    1. C'est quasiment une minorité opprimée par avance, Paul McCarthy, c'est ça que vous essayez de nous dire ?

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  7. Pas assez radical, comme juste châtiment (ou vengeance des braves)
    Ce mac carti de mes deux mérite juste de faire une heure de cours dans un collège du 9-3.
    Ça va lui laver le cervelet voire le reste.
    M'étonnerait qu'il récidive...

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  8. M'enfin, votre "parrain" Jack Lang s'est montré anormalement réservé sur cette histoire de plug. Point de dithyrambe sur l' oeuvre, il a préféré se féliciter de la controverse et s’inquiéter de la marchandisation affectant le monde de l’art. Tout fout le camp!

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