Lundi : une vidéo partagée sur les réseaux sociaux montre une adolescente qui monte sur scène à un concert et que le groupe de rap attrape violemment et se met à « violer » pour de faux devant le public sans qu’elle ne puisse rien faire. Rien d’étonnant après tout : l’imagerie de la variété musicale pour ados n’a plus de différence fondamentale avec la pornographie depuis quelques temps.
Mardi : quelqu’un me raconte que son fils de 8 ans a recherché «
sexe vidéo » sur sa tablette. Après enquête, l’idée vient d’un camarade de classe, qu’on imagine aisé et précocement « connecté », et qui a montré ce genre de vidéos dans la cour de récré. Après coup, qu’est-ce que cela a d’étonnant alors que ce bel univers est à portée de clic sur l'écran de n’importe qui ? Qu’est-ce que cela a de surprenant et faut-il douter que cela se produise tous les jours dans les cours d’école ?
Mercredi : une discussion de collègues dérive sur les films X et «
les bruits de gorge que font les filles » ; pour que chacun sache bien de quoi on parle, un type lance une vidéo hard de fellation sur son smartphone et la présente à tous. Les femmes présentes, ne sachant pas bien si elles doivent être gênées, rigolent comme les hommes pour faire bonne figure. Il est vrai que la génération 25-30 ans connaît parfaitement le jargon de l’industrie pornographique américaine et en use sans rougir dans la conversation courante.
Jeudi : je feuillette un magazine design branché, généreusement mis à disposition dans les toilettes de mon entreprise. Peu de texte, beaucoup de photos, notamment celles d’un artiste japonais contemporain qui fait des choses avec des parcelles de corps nus. Certaines vont assez loin : un bassin humain plié, cul vers le haut, les fesses fourrées de chantilly, le tout surmonté d’une cerise ! D’autres évoquent la soumission, l’humiliation sexuelle, le sadomasochisme… Ceci est banalement laissé à la lecture, à mon travail, comme ce pourrait l’être dans une salle d’attente. Je referme la revue et retourne bosser. Tout va bien. Ce monde est normal.
Vendredi : Fouquet nous apprend que le « labo » d’Arte réalise des vidéos « artistiques » dont le concept est de faire demander par une voix de petite fille ce qu’est un
anulingus, un
clitoris ou un «
ass-to-mouth »… Décalage. Humour irrévérencieux. Contre-culture(s)… Je crois que je regarderai ça plus tard…
« Humour, humour, je précise... »
Porno grand public. Porno de masse. C’est cela qui menace la dignité et le respect de la femme, bien plus que le port du voile ou le sexisme soi-disant omniprésent.
Le porno, aujourd’hui, ne sert plus à bander mais à ricaner, à discuter, à socialiser… ou à faire de l’art. Sorti du placard où l’on planquait les cassettes VHS, il est partout et n’est plus choquant, ni transgressif, ni même excitant… il a tristement envahi le quotidien pour devenir « amusant ». On en rit à une tablée de collègues, hommes et femmes confondus, sans que gêne ou confusion n’affleure.
Le porno est devenu inoffensif, c’est-à-dire
normal. Il faut en rire, et notamment avec les femmes. Personne ne doit s’en offusquer. Surtout pas elles. Et alors qu’elles se disent « blessées » par une publicité de femme-objet ou « outrées » par les conceptions d’un
Zemmour, elles ne doivent pas voir comme oppressant qu’un collègue mâle leur mette sous le nez une vidéo où elles avalent un pénis jusqu’à la garde.
Plus que jamais, la perversion masculine est amenée à devenir le désir standard, le désir partagé. Et comment en serait-il autrement ? Nous sommes égaux ! Parité des blagues triviales et de la perversité masculine. Un garçon et une fille rient de caca. Hommes et femmes d’aujourd’hui s’appellent « garçons » et « filles » jusqu’à un stade avancé de l’âge adulte, et ricanent autour du porno. A l’heure de l’égalité des sexes, l’homme et la femme font partie de la même bande d’amis, boivent des bières ensemble et sont en quelque sorte de simples « potes » qui baisent… Alors pourquoi pas partager le
hard ?
La diffusion générale du porno doit permettre à ces femmes d’intéruioriser ce qu’il convient d’offrir aux hommes. L’environnement imprégné de porno exerce une certaine pression sociale pour se normaliser. A la fin, l’homme de Cro-Magnon n’aura plus à traîner la femme par les cheveux pour l’emmener satisfaire ses envies : c’est elle qui lui tendra sa crinière. Elle se comportera comme une traînée pour mieux ressembler à Rihanna.
Mais bien sûr, ne le dites pas : vous seriez affreusement pudibond, puritain, moralisateur… Voire même on vous reprocherait de vous mêler des affaires des autres. Chacun est libre. Si vous n’aimez pas, vous n’avez qu’à ne pas regarder.