13 août 2014

Le type gentil mais fragile

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Il y en a toujours un à votre travail ou dans votre entourage : ce type gentil, un peu timide et renfermé, phobique social, qui lorsqu’on le croise dans les couloirs inspire plus souvent la gêne et l’embarras que la franche rigolade, mais avec qui il vaut mieux être amical et nouer des liens malgré tout, en prévision du jour où il pourrait craquer, débarquer avec un fusil automatique et des grenades et faire un carton dans les couloirs...

Toujours poli, toujours bien mis, la petite chemisette sans un pli. Ponctuel quoi qu’il arrive. Il ne dit rien sauf « bonjour » le matin et « au revoir » le soir, son visage gonflé, cramoisi, le sourire tendu comme une baudruche. Il travaille seul, semble vivre un peu à côté… et un matin il arrive, à 8h45 comme d’habitude, dit « bonjour », entre dans son bureau, y pose son attaché case, en sort méthodiquement les pièces d’un fusil, une par une…

Avec le type gentil mais fragile, il faut être ami, car ce jour-là il pourrait bien vous épargner du simple fait que vous ne l’avez pas rejeté. Au seul prétexte que vous l’avez par exemple convié une fois à fumer une cigarette dehors avec vous. Ou parce qu’il se souviendra qu’il y a 3 ans, vous avez eu une conversation avec lui à propos de l’un de ses albums préférés… Tout du moins pouvez-vous espérer interrompre sa furie, obtenir une pause, l’amadouer quelques secondes, l’approcher calmement et suffisamment près… pour vous jeter sur lui, lui coller un pain, lui cogner le crâne contre le sol jusqu’à ce qu’il perde connaissance, ou bien retourner l’arme contre lui...

Violence contradictoire des émotions… Malgré notre sympathie naturelle pour le type gentil mais fragile, nous nous tenons prêts à tout moment à le trahir. Malgré notre amour pour la marge et les inadaptés, le jour venu nous serons du côté de la société.

Jeu d’été : repérez qui est le type gentil mais fragile autour de vous et établissez votre plan d’évacuation. Par quelle(s) porte(s) entrerait-il ? Qui se trouverait immédiatement dans sa ligne de mire ? Pourrait-il avoir un complice ? Depuis votre emplacement, quelles sont vos issues ? Quelle est votre meilleure chance d’atteindre un endroit sécurisé ? Pensez-y avant qu’il ne soit trop tard !

11 commentaires:

  1. "C'est une bien belle chose que ce contentement, que cette absence de douleur, que ces jours supportables et assoupis, où ni la souffrance ni le plaisir n'osent crier, où tout chuchote et glisse sur la pointe des pieds. Malheureusement, je suis ainsi fait que c'est précisément cette satisfaction que je supporte le moins; après une brève durée, elle me répugne et m'horripile inexprimablement, et je dois par désespoir me réfugier dans quelque autre climat, si possible, par la voie des plaisirs, mais si nécessaire, par celle des douleurs. Quand je reste un peu de temps sans peine et sans joie, à respirer la fade et tiède abomination de ces bons jours, ou soi-disant tels, mon âme pleins d'enfantillages se sent prise d'une telle misère, d'un tourment si cuisant, que je saisis la lyre rouillée de la gratitude et que je la flanque à la figure béate du dieu engourdi de satisfaction, car je préfère une douleur franchement diabolique à cette confortable température moyenne ! Je sens me brûler une soif sauvage de sensations violentes, une fureur contre cette existence neutre, plat, réglée et stérilisée, un désir forcené de saccager quelque chose, un grand magasin, ou une cathédrale, ou moi-même, de faire des sottises enragées..."

    Hermann Hesse, Le Loup des Steppes.

    "Mais nous avons à confesser nos fautes. Les meilleurs d’entre nous ont péché par dilettantisme. J’ai été, nous avons été des intellectuels fins connaisseurs en politique, comme nous le sommes en peinture, en poésie, en cinéma. La politique, apprise par trop d’entre nous à l’école maurrassienne, a été le déversoir de nos dons littéraires, philosophiques, qui eussent trouvé ailleurs un plus durable emploi. Il est très beau de fignoler la société future. Mais lorsqu’on en voit si bien le plan, pourquoi tant tarder à en dresser les murs ? La spéculation politique est superflue, dans des années où le monde se reconstruit à toute vitesse. On a tout annoncé, tout dessiné, mais pendant ce temps, ce sont d’autres hommes que nous qui refont l’histoire, ils la feront moins bien peut-être parce qu’ils ne nous valent pas, mais elle est, et c’est cela qui compte. La politique n’est pas un idéal de la pensée. C’est avant tout la nécessité de nettoyer et de remettre de l’ordre chez soi. Cet art est assez sommaire. Celui qui cherche la perfection n’a qu’à lui tourner le dos, à s’enfermer dans sa chambre et à écrire des poèmes."

    Lucien Rebatet, Les Décombres.

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    1. J'aime beaucoup la citation de H.Hesse. On dirait la description exacte d'un mec qui refuserait d'être le "dernier des hommes". Je ne pense cependant pas que nos TPFG soient de cet acabit-là. Peut-être même l'aimeraient-elle, cette vie molle et sûre, toute consacrée à la conservation de leur petite santé, s'ils pouvaient y avoir accès ?

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    2. Oui, bien sûr Beboper. Bien sûr que le premier barbu venu n'est pas le Loup des Steppes.

      C'était-là ce que j'essayais de signifier justement. Il y a un monde entier, des années lumières de différence qualitative, entre la vision-du-monde toute transie de subtiles douleurs morales, de certains jeunes gens aimables et délicats - dont c'est précisément l'amabilité et la délicatesse qui s'exaspèrent dans le monde stupide, binaire, agressif dans lequel nous vivons - et la folie furieuse des barbus&Co au goût desquels notre monde, au contraire, semble toujours manquer de manichéisme et de violence.

      Il n'y a qu'à voir comment certaines gens, qui par ailleurs rient lorsqu'ils se représentent notre pays en train de sombrer dans la guerre civile et l'apocalypse, ne répugnent pas à abuser de la charité publique ou à vivre aux dépens de leurs concitoyens, et cela uniquement pour pouvoir ensuite se vautrer dans le consumérisme sous sa forme la plus basse qui soit, pour se rendre compte que toutes les cultures n'attachent pas comme la nôtre une connotation péjorative à l'égoïsme intrinsèque du petit-confort bourgeois.

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  2. Putain, c'est vraiment la merde de bosser en bureau en fait.

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  3. Merde, c'est moi le type gentil mais fragile. Mais j'ai pas envie de faire une tuerie, je suis quand même obligé ?

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  4. kobus van cleef14 août 2014 à 18:24

    Ce type gentil mais fragile..... mais c'est moi !
    Vous allez pas vous en tirer comme ça, bande de fumiers !
    Vais tous vous faire la peau, vous fumer à coup de 7,62 ,vous achever à coup de crosse!
    Et XIX le premier !
    Fourbe qui a essayé de m'amadouer en me conviant à fumer une cibiche sur le palier, en tentant de me faire causer de ma collec' de safari/signe de piste !
    Tiens, la première elle est pour toi !
    Bang !
    Prend ça !
    Et celle là aussi !
    Au tour des autres, maint'nant !
    Ha, ça s'égaye dans le couloir, ça decanille dans l'Open space ?
    Trop tard, mes bougres !
    Prenez ça et ça et ça encore !
    Et la stagiaire de la compta, avec ses grosses loloches et son sourire comme un con de jument, on fait moins sa pimbêche, pas vrai ?
    Et Dubois, du bureau R et D, toujours aussi connes, mes propositions ?



    J'aime bien ce genre de délire, ça détend
    À mon corps défendant, chuis bloqué en armorique et il pleut

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  5. Il a une bonne tête sur la photo de l'illustation de l'article.
    Ça sent l'ingénieur telecom

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  6. Foin d' investigations psychologiques complexes.
    Le type sur la photo, là, collez-lui une barbe...

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  7. Y marchent pas tes liens, connard.

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  9. J'ai hélas un collègue qui correspond point pour point à cette description, il revient de vacances lundi, j'en suis déjà malade!

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