28 février 2013

Le Pape pour tous

« Bernard IV, acceptes-tu les pédés, les travelos, la gestation pour autrui, la fornication à volonté, et renonces-tu à toutes les conneries que tu profères depuis des siècles ? Dis une parole et tu seras guéri. »

Il est toujours comique, à chaque nouveau pape, de voir Modernité et Progrès faire mine de s’intéresser, voire de se réjouir de l’arrivée du futur nominé.

Ils sont laïcs, voyez-vous, mais démocrates avant tout : et à ce titre ils sont tout à fait disposés à accueillir la contradiction à leurs côtés. Le fameux « je ne suis pas d'accord avec vous, mais je me battrai jusqu'au bout pour que vous puissiez vous exprimer »... Avec une certaine innocence, ils ne désespèrent pas, un jour, de trouver un Pape pour tous, qui soit rallié à leur cause et à leur vision des choses.

Ils sont disposés à tolérer tout nouveau pape, à certaines conditions toutefois : qu’il renonce à 99 % de sa foi. C'est ainsi de bon coeur qu'ils espèrent que le nouveau pape soit quelqu’un qui s’attèle : à mettre fin au célibat des prêtres, à épingler le pin’s du sida sur sa chasub’, à condamner et bousculer l’institution ecclésiastique, à autoriser les prêtres femmes et à les marier entre elles, pourquoi pas, et aussi à rouler une pelle à Mimie Mathy en prime time sur le plateau des Enfoirés… Et si, pour finir, il pouvait convenir une fois pour toutes que Dieu est de la connerie, ils commenceraient peut-être à pouvoir considérer que les bases pour un débat sont saines, et que l'on peut éventuellement écouter ce qu’il a à dire.

Forcément, lorsque le type arrive, quel qu’il soit, les enfants de chœur de la Modernité et du Progrès sont toujours un peu déçus...

Bienvenue en IndigNation

Remember Stéphane Hessel... (Publié en janvier 2011)
Stéphane Aisselle
« 93 ans. La fin n’est plus bien loin. ». Dès le début d’Indignez-vous, il vous prend comme un regret… L’âge a manqué un brin d’avancement. Une ultime promotion qui se sera fait cruellement attendre, et ne nous aura donc pas épargné l’adoubement de Stéphane Hessel par le Spectacle, en tant que dernier super héros des droits de l’homme, promotion 48. Indignez-vous, une bienpensance testamentaire manifestement écrite à titre posthume... L’âge n’est pas une excuse au terrorisme intellectuel ! Que diable l’a-t-on sorti de sa maison de retraite dorée d’ancien dignitaire ?! Indignez-vous nous intime-t-il, telle une métaphore de son incontinence.
« Buvez ! Ceci est ma pisse !»

25 février 2013

Mon empire pour un cheval




Philippe Muray n’est plus là pour tenir la désespérante/désopilante chronique de la modernité en marche, mais nous pouvons nous inspirer de son effort et relever encore les attaques les plus dégueulasses contre le bon sens, les traditions et les modes de vie « rétrogrades ». Un bel exemple nous vient de Pologne, où des associations font, comme partout ailleurs, leur travail de flic. Là-bas, certains militants estiment que la foire de Skaryszew, datant pourtant du XVème siècle, doit cesser, tout simplement. Pourquoi ? parce qu’on y vend des chevaux. Ces militants prétendent qu’en plus de les vendre, les gens de la foire les maltraitent. C’est bien connu, avant de mettre en vente un animal, on le maltraite un bon coup, histoire d’y donner des couleurs. D’ailleurs, pour vendre son ordinateur portable sur Ebay, il est recommandé de l’assaisonner préalablement à coups de gourdin.

18 février 2013

Blasphème en musique

Il est toujours cocasse de voir se débattre sur scène un groupe de rock plus ou moins métal ou sataniste dans le but de jouer au diable, ou d’être le plus offensant possible envers la religion (notons qu’il s’agit toujours de sa religion, le christianisme, jamais de celle des autres).

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Le fameux « Pas de Boogie-Woogie », par Eddy Mitchell

Ce dont ne se rendent pas compte les Marilyn Manson et consorts, outre la désuétude de leur combat, c’est que même de cette façon, même par l'attitude insultante et provocante, ils restent fidèles à une esthétique d’essence chrétienne. Les valeurs du rock (liberté, dégoût du fric et de la corruption du monde, esthétique de la violence tournée contre soi, jeunesse innocente, idéal de l’intégrité...) sont chrétiennes d’une certaine manière. Et le Poète eut raison de chanter : « Jésus-Christ est un hippie ».

Le rockeur rebelle, quel que soit le maquillage qu’il arbore, est toujours au fond l’enfant maudit de ses parents chrétiens ou de sa culture chrétienne : son reproche et son dégoût sont ceux d’un éloignement des choses essentielles, et le cri qu’il pousse est sa façon de chasser les marchands du temple et de prôner un retour aux sources.

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« En vérité je vous le dis : ch’uis fin bourré ! »

Il existe en revanche des territoires beaucoup plus impies lorsque l'on souhaite enfoncer un couteau dans le cœur de Dieu. C’est ce qu’un Marilyn Manson ne comprendra jamais : il peut mettre en branle tout l’attirail, les cris et les mises en scène qu’il veut, il ne représentera jamais sur la figure du Christ un plus gros crachat que le premier rappeur venu faisant l’éloge du fric, de la vulgarité, de la pornographie, et de la violence contre l'autre. Mieux que le rock à cornes, il y a le rap ou la variété internationale pour jouer à l'Antéchrist. Là on ne dénonce pas le monde de l’argent : on l’épouse et on le glorifie. Là on n’est pas violent envers soi-même mais envers l'extérieur. Là on n’a pas de moralité : on jouit sans entrave.

Il jouait du Femen debout....

14 février 2013

Les tatoués sont des pédés, grâce à François Damiens

Traçabilité alimentaire : vers un second tsunami français ?

Alors que la France est encore secouée par l'émoi provoqué par la découverte de viande chevaline dans des produits cuisinés industriels, un groupe de touristes a soulevé un nouveau scandale alimentaire ce mardi 12 février 2013, alors qu'il visitait Paris. 

Le quartier (Saint Michel - Notre Dame) fait pourtant l'objet de contrôles d'hygiène permanents tant les commerces culinaires et les touristes qui les fréquentent sont nombreux. Mais cette batterie de mesures n'aura vraisemblablement pas suffi : ce mardi, un lot de plus de 125 kilos de viande irrégulière a été découvert dans un établissement aux alentours de Notre Dame de Paris !

Rapidement débarquées sur les lieux, les autorités de contrôle sanitaire ont immédiatement procédé à des tests sur l'échantillon saisi. A première vue, la chaîne du froid semblait avoir été respectée et chaque échantillon de viande présentait les informations nécessaires à leur traçabilité. Mais les résultats ADN ne se sont pas fait attendre : la viande, étiquetée d'origine "féministe & athée", est en réalité de la viande de connasse 100 % en provenance d'Urkraine !

Ne manquez pas notre dossier dans le prochain CGB Dimanche :


13 février 2013

Les gens qu'on aime : Jules Berry


Jules Berry était né le 9 février 1883, une date pas plus mauvaise qu’une autre pour venir au monde. Si la médecine avait fait de réels progrès, il aurait fêté ses 130 ans parmi nous il y a trois jours.


Anecdote vécue la semaine dernière : je suis dans un groupe de 8 personnes, dont l’âge moyen tourne autour de 45 ans. J’évoque Jules Berry (me demandez pas pourquoi) : personne n’avait même entendu parler de lui. Je m’étonne. J’explique vite fait qui fut Jules Berry. On me rétorque que pour connaître un type mort en 1951, il faudrait vraiment avoir de la culture ! Je laisse tomber. (je précise que dans ce groupe, TOUTES les personnes sont diplômées de l’enseignement supérieur).

Jules Berry est le fantôme de ces cancres. Il vient ici, sous ma modeste plume, les tirer non par les pieds, mais par les oreilles, pour les mener de force au ciné club du coin. Ah, misère, on me parle de « culture » quand je pensais amour ! Amour du cinéma d’avant-guerre, cinéma populaire comme on n’en fit jamais plus, avec ses personnages ridicules, ses cocus, ses vieilles ganaches, ses types à moustaches, ses petits gros engoncés, ses enfants en culottes courtes, ses jeunes femmes aux sourcils épilés ! Et surtout, avec ses comédiens inoubliables. Ah, la diction des acteurs d’avant le charabia ! Tous formés au théâtre, où on ne plaisantait pas avec le public…

11 février 2013

Victor Hugo clashe Jack Lang sur le CGB


Jack Lang, Mariage pour tous
Y’a pas longtemps, notre Parrain des familles, du Bien et de l’Amour par tous les trous, Jack Lang, était sur le plateau du Grand Journal pour défendre le mariage pour tous. A Sylviane Agacinski, philosophe et femme de Lionel Jospin, qui tentait de faire valoir son scepticisme sur la question par quelque raisonnement structuré, avec des arguments reposant sur l’histoire, la culture, le droit des enfants qui doit primer sur le droit à l’enfant, Jack Lang répondit par un argument irréfutable, comme qui dirait le cantique des cantiques de la pensée politique : « Nous Madame, nous nous battons pour l’Amour ! »

6 février 2013

22 v’là XXI

XXI comme 21 siècles de retard
On a récemment assisté à une conférence des créateurs de la revue XXI, Laurent Beccaria (directeur de publication) et Patrick de Saint-Exupéry (rédacteur en chef). Venus à la rencontre de leurs lecteurs, « qui ne sont pas des bobos parisiens comme le prétend The Economist » (nous confirmons, nous n’y avons vu que des bourgeois des beaux quartiers), à l’occasion de leur 5ème anniversaire, et de la publication du numéro 21 de XXI, la conférence s’est rapidement cristallisée sur le manifeste pour un nouveau journalisme des autoproclamés hérauts de l’info du XXIème siècle.
Décryptage. Plasticage.

5 février 2013

Les gens qu'on aime : William Burroughs



William Burroughs aurait 99 ans aujourd’hui. Il était né le 5 février 1914, une date aussi bonne qu’une autre pour venir au monde.
Le 5 février 1914, bien sûr, personne ne savait qu’il deviendrait un des deux ou trois plus grands écrivains américains de son siècle. A St Louis du Missouri, tandis qu’il poussait ses premiers cris, on a dû se contenter de dire « oh, le joli bébé ». Des banalités, en somme.


Comme tous les personnages ayant fait naître une légende, William Burroughs est souvent aimé pour de mauvaises raisons. Il est aussi détesté pour de mauvaises raisons, mais c’est un cas plus fréquent. La première des mauvaises raisons de l’aimer, c’est de l’aimer sans l’avoir lu. Oui, des gens détestent des films qu’ils n’ont pas vus, des livres qu’ils n’ont pas lus, ils sont en désaccord avec des déclarations qu’on leur a vaguement rapportées, c’est assez courant. Avec les légendes, nous trouvons aussi le cas de gens qui aiment un auteur mais ne le lisent pas. Ainsi, on aime Jack Kerouac pour sa belle gueule, Hemingway pour sa barbe d’ivrogne, on adule Joyce pour les mugs Finnegans wake qu’on trouve à Dublin, on adore Proust pour les téléfilms sur La Recherche, Céline pour se fringues rapiécées, ses chiens, ses chats, sa femme et Bukowski parce qu’il s’est saoulé en direct à la télévision française. On aime Chet Baker pour les photos de Chet Baker. On aime le Che pour la barbe du Che !

Dans les mauvaises raisons d’aimer Burroughs, voici les plus fréquentes :
• il fonda le mouvement beat
• il fit l’apologie de la drogue
• il est cool
• il inspira les punks
• il lutta pour faire reconnaître l’homosexualité
• c’est le Buster Keaton de la littérature

Évidemment, rien de tout cela n’est vrai, c’est ce qui arrive quand on aime un écrivain sans le lire. La variante peut consister à avoir quand même lu les quarante premières pages du Festin nu, puis à imaginer avoir une idée précise de son œuvre.

On pourrait passer des heures sur le Festin nu ou sur la drogue selon Burroughs, mais ce n’est pas le sujet. Celui qui, lisant Burroughs, ne comprend pas que la drogue est la Marchandise absolue, celle qui met le consommateur dans un état de besoin impérieux, qui l’esclavagise, c'est-à-dire qui le rend le moins libre possible, qu’elle est la quintessence de l’asservissement consumériste, un produit-virus conçu pour remplacer le cerveau du camé et prendre le contrôle de son misérable corps pour le plus grand profit du fourgueur, enfin une marchandise proprement diabolique, celui-là est un définitif trou du cul.

Pourquoi on l’aime, Burroughs ? Pour sa puissance littéraire, qui est avant tout une puissance picaresque. Aventure, critique de l’ordre établi, satire puissante, naturalisme burlesque, inventivité formelle, liberté de ton et de structure. Peu d’écrivains sont aussi drôles que lui, et plus que drôles : comiques. C’est une des dimensions essentielles de Burroughs, systématiquement négligées par les arbitres critiques, personne ne sait au juste pourquoi. Peut-être ne faut-il pas vulgariser la haute teneur existentielle de l’œuvre burroughsienne, traitant de graves problèmes sociaux (drogue, sexe, esthétique de la marge), en laissant penser qu’il considérait la vie comme une comédie bouffonne ? Une certaine critique bien-pensante, de gauche, ivre de prises de conscience militantes, n’est certainement pas prête à rigoler des camés, des pédés, des clodos et des vieilles putes comme Burroughs le fit dans tous ses livres.
Burroughs lui-même revendiquait pourtant cette tradition qui va de Pétrone à Céline, en passant par Thomas Nashe, le Guzmàn de Alfarache ou Jacques le fataliste. Car on peut dénoncer la misère en en rigolant, on peut rire de ses malheurs (c’est même recommandé), on peut faire autre chose que se plaindre, ou du moins se plaindre platement, comme le premier écrivain engagé venu. Et surtout, on peut écrire sans prendre de gants.

Dans la tradition picaresque, le héros est toujours un pauvre type qui tente de sortir de sa condition, qui expérimente, bouscule, force les choses, un trublion qui met la société à l’épreuve, en révèle les aberrations et les hypocrisies, s’affranchit du bon goût et des convenances, pour finir généralement au même point qu’au début de ses aventures… Comme Céline, qui l’a beaucoup influencé, Burroughs a réussi à coller à cette tradition dans un contexte moderne, mieux : d’avant-garde. On trouverait d’ailleurs beaucoup de points communs dans leurs œuvres : expérimentalisme formel, non linéarité, utilisation de l’argot, cruauté comique, pornographie, implication personnelle, etc. On trouvera surtout la joie que donne le génie quand il permet qu’on le suive dans ses fulgurantes errances.


Bien sûr, il n’y a pas que du comique dans Burroughs ! Il y a aussi des obsessions malsaines, une paranoïa inquiétante, une pulsion de mort évidente et une indécence considérable. Il y a l’expérience de la drogue et son récit circonstancié. Il y a une capacité d’invention qui tient du grouillement. Il y a aussi une intéressante théorie du langage nourrie aux leçons des codex mayas, le langage comme pouvoir, langage viral implanté dans le cerveau, générations après générations, pour un contrôle absolu, discret et permanent, de la pensée… D'où un dantesque combat littéraire contre le langage, qui donne sa matière à toute l’œuvre.
Ce qu’on aime, dans Burroughs, c’est la profusion, le mouvement, le non-sens, les points de vue et de fuite, la poésie crade et l’analyse inquiète de la condition humaine. C'est l'énormité du rire et le détachement souverain.