31 juillet 2011

Le son du soir qui fait couiner la guitare

La revanche de cousin Dugland

Tout va mal...
On vous soupçonnait déjà de ne pas forcément être socialiste... D'être peu enthousiaste à l'idée de bouffer hallal... De moquer les femmes déguisées en boîte à lettres... De ne pas aspirer au multiculturalisme ni de voir dans le Métis l'ubermensch à venir, infiniment supérieur au "sous-chien"... Vous renâclez encore à ranger Booba au coté de Baudelaire comme Libé... Et tout ça, votre cousin Dugland, celui qui passe sa retraite dans une petite ferme de l'Aveyron, l'a bien remarqué. Il voudrait que vous deveniez aussi tolérant dans votre RER que lui dans son jardin. Il voudrait vous sauver.

Ce week-end, il a débarqué en banlieue pour venir chasser définitivement toutes vos mauvaises pensées, pire qu'un marabout, il a concocté une formule magique, un sort puissant qui tient en trois mots:

_ Breivik, c'est toi !
_ Intéressant...
_ Ah, tu peux bien faire le malin, n'empêche que tu as du sang sur les mains. Allez, rend les armes cousin, et rejoins le camps du Bien!

(Nota bene: le cousin Dugland écoute un peu trop grand cor malade, il a décidé de "slamer la vie", comme son idole)

_ Pas d'amalgame mon cousin, pas d'amalgame, sinon, au prochain attentat islamiste, je me ferai un plaisir de t'expliquer que tous les musulmans sont des terroristes sanguinaires...
_ ... ça n'a rien à voiiiir, tu l'auras voulu, je pars!
Et le cousin Dugland s'enfuit dans la nuit.

Bon, maintenant qu'il est parti, on peut recommencer à déconner:

30 juillet 2011

La guerre froide et humaniste de Klaus Barbier


Vous vous demandiez ce que nous foutions en Afghanistan ou en Lybie ? Eh bien Christophe Barbier, rédacteur en chef du magazine L’Express, vous l’explique, dans un édito aberrant intitulé « L’art de la guerre ».
Dans la tête des gens comme Christophe Barbier, il y a deux sortes de guerres :
  • les guerres « guerre », menées par les acteurs de l’Histoire, motivées par de bas instincts et de vils intérêts,

  • les guerres humanistes, menées par les pays qui sont sortis de l’Histoire, au premier rang desquels se trouve la France.

L’art de la guerre humaniste, selon Barbier, c’est de savoir discerner par « une sorte de lucidité tricolore », par un recul froid et objectif, les bons et les mauvais conflits. Et il en faut de la lucidité ! Avant c’était fastoche, on se battait là où il y avait un territoire à défendre, une position stratégique à conquérir... Mais avec la guerre humaniste, ce n’est pas si simple : il faut y réfléchir à deux fois avant de choisir qui l’on va bombarder et pourquoi. C’est que cette guerre est de type sage et dépassionné : elle est désintéressée et n’a aucune visée concrète sinon l’intérêt général universel. Elle est, comme l’écrit le journaliste à l’écharpe rouge, l’art « d’envoyer vers la mort au nom d’abstractions ». Il en faut, de l’œil, pour lire dans l’abstraction, diagnostiquer où est-ce que le Bien va mal, qui n’a rien demandé mais n’en pense pas moins, qu’est-ce que l’on va sauver de quoi… Ou tenez par exemple, quand est-ce que la guerre est finie… Avant, les guerres s’arrêtaient d’elles-mêmes en se soldant par une victoire ou une défaite, mais une guerre humaniste, quand est-ce qu’on décrète que ça y est, c’est bon, ça ira bien comme ça ? Quand est-ce qu’on décrète qu’elle a amélioré le sort de l’humanité ? Quand est-ce que la guerre sans objectifs a atteint son but ? Désormais, faute de la gagner ou de la perdre, « il faut savoir finir une guerre » comme dit Sarkozy.

Le voilà donc, l’art suprême que les nations post-historiques, les seules assez mortes et assez froides pour lorgner au-delà de leur intérêt et entrevoir le bien universel, ont vocation à maîtriser : la guerre pour l’abstraction, à ne pas confondre avec la guerre pour l’absurde.

29 juillet 2011

Les lectures de l'été : Gustave Le Bon - Révolution Française et la Psychologie des Révolutions

Révolution Française et la Psychologie des Révolutions
Flammarion Éditeur - 1916

Préface et introduction

Préface

Les idées actuelles sur la révolution française

Paris, Janvier 1913.

L’ouvrage dont je présente une nouvelle édition n’a pas été écrit pour blâmer ou louer la Révolution, mais seulement pour tâcher de l’interpréter au moyen des méthodes psychologiques exposées dans un autre de mes livres : Les Opinions et les Croyances.

Le but poursuivi me dispensait de tenir compte des opinions antérieurement formulées. Il était cependant intéressant de les connaître, c’est pourquoi j’ai consacré un chapitre à énumérer les idées, d’ailleurs contradictoires, des historiens sur le grand drame révolutionnaire.

Les livres ne traduisent guère que des opinions anciennes. Ils peuvent préparer les idées de l’avenir mais expriment rarement celles du présent. Seuls les revues et les journaux traduisent fidèlement les sentiments de l’heure actuelle. Leurs critiques sont donc fort utiles.

Des divers articles consacrés à l’analyse de cet ouvrage on peut dégager trois conceptions, représentant nettement les idées ayant cours aujourd’hui sur la Révolution Française.

La première considère la Révolution comme une sorte de croyance qu’il faut accepter ou rejeter en bloc ; la seconde comme un phénomène mystérieux resté inexplicable; la troisième, comme un événement ne pouvant être jugé avant la publication d’un nombre immense de pièces officielles encore inédites.

Il ne sera pas sans intérêt d’examiner brièvement la valeur de ces trois conceptions.

Interprétée avec les yeux de la croyance, la Révolution apparaît à la majorité des Français comme un événement heureux les ayant sortis de la barbarie et libérés de l’oppression de la noblesse. Plus d’un personnage politique croit que sans la Révolution il serait réduit à la domesticité chez de grands seigneurs.

Cet état d’esprit est bien traduit dans une étude importante, consacrée par un célèbre homme d’État, M. Émile Ollivier, à combattre les idées de mon livre.

Après avoir rappelé la théorie qui considère la Révolution comme un événement inutile, l’éminent académicien ajoute :

“ ...Gustave Le Bon vient d’accorder son autorité à cette thèse. Dans un ouvrage récent sur la psychologie de la Révolution, où l’on retrouve sa puissance de synthèse et de style, il dit : “ Le gain récolté au prix de tant de ruines eût été obtenu plus tard sans effort par la simple marche de la civilisation. ”

M. Émile Ollivier n’admet pas cette opinion. La Révolution lui paraît avoir été nécessaire, et il conclut en disant :

“ Regrette qui voudra de n’être plus un vilain allant battre des étangs pour empêcher les grenouilles de troubler le sommeil du seigneur ; se lamente qui voudra de n’avoir plus la satisfaction de voir son champ dévasté par la meute d’un jeune insolent ; se désole qui voudra de n’être plus exposé à se réveiller à la Bastille parce que quelque Lauzun convoite sa femme, ou à cause d’un mot prononcé contre un puissant, ou mieux encore, pour un motif ignoré ; se désespère qui voudra de n’être pas tyrannisé par quelques ministres, par quelques commis, par quelques intendants, de n’être plus taillé à merci, pillé plus qu’imposé; de n’être plus foulé et conspué par de prétendus conquérants. Pour moi plébéien, je suis reconnaissant à ceux dont le rude labeur m’a délivré de ces jougs qui, sans eux, pèseraient encore sur ma tête, et malgré leurs fautes, je les bénis. ”

La croyance synthétisée par les lignes précédentes contribua fortement, avec l’épopée napoléonienne, à rendre populaire en France le souvenir de la Révolution. Elle dérive surtout de cette illusion si répandue, même chez des hommes d’État, que les institutions déterminant les formes d’existence d’un peuple, alors que ces dernières sont presque exclusivement conditionnées par les progrès scientifiques et économiques. La locomotive fut une niveleuse autrement efficace que la guillotine, et même sans la Révolution, nous serions sûrement arrivés depuis longtemps à la phase d’égalité et de liberté atteinte aujourd’hui et que d’ailleurs plusieurs peuples avaient déjà conquise avant l’époque révolutionnaire.

La seconde des conceptions énumérées plus haut — jugeant la Révolution un événement mystérieux et inexplicable — contribue également à maintenir son prestige.

Dans un article consacré à l’examen de mon ouvrage, le directeur politique d’un des plus importants journaux de Paris, M. Drumont, s’exprime comme il suit :

“ Cet événement formidable, qui secoua le vieux monde sur sa base, reste toujours une énigme... Les méthodes de la psychologie moderne ne font pas comprendre davantage ce qu’il y eut d’étrange et de mystérieux dans cette crise qui restera toujours un des étonnements de l’histoire. ”

Cette théorie paraît assez répandue chez nos hommes politiques. Je l’ai retrouvée sous une forme peu différente dans un article publié par un ancien ministre, M. Edouard Lockroy :

“ ...Les historiens n’ont pas compris la Révolution... La Convention a vécu dans le chaos au centre d’une émeute permanente... La dictature de Robespierre est une fable... L’histoire de la Révolution, c’est l’histoire d’une foule où personne n’est responsable et où tout le monde agit... Qui est responsable ? La foule, tout le monde, personne, des gens obscurs qui entraînent des gens inconnus. ”

Envisagée sous un tel angle, la Révolution apparaîtrait comme une série d’événements chaotiques dominés par un hasard mystérieux.

Ces courtes citations montrent quelles incertitudes obscurcissent encore l’étude de la Révolution et semblent justifier la prudence des érudits se bornant à publier des textes1.

Un esprit impartial soucieux de se former une idée juste sur la Révolution se trouve donc aujourd’hui en présence, soit de croyances aveugles, soit d’assertions déclarant ce grand événement inexplicable, au moins avec les documents actuels.

Cette impuissance d’interprétation m’avait frappé quand je commençai l’étude de la Révolution pour y chercher une application de mes méthodes psychologiques. Il m’apparut très vite que les incertitudes des historiens sur cette grande crise résultaient simplement de l’habitude d’avoir recours aux interprétations rationnelles pour expliquer les événements dictés par des influences mystiques, affectives et collectives étrangères à la raison.

L’histoire de la Révolution en fournit à chaque page la preuve. La logique collective seule et non la logique rationnelle pouvait révéler pourquoi les assemblées révolutionnaires votaient sans cesse des mesures contraires aux opinions de chacun de leurs membres. La raison ne saurait expliquer davantage pourquoi, dans une nuit célèbre, les représentants de la noblesse renoncèrent à des privilèges auxquels ils étaient si attachés et dont l’abandon en temps utile eût peut-être évité la Révolution. Comment, sans connaître les transformations de personnalités dans diverses circonstances, comprendre que les bourgeois intelligents et pacifiques qui, dans certains comités, décidaient la création du système métrique et l’ouverture de grandes écoles, votaient ailleurs des mesures aussi barbares que la mort de Lavoisier, celle du poète Chénier ou encore la destruction des magnifiques tombeaux de Saint-Denis ? Comment comprendre enfin la propagation des mouvements révolutionnaires en général sans la connaissance des lois réelles de la persuasion, si différentes de celles qu’enseignent les livres ?

Nous sommes trop rationalisés en France pour admettre facilement que l’histoire puisse se dérouler en dehors de la raison et souvent même contre toute raison. Il faudra bien cependant nous résigner à changer entièrement nos méthodes d’interprétations historiques si nous voulons arriver à comprendre une foule d’événements que la raison demeure impuissante à expliquer.

Je crois que les idées exposées dans cet ouvrage se répandront rapidement. De nombreux articles prouvent qu’elles ont déjà frappé beaucoup d’observateurs. Il suffira de citer parmi eux quelques extraits du plus important des journaux anglais, le Times.

“ Tous les hommes d’État devraient étudier le livre de Gustave Le Bon. L’auteur n’a aucun respect pour les théories classiques concernant la Révolution, et ses interprétations psychologiques le conduisent à des conclusions très neuves. C’est ainsi qu’il expose avec un frappant relief le faible rôle joué par la masse du peuple dans les mouvements révolutionnaires, l’absolue contradiction entre les volontés individuelles et les volontés collectives des membres des assemblées, l’élément mystique qui conduisit les héros de la Révolution et à quel point ces héros furent peu influencés par la raison. Sans la Révolution il eût été très difficile de prouver que la raison ne saurait transformer les hommes, et que par conséquent une société ne se reconstruit pas à la volonté des législateurs, si complet que soit leur pouvoir. ”

L’histoire de la Révolution se compose en réalité d’une série d’histoires parallèles, et souvent indépendantes : histoire d’un régime usé qui périt faute de défenseurs ; histoire des assemblées révolutionnaires ; histoire des mouvements populaires et de leurs meneurs ; histoire des armées ; histoire des institutions nouvelles, etc. Toutes ces histoires représentant le plus souvent des conflits de forces psychologiques, doivent être étudiées avec des méthodes empruntées à la psychologie.

On pourra discuter la valeur de nos interprétations. Je crois cependant qu’il sera désormais difficile d’écrire une histoire de la Révolution sans en tenir compte.

Introduction

Les révisions de l’histoire

L’âge moderne n’est pas seulement une époque de découvertes, mais aussi de révision des divers éléments de la connaissance. Après avoir reconnu qu’il n’existait aucun phénomène dont la raison première fût maintenant accessible, la science a repris l’examen de ses anciennes certitudes et constaté leur fragilité. Elle voit aujourd’hui ses vieux principes s’évanouir tour à tour. La mécanique perd ses axiomes, la matière, jadis substratum éternel des mondes, devient un simple agrégat de forces éphémères transitoirement condensées.

Malgré son côté conjectural qui la soustrait un peu aux critiques trop sévères, l’histoire n’a pas échappé à cette révision universelle. Il n’est plus une seule de ses phases dont on puisse dire qu’elle soit sûrement connue. Ce qui paraissait définitivement acquis est remis en question.

Parmi les événements, dont l’étude semblait achevée, figure la Révolution française. Analysée par plusieurs générations d’écrivains, on pouvait la croire parfaitement élucidée. Que dire de nouveau sur elle, sinon modifier quelques détails ?

Et voici cependant que ses défenseurs les plus convaincus commencent à devenir fort hésitants dans leurs jugements. D’anciennes évidences apparaissent très discutables. La foi en des dogmes tenus pour sacrés est ébranlée. Les derniers écrits sur la Révolution trahissent ces incertitudes. Après avoir raconté, on renonce de plus en plus à conclure.

Non seulement les héros de ce grand drame sont discutés sans indulgence, mais on se demande si le droit nouveau, succédant à. l’ancien régime, ne se serait pas établi naturellement sans violence, par suite des progrès de la civilisation. Les résultats obtenus ne paraissent plus en rapport ni avec la rançon qu’ils ont immédiatement coûtée, ni avec les conséquences lointaines que la Révolution fit sortir des possibilités de l’histoire.

Plusieurs causes ont amené la révision de cette tragique période. Le temps a calmé les passions, de nombreux documents sont lentement sortis des archives et on apprend à les interpréter avec indépendance.

Mais c’est la psychologie moderne peut-être qui agira le plus sur nos idées en permettant de mieux pénétrer les hommes et les mobiles de leur conduite.

Parmi ses découvertes, applicables dès maintenant à l’histoire, il faut mentionner surtout la connaissance approfondie des actions ancestrales, les lois qui régissent les foules, les expériences relatives à la désagrégation des personnalités, la contagion mentale, la formation inconsciente des croyances, la distinction des diverses formes de logique.

À vrai dire, ces applications de la science, utilisées dans cet ouvrage, ne l’avaient pas été encore. Les historiens en sont restés généralement à l’étude des documents. Elle suffisait d’ailleurs à susciter les doutes dont je parlais à l’instant.

Les grands événements qui transforment la destinée des peuples révolutions, éclosions de croyances, par exemple, sont si difficilement explicables parfois, qu’il faut se borner à les constater.

Dès mes premières recherches historiques, j’avais été frappé par cet aspect impénétrable de certains phénomènes essentiels, ceux relatifs à la genèse des croyances surtout. Je sentais bien que pour les interpréter, quelque chose de fondamental manquait. La raison ayant dit tout ce qu’elle pouvait dire, il ne fallait plus rien en attendre et l’on devait chercher d’autres moyens de comprendre ce qu’elle n’éclairait pas.

Ces grandes questions restèrent longtemps obscures pour moi. De lointains voyages consacrés à l’étude des débris de civilisations disparues ne les avaient pas beaucoup éclaircies.

En y réfléchissant souvent, il fallut reconnaître que le problème se composait d’une série d’autres problèmes devant être étudiés séparément. C’est ce que je fis pendant vingt ans, consignant le résultat de mes recherches dans une succession d’ouvrages.

Un des premiers fut consacré à l’étude des lois psychologiques de l’évolution des peuples. Après avoir montré que les races historiques, c’est-à-dire formées suivant les hasards de l’histoire, finissent par acquérir des caractères psychologiques aussi stables que leurs caractères anatomiques, j’essayai d’expliquer comment les peuples transforment leurs institutions, leurs langues et leurs arts. Je fis voir, dans le même ouvrage, pourquoi, sous l’influence de variations brusques de milieu, les personnalités individuelles peuvent se désagréger entièrement.

Mais en dehors des collectivités fixes constituées par les peuples, existent des collectivités mobiles et transitoires, appelées foules. Or, ces foules, avec le concours desquelles s’accomplissent les grands mouvements historiques, ont des caractères absolument différents de ceux des individus qui les composent. Quels sont ces caractères, comment évoluent-ils ? Ce nouveau problème fut examiné dans la Psychologie des foules.

Après ces études seulement je commençai à entrevoir certaines influences qui m’avaient échappé.

Mais ce n’était pas tout encore. Parmi les plus importants facteurs de l’histoire, s’en trouvait un prépondérant, les croyances. Comment naissent ces croyances, sont-elles vraiment rationnelles et volontaires, ainsi qu’on l’enseigna longtemps ? Ne seraient-elles pas, au contraire, inconscientes, et indépendantes de toute raison ? Question difficile étudiée dans mon dernier livre Les Opinions et les Croyances.

Tant que la psychologie considéra les croyances commue volontaires et rationnelles elles demeurèrent inexplicables. Après avoir prouvé qu’elles sont irrationnelles le plus souvent et involontaires toujours, j’ai pu donner la solution de cet important problème comment des croyances qu’aucune raison ne saurait justifier furent-elles admises sans difficulté par les esprits les plus éclairés de tous les âges ?

La solution des difficultés historiques poursuivie depuis tant d’années, se montra dès lors nettement. J’étais arrivé à cette conclusion qu’à côté de la logique rationnelle qui enchaîne les pensées et fut jadis considérée comme notre seul guide, existent des formes de logique très différentes logique affective, logique collective et logique mystique, qui dominent le plus souvent la raison, et engendrent les impulsions génératrices de notre conduite.

Cette constatation bien établie, il me parut évident que si beaucoup d’événements historiques restent souvent incompris, c’est qu’on veut les interpréter aux lumières d’une logique très peu influente en réalité dans leur genèse.

Toutes ces recherches, résumées ici en quelques lignes, demandèrent de longues années. Désespérant de les terminer, je les abandonnai plus d’une fois pour retourner à ces travaux de laboratoire où l’on est toujours sûr de côtoyer la vérité et d’acquérir des fragments de certitude.

Mais s’il est fort intéressant d’explorer le monde des phénomènes matériels, il l’est plus encore de déchiffrer les hommes, et c’est pourquoi j’ai toujours été ramené à la psychologie.

Certains principes déduits de mes recherches, me paraissant féconds, je résolus de les appliquer à l’étude de cas concrets et fus ainsi conduit à aborder la psychologie des révolutions, notamment celle de la Révolution française.

En avançant dans l’analyse de notre grande Révolution, s’évanouirent successivement la plupart des opinions déterminées par la lecture des livres et que je considérais comme inébranlables.

Pour expliquer cette période, il ne faut pas la considérer comme un bloc, ainsi que l’ont fait plusieurs historiens. Elle se compose de phénomènes simultanés, mais indépendants les uns des autres.

À chacune de ses phases se déroulent des événements engendrés par des lois psychologiques fonctionnant avec l’aveugle régularité d’un engrenage. Les acteurs de ce grand drame semblent se mouvoir comme le feraient les personnages de scènes tracées d’avance. Chacun dit ce qu’il doit dire, et agit comme il doit agir.

Sans doute les acteurs révolutionnaires diffèrent de ceux d’un drame écrit en ce qu’ils n’avaient pas étudié leurs rôles, mais d’invisibles forces le leur dictaient comme s’ils l’eussent appris.

C’est justement parce qu’ils subissaient le déroulement fatal de logiques incompréhensibles pour eux, qu’on les voit aussi étonnés des événements dont ils étaient les héros, que nous le sommes nous-mêmes. Jamais ils ne soupçonnèrent les puissances invisibles qui les faisaient agir. De leurs fureurs, ils n’étaient pas maîtres, ni maîtres non plus de leurs faiblesses. Ils parlent au nom de la raison, prétendent être guidée par elle, et ce n’est nullement en réalité la raison qui les guide.

“ Les décisions que l’on nous reproche tant, écrivait Billaud-Varenne, nous ne les voulions pas, le plus souvent deux jours, un jour auparavant la crise seule les suscitait. ”

Ce n’est pas qu’il faille considérer les événements révolutionnaires comme étant dominés par d’impérieuses fatalités. Les lecteurs de nos ouvrages savent que nous reconnaissons à l’homme d’action supérieur le rôle de désagréger les fatalités. Mais il ne peut en dissocier qu’un petit nombre encore et est bien souvent impuissant sur le déroulement d’événements qu’on ne domine guère qu’à leur origine. Le savant sait détruire le microbe avant qu’il agisse, mais se reconnaît impuissant sur l’évolution de la maladie.

Lorsqu’une question soulève des opinions violemment contradictoires, on peut assurer qu’elle appartient au cycle de la croyance et non à celui de la connaissance.

Nous avons montré dans un précédent ouvrage que la croyance, d’origine inconsciente et indépendante de toute raison, n’était jamais influençable par des raisonnements.

La Révolution, œuvre de croyants, ne fut guère jugée que par des croyants. Maudite par les uns, admirée par les autres, elle est restée un de ces dogmes acceptés ou rejetés en bloc sans qu’aucune logique rationnelle intervienne dans un tel choix.

Si, à ses débuts, une révolution religieuse ou politique peut bien avoir des éléments rationnels pour soutien, elle ne se développe qu’en s’appuyant sur des éléments mystiques et affectifs absolument étrangers à la raison.

Les historiens qui ont jugé les événements de la Révolution française au nom de la logique rationnelle ne pouvaient les comprendre, puisque cette forme de logique ne les a pas dictés. Les acteurs de ces événements les ayant eux-mêmes mal pénétrés, on ne s’éloignerait pas trop de la vérité en disant que notre Révolution fut un phénomène également incompris de ceux qui la firent et de ceux qui la racontèrent. A aucune époque de l’histoire on n’a aussi peu saisi le présent, ignoré davantage le passé et moins deviné l’avenir.

La puissance de la Révolution ne résida pas dans les principes, d’ailleurs bien anciens, qu’elle voulut répandre, ni dans les institutions qu’elle prétendit fonder. Les peuples se soucient très peu des institutions et moins encore des doctrines. Si la Révolution fut très forte, si elle fit accepter à la France les violences, les meurtres, les ruines et les horreurs d’une épouvantable guerre civile, si enfin elle se défendit victorieusement contre l’Europe en armes, c’est qu’elle avait fondé, non pas un régime nouveau, mais une religion nouvelle. Or, l’histoire nous montre combien est irrésistible une forte croyance. L’invincible Rome elle-même avait dû plier jadis devant des armées de bergers nomades illuminés par la foi de Mahomet. Les rois de l’Europe ne résistèrent pas, pour la même raison, aux soldats déguenillés de la Convention. Comme tous les apôtres, ils étaient prêts à s’immoler dans le seul but de propager des croyances devant, suivant leur rêve, renouveler le monde.

La religion ainsi fondée eut la force de ses aînées, mais non leur durée. Elle ne périt pas cependant sans laisser des traces profondes et son influence continue toujours.

Nous ne considérerons pas la Révolution comme une coupure dans l’histoire, ainsi que le crurent ses apôtres. On sait que pour montrer leur intention de bâtir un monde distinct de l’ancien, ils créèrent une ère nouvelle et prétendirent rompre entièrement avec tous les vestiges du passé.

Mais le passé ne meurt jamais. Il est plus encore en nous-mêmes, que hors de nous-mêmes. Les réformateurs de la Révolution restèrent donc saturés à leur insu de passé, et ne firent que continuer, sous des noms différents, les traditions monarchiques, exagérant même l’autocratie et la centralisation de l’ancien régime. Tocqueville n’eut pas de peine à montrer la Révolution ne faisant guère que renverser ce qui allait tomber.

Si en réalité la Révolution détruisit peu de choses, elle favorisa cependant l’éclosion de certaines idées qui continuèrent ensuite à grandir. La fraternité et la liberté qu’elle proclamait ne séduisirent jamais beaucoup les peuples, mais l’égalité devint leur évangile, le pivot du socialisme et de toute l’évolution des idées démocratiques actuelles. On peut donc dire que la Révolution ne se termina pas avec l’avènement de l’Empire, ni avec les restaurations successives qui l’ont suivie. Sourdement ou au grand jour, elle s’est déroulée lentement dans le temps, et continue, à peser encore sur les esprits.

L’étude de la Révolution française, à laquelle est consacrée une grande partie de cet ouvrage, ôtera peut-être plus d’une illusion au lecteur, en lui montrant que les livres qui la racontent contiennent un agrégat de légendes fort lointaines des réalités.

Ces légendes resteront sans doute plus vivantes que l’histoire. Ne le regrettons pas trop. Il peut être intéressant pour quelques philosophes de connaître la vérité, mais pour les peuples les chimères sembleront toujours préférables. Synthétisant leur idéal elles constituent de puissants mobiles d’action. On perdrait courage si l’on n’était soutenu par des idées fausses, disait Fontenelle. Jeanne d’Arc, les Géants de la Convention, l’Épopée impériale, tous ces flamboiements du passé, resteront toujours des générateurs d’espérance, aux heures sombres qui suivent les défaites. Ils font partie de ce patrimoine d’illusions léguées par nos pères et dont la puissance est parfois supérieure à celle des réalités. Le rêve, l’idéal, la légende, en un mot l’irréel, voilà ce qui mène l’histoire.

26 juillet 2011

Contre la discrimination, discriminons.



A certains égards, l’affaire DSK est une répétition de ce que deviendra la France d’ici vingt ans, si les partisans du communautarisme l’emportent sur les républicains pur sucre.
Au départ, il s’agit d’une plainte d’une femme de chambre contre le patron du FMI. Curieusement, toutes les voix, en France, qui dénoncent à longueur d’année « l’essentialisation » consistant à traiter les gens par catégories (LES Arabes, LES Juifs, LES Noirs) ne se sont pas gênées pour essentialiser LES femmes de chambres, LES mères célibataires, LES Noires, LES hommes, LES puissants. Oui, soudain, la parole s’est libérée, comme on dit, laissant voir les donneurs de leçons tels qu’ils sont : de parfaits hypocrites. Soudain, les hommes devinrent des violeurs, des batteurs d’épouses, les femmes noires devinrent des victimes, les procureurs américains devinrent des héros, ou des salauds (selon les opinions), les femmes du monde entier devinrent des biches pourchassées et les féministes devinrent des exemples de courage. On a essentialisé à tour de bras, on s’est vautré dans l’essentialisation comme des pourceaux. Les mêmes qui expliquent qu’on ne peut pas parler des gens selon la couleur de leur peau ni selon leur origine s’en sont donné à cœur joie dans la réduction de ces mêmes personnes à ces deux catégories. Mais, attention : pour la bonne cause !
A un moment, le français fut épaté de ce qu’aux Etats-Unis, au moins, la Justice ne plaisante pas avec le sexe. Et chacun de se dire que « c’est pas en France qu’on aurait vu ça » ! Qu’un homme puissant soit amené à répondre de tentative de viol, vraiment, le Français, ça l’a scié… Puis, les mêmes qui ne juraient que par l’indépendance et la rigueur de la Justice made in New York se sont mis à faire l’inverse : le procureur qui révèle les mensonges de la plaignante, ça ne pouvait être qu’une histoire d’intérêt, de lobby, de pression. Bref, autant le dire tout de suite : si on veut conserver un peu de l’humanisme qui est en nous et continuer d'aimer son prochain, il faut éviter de discuter de cette affaire avec qui que ce soit. Trop d’imbéciles.

Comme je l’ai déjà dit, un procès n’est jamais qu’un cas unique. On juge un individu pour des actes et, si l’on veut éviter la grandiloquence autant que l’erreur judiciaire, on se gardera bien de juger quiconque « pour l’exemple » ou pour racheter des injustices par ailleurs impunies. Ainsi, les simplettes d’esprit qui tentèrent de faire passer les femmes comme victimes par essence, ne se gênaient pas pour en tirer les conclusions logiques : elle n’a pas pu mentir, il faut respecter sa « présomption de véracité », donc DSK est coupable. Heureusement, depuis les derniers développements de l’affaire, Osons le féminisme semble s’être transformé en Osons-fermer-notre-grande-gueule. C’est toujours ça de pris.
Mais la France, décidément, n’est pas encore tout à fait américaine. Oui, malgré les vacheries que j’ai eu l’audace de lancer sur mes compatriotes en introduction, je suis bien obligé de convenir que la foire aux conneries s’est un peu calmée, en France, depuis que DSK est redevenu un être humain presque comme tout le monde. Même Gisèle Halimi s’est tue ! Aux Etats-Unis, en revanche, la rage justicière ne s’arrête pas à un détail aussi mince que l’innocence de l’accusé. Non, il faut encore que l’accusé soit innocent de la couleur de sa peau.
Comme toute maladie, le communautarisme produit ses effets sans état d’âme : les Noirs « défendent » donc les intérêts des Noirs, et les Blancs, ceux des Blancs. Il ne s’agit plus, dès lors, de savoir où se trouve la justice ni l’intérêt général, il s’agit de se serrer les coudes entre soi. C’est ainsi qu’on voit se former des manifestations de Noirs pour exiger que le procès de DSK ait lieu. Bill Perkins, sénateur noir, endosse même le rôle de défenseur de la communauté noire, ce qu’il est d’ailleurs très exactement ! Ils exigent le procès non en raison de leur goût pour la justice, mais parce qu’ils pensent qu’un procès sera favorable à une femme noire. Si madame Diallo avait accusé de viol un homme noir, croyez-vous que le sénateur Perkins serait venu froncer le sourcil devant les caméras de télévision ? Et si madame Diallo était une femme blanche, les belles âmes de Harlem, soudain devenues féministes, se seraient-elles manifestées ? Non. Si des manifestations ont lieu et si l’on se démène pour Diallo, c’est pour une raison d’ordre tribal : elle fait partie de la famille.
Le communautarisme et le racialisme sont tellement vivaces, là-bas, que personne n’est plus choqué quand un groupe de Noirs, sénateur en tête, demande et exige. Que l’on veuille qu’un procès ait lieu, pourquoi pas, mais que ce soit des Noirs qui le demandent, et uniquement des Noirs, ça donne aperçu de ce que devient la justice quand les individus sont intrinsèquement rattachés à une communauté ethno-raciale, qu’ils le veuillent ou pas.



Pendant ce temps, chez nous, des activistes font campagne pour l’adoption de statistiques ethniques. Dans un article qui ne le montre pas à son avantage, un certain Kamel Hamza, président d’une « association nationale des élus locaux de la diversité », nous raconte son récent voyage aux Etats-Unis où, affirme-t-il, le meilleur des mondes est déjà bien établi... La langue de bois n’ayant aucun secret pour lui, il débite une quantité d’insanités malhabiles, propres à le faire entrer rapidement dans le Top 10 des Très Grands Comiques, chouchou des médias. Ce type a au moins le mérite d’être décomplexé, ce qui est toujours un avantage pour ses adversaires. Il affirme qu’aux Etats-Unis, des élus issus de la diversité « ont porté plainte pour que le redécoupage électoral soit plus représentatif des minorités ethniques. Ils ont réussi à sensibiliser la population sur l’idée de «voter pour quelqu’un qui vous ressemble». Ce qui n’est pas le cas en France. » Ce qu’Hamza souhaite, il le dit, il le proclame sans ambages, c’est qu’on lui réserve un corps électoral à lui, ethniquement pur, pour simplifier ses réélections futures ! Que les Blancs votent pour des Blancs, que les Noirs élisent des Noirs, et que les Arabes restent entre eux : immense progrès, auquel on doit reconnaître que la République Française n’avait pas pensé.

Je me souviens d’une réplique de Robert de Niro, dans Brazil. A quelqu’un qui a peur des terroristes (parce que les médias en font leur sujet continu), il demande : « mais toi, un terroriste, tu en as déjà vu ? ».
Les statistiques ethniques, c’est la même chose. Leurs partisans posent comme base de la discussion que les discriminations existent, qu’elles sont « d’ordre ethnique » (lire : racisme) et qu’elles sont les seules explications possibles au fait qu’il n’y a pas dix pour cent de députés d’origine arabe au Parlement, par exemple. Tout est fait pour qu’on ne discute même pas de ces axiomes pourtant bien branlants. Et, bien sûr, si ces discriminations existent, il faut des stats ethniques pour en prendre la mesure. Faisons comme Robert de Niro, demandons-nous si ce qu’on nous dit est vrai.
Basons-nous, par exemple, sur le rapport du CREST (Centre de Recherche en Economie et Statistique) de mars 2011, portant sur l’évaluation de l’impact du CV anonyme (CV qui ne comporte aucune mention du nom, du prénom, de l’adresse ni de la date de naissance du candidat). Ce rapport établit clairement que les recruteurs recrutent par « homophilie », c'est-à-dire qu’un homme recrute plutôt des hommes, une femme fait de même avec les femmes, un jeune avec les jeunes, etc. Dans cette perspective, il est probable qu’un Blanc a tendance à recruter des blancs, et un Noir des noirs. Or, si la grande majorité des recruteurs est composée de Blancs, il est mécaniquement probable qu’ils recruteront « plutôt » des blancs. Il s’agirait alors non pas de racisme, mais d’un effet mécanique dû au grand nombre des acteurs en présence.
Cette « homophilie » est quantifiée, et devient très instructive : « Lorsque le recruteur est un homme et que le CV est nominatif, les femmes ont une chance sur 27 d’être reçues en entretien et les hommes une chance sur cinq ». Cela revient à dire que dans ces circonstances, les femmes ont 3% de chances d’être recrutées, et les hommes 20%. Bigre ! Le clou du spectacle arrive quand on aborde les différences ethniques : « Avec des CV nominatifs, les candidats issus de l’immigration et/ou résidant en ZUS-CUCS ont 1 chance sur 10 d’obtenir un entretien, tandis que le reste de la population a 1 chance sur 8 ». C'est-à-dire 12% pour les « de souche » et 10% pour les autres. Vous avez bien lu : la différence de traitement selon l’ethnie est insignifiante, tandis que celle entre les hommes et les femmes est gigantesque ! La différence de traitement selon l’ethnie est donc hors de proportion avec ce qu’on raconte dans les médias, avec le discours dominant, avec les accusations de racisme endémique qui gangrènerait la France, et les jérémiades des victimes professionnelles qui vont avec.
Mais ce spectacle a un second clou, encore plus formidable, que voici : quand le CV est anonyme, cette fois : une chance sur 6 pour les femmes, une chance sur 13 pour les hommes. La première tendance (homophile) est donc inversée. Mais pour les candidats « issus de l’immigration et/ou résidant en ZUS-CUCS », on passe de 10% de chance d’obtenir un entretien à…4% ! SCANDALE ! C’est donc quand les recruteurs connaissent le nom et l’origine de Mohamed qu’il a le plus de chance de trouver un boulot ! Mais alors, où est passé le racisme congénital des Français ? Si on leur file un CV anonyme, s’ils jugent donc « sur pièces » et non en fonction de leurs épouvantables préjugés, ils divisent par deux et demie les chances du candidat ! Il y a de quoi se les mordre, non ?
On peut trouver quelques explications à ce phénomène, mais ce n’est pas mon propos. On est en revanche obligé d’admettre qu’il n’y a pas de discrimination à l’embauche basée sur l’origine ethnique en France. On est obligé de l’admettre, sauf à nier les conclusions de cette étude. T’en as déjà vu, toi, des terroristes ?



Mais, chacun l’aura remarqué, ce que j’avance est paradoxal : je m’oppose aux statistiques « ethniques » MAIS je me base sur les conclusions d’une étude « ethnique » pour démontrer qu’elles n’ont pas d’objet ! C’est une absurdité circulaire, c’est la politique de la France livrée aux Marx Brothers, c’est l’Eternel retour de la galéjade !
En fait, l’enjeu des « statistiques ethniques » ne se situe pas là. Il ne s’agit pas de quantifier les discriminations ethniques dans un domaine ou dans un autre. Ça, au fond, tout le monde s’en fout. Et d’ailleurs, comme le montre l’étude du CREST, on peut bien prouver qu’il n’y a pas de discrimination, ça ne diminue en rien le zèle des militants antiracistes amateurs de stats raciales. L’objectif final, c’est la partition d’une nation en groupes, en communautés, en tribus. C’est aussi, bien sûr, la nouvelle donne politique qui irait avec (collèges électoraux séparés, ou découpage électoral racial – qu’on appellerait autrement, tu parles !). C’est, si l’on regarde loin en délaissant les détails qui ne font qu’obscurcir le tableau, une véritable passion racialiste qui s’exprime, un désir profond de régression tribale fondée sur un entre soi primitif, c’est une profonde haine symétrique de l’autre et de soi (honte d’être victime et ressentiment d’un côté ; honte d’être raciste et militantisme xénolâtre de l’autre). Quand la mondialisation des échanges laissait les peuples dans leurs contrées d’origine, quand les migrations n’étaient pas très massives et surtout quand elles n’avaient pas encore produit leur effet de cumul, il était « facile » de détester les étrangers. C’était une tradition sans conséquence. Les étrangers, c’était ceux qui habitent de l’autre côté de la frontière, de la mer, de l’autre côté du monde, ces ploucs, ces couillons ! Maintenant que la mondialisation s’emballe et que les peuples s’interpénètrent comme jamais, l’étranger habite la maison d’à côté, on ne peut plus le considérer comme une abstraction. Lui-même, cet étranger, venu ici pour gagner sa vie, s’aperçoit bientôt qu’il doit abandonner une grande part de ses habitudes, de sa « culture d’origine ». D’où les revendications particulières, d’où les lieux de culte, d’où la viande halal, d’où le voile, d’où un jour la charia, c’est mécaniquement prévisible. Contrairement à ce qu’on entend souvent, la mondialisation et les migrations ne produisent pas la peur et le repli uniquement chez les populations d’accueil. Les déplacés aussi aspirent au communautarisme parce qu’ils sont déboussolés par la perte de leurs repères, par l’obsolescence soudaine de leur mode de vie, de leurs façons de penser, de leur vision de l’avenir, du rôle des parents dans l’éducation. Comment, sinon, expliquerait-on que leurs enfants deviennent soudain massivement délinquants ?
Dans son excellent « Les yeux grands fermés », Michèle Tribalat défend et réclame des statistiques ethniques. Ses arguments semblent frappés au coin du bon sens, et par certains côtés, ils le sont. Mais Tribalat néglige les conséquences de ce changement, y compris les conséquences psychologiques. Déjà bien assez vivace, le communautarisme serait renforcé par une lecture systématiquement racialisée des problèmes sociaux, que les statistiques ethniques permettraient. Comment en serait-il autrement ? Autoriser des stats ethniques, c’est renforcer la conscience de groupe et faire la promotion des origines, ces boulets. Tout cela au détriment du sentiment d’appartenance nationale.

La difficulté de la position anti communautariste vient de ce que la communauté est un mode d’organisation « naturel » à l’homme. Il est parfaitement humain de vouloir vivre au milieu de gens qui partagent votre mode de vie, votre langage, votre histoire, vos codes sociaux, votre façon de faire la bouffe, etc. Les étrangers se regroupent en quartier (et on les y regroupe) depuis l’Antiquité. C’est à une tendance bien « naturelle » de l’homme que l’on s’oppose, quand on supporte l’idée de nation (au sens révolutionnaire français du mot). Les Etats-Unis sont une nation composée dès l’origine de populations différentes et toutes immigrées ; par la même logique, c’est le pays des communautés. Mais ce qui est logique et explicable pour les Etats-Unis ne l’est pas pour la France. Il n’y a pas, aux Etats-Unis une population ayant conscience d’être « là » depuis Jules César (que ceci soit vrai ou pas), à part les Indiens, noyés sous la masse. Ce qui a fonctionné là-bas ne pourra que faire exploser la nation ici, surtout dans une époque où la nation a honte d’elle-même, de sa nature, de son histoire, de ses principes et de ses réalisations. Quand on s’oppose au communautarisme et à ses méthodes, on s’oppose à ce risque. Le racisme n’a rien à faire là-dedans, n’en déplaise aux imbéciles et aux faux-culs.

Si on accède aux désirs des gens comme Kamel Hamza, si l’on tronçonne les populations en fonction de la couleur de la peau, il faut s’attendre à ce qu’en 2040, des processions « ethniques » viennent manifester pour soutenir la Nafissatou d’alors, coupable ou victime, qu’importe. On avait la justice de classes, on lui aura substitué, comme lors de l’affaire O.J. Simpson, la justice de races.

23 juillet 2011

Tristane Banon : ce qu'elle ne sait pas encore

Voir l'article du Figaro sur son père "absent" (et pour cause!)
Pas de père, enfin si, un nom, celui de l'homme qui s'est évaporé le jour de la naissance de Tristane(...)

20 juillet 2011

Si Lagardère ne va pas aux putes...

Non, Arnaud Lagardère n'aime pas tâter les balles de service de Richard Gasquet plus que de raison, et il le prouve, tas de mauvaises langues!



(Pour faire taire les rumeurs, était-il vraiment malin de s’habiller en mauve ?)

Les lectures de l'été : Georges Bernanos contre C-3PO

Quand la société impose à l'homme des sacrifices supérieurs aux services qu'elle lui rend, on a le droit de dire qu'elle cesse d'être humaine, qu'elle n'est plus faite pour l'homme, mais contre l'homme. Danš ces conditions, s'il arrive qu'elle se maintienne, ce ne peut être qu'aux dépens des citoyens ou de leur liberté ! Imbéciles, ne voyez-vous pas que la civilisation des machines exige en effet de vous une discipline chaque jour plus stricte ? Elle l'exige au nom du Progrès, c'est-à-dire au nom une conception nouvelle de la vie, imposée aux esprits par son énorme machinerie de propagande et de publicité. Imbéciles ! Comprenez donc que la civilisation des machines est elle-même une machine, dont tous les mouvements doivent être de plus en plus parfaitement synchronisés ! Une récolte exceptionnelle de café au Brésil influe aussitôt sur le cours d'une autre marchandise en Chine, ou en Australie; le temps n'est certainement pas loin où la plus légère augmentation de salaires au Japon déchaînera des grèves à Detroit ou à Chicago, et finalement mettra une fois encore le feu au monde. Imbéciles ! Avez-vous jamais imaginé que dans une société où les dépendances naturelles ont pris le caractère rigoureux, implacable, des rapports mathématiques, vous pourrez aller et venir, acheter ou vendre, travailler ou ne pas travailler, avec la même tranquille bonhomie que vos ancêtres ? Politique d'abord ! disait Maurras. La Civilisation des Machines a aussi sa devise : « Technique d'abord ! Technique partout ! » Imbéciles ! Vous vous dites que la technique ne contrôlera, au pis aller, que votre activité matérielle, et comme vous attendez pour demain la « Semaine de Cinq Heures » et la Foire aux attractions ou verte jour et nuit, cette hypothèse n'a pas de quoi troubler beaucoup votre quiétude. Prenez garde, imbécile ! Parmi toutes les Techniques, il y a une technique de la discipline et elle ne saurait se satisfaire de l'ancienne obéissance - obtenue vaille que vaille par des procédés empiriques, et dont on aurait dû dire quelle était moins la discipline qu'une indiscipline modérée.

La Technique prétendra tôt ou tard former des collaborateurs acquis corps et âme à son Principe, c'est-à-dire qui accepteront sans discussion inutile sa conception de l'ordre, la vie, ses Raisons de Vivre, Dans un monde tout entier voué à l'Efficience, `au Rendement, n'importe-t-il pas que chaque citoyen, dès sa naissance, soit consacré aux mêmes dieux ? La Technique ne peut être discutée, les solutions qu'elle impose étant par définition les plus pratiques. Une solution pratique n'est pas esthétique ou morale. Imbéciles ! La Technique ne se reconnaît-elle pas déjà le droit, par exemple, d'orienter les jeunes enfants vers telle ou, telle profession ? N'attendez pas qu'elle se contente toujours de les orienter, elle les désignera. Ainsi, à l'idée morale, et même surnaturelle, de la vocation s'oppose peu. A peu celle d'une simple disposition physique et Mentale, facilement contrôlable par les Techniciens. Croyez-vous, imbéciles, qu'un tel système, et si rigoureux, puisse subsister par le simple consentement ? Pour l'accepter comme il veut qu'on l'accepte, il faut y croire, il faut y conformer entièrement non seulement ses actes, mais sa conscience. Le système n'admet pas de mécontents. Le rendement d'un mécontent — les statistiques le prouvent — est inférieur de 30 % au rendement normal, et de 5o ou 6o % au rendement d'un citoyen qui ne se contente pas de trouver sa situation supportable - en attendant le Paradis — mais qui la tient pour la meilleure possible. Dès lors, le premier venu comprend très bien quelle sorte de collaborateur le technicien est tenu logiquement de former. Il n'y a rien de plus mélancolique que d'entendre les imbéciles donner encore au mot de Démocratie son ancien sens. Imbéciles ! Comment diable pouvez-vous espérer que la Technique tolère un régime où le technicien serait désigné par le moyen du vote, c'est-à-dire non pas selon son expérience technique garantie par des diplômes, mais selon le degré de sympathie qu'il est capable d'inspirer à l'électeur ? La Société moderne est désormais un ensemble de problèmes techniques à résoudre. Quelle place le politicien roublard, comme d'ailleurs l'électeur idéaliste, peuvent-ils avoir là-dedans ? Imbéciles ! Pensez-vous que la marche de tous ces rouages - économiques, étroitement dépendants les uns des autres et tournant à la vitesse de l'éclair va dépendre demain du bon plaisir des braves gens rassemblés dans les comices pour acclamer tel ou tel programme électoral ? Imaginez-vous que la Technique d'orientation professionnelle, après avoir désigné pour quelque emploi subalterne un citoyen jugé particulièrement mal doué, supportera que le vote de ce malheureux décide, 'en dernier ressort, de l'adoption ou du rejet d'une mesure proposée par la Technique elle-même ? Imbéciles ! Chaque progrès de la Technique vous éloigne un peu plus de la démocratie rêvée jadis par les ouvriers idéalistes du Faubourg Saint-Antoine. Il ne faut vraiment pas comprendre grand chose aux faits politiques de ces dernières années cour refuser encore d'admettre que le Monde moderne a déjà résolu, au seul avantage de la Technique, le problème de la Dem6cratie. Les Etats totalitaires, enfants terribles et trop précoces de la Civilisation des Machines, ont tenté de résoudre ce problème brutalement, d'un seul coup. Les autres nations brûlaient de les imiter, mais leur évolution vers la dictature s'est trouvée un peu ralentie du fait que, contraintes après Munich d'entrer en guerre contre le hitlérisme et le fascisme, elles ont dû, bon gré mal gré, faire de l'idée démocratique le principal, ou plus exactement l'unique élément de leur propagande. Pour qui sait voir, il n'en est pas moins évident que le Réalisme des démocraties ne se définit nullement lui-même par des déclarations retentissantes et vaines comme, par exemple, celle de 1a Charte de l'Atlantique, déjà tombée dans l'oubli.

Depuis la guerre de 1914, c'est-a-dire depuis leurs premières expériences, avec -Lloyd George et Clemenceau, des facilités de la dictature, les Grandes Démocraties ont visiblement pérdu toute confiance dans l'efficacité des anciennes méthodes démocratiques de travail et de gouvernement. On peut être sûr que c'est parmi leurs anciens adversaires, dont elles apprécient l'esprit; de discipline, qu'elles recruteront bientôt leurs principaux collaborateurs ; elles n'ont que faire des idéalistes, car l'Etat Technique n'aura demain qu'un seul ennemi : « l'homme qui ne fait pas comme tout le monde » ou encore : « l'homme qui a du temps à perdre » — ou plus simplement si vous voulez : « l'homme qui croit a autre chose qu'à la Technique ».

Extraits de :

LA FRANCE CONTRE LES ROBOTS

Laffont. 1947

Maurice VS Charlotte


MAURICE VS SOS RACISME - part 1 Solidays par sebgob


MAURICE VS SOS RACISME - part 2 Solidays oui fm par sebgob


Piqué chez Millie

19 juillet 2011

Rendez-nous Mohamed


Avant même ma naissance, des musicologues et des électroniciens travaillant sur les nouveaux instruments de musique, cherchaient à rendre les machines capables d’imiter les sons acoustiques. On rêvait qu’un jour, un synthétiseur pourrait reproduire non seulement le son d’un violon mais aussi celui du frottement de l’archet et, pourquoi pas, le léger bruit que produit le doigt humide quand il quitte trop vite une corde. On s’échinait à mettre en équation le son soufflé d’une note de saxophone, celui plus grêle de la clarinette et la bonhomie du trombone à coulisses. Les crash, les boum, les clings et les fla de la batterie avaient vocation, eux aussi, à finir dans une boîte à rythmes, à la portée d’un enfant de cinq ans. Parmi les plus grands chercheurs de l’époque, parmi les plus radicaux visionnaires de la musique électronique, personne n’aurait imaginé qu’un jour, les êtres humains trouveraient fun d’imiter eux-mêmes, avec la bouche, les sons d’une boîte à rythmes. Personne n’aurait imaginé les chanteurs BeatBox. Depuis les automates de Vahttp://www.blogger.com/img/blank.gifucanson, l’humanité avait fabriqué des machines reproduisant ce que fait la nature. L’homme moderne trouve plus amusant de reproduire ce que font les machines… Ce n’est plus la nature qu’on prend comme modèle, mais les machines, pourtant conçues à l’origine pour imiter la nature. C’est comme ça, les choses changent…

En matière de noms et prénoms, c’est la même chose : on fait tout à l’envers. Quand nos ancêtres transformaient sans hésiter Buckingham en Bouquinquant, nous trouvons aujourd'hui très normal de prénommer un enfant Lucas (voire Louka !) au lieu de… Luc. Nous préférons l’apatride Matéo au biblique Mathieu, l’incompréhensible Hugo au très médiéval Hugues, nous préférons cette sotte d’Ynès à la sage Agnès, désormais frappée d’obsolescence. Vous voulez que la petite s’appelle Claire ? Au fou ! Elle s’appellera Clara, comme papa ! Les anciens s’affublaient de prénoms français, c'est-à-dire de prénoms venant de n’importe où mais francisés, roulés sous la langue d’ici. Les modernes ajoutent un O ou un A aux prénoms franchouillards, pour les faire sonner sud
Mais ce n’est pas tout. Imaginons un abruti. Il s’appelle Brouchardon, par exemple. Il sort de la Bourgogne comme Ève sortit d’Adam. Pour un peu, il roulerait les R. Mais voilà que Brouchardon se met en tête de fonder foyer avec la fille de Planpane, le gars du Jura, l’étranger. Une fois la chose faite, qui comprendra ce qui pousse le Brouchardon et la Planpane à appeler leur premier enfant Kylian ou Timéo, Maèlys ou Louna, Lilou, Noha, Yanis, Lena ou Rayan ? Qui expliquera les Noam, Ilhan, Titouan, Ilyes, les Maya, les Sofia et les Kenza ? Qui aura la force d’explorer ce gouffre grouillant du Grotesque ? Ça donnera quoi, ça donnera qui, Rayan Brouchardon ? Ça parlera quelle langue, ça se souviendra de quoi ? Et Yanis Planpane, quelle tête de con ça deviendra ?



Dans les années 60, l’industrie du disque naissante nous fourguait des « vedettes » de seconde main, incapables de produire quoi que ce soit d’autre que du plagiat, et encore, du mauvais. Un peu comme aujourd’hui avec les rappeurs, les « artistes » d’alors commençaient par se mettre un masque d’Ailleurs : ils changeaient leur noms. Claude Moine devenait Eddy Mitchell, Richard Btesh se changeait en Richard Anthony, la petite Annie Chancel se transforme en Sheila tandis que le plus drôle de tous, Jean-Philippe Smet, s’incarne en Johnny Hallyday pour l’éternité. Ainsi armés, nos fers de lance adapteront débilement des succès américains souvent pitoyables en se faisant passer pour d’autres. Avec leurs noms en forme de réclame, leurs noms de boissons gazeuses, ils vont se charger de vibrer avec leur époque, c'est-à-dire comme des glands. Comme les costards à la papa, un nom français vous condamnait à la ringardise, tandis qu’un blaze made in engliche faisait de vous un type dans le coup. On a vu ce que ça a donné.
Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les « stars » de mes deux qui se griment le prénom, c’est devenu la règle commune, même pour les gosses d’instits. Les industriels de la musique populaire avaient au moins un but : ils voulaient faire du fric en nous faisant avaler des chansonnettes tombées du camion. Pour que l’arnaque réussisse, il fallait quand même soigner le déguisement, il fallait faire croire à de l’authenticité, fût-ce à grand coup de triche. Ils ont maquillé les noms des chanteurs pour les faire rimer avec les Be-bop-a-lulla et les Da-dou-ron-ron (pour nos plus jeunes lecteurs, précisions que ces titres sont authentiques). Bon. OK ! Mais le petit Kalvin Ramirez, fils de routier et promis quant à lui à une belle carrière de vendeur de slips chez Kiloutou, quelle star est-il censé devenir ? Quel public pour ce noeud ? Et Maèlys Chauffier, qui deviendra coiffeuse et chopera un cancer de la peau à trente-deux berges, que fera-t-elle de ce prénom d’idole ? Cet empaffé de Kenzo Lavalette, fils de pute, petit-fils de collabo et futur DRH lui-même, attend-il des applaudissements chaque fois qu’il se présente ? A quoi riment ces conneries ?



Le constat est cruel, mais il est clair : la France produit désormais des chanteurs de variétés par paquets de dix mille. Dans l’imaginaire collectif, il n’y a pas plus haut. Chacun est affublé dès la naissance d’un prénom qui-fait-pas-français, NRJ-compatible, un prénom de star, prêt à servir, au cas ! Le prochain stade est facile à imaginer : c’est avec un prénom de rappeur clé en main qu’ils naîtront, les enfants : GangstA, DJmalin, RokkoEtnikk ou SoQP2touha- ZboubA\family©…
Les parents, à qui on a fait croire qu’ils sont des artistes, se trouvent bien obligés de faire de temps en temps œuvre de création. N’ayant pas la tête à ça (malgré les exhortations de Jack Lang), ils se rattrapent quand leur naît un petit. Là, leur imagination ne connaît plus de borne, leur furie s’exaspère, leur pouvoir est sans limite (malgré l’article 57 du Code Civil). Ils se lancent dans le choix du prénom comme on franchit le Rubicon. Ils ne respectent ni les règles, ni la tradition, ni les lois de la gravitation universelle : ils s’envolent. Et allons-y pour les Nolan, allons-y pour Aymen, Noa, Bryan ou Bruna ! Chaud, devant ! Et vlan pour Evaëlle ! On fait non seulement table rase du passé, mais on lui bazarde son couffin !

Jusqu’à une date récente, on tenait pour certain que les individus ne naissent pas spontanément et ne surgissent pas du néant. Les noms et les prénoms illustraient bien cette vieille croyance, et on se les transmettait comme on se passe le relais de la vie. Par le prénom, on en arrivait forcément à ressembler à quelqu’un d’avant – abomination qui rebuterait le premier venu aujourd’hui, s’il y avait encore des premiers venus… On donnait aux enfants un prénom qui avait déjà été porté, par hommage et aussi prudence, sans doute, pour éviter de se tromper. Une aïeule s’était appelée Denise, elle n’en était pas morte : ça pouvait aller ! Époques précautionneuses, qui ne sont plus…
Depuis deux siècles, la mode est à l’homme nouveau. Ah, on en a trouvé, des astuces, pour renouveler cette antiquité, l’homme ! A grands coups de révolutions, à grands coups de massacres et de chambres à gaz. Pire : à grands coups d’idées ! Et ça a profusé : l’homme nouveau sera industriel ! Il sera colonial, motorisé, il sera spatial, électronique, socialiste ! Il sera mondial, égal, il sera équitable, rouge, vert ! Il sera éolien ! Il sera consommateur et pacifique, il sera libre et assujetti à la CSG. Mieux : il sera une femme !... Et puis, on s’est rendu compte que ça ne fonctionnait pas : l’homme, plus il est nouveau, plus il est mauvais. Khmer rouge, par exemple, c’était bien nouveau, ça, pas de doute... Mais la rage de nouveauté et le zèle des changeurs de monde ne s’arrêtent pas à ce genre de détail. Sur la lancée des anciennes, les générations nouvelles ne peuvent pas s’empêcher d’entrer dans la tradition de la nouveauté. Hélas, n’ayant plus aucun lien avec l’Histoire, n’ayant que le divertissement pour vision collective et tournant littéralement à vide, nous n’avons plus les moyens de changer le monde, sinon par le fun. Et hop, les prénoms rigolos, venus de nulle part ! L’idée est tellement simple que personne ne l’avait eue : à prénom nouveau, homme nouveau. Une ancienne pub horlogère disait : « vous vous changez, changez de Kelton ». C’était juste pour vendre plusieurs montres, des jaunes, des bleues, des rouges, assorties à tes fringues. C’était pourtant simple, comme slogan, mais certains l’ont pris de travers, ils ont compris « vous changez de Kelton, vous changez ! ». Révélation ! pour devenir un autre, il suffisait de changer de montre ! Et si ça marche pour la montre, ça doit marcher pour les prénoms. Les billets de banque en euros nous ont déjà habitués à leurs illustrations irréelles, des ponts qui ne franchissent rien, des portes virtuelles, une architecture sans vie, sans hommes et sans passé. Les nouveaux prénoms finiront le travail. C’est ainsi que l’homme nouveau (modèle XXIème siècle naissant) s’appelle Noa, qu’il a deux ans et qu’il est mal parti.



Rendez-nous nos Jean ! Rendez-nous nos Gilles, nos Robert, nos Alain, nos Catherine, nos Françoise, nos admirables Françoise ! Rendez-nous nos prénoms normaux, nos prénoms de gens ordinaires, pas artistes, pas chanteurs, pas voyageurs, pas tatoués ! Rendez-nous des prénoms de chauffagiste, de boulanger, de comptable ! Des prénoms de chômeurs ! Rendez-nous nos Jean-Philippe, nos Jean-Marc, nos Martine, putain de bordel de merde ! Rendez-nous nos Mohamed !

17 juillet 2011

No Logo

Gnéééééééééé toi donner porte-clés !!


Vous ne pouvez plus sortir sans votre bob Cochonou ? Vous vous enorgueillissez de votre t-shirt à pois Carrefour, symbole de votre titre de meilleur grimpeur des apéros du camping "les pieds dans l'eau" ? Comme on vous comprend. Et visiblement vous faites des envieux. C'est à lire sur le site du journal Le Monde. Mécontents de la non-distribution de gadgets et autres échantillons promotionnels par les marques partenaires de la grande boucle sur certaines portions du parcours, une bande de gueux en manque a pris d'assaut la caravane du Tour de France lors de la 13ème étape reliant Pau à Lourdes. Non-prévenus par les organisateurs que les caravanes à neuneus n'avaient plus le droit de polluer les bords de route dans les zones Natura2000, invoquant leur droit non opposable aux glinglins gratuits et à se transformer en pancarte promotionnelle vivante, une foule de spectateurs indignés, affamés et mal-vêtus a festivement caillassé les panneaux propagandistes montés sur roue des marques scélérates, brisant vitres et rétroviseurs, invectivant et crachant sur les occupants des véhicules. Malheureusement aucun blessé n'est à déplorer dans les rangs des imbéciles ni dans ceux des crétiniseurs de masse.

14 juillet 2011

La pochette magique de Béatschnell : le Talmud


la solution de BHL pour le monde par sebas54dieuce


Le Talmud protège-t-il du dogme Béatschnellien ? Le Talmud protège-t-il du fanatisme social-démocrate de l'impérative démocratie libérale ? Le Talmud protège-t-il de la religion forcée du désir des désirs et de son signifiant qu'est la religion de l'argent ? Béatschnell, réponds-nous !

6 juillet 2011

I'm a CGBien : don't panic


Lundi 27 juin, aéroport de Marseille Provence. C’est le matin. Les équipes se réunissent pour débriefer le week-end. Rien à signaler. Pourtant, dimanche 26 juin, un vol Air France Marseille Paris a bien failli se crasher en flammes. Une info qui n'aurait pas transpiré si l'un des témoins cités par le Parisien, n'avait pas été l'ami d'une secrétaire de rédaction du canard. Pas de panique. Bonnes vacances à tous.

Samedi 1er juillet. Champigny-sur-Marne. Une vingtaine de jeunes attaquent le commissariat avec des pétards, des fusées et des mortiers, des barres de fer et autres projectiles. Un policier décrit la scène comme un acte mûrement réfléchi. La préfecture du Val-de-Marne parle de « simple provocation de gamins », Pierre Dartout, tout nouveau préfet du 9-4 de préciser : « Il y a eu un petit attroupement de quelques gamins à proximité du commissariat, qui ont allumé des pétards. Des petites fusées de feux d'artifice ont été projetées à un moment vers les policiers (...). C'est plus une connerie de gamins désoeuvrés qu'une opération programmée. » Dans la nuit du dimanche 2 au lundi 3 juillet, des cocktails Molotov ont été lancés contre le parking de ce même commissariat, a priori en représailles des neuf interpellations qu’a nécessité cette « simple provocation de gamins ». Pas de panique. Vivement le 14 juillet.

Lundi 3 juillet, journal télévisé de France 2. Au sujet de la noyade du petit William, 14 ans, contraint par quatre camarades à plonger dans le canal de l’Escaut alors qu’il ne savait pas nager. David Pujadas lance son sujet parlant d’un « jeu d’enfants qui a mal tourné » (à peu de choses près). Quelques dizaines de minutes plus tard, Léa Salamé enfonce le clou sur I-Télé, qualifiant le drame de « stupide dispute ». On ne savait pas encore que le leader du groupe avait un « profil de délinquant déjà très marqué » (Le Parisien du 5 juillet), mais on sentait que ce « jeu d’enfants » partait d’une volonté de faire du mal, d’humilier, de torturer, d’asservir. Pas de panique. Vivement les rackets à la rentrée !

Un jour un avion s’écrasera dans votre chambre comme dans Donnie Darko. Un jour la réalité ce sera Banlieue 13 pour tout le monde. Un jour l’Education nationale ce sera comme dans Sa majesté des mouches. Le déni de réalité fait la loi. Pas de panique. Montez le son. Et choisissez vos mots.

Le son du jour qui fait témoigner l'accusé

Mon empreinte écologique dans ta gueule

« V'là mon empreinte écologique ! »

Notre époque lance deux injonctions contradictoires :
  • d’un côté, elle nous invite à nous effacer, à gommer notre empreinte, à ne pas laisser trace de notre passage. Laisser la planète dans l’état où nous l’avons trouvée. Se faire petit. Pour chacun de nos gestes, chacune de nos actions, chacune de nos respirations, on nous présente la facture de ce que nous coûtons en fait de défiguration de l’environnement et de dégâts sur la couche d’ozone,
  • de l’autre, elle nous encourage à nous exprimer, nous affirmer, crier notre individualité sur les murs… Par la création et la consommation, se démarquer, laisser un souvenir, marquer les esprits, être célèbre un quart d’heure ou deux, donner son avis, participer, s’habiller pas comme les autres, assumer sa différence et son originalité…


En somme, on peut marquer notre empreinte, mais à l’encre effaçable. Des traces oui, mais sur le sable. Si affirmation il doit y avoir, c’est par le lifestyle, les choix de vie, les looks, les produits… A la rigueur un tatouage d’elfe au bas des reins. Mais de grâce, pas de construction en dur. Pas de traînée indélébile. Pas de geste trop grandiose apte à rester dans les mémoires. Que du recyclable, et de l’incinéré ! Nous coûtons suffisamment à la Terre en eau et en air pour ne pas les consommer en vain !

Cet état d’esprit, fort heureusement, n’est pas celui qui a toujours régné. Le bon Gustave Eiffel, lui, ne s’est pas soucié de son empreinte écologique lorqu’il a laissé sa grosse trace de doigts au milieu de la figure de Paris.

3 juillet 2011

Boulevard Solferino de la Mort : Un Film Grindhouse

Cette semaine notre C.V.C (Cellule de Vigilance Citoyenne - créée le soir du cataclysme républicain du 21 avril 2002) a repéré une séquence plus que douteuse.


touslessocialistes_1 par Culturalgangbang

Scénario, production, dialogues, réalisation, Bande originale du film, cascades et mauvais gout par Skymann.

2 juillet 2011

Engagez-vous !

Au CGB on essaye de suivre les conseils de Stéphane Aisselles, mais le vieux nous engueule tout le temps... ce coup-ci ça devrait être bon :

1 juillet 2011

Rebondissements dans l'affaire DSK, l'ancien patron du FMI impliqué dans un important trafic de drogues international ?


On en sait un peu plus sur le trouble passé de la mystérieuse maitresse de l'ancien patron du FMI, celle avec laquelle le candidat socialiste aurait entretenu, à New-York, en mai 2011, une intense relation extra-conjugale.

D'après les révélations de notre excellent confrère du N.Y Times, la dénommée Nafissatou Diallo serait le personnage-pivot d'un important trafic de drogues et de blanchiment d'argent qui aurait eu pour but d'alimenter illégalement le trésor de guerre constitué en vue de la campagne présidentielle 2012 de DSK si celui-ci était désigné par les militants socialistes lors des primaires organisées par ce parti.

Déjà mis en examen à la fin des années 90 dans le scandale de l'affaire de la MNEF et pris au cœur d'une des plus grandes affaire de corruption qui ait touché le milieu politique français avec l'affaire de la cassette Mery, Dominique Strauss-Kahn, actuellement défendu dans son affaire de mœurs par l' avocat de la Mafia, se voit une fois de plus rattrapé par ses interlopes fréquentations.

Même si la question du financement de sa campagne par le trafic de drogues devrait être difficile à démontrer, le seul fait d'entretenir des relations intimes avec une trafiquante de haut vol devrait définitivement ternir l'image du candidat socialiste et lui interdire toute nouvelle prise de responsabilité politique pour les prochaines années. Un nouveau coup dur pour le parti socialiste qui voit là son champion définitivement éliminé dans la course à la présidentielle 2012.

HUSH HUSH

Y a pas d'mai !


La France ressemble à une vieille actrice. Depuis qu’elle ne fait plus l’Histoire, elle ressasse les grandes dates de son passé, de commémorations en anniversaires, comme on repasse les bandes usées d’un vieux film. Parvenue même au stade ultime de cette passion, elle en arrive à revoir ses nanars avec la même autosatisfaction que si elle contemplait ses chefs d’œuvre. Pour remplir le rétroviseur, tout est bon : entre une commémoration de Valmy et une autre de Verdun, on trouvera donc le 10 mai 1981, comme on tolère l’asticot au cœur de la plus admirable scarole.
Durant ce mai 2011, personne ne peut l’ignorer, on a honoré le 10 mai comme une grande date. Pourquoi pas ? De toute façon, les mythes n’ayant aucun rapport avec la réalité, on ne saurait reprocher à nos revivalistes de faire passer des petits matins frisquets pour de grands soirs. Au-delà du 10 mai, c’est surtout sur les « années Mitterrand » que l’on est revenu, cherchant des motifs de fierté dans un passé pourtant comique.

Pour augmenter le mérite d’un vainqueur, il est toujours avantageux de faire croire à la grande valeur de ceux qu’il a vaincus. De la même façon, pour parer d’un lustre mirifique les années dites « Mitterrand », il est de bonne guerre de faire croire que les années « Giscard » n’étaient qu’obscurité, que les « Pompidou » ne furent qu’ultralibéralisme rampant et que les « de Gaulle » suffoquèrent sous le double joug de la mégalomanie personnelle et du militarisme. Interrogez des mecs de soixante ans, ils seront unanimes : c’est rien que des conneries.
Trente ans plus tard, on s’étonne même qu’avec la complicité de professionnels de la com bientôt promis au sarkozysme, le Grantomdegoche ait pu proposer un projet aussi puéril : changer la France. Comme on change un bébé qui a embrené ses couches ! Après le gros caca des années Giscard, il fallait d’urgence redonner aux fé-fesses du pays un soyeux impeccable, une fraîcheur printanière conforme à l’ambition de sa grande Maman mitterrandienne ! Rien ne vieillit plus vite que les idées modernes et les slogans. Voyez la « Force tranquille » : que reste-il de force dans la France d’aujourd’hui ? Qui est encore tranquille ? Où est-il, cet inconscient, ce phénomène ? Malgré ça, on réclame l’extase générale à l’évocation du grand fait d’armes du 10 mai… (Rappelons aussi qu’on a reproché à Mitterrand de n’avoir pas fait la révolution. Or, son programme se résumait en trois mots bien peu robespierriens: la force tranquille. Les reprocheurs n’avaient qu’à les lire avant !)



Un test simple permettra à chacun de vérifier cette constante : dès qu’on évoque publiquement le bilan de Mitterrand, l'omdegauche cherche désespérément dans sa mémoire un changement grandiose à la mesure de « l’espoir » du 10 mai puis, ne trouvant rien, sort l’abolition-de-la-peine-de-mort de son chapeau, comme si Mitterrand n’avait fait que cela pendant quatorze ans. Formidable ! nécessaire ! la fin de l’indécence ! Soit. Mais qu’est-ce que ça a été, l’abolition de la peine de mort ?
La mort de la peine du même nom n’est finalement qu’une mesure symbolique. Symbolique, oui, parce qu’elle n’a aucune importance sur la vie concrète et bassement réelle des Français. La peine de mort, le Français réel, dans son écrabouillante majorité, il n’en n’a rien à foutre. Pour être précis, sous le septennat giscardiaque, sur cinquante-quatre millions d’habitants, la France n’a perdu que trois pélots sous la guillotine. En sept ans ! Trois 54 millionièmes de condamnés à mort ! Pas de doute, y’avait urgence ! Il fallait arrêter le massacre ! La dépopulation nous guettait ! Le génocide ! Bien sûr, tout citoyen étant aussi un justiciable, chacun était à ce titre, en principe, raccourcissable. Mais dans la réalité, un simple quart d’heure de circulation routière faisait bien plus de victimes que la guillotine en sept ans.
En France, on vit exactement de la même façon avant et après l’abolition de la peine de mort, je l’affirme ! L’abolition n’a même rien changé pour les assassins eux-mêmes, puisqu’un des arguments abolitionnistes avançait que la peine capitale n’était pas dissuasive. C’est bien ce que je dis : tout le monde s’en foutait. CQFD.
Si l’on veut citer des mesures qui changent la façon de vivre des gens au-delà du symbole, on peut évoquer le droit de vote, celui de divorcer, l’accès à la contraception, l’avortement, les mesures sur le crédit, les réformes scolaires. Un Président qui permet l’indépendance de l’Algérie, par exemple, ou qui décide de la fin de la conscription, ou qui fout des radars routiers jusque dans les chiottes change bien plus radicalement la vie des citoyens que celui qui abroge une loi exceptionnelle par nature, et presque jamais appliquée. Par ailleurs, on rougit d’avoir à le rappeler, les évolutions de la science, puis de la technique, changent bien plus radicalement la vie des gens qu’un Président de la République, fût-il grantomdegoche, fût-il élevé au rang de héros par une foule en liesse un soir de mai, prise d’un délire qui fera sourire de pitié ses enfants à naître. La perceuse-visseuse sans fil, ça oui, j’en témoigne devant l’Histoire, ça a changé ma vie !

Parlant bilan, on pourrait aussi rappeler que c’est sous le même Mitterrand qu’on commença à parler des « nouveaux pauvres », toujours aussi pauvres trente ans après, d’ailleurs, mais moins nouveaux. On pourrait rappeler qu’il a été un parfait continuateur de Giscard sur bien des points, par exemple en contribuant à faire entrer la France dans l’européisme le plus libéral, abandonnant une grande part de la souveraineté nationale pour le plus grand profit des citoyens, comme chacun peut le constater aujourd’hui. On pourrait rappeler qu’il a ouvert un boulevard médiatique à la publicité partout où c’était possible, qu’il a filé une chaine de télévision française à Silvio Berlusconi et fait passer son ministre Bernard Tapie pour un modèle. Mais ce serait déplacé en ces temps de fièvre commémorative.



Que Mitterrand ait donc tenu à abolir la peine de mort ne peut pas compter pour une grande part dans le bilan de son action, sauf sur le point des symboles. Mais c’est pourtant de ça que se nourrissent aujourd’hui les souvenirs de la période, et l’essentiel de la fierté de notre impayable gauche moderne.