31 décembre 2010

Gaston et les euros millions

Je ne maitrise pas le plus-que-parfait, mais je m'a suis lancé quand même.
Gaston avait été ce qu’on appelle sans tact un nouveau riche. Un ancien pauvre nouveau riche même, si la précision vous botte.
Ça avait commencé il y avait tout juste un an. Sa mère lui avait acheté un euro million pour Noël, normalement le cadeau de chiotte assuré qui, au mieux, ferait de vous l’heureux bénéficiaire d’un pactole de dix euros. Voyez le genre ? Comment une mère avait-elle pu offrir une telle gnognotte à un fiston ? Lui, le fruit de ses ovaires d’avec un compagnon franchement d’infortune, le daron, ce soldat-déserteur inconnu qui avait fini par reposer en toute impunité sous l’Arc de la débâcle.
Il avait dû mimer le faciès de miraculé à sa mère, une satisfaction d’illuminé, qu’on se serait cru à Lourdes, comme beaucoup de gens obligés de surjouer un bonheur postiche, en somme. Puis la soirée avait continué avec son frère rigolard, aussi moche que lui. Leur mère ne les avait pas loupés les deux et vu sa trombine à elle, et paraitrait que le père refoulait les regards, ce qu’elle devait engendrer ne pouvait être que d’une logique mathématique implacable, l’équation parfaite. Racine carrée de laideron ajoutée à disgracieux puissance dix, égale engeance de cochons. Les chats n’avaient pas fait des chiens comme on l’avait dit.
Le résultat de l’euro millions avait eu lieu le soir même, avant le réveillon. Il avait regardé sur internet le lendemain, sans trop d’espoirs. Il n’en avait pas cru ses orbites. Il avait eu tous les numéros. Hallucinant. Lui qui aimait peu l’argent, le voilà le récipiendaire de trente-cinq millions de petites douceurs en monnaie européenne. Pourtant, il avait voté contre en 2005.
Trente-cinq millions d’euros pour vous chambouler la vie. ça l'avait tellement mis dans le cosmos qu’il fut incapable de convertir en nouveau franc. Il avait failli appeler sa mère, mais avec sa grande bouche habituelle, même Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière auraient été au parfum. Il n’avait pas envie de se faire braquer par d’innombrables Moustapha en bas de chez lui. Ça devait rester secret et une fois sécurisé dans un quartier d’apeurés fortunés, là, il n’aurait plus qu’à prévenir les rapaces.
Il avait eu rendez-vous avec la Française des jeux, qui lui avait proposé un choix d’institutions bancaires, partenaires de la société. Il leur avait dit « Où sont les juifs ? ». On lui avait répondu que Lazard Frères Gestion SAS en était gorgé. Alors, il leur avait demandé un rendez-vous avec eux pour deux raisons. La première était qu’avec les juifs son argent travaillerait au mieux de sa forme, et que rien que pour ça les nazis avaient été des salopards. La deuxième était qu’au cas où une grave crise économique aurait l’intention de percer son coffre, les banques juives seraient les dernières à être dilapidées. Savaient y faire, les habiles, c’était leur truc. Et si c’était antisémite de dire ça, alors les banques juives étaient les premières à être antisémites.
Il leur avait foutu deux cent millions de francs dans la tronche pour qu’il sue à douze pour cent à l’année, soit six pour cent net de rapine étatique, soit environ cent cinquante mille euros par mois, soit un million de francs jusqu’à ce que la mort vienne solder le compte. De plus un des charmants Lazard lui avait ouvert un compte courant avec les vingt-neuf millions cinq cent quatre-vingt-quatre mille neuf cent cinquante francs en surplus. C’est tout.
Gaston avait déjà un peu cogité sur le sujet, utilitairement et moralement. Pour lui avant, l’argent c’était mal, maintenant, bizarrement, c’était pas si mal. Il avait enfin compris pourquoi y avait tant d’intéressés sur le créneau. Il allait pouvoir dormir dans du satin, s’envoyer autre chose que des miss boudin, manger le caviar à la soupière, fumer du Cubain en compagnie des Saoudiens de Marbella, faire le kéké sur les pistes de Gstaad, se faire refaire la frimousse selon les canons d’Hollywood, être faussement admiré et s’offrir le luxe d’être véritablement détesté, mais encore envié, se comporter en seigneur moderne et être une valeur au dessus des autres. Sacré bon programme ! Vive l’euro !
Le soir, alors qu’il n’était pas au courant, la Française des jouasses lui avait offert une nuit au Ritz, paraissait que c’était habituel, histoire de s’y faire tout de suite aux douceurs. Arrivé sur place, il n’avait jamais autant vu de personnes être fières d'elles-mêmes et autant de larbins se frotter à ses pattes en ronronnant. Il avait aimé ça aussitôt. Il avait eu l’impression d’être Louis XIV en bonne et due forme.
Il avait demandé une pute au comptoir. On lui avait répondu que ce n’était pas le genre de la maison, mais une heure après avoir investi sa suite, un groom lui avait discrètement présenté un catalogue de ce genre de service. Il en avait pris deux des services, une blonde et une rousse. De plus, le garçon d’étage lui avait proposé un apéritif nasal. Pourquoi pas ? Il lui avait dit que c’était de la pure, alors qu’il fallait y aller mollo la première fois.
Les professionnelles étaient enfin arrivées et avaient pris les choses en mains. Elles avaient été rassasiées d’apéritifs, ce qui les avait rendues ensauvagées. Les réjouissances s’étaient avérées à la hauteur de ses espérances. Gaston avait été éclaté jusqu’à l’os. Pour finir en beauté, il s'était envoyé un autre apéritif colombien. Cependant, il avait pris à la légère les recommandations du fournisseur. Que de mal lui en avait pactisé au Gaston ! Il s’était écroulé après quelques spasmes devant les insatiables coquines qui avaient déguerpis avec le reste de la poudre. La police en avait conclu à un décès par overdose après fatigue physiologique. L’institution hôtelière en avait été mal à l’aise, ainsi que la Française des jeux. Une publicité ravageuse à taire d’office.
Une inspectrice s’était présentée à la mère de Gaston. Celle-ci s’était esclaffée en apprenant que son Gaston était décédé des suites d’une overdose de cocaïne, après avoir virevolté avec deux putes de luxe dans une suite du Ritz. Elle en avait conclu que la police devait être bien surmenée pour lui annoncer de pareilles sotties. C’était quand elle avait dû identifier le corps au motel des macchabées qu’elle avait dû rendre son incrédulité à l’horrible vérité. Son Gaston était mort après avoir gagné aux euros millions. Elle s’en était voulu. Une orange à Noël, comme au bon vieux temps, lui aurait gardé son Gaston. Après l’héritage, elle avait tout donné au téléthon. Avec eux au moins, elle était certaine que cet argent maudit n’allait servir à s’envoyer des apéritifs nasaux et des putes dans un hôtel de luxe.


FIN

10 commentaires:

  1. Quelle gourde cette mère. Tout ce qu'elle a fait, c'est permettre à l'AFM d'agrandir encore son parc immobilier. Salope.

    Très bon sinon, ça fait toujours plaisir de se fendre un peu la poire en ces temps de gerbe télévisuelle où on ne fait que vous parler de votre choix de foie gras ou encore de la manière d'agrémenter votre bûche.

    Milles excuses, faut que je retourne aux chiottes, je viens d'entrapercevoir une émission culinaire, et j'ai les huitres de ce midi qui me font de l'alpinisme dans l'oesophage .

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  2. Un beau conte de Noël

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  3. Association Française contre les Myopathies

    Association Française du marketing

    Association française de mécanique

    on s'y perd !

    PS : Ils ont un parc de logement social ?

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  4. Sympa mais y a de très gros problèmes d'écriture (grammaire, conjugaison, syntaxe, usage).
    Désolé de jouer au connard inspecteur des travaux finis.
    Ah ouais pis bonne année mon cul sur la commode.
    Moi le jour où je gagne 35 millions d'heuros je m'achète une Amsterdam Maximator en 50cl ; ça fait trop longtemps que j'en ai envie.

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  5. "Les professionnels", Gaston est pd...Bon sinon pas mal...J'avais entendu le même genre d'histoire avec un connard qui s'était acheté une Ferrari et s'était tué au bout de deux jours. Ce qui confirme ce que je savais déjà depuis long...si l'argent était fait pour les pauvres cela se saurait...et puis ils ne seraient plus pauvres les pauvres, et on aurait du mal à les exploiter...

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  6. à la réflexion ce conte me plaît beaucoup. J'étais pas loin de partager l'opinion de "jamais content". Mais ce serait passer à côté du truc. L'histoire est un peu convenue, certes. En fait, c'est même la parabole ripolinée du riche qui fait un bonne récolte et se réjouit de ce qu'il est désormais à l'abri du besoin. Mais il meurt le soir même.
    Depuis, on [autant la peau de chagrin que les contes de la crypte] s'était borné à rajouter un seul élément: le lien de causalité entre la fortune subite et la mort du nouvel enrichi.
    Mais la mire s'est déplacée de la mort du fiston et du flot d'insultes descriptif des classes popu (à la portée du premier beigbeder venu, il suffit pour ça de tremper sa plume dans le gras de son autosatisfaction) vers la réaction de la mère.
    Au début, je la sentais bien comme une sorte de thénardier abrutie de misère. Le persistance d'instinct maternel est effectivement tragique. Et si le but de cette nouvelle était de l'illustrer, elle y est arrivée totalement.

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  7. Pourquoi que "jamais content", qui a pourtant l'air très content, il serait pas content rien qu'une fois ? Pourquoi y en a toujours un pour nous sortir sa science sur les "classes popu (à la portée du premier beigbeder venu) " ? Pourquoi qu'on peut jamais profiter peinard du moment sans être emmerdé avec des conneries ?

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  8. Texte retravaillé et fautes corrigées.

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  9. Ton Gaston, il est d'origine espinguouine ? http://news.fr.msn.com/m6-actualite/insolite/article.aspx?cp-documentid=155739964

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