12 septembre 2008

La "civilisation" en marche

Marrant d'exhumer de vieux manuels marketoche des années 90...

Voyons voir:

Alain Ollivier, Renaud de Maricourt, Pratique du marketing en Afrique, collection Universités francophones UREF, édition EDICEF/AUPELF, 1990, Paris.

Ils décrivent la place capitale du marketing au sein de nos pays à idéologie libérale, ou le marketing est devenu un des moteur principal de l’activité économique.
...Et le principal outil doctrinal de formation des petits soldats du libéralisme.
Les grouillots du système ne lisent pas Adam Smith, mais des manuels de marketing.

Bref, nos compères embrayent sur le rôle civilisateur du marketing en Afrique:

(...) le marketing joue un rôle moteur dans le développement en stimulant les besoins des consommateurs, ou en les orientant vers des besoins nouveaux plus performants, plus attrayants ou plus variés. Pour satisfaire ces besoins accrus, ils doivent accroître leurs ressources en travaillant plus et en améliorant leur productivité ; ainsi sont-ils incités à secouer leur paralysante apathie, car ils reprennent l’espoir d’améliorer leur condition.
Ibid., p.33


Haaa, que de magie et de bienfaits!
Le bonheur de se crever la paillasse pour avoir le dernier zizigougou à la mode de chez nous...


La joie se répand peu à peu sur le monde...
Sentez-vous la frustration intense de milliards d'individus?
Frustration laborieusement obtenue grâce aux techniques des marketeux qui n'ont qu'une obsession: nous faire honte.

Retournons en Afrique:
Le népotisme, l’absence de sens éthique et la corruption généralisée sont, on l’a souvent remarqué, une des caractéristique les plus constantes et une des plaies des pays africains et s’expliquent par la dureté de la lutte pour la survie. Le marketing est fondé sur le respect des consommateurs ; celui-ci passe par l’élimination des produits frelatés ou de qualité douteuse, par la recherche constante de l’amélioration des produits, du service et du rapport qualité / prix, et par la prise en compte de la nécessité à long terme d’une bonne image fondée sur la confiance. L’honnêteté commerciale et la rigueur, à partir du moment où l’on constate qu’elles sont payantes en terme d’image et de fidélité dans le relations d’affaires, font peu à peu tache d’huile dans d’autres domaines, et contribuent notablement à l’instauration d’un environnement propice au développement.
Ibid., p.33


C'est-y pas un beau laïus idéologique ça? Les lendemains qui chantent, la pureté des sentiments, la tornade blanche! On se croirait dans un opéra de la présidente Mao.

Ils détaillent finalement ce qui dans la " nature " des noirs les rend peu aptes à se soumettre au marketing (ces sauvages!) :
L’importance du contact humain, de la relation personnelle, de l’affectivité [qui] l’emporte sur la rationalité : les salutations sans fin, la palabre, le marchandage, le goût des cadeaux, le sens de l’hospitalité [...]
Ibid., p.35

Un humour qui exprime une réaction narquoise à la vie : auto-dérision, sublimation ludique réponse par le rire aux souffrance et difficultés d’une vie qui ne vaut rien
Ibid., p.35

Une relation au travail différente : " le travail du blanc n’en finit jamais comme Bourgoin le note malicieusement (...)
Ibid., p.35


Que de défauts, que de défauts...
Cible marketing en vue: identité à détruire, feu!

7 commentaires:

  1. Je me tue à expliquer à mes contemporains que l' ennemie n'est pas le libéralisme, mais le marketing. Deux notions à ne pas confondre, le marketing étant un élément commun aux idéologies collectivistes et libérales (propagande, management scientifique, modification de l'individu pour coller à la structure, etc.), je dirais même que le marketing est plus proche des idéologies de gauche, les DRH, les RP, les pubblicitaires, etc, étant plus issus de la fac de Nanterre que de Harvard. Bref, on peut être libéral tout en conchiant le management et la communication moderne, et on peut être de gauche tout en adulant cela et être pleinement impliqué

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  2. Certes, le marketing est un outil, une teckné qui vise à accroitre un résultat.
    Il est utilisé par tout le monde.
    Il existe du marketing éthique, du marketing pour ONG, du marketing politique etc..

    Les intellos imaginent souvent à tort un marketing qui part du haut pour arriver en bas, c'est faux. Le marketing, largement diffusé et pratiqué par la masse, enseigné au plus bas niveau mais aussi inventé au plus bas niveau.
    Son efficacité c'est sa plasticité. On part toujours de la pratique pour arriver à systématiser une technique marketing.

    Là où l'on commence à diverger c'est que son enseignement est totalement imprégné d'une idéologie libérale très simpliste et brutale, épurée... Ce n'est pas les citations que j'ai donné qui me contrediront.
    C'est l'idéologie du chiffre. Les RH,le management, la com, la pub, les RP etc.. etc.. tout ce dont tu parles ne sont que des outils parmi d'autres.

    Une campagne marketing est affaire de chiffres. Et c'est cette obsession du chiffre qui se marie parfaitement avec le libéralisme.

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  3. Comme quoi il est parfaitement possible de faire un très bon article sur un gros paquet de merde... (mais j'le savais)

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  4. "Des besoins nouveaux plus performants, plus attrayants."

    Dans quelle langue est écrite cette phrase? Un besoin plus performant, un besoin plus attrayant, cela ne veut rien dire.

    Par ailleurs, je ne crois pas que le coeur du marketing soit le chiffre. Le coeur du marketing, c'est l'art de créer un désir sournois, violent et universel d'acheter, là où il n'y avait rien auparavant. C'est une opération de manipulation mentale.

    Sa recette, c'est le couple télévision + publicité, qui est une arme de destruction civilisationnelle massive.

    Et, en effet, cela n'a rien à voir avec le libéralisme, inventé et théorisé à une époque où il n'y avait ni télévision ni publicité.

    Les historiens des siècles à venir écriront des tonnes de livres sur ces deux inventions, aussi importantes (mais plus funestes) que l'électricité, la roue ou l'imprimerie.

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  5. "Par ailleurs, je ne crois pas que le coeur du marketing soit le chiffre. Le coeur du marketing, c'est l'art de créer un désir sournois, violent et universel d'acheter, là où il n'y avait rien auparavant. C'est une opération de manipulation mentale."

    Oui, mais qu'est-ce qui valide in fine la réussite de l'opération? La frustration; l'invention d'un désir qui n'existait pas, n'est qu'un outil parmi d'autre pour améliorer le chiffre.

    (J'ai pas mal "réfléchi" à la question...)

    D'autre part, tu oublies tout un pan du marketing, celui qui concerne l'adhésion, le vote etc..

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  6. K: oui, mais qu'est-ce que le chiffre? Réponse de la part de quelqu'un qui a, lui aussi, pas mal réfléchi à la question:

    "Dieu travaille ! C’est ainsi que le travail des hommes devait apparaître comme une expression particulière de leur ressemblance avec Dieu qui rend l’homme participant à l’œuvre créatrice de Dieu dans le monde. Sans cette culture du travail qui, avec la culture de la parole, constitue le monachisme, le développement de l’Europe, son ethos et sa conception du monde sont impensables."

    "L’originalité de cet ethos devrait cependant faire comprendre que le travail et la détermination de l’histoire par l’homme sont une collaboration avec le Créateur, qui ont en Lui leur mesure. Là où cette mesure vient à manquer et là où l’homme s’élève lui-même au rang de créateur déiforme, la transformation du monde peut facilement aboutir à sa destruction."

    (Benoît XVI, hier, collège des Bernardins)

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  7. Une progression quelconque... C'est la seule définition satisfaisante, les tentatives de définition se contredisent (je pourrais copier/coller une liste, mais ça deviendrait fastidieux).

    Progression des ventes, du tx de satisfaction, de votes, d'adhésion à une idée, du nbr de fidèles (oh!) etc..

    Quand tu te lances dans une campagne marketing, à la fin tu prévois toujours de vérifier le tx de progression pour savoir si tu as réussi ou pas... le chiffre comme juge de paix.

    La technique marketing a tout infiltré, comme dirait l'autre c'est une méta-tekné. Et elle ne sert plus aux seuls libéraux, même si c'est eux qui ont d'abord compris son importance.
    Comme ça semble intéresser, je ferai d'autres bafouille à ce sujet.

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