3 juin 2008

Histoire de la banque de France au XX° siècle

L'histoire de la banque de la France au XX° siècle par l'excellent site http://www.fauxmonnayeurs.org/index.php?lng=fr



La Banque de France



« La Banque de France était à l’origine une banque privée, dotée d’une assemblée ou d’un conseil de deux cents gros actionnaires. Ces deux cents actionnaires les plus puissants de la place de Paris ont donné naissance au mythe des « deux cents familles », les deux cents familles bourgeoises contrôlant l’argent en France et cimentant le « mur de l’argent », ce mûr contre lequel se heurtaient les gouvernements progressistes. Les régents de la Banque de France étaient recrutés dans les deux cents familles, les Mallet, Vernes, Rothschild, Hottinger, Wendel. La loi de Germinal an XI définissait la parité du franc par rapport à deux métaux, l’or et l’argent, la Banque de France devant, statutairement, garantir la solidité du franc, en contrôlant le volume de la création monétaire. En gros, la Banque suivait le principe du « tiers » : le crédit consenti à l’économie était égal à trois fois les réserves d’or et d’argent contenues dans les caisses. C’était une gestion prudente, et le franc germinal se révéla le plus solide de toutes les monnaies, résistant le dernier à la crise de 1929 et restant convertible en or jusqu’en 1926, alors que la livre, le dollar, le mark étaient depuis longtemps inconvertibles. (Déjà politique du franc ultra fort, déflationniste, qui fit dire à Keynes que « les français étaient des paysans assis sur leur tas d’or ».)


Mais les banquiers et les industriels du conseil de la Banque de France, contrôlant le crédit, contrôlaient d’une certaine manière la politique de la France. Ainsi, l’État s’était ruiné après la guerre de 14. Les dépenses de reconstruction étaient importantes. Le chômage menaçait. La politique coloniale était coûteuse. Les dépenses à caractère social pointaient leur nez, l’éducation coûtait cher. En 1924, arrive au pouvoir le Cartel des gauches, qui demande des avances à la Banque de France pour boucler son budget. Une avance de la Banque de France à l’État, autrement dit au Trésor, se traduit dans le langage populaire par : « faire marcher la planche à billets ». Moreau, le régent de la Banque de France refuse. Herriot le radical, Président du Conseil, démissionne ! La Banque de France a fait chuter le gouvernement ! La gauche s’est fracassée sur le mur de l’argent !


En 1934, Pierre Laval, chef du gouvernement, et surtout Léon Blum, Président du conseil, en 1936, du gouvernement du Front Populaire, soumettent la Banque de France à la tutelle publique. Vincent Auriol, ministre des Finances du Front déclare : « Les banques je les ferme, les banquiers je les enferme ! » Il décrète le franc inconvertible. Les régents de la Banque de France, transformés en gouverneurs, et des sous-gouverneurs sont nommés par l’État. En 1945, le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire, nationalise la Banque de France : c’est fini. En même temps, les trois grandes banques de dépôt, le Crédit Lyonnais, le Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) et la Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI) sont nationalisées. Le crédit est sous tutelle publique. L’État a recouvré son autorité sur la monnaie, ce qui ne durera pas.



Retour de la création monétaire au privé
1945-1993 : presque un demi-siècle de tutelle publique. En fait, l’État cesse de contrôler le crédit en 1983, lorsque le gouvernement socialiste décide d’arrimer le franc au mark, monnaie forte, de stabiliser la France dans l’Europe, et de laisser le contrôle du crédit et de l’émission monétaire (à nouveau !) à la Banque de France. L’État a donc contrôlé le crédit de 1934 à 1983, pendant cinquante ans.
En 1993, l’État prend acte de l’indépendance de la Banque de France par la loi de décembre. Désormais, le gouverneur est nommé, mais ne peut plus être « démissionné » par l’État. Il est interdit à la Banque de France de financer le déficit du budget de l’État, autrement dit de faire marcher « la planche à billets ». Si l’État a besoin de sous, qu’il les emprunte et qu’il les rembourse ! Les nouveaux statuts de la Banque interdisent aux membres de son conseil (art. 1) « de solliciter ou d’accepter d’instruction du gouvernement ou de toute personne ». Et voilà. Le pouvoir politique est soumis. La dictature des rentiers a triomphé. Les statuts de la Banque de France, calqués (et « aggravés » en quelque sorte) sur ceux de la Bundesbank, gardienne du temple de la monnaie forte, seront copiés par la Banque centrale européenne. L’ordre des créanciers règne en Europe.
Aux États-Unis, c’est l’inverse. La Banque fédérale de réserve est responsable devant le Congrès. La planche à billets fonctionne toujours. Le statut d’hyper puissance permet aux États-Unis d’accaparer, chaque année, les deux tiers de l’épargne nouvelle dans le monde, essentiellement en provenance de l’Europe et du Japon. Les États-Unis, souverains du monde, fonctionnent selon le principe régalien de la création monétaire.
Voilà une question essentielle d’économiste : qui fabrique l’argent qui nous fait vivre ? Au profit de qui ? Pour quelles activités ? De 1945 à 1976, l’État fabrique l’argent au profit de la reconstruction, puis de la croissance. Et puis, après cette très brève parenthèse du capitalisme, le privé reprend ses droits. »


Source : Bernard Maris, « Anti-manuel d’économie », éd. Bréal, oct. 2003, p. 221 s.

3 commentaires:

  1. Méfiance, Bernard Maris occupe le créneau du keynésien de service, il est bien plus libéral qu'on ne le croit...

    Sur l'indépendance de la BCE par exemple, on paye encore notre vote oui à Maastricht.

    Putain de merde, un nouveau Bretton-Woods vite!

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  2. la banque fédérale responsable devant le congres mais d'ou sort-il ca l'économiste de charlie-hebdo?

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  3. ..embauché sur i>télé à la suite de son maitre.

    Val: "Marris serrez ma haire avec ma discipline et priez pour que Spinoza vous illumine"

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